| ×Avertissement Le Trésor de la langue française a été préparé à partir de 1960, et rédigé des années soixante jusqu’au début des années quatre-vingt-dix. Il s’agit d’une œuvre close, que nous ne soumettons plus à aucune révision ; la tâche du laboratoire ATILF est limitée à la mise à disposition du public, dans les meilleures conditions possibles, d’un texte qui ne sera plus modifié. Le Trésor, comme son sous-titre (Dictionnaire de la langue du 19e et du 20e siècle (1789-1960)) l’indique, ne décrit pas la langue d’aujourd’hui. Par ailleurs, un dictionnaire qui serait rédigé aujourd’hui et voudrait décrire la langue des 19e et 20e siècles ne le ferait sans doute pas non plus de la même façon ; mais nous n’avons pas la tâche, ni l’intention, de corriger une œuvre déjà datée, pas plus que celle de corriger le dictionnaire de Littré ou les premières éditions de celui de l’Académie. On ne peut s’attendre à ce que les articles du Trésor répondent dans chaque cas à nos besoins actuels. INCESTE, subst. A. − Subst. masc. 1. Relations sexuelles prohibées entre parents très proches de sexe différent. Commettre un inceste. Le parjure, le meurtre et l'inceste étaient la vie commune. En Égypte, les rois, à l'exemple des dieux du pays, épousaient leurs sœurs, régnaient avec elles (Michelet, Hist. romaine, t. 2, 1831, p. 51).La prohibition de l'inceste − règle universelle élaborée par l'humanité et transmise d'âge en âge − est une démarche acquise et non pas innée, qui, selon Lévi-Strauss, est « fondamentale, grâce à laquelle, par laquelle, mais surtout en laquelle s'accomplit le passage de la nature à la culture » (Le Monde dimanche,20 sept. 1981, p. 5, col. 3): 1. La Bible nous en indique un exemple très inquiétant pour la Foi. « Loth, fuyant Sodome, fut séduit, vous ne l'ignorez pas, par ses deux filles, et, étant privé de sa femme changée en statue de sel, il succomba. De ce double et horrible inceste naquirent Ammon et Moab... »
Maupass., Contes et nouv., t. 2, Nos Angl., 1885, p. 55. − DR. ,,Commerce charnel entre un homme et une femme parents ou alliés à un degré qui entraîne une prohibition au mariage`` (Cap. 1936). Nicolas III décapita sa femme Parisina pour inceste avec son propre bâtard Hugues (Péladan, Vice supr.,1884, p. 17): 2. ... car en dépit de la fable, rien de moins criminel que le trouble de Phèdre : rien de réel n'y répond à ce mot affreux d'inceste, puisque le sang de Phèdre ne coule pas dans les veines d'Hippolyte.
Mauriac, Vie Racine,1928, p. 132. 2. P. ext., DR. CANON. Relations sexuelles entre personnes considérées comme unies par un lien spirituel, entre un parrain et sa filleule, entre un confesseur et sa pénitente. Inceste spirituel (Ac.1798-1935).Et quel attrait d'inceste spirituel, de la femme laie avec un clerc! (Péladan, Vice supr.,1884p. 282): 3. Il est vrai que l'on risque alors de s'amouracher d'un confesseur qui est peut-être, lui-même, sans défense, et... − Et c'est l'inceste, car le prêtre est un père spirituel, et c'est aussi le sacrilège, car le prêtre est consacré.
Huysmans, Là-bas, t. 2, 1891, p. 88. B. − Subst., vieilli. Personne qui a commis un inceste. Synon. incestueux.Fils de l'inceste. Le fils, sans le connaître, tuerait son père et épouserait sa mère... Cela découvert, il dirait à ses enfants avant de se tuer... : « Venez, fils de l'inceste... Imprimez-vous bien mon visage... » (Chénier, Poèmes, Amérique, 1794, p. 117): 4. don apostolo : Gennaro, cette femme à qui tu parlais d'amour est empoisonneuse et adultère. jeppo : Inceste à tous les degrés. Inceste avec ses deux frères, qui se sont entretués pour l'amour d'elle! dona lucrezia : Grâce! ascanio : Inceste avec son père, qui est pape!
Hugo, L. Borgia,1833, I, part. 1, 5, p. 46. Rem. ,,Dans ce sens, on l'a quelquefois employé comme adjectif, surtout en poésie`` (Ac. 1835-1935). Prononc. et Orth. : [ε
̃sεst]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Fin du xiiies. « relations sexuelles entre proches parents » (Hystore Job, éd. J. Gildea, 871). B. 1. a) Fin du xives. adj. « qui a commis un inceste » (E. Deschamps,
Œuvres, VI, 146, 12 ds T.-L.); b) 1524 emploi subst. « personne qui a commis un inceste » (P. Gringore, Le Blason des hérétiques ds
Œuvres complètes, éd. Ch. d'Héricault et A. de Montaiglon, t. 1, p. 332); 2. ca 1480 « qui constitue un inceste » (Myst. du V. Testament, éd. J. de Rothschild, 5407). A empr. au lat. class. incestum « sacrilège; inceste ». B empr. au lat. incestus adj. « sacrilège; incestueux ». Fréq. abs. littér. : 185. Bbg. Hesse-Fink (E.). Ét. sur le thème de l'inceste dans la litt. fr. Bern, 1971, passim. (Thèse. Zurich. 1967). |