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GARGARISER, verbe trans.
A. − Vx. Laver (la bouche, l'arrière-bouche, la gorge) avec un liquide médicamenteux. On fixe un morceau de chiffon au bout d'un bâtonnet; on le trempe dans la liqueur et l'on gargarise la bouche de la bête à cornes (Lar. 19e).
Au fig. Endormir, leurrer. Le fait est qu'on n'eût pas trouvé son pareil pour gargariser le personnel du miel calmant de discours aussi onctueux de bonne grâce que dépourvus de bonne foi (Courteline, Ronds-de-cuir,1893, I, 3etabl., p. 98).
B. − Emploi pronom.
1. Se laver l'arrière-bouche avec un liquide en le laissant pénétrer aussi loin que possible et en le repoussant à diverses reprises avant de le rejeter. Le médecin m'ordonne de me gargariser (Ac.1932).Le boxeur, pendant les repos, se gargarise avec l'eau qu'il a crachée (Montherl., Olymp.,1924, p. 263).
Pop. Boire, savourer (une boisson). Ils se gargarisaient lentement avec le cognac sucré qui formait un sirop jaunâtre au fond des tasses (Maupass., Contes et nouv., t. 1, En fam., 1881, p. 349).Tous, le nez tourné vers la poêle où se rissolaient les alouettes, flairaient la bonne odeur. Et ils burent gravement, se gargarisèrent (Zola, Terre,1887, p. 50).
2. Au fig., péj.
a) Se donner un grand plaisir, jouir sans réserve (de quelque chose). Il sera vain (...) d'accuser le mauvais goût du public qui se gargarise d'insanités (Artaud, Théâtre et double,1938, p. 91) :
1. ... beaucoup de personnes se demandent si véritablement les « savants » ne se gargarisent pas de leur propre progrès et ne perdent pas complètement de vue le but final de la science... Decaux, Mesure temps,1959, p. 54.
b) Montrer de la complaisance (pour ce dont on parle). Il pérore, l'imbécile!... Il se gargarise de lieux communs! (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 153).Le terme de justice se détachait parfois maintenant, ce terme dont la haine aime tant à se gargariser pour se masquer à elle-même et s'exorciser (Arnoux, Calendrier Fl.,1946, p. 28) :
2. Combien d'austères bourgeois, à cheval sur les principes devant leur femme et leurs enfants et se gargarisant, dans tous leurs discours, de la morale la plus sonore, vont chercher honteusement, loin du nid conjugal, de l'amour sans scandale et du plaisir sans peur. Coppée, Franc-parler II,1896, p. 248.
Prononc. et Orth. : [gaʀgaʀize], (il se) gargarise [gaʀgaʀi:z]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. xiiies. gargarissier « prendre (un liquide) en gargarisme » (Platearius, le Livre des simples médecines, éd. P. Dorveaux, 838); ca 1350 gargarisier (J. Pitart, ms. B.N. fr. 12 323, fo19 vo, d'apr. R. Arveiller ds R. Ling. rom. t. 37, p. 498). Empr. au lat.gargarizare (dep. Varron : -issare) « prendre en gargarisme; se gargariser », gr. γ α ρ γ α ρ ι ́ ζ ε ι ν « gargariser, gargouiller », forme à redoublement de la racine onomat. garg-, v. gargouille. Fréq. abs. littér. : 44.