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HABITUER, verbe trans.
A. − Habituer (qqn ou qqc.) à.Faire prendre (à quelqu'un ou à quelque chose) l'habitude (v. ce mot II) de. Synon. accoutumer.Glaucon, qui lui disait [à Platon] que l'astronomie habituait notre esprit à regarder en haut et le tournait vers le ciel (P. Leroux, Humanité, t. 2, 1840, p. 870).L'air est indispensable aux plantes; il est bon de les habituer progressivement à l'air et à la lumière (Gressent, Potager mod.,1863, p. 727).L'histoire de la littérature nous a habitués à des recherches de ce genre (Langlois, Seignobos, Introd. ét. hist.,1898, p. 235).Nous les habituons [les patients] à réfléchir sans préjugés aux faits sexuels comme à tous les autres faits (Freud, Introd. psychanal.,1959, p. 464) :
1. ... on a bien tort, dans certains milieux, de juger de haut les écrivains qui sont du monde. La fréquentation du monde habitue un monsieur célèbre à ne pas se faire précéder de son génie ainsi qu'une bannière. Mauriac, Journal 2,1937, p. 183.
[Sans compl. dir.] On me dira que les mathématiques rendent particulièrement appliqué; mais elles n'habituent pas à rassembler, apprécier, concentrer (Staël, Allemagne, t. 1, 1810, p. 254).
B. − Emploi pronom. S'habituer à
1. Prendre l'habitude (v. ce mot II) de. Il faut que nos amis s'habituent peu à peu à nous inviter comme un couple (Giraudoux, Simon,1926, p. 179) :
2. ... tout en riant, je sentais de grosses larmes couler sur mes joues. Je ne pouvais m'habituer à la voir irritée et malheureuse dans ces moments où j'allais lui porter tout mon cœur... Sand, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 412.
2. S'adapter par une pratique régulière, une expérience ou une présence fréquente à. S'habituer à tout Comment aimez-vous le Canada? − C'est un beau pays, neuf, vaste... Il y a bien des mouches en été et les hivers sont pénibles; mais je suppose que l'on s'y habitue à la longue (Hémon, M. Chapdelaine,1916, p. 164).J'appris que les sapins s'habituaient au soleil dans nos contrées (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 28).Nous luttons mal contre le bruit des grandes villes (...). Nous ne nous habituons pas non plus au manque de sommeil (Carrel, L'Homme,1935, p. 257) :
3. ... quand ensuite le feu se déclarait au milieu des gémissements et des pleurs, c'était un spectacle auquel je n'ai jamais pu m'habituer, quoiqu'on dise que l'habitude fait tout. Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 113.
Rem. La plupart des dict. gén., excepté Ac. 1835-1935, attestent comme vx un sens partic. de l'emploi pronom. « s'établir dans un lieu d'une manière durable ». Ceux qui allèrent s'habituer au Canada furent, en grande partie, des Normands (Littré).
Prononc. et Orth. : [abitpe], (il) habitue [abity]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1330 abituer « habiller » (H. Capet, 104 ds T.-L.); 2. 1370-72 part. passé adj. habitué « accoutumé » (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, livre III, chap. 20, note 5); 1549 (s')habituer (Est.); 1778 part. passé subst. « personne qui va habituellement dans un lieu » (Nouveau Spectateur, 1erjanv. − noXIX, p. 105 ds Proschwitz Beaumarchais); 3. 1475 (soy) habituer « s'établir » (Ordonnance de Louis XI, t. 18, p. 124 et 125); spéc. 1477 part. passé subst. « ecclésiastique attaché au service d'une paroisse sans y avoir charge ou dignité » (ibid. p. 287). Empr. au b. lat.habituari « avoir telle manière d'être; être pourvu », lat. médiév. habituare « accoutumer » (ca 1290 ds Latham), dér. de habitus, v. habitus. Fréq. abs. littér. : 902. Fréq. rel. littér. : xixe s. a) 931, b) 1 467; xxes. : a) 1 392, b)1 416.