| IMPAIR, -AIRE, adj. et subst. I. − Adj. et subst. Anton. de pair. A. − MATH. Chiffre impair; polynôme impair; indice, degré impair; application, permutation, puissance impaire. ♦ Nombre impair. Nombre entier non multiple de deux, qui n'est pas divisible en deux entiers égaux. Tous les mois reçurent un nombre de jours impair : les Romains superstitieux de cette époque croyaient que le nombre impair portait bonheur (Chauve-Bertrand, Question calendrier,1920, p. 61).Les structures dualistes indonésiennes semblent coexister avec des structures formées d'un nombre impair d'éléments : 3 le plus souvent, mais aussi 5, 7 et 9 (Lévi-Strauss, Anthropol. struct.,1958, p. 155).Emploi subst. masc. sing. L'impair. Les nombres impairs. L'être (...) en qui sont fondus tous les contrastes et toutes les harmonies, la variété et l'unité, le pair et l'impair (Ch. Blanc, Gramm. arts dessin,1876, p. 25).Tel est incliné au pair, tel à l'impair, un autre aux nombres premiers, un autre aux divisibles (Arnoux, Chiffre,1926, p. 136). ♦ Fonction impaire. Fonction dont la valeur change de signe en même temps que la variable. La fonction est impaire quand on a : F(x) = -F(-x) = -F(2π-x) (Bouasse, Acoust. gén.,1926, p. 2). B. − P. ext. Qui est exprimé par un nombre impair; qui porte un numéro impair (dans une série, un nombre pair succédant à un nombre impair). Jours impairs (du mois); stationnement interdit jours impairs; années impaires; côté impair (= des numéros impairs, dans une rue). Les bateaux pour le Havre partent de Rouen dans le mois d'octobre tous les jours impairs, 1er, 3, 5, 7, etc., jusqu'au 15 (Flaub., Corresp.,1853, p. 314).Les principales divisions d'un ouvrage commencent toujours en belle page, c'est-à-dire en page impaire (E. Leclerc, Nouv. manuel typogr.,1932, p. 207). C. − Dont les éléments sont en nombre impair. 1. VERSIF. En nombre impair de syllabes. Vers, rythme, mètre impair. Les vers ne voulaient point être beaux. Ils étaient simples, toutefois impairs, pour la légèreté (A. France, Lys rouge,1894, p. 276). − Emploi subst. masc. sing., littér. : 1. De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l'Impair
Plus vague et plus soluble dans l'air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.
Verlaine,
Œuvres compl., t. 1, Jadis, 1884, p. 206. 2. MUS. En nombre impair de temps. À trois, ils exécutent de véritables morceaux; rythme impair, bizarrement haché de syncopes, qui affole et provoque tous les bondissements de la chair (Gide, Feuilles de route,1896, p. 83).Chopin est le magicien du rythme impair (Levinson, Danse,1924, p. 119). 3. ANAT. Qui n'a pas son double symétrique. Nerf impair. On compte, dans l'homme, dix muscles différens, dont neuf pairs et un impair, par conséquent en tout dix neuf (Cuvier, Anat. comp., t. 4, 1805, p. 523).− L'épiphyse, petit organe impair situé dans le plan de symétrie, en avant des tubercules quadrijumeaux (Camefort, Gama, Sc. nat.,1960, p. 205). 4. BOT. Foliole impaire ou p. ell. impaire, subst. fém. Foliole terminale unique de certaines fleurs pennées. Feuille ailée avec impaire, feuille ailée sans impaire (Ac.). Les feuilles de la clématite droite (...) sont pennées, terminées par une impaire (Kapeler, Caventou, Manuel pharm. et drog., t. 1, 1821, p. 205). 5. CH. DE FER. Voie impaire. Sur une ligne à deux voies, voie suivie par les trains qui s'éloignent du point d'origine, appelés « trains impairs », qui portent un numéro impair. Synon. voie montante; anton. voie paire, voie descendante.Selon sa position par rapport à la gare initiale, on a la voie paire ou impaire, la voie montante ou la voie descendante (Albitreccia, Gds moyens transp.,1931, p. 45). II. − Subst. masc. A. − JEUX (de hasard). (L')impair, les impairs. L'ensemble des numéros impairs. Jouer les impairs. Ils (...) se retrouvèrent à deux mille francs, et les risquèrent sur pair, pour les doubler d'un seul coup; pair n'avait pas passé depuis cinq coups, ils y pontèrent la somme. Impair sortit encore (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 488) : 2. Mais on gagne presque toujours sur la dernière mise; et impair venait de sortir trois fois de suite. Depuis son arrivée, pourtant, impair sortait plus souvent que pair, puisqu'il perdait... Changer, jouer impair?
Malraux, Cond. hum.,1933, p. 358. ♦ Faire un double impair. Choisir l'impair deux fois de suite (à tort). (Dict. xixeet xxes., sauf Ac.). ♦ En partic. Pair-impair, pair et/ou impair. Jeu consistant à deviner si les objets (des billes notamment) cachés dans la main de son partenaire sont en nombre pair ou en nombre impair. Jeu de pair ou impair, jouer à pair ou impair. Je te joue Fanny à pair ou impair ou aux dés (Karr, Sous tilleuls,1832, p. 198).On peut aussi jouer aux épingles à la manière de pair et impair, c'est-à-dire que, l'un des joueurs ayant placé dans sa main deux épingles, son partenaire doit deviner si elles sont parallèles ou si elles sont croisées (D'Allemagne, Récr. et passe-temps,1904, p. 96).V. aussi bluff ex. 1. B. − Au fig., fam. Maladresse ou manque de tact pouvant entraîner de fâcheuses conséquences. Synon. fam. bêtise, bourde, gaffe.Un impair énorme, regrettable; faire, commettre, éviter un impair; commettre impair sur impair, accumuler les impairs. Effaré qu'il est à l'appréhension des impairs que la môme peut commettre et voulant être là pour y parer (Feydeau, Dame Maxim's,1914, II, 1, p. 30).Lui donner, puisqu'elle est si bavarde, les conseils qui éviteront, du moins aujourd'hui, tout impair (Giraudoux, Ondine,1939, II, 7, p. 109) : 3. ... un mouvement s'était produit parmi ces dames; toutes changèrent de place comme au jeu de la « mer agitée », de sorte qu'au moment de prendre congé je ne fus plus capable de les reconnaître et serrant ou baisant des mains au hasard, ou négligeant d'en serrer d'autres, sans doute fis-je nombre d'impairs.
Gide, Journal,1917, p. 624. REM. Impairement, adv.,rare. En nombre impair. Nombre impairement pair. ,,Nombre dont la moitié est un nombre impair`` (Lexis 1975). Prononc. et Orth. : [ε
̃pε:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1484 adj. nombre (...) impar (N. Chuquet, Triparty, 67); 1521 impair (Doc. cité par Baldinger ds Z. rom. Philol. t. 67, p. 27); b) 1765 subst. (Encyclop. t. 11, s.v. pair, p. 755a : [dans le jeu de pair ou non] soit en tas de 3 jettons [...] il y a deux impairs contre un pair, ou 2 contre 1 à parier pour l'impair); 2. 1858 subst. « maladresse, indélicatesse » (Augier, Jeunesse, III, p. 307). Empr. au lat.impar « inégal; dissemblable; qui n'est pas pair » adj. et subst. (ludere par impar « jouer à pair ou impair », attesté par Horace, v. TLL s.v., 518, 19); l'a. fr. avait traduit impar par non per (cf. (un jeu de dés) per ou nonper, xiiies., J. de Journi ds T.-L., s.v. nonper, jeu de per et de non per, xives., Oresme ds Gdf. Compl.). Selon Esn., le sens 2 s'expliquerait p. oppos. à pair « juste, franc, précis » que l'on peut tirer de la loc. parler pair « parler juste, sans équivoque, précisément » (1672, De Brieux, Origines de quelques coutumes anciennes et façons de parler triviales, Caen, p. 62; cf. Trév. 1704-52). Fréq. abs. littér. : 110. Bbg. Chautard (É.). La Vie étrange de l'arg. Paris, 1931, p. 479. |