| IMPORTUN, -UNE, adj. et subst. masc. A. − [En parlant d'une pers.] 1. Adj. Qui ennuie ou fatigue par une présence intempestive ou un comportement hors de propos; p. ext. indésirable. Synon. embêtant (fam.), encombrant, envahissant, fâcheux, indiscret, insupportable.Hôte, solliciteur, visiteur importun; se rendre, se sentir importun; craindre d'être importun. À la fin, comprenant l'inutilité de son zèle et craignant de devenir importun, il cessa d'être quotidien (Bloy, Femme pauvre,1897, p. 259).Le tiers importun qui est avec deux fiancés et doit s'en aller afin qu'ils soient vraiment ensemble (S. Weil, Pesanteur,1943, p. 49) : 1. ... elle accueillait parfois les deux visiteuses sans aménité, comme des étrangères importunes dont les intentions étaient suspectes; et (...) elle les congédiait généralement bien avant l'heure de la clôture du parloir, pour ne pas manquer sa partie de bésigue.
Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 640. − [En fonction d'attribut] Il s'enfuyait, craignant de venir trop tard ou de paraître importun à Ève qui sans doute était couchée (Balzac, Illus. perdues,1837, p. 73).Dans l'entourage de Gilberte on avait l'impression que je lui étais importun (Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 588). 2. Subst. masc. Personne qui est mal venue, qui intervient hors de propos et qui gêne ou fait perdre du temps. Synon. gêneur, raseur (fam.), casse-pieds (pop.).Éviter un importun, se débarrasser d'un importun, chasser les importuns; loin des importuns; être sans cesse dérangé par des importuns. Vous devez bien en vouloir à l'importun qui a dérangé vos projets et retardé votre départ (Benoit, Atlant.,1919, p. 55).Je ne retourne jamais dans les maisons dont on m'a, même une seconde, refusé la porte. Je ne peux souffrir d'avoir l'air d'un importun (Duhamel, Désert Bièvres,1937, p. 228) : 2. Brusquement, l'idée lui vint qu'il s'était conduit en importun. On lui signifiait que l'on ne tenait pas à le voir. En eût-il pu douter : il n'aurait eu qu'à se rappeler la manière dont Philippe l'avait quitté; il ne lui avait même pas dit, comme la première fois : « À l'un de ces jours. »
Arland, Ordre,1929, p. 118. B. − [En parlant d'un inanimé] 1. Qui survient mal à propos. Synon. agaçant, désagréable, gênant, inopportun; anton. agréable, discret, opportun.Attitude, circonstance, joie, manifestation, visite importune; détails, discours, propos, regards importuns. Triste réunion où la joie des enfants était devenue importune, tant mon aspect y jetait de morne désespoir (Soulié, Mém. diable, t. 1, 1837, p. 345).Et dans la crainte que sa présence ne fût importune, il s'éloigna sur la pointe de ses bottines (Aymé, Jument,1933, p. 142). 2. Qui incommode, qui cause du tracas par sa continuité, sa fréquence ou son excès. Babil, souci importun; plainte, pluie importune; chasser une idée, une pensée importune; toux importune. Les louanges, qui m'étaient importunes quand je les recevais, me devenaient agréables lorsqu'elles s'adressaient à Varius ou à Macer (A. France, Île ping.,1908, p. 164). Prononc. et Orth. : [ε
̃pɔ
ʀtε
̃] ou [-tœ
̃], adj. fém. [-tyn]. 12 témoins sur 17 ds Martinet-Walter 1973 : [-tε
̃]. Au masc. devant voyelle : un importun ami [-tε
̃nami], [-tœ
̃nami], voire [-tynami] (cf. Littré). Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist 1. a) 1327 « pressant (en parlant d'une requête, d'une supplication) » (Ordonnance no634 ds Isambert, Recueil gén. des anc. lois fr., Paris, Belin-Leprieur, t. 3, p. 323 : par faveurs et importunes instances et prieres); b) 1540 « qui poursuit, tracasse d'une manière répétée (en parlant d'une personne) » (Amadis, 295 ds IGLF : En bonne foy, cela vous monstre bien qu'une austresfois vous ne devez estre si importun, pour sçavoir l'affaire de nul oultre son gré); 1558 « id. (d'une chose) » l'importun souci (Du Bellay, Regrets, éd. J. Jolliffe, 24); 2. ca 1450 « dont la conduite n'est pas en accord avec le rang, la dignité » (Mist. Viel Testament, éd. J. de Rotschild, 44846); 1541 [éd.] « inopportun » argument ... importun et improprement appliqué à la matière présente (Calvin, Instit., XII, p. 631 ds Hug.). Empr. au lat. class.importunus « incommode, fâcheux, désagréable » mot à mot « qu'on ne peut aborder, impraticable », dér. de portus « port, asile, refuge », préf. négatif in-1*; le sens de « désagréable » s'est développé en français. Fréq. abs. littér. : 660. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 340, b) 904; xxes. : a) 897, b) 629. DÉR. Importunément, adv.,littér., peu usité. D'une manière importune, hors de propos ou agaçante par sa répétition. Anton. discrètement, opportunément.Arriver, intervenir, survenir importunément. Il revient importunément à la charge; presser importunément (Ac.). L'autre (...) n'imposait jamais sa compagnie importunément, sentant quand il était de trop (Richepin, Cadet,1890, p. 50).Notre sollicitude les irrite [ces jeunes gens], et le mieux est de ne pas trop la leur laisser voir. Je sais qu'elle s'exerce bien importunément et maladroitement quelquefois (Gide, Faux-monn.,1925, p. 1206).− [ε
̃pɔ
ʀtynemɑ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. − 1resattest. a) xiiies. [ms.] « de manière importune, à contretemps » (Bible, Maz. 35, fo40b : Ne paroles par la ou tu ne servies mie oys et ne voeilles mie estre eslevez importunement en ta sapience), b) 1400-50 « de façon pressante » (Arch. Nord, 10 H 326 fol. 12v ds IGLF : [Ils] luy coururent subs furieusement et importunement); de importun, suff. -ment2*. |