| GALANTERIE, subst. fém. Qualité d'une personne ou d'une chose galante. A. − [Gén. sans réf. partic. à l'amour] 1. [À propos d'une pers.] a) Vieilli. Art de plaire en société, par une allure élégante, une politesse raffinée, des procédés obligeants, etc. Il y fut comblé de bons traitements, et ne tarit pas sur les efforts et la galanterie d'Alexandre pour se rendre agréable à son nouvel allié (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 799).Il m'a vendu des pommes et du foin avec beaucoup de galanterie, et je veux lui rendre sa politesse (Musset, Il faut qu'une porte,1845, p. 237) : 1. ... il portait un fusil moins par nécessité que par galanterie [it. ds le texte], par mode, de même qu'un dandy ne sort qu'avec une canne élégante. Bien qu'un fusil soit une arme moins noble et moins poétique qu'un stylet, miss Lydia trouvait que, pour un homme, cela était plus galant qu'une canne...
Mérimée, Colomba,1840, p. 25. − En partic. Disposition à se montrer courtois envers les femmes, à les traiter avec déférence, à les entourer d'hommages respectueux, d'aimables prévenances. Montrer de la galanterie. Mon oncle, (...) fidèle à un ancien usage de galanterie, prit la main de cette jeune dame, et, s'étant incliné, il la porta à ses lèvres (Toepffer, Nouv. genev.,1839, p. 214).Saurons-nous un jour si l'acte de faire asseoir les dames est une simple convention de la « galanterie », ou si réellement elles ne tiennent pas sur leurs jambes? (Montherl., Olymp.,1924, p. 312). ♦ Avoir la galanterie de + inf.Jacques en parlait [des femmes] légèrement, en homme qui ne les estimait guère, mais qui avait la galanterie de les traiter avec douceur et de ne point dire sur elles sa pensée toute crue (Zola, M. Férat,1868, p. 60). b) P. méton., gén. au plur. Procédé, présent, propos qui dénote une certaine élégance, obligeance, etc., et où se marque l'intention d'être agréable. Sa maison était un centre de délicatesse, de galanteries, d'élégance et de lettres (Lamart., Nouv. Confid.,1851, p. 76).Il aura dîné en ville où il aura dit des galanteries, conté des histoires, été le plus aimable de la compagnie (Flaub., Corresp.,1852, p. 385).Les branches [du sapin] étaient chargées de jouets, (...) de bijoux, et de toutes les galanteries que l'on donne, en cette occasion [de Noël] (Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 83). 2. Rare, vx. Ce qui se distingue par sa délicatesse, sa mignardise. Le cabinet [de Mlledes Touches] entièrement moderne oppose aux galanteries du siècle de Louis XV un charmant mobilier d'acajou (Balzac, Béatrix,1839-45, p. 87).La guitare est aujourd'hui vaincue par le piano, ainsi que la harpe; ce sont là des galanteries et des grâces d'un autre temps (Nerval, Bohême gal.,1853, p. 199). B. − [Avec une réf. explicite à l'amour] Emplois usuels 1. [Sans réf. spéc. aux relations charnelles; à propos d'un homme vis-à-vis d'une (des) femme(s)] a) En gén. Tendance à rechercher la compagnie des femmes et à leur plaire par un empressement flatteur, des amabilités piquantes. Galanterie française : 2. En montant sur le trône, à vingt-un ans, François Iers'occupa d'attirer le beau sexe à sa cour, et de l'y retenir par les charmes d'une galanterie chevaleresque, que la nation entière s'empressa d'imiter. Les intrigues amoureuses, les tournois, les carrousels marquèrent chaque jour d'un règne où brillèrent, au premier rang, les belles duchesses...
Jouy, Hermite, t. 3, 1813, p. 9. b) Disposition à courtiser une femme en vue de la conquérir, comportement traduisant une tendre inclination. Henriette devint rouge (...) la galanterie du vieillard, qui prenait une voix et des regards tendres, lui déplut (Duranty, Malh. H. Gérard,1860, p. 149).Que ce chaste amour presque farouche fût absolument sans galanterie, non. « Faire des compliments » à celle qu'on aime est la première façon de faire des caresses (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 218). − En partic., domaine de l'amour courtois ou précieux. Langage de la galanterie. L'époque des croisades ramène la galanterie aux formes héroïques et religieuses, en y joignant une teinte sentimentale qu'elle n'avait point encore connue. C'est dans la Palestine qu'un amant doit aller conquérir le cœur de sa dame (Jouy, Hermite, t. 3, 1813p. 4).V. aussi alambiqué ex. 1. c) P. méton., gén. au plur. Procédé, présent, propos très aimable, qui manifeste l'intention de plaire aux femmes ou de charmer, séduire une femme. Dire des galanteries. La jeune fille (...) écoute (...) les galanteries que lui chuchote à l'oreille le conseiller Silver Tongue (langue d'argent), un légiste galantin (Gautier, Guide Louvre,1872, p. 332).L'amour qu'il nous faut est fait de gâteries, de gentillesses, de galanteries. C'est la nourriture de notre cœur, ça. C'est indispensable à notre vie (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Joseph, 1885, p. 1008) : 3. Ne refusez pas ce que j'ai de meilleur, ma façon de faire la cour à une femme, de lui prodiguer les tendresses fugitives, les menus soins, les petits cadeaux, les galanteries, les bagatelles nécessaires, et de lui parler une langue inconnue d'elle.
Renard, Pain mén.,1899, p. 78. 2. [Avec des relations charnelles hors mariage; à propos d'un homme ou d'une femme] Goût, recherche des aventures amoureuses, des plaisirs physiques. Elle quitta son mari pour vivre avec le roi, et, sans quitter le roi, elle vivait avec d'autres. Aimable friponnerie, fine galanterie, coquetterie du beau monde! Il y a des gens, mes filles, qui appellent cela débauche (Courier, Pamphlets pol., Procès, 1821, p. 130).On le disait de plus trop porté sur la galanterie, au point (...) d'avoir séduit plusieurs femmes mariées (Grousset, Croisades,1939, p. 174) : 4. En France, on sait faire la fête. La fête française est élégante, spirituelle, lumineuse; (...) elle déguise l'obscénité en libertinage; elle pimente la galanterie d'épigrammes et de madrigaux. J'ai vu des nuits de Paris et de Nice où il se prodiguait plus de grâce et plus de verve, entre quatre viveurs et quatre courtisanes, que tout le reste de l'Europe n'en dépense dans une année.
Farrère, Homme qui assass.,1907, p. 223. − P. méton. ♦ Aventure amoureuse. Le duc d'Orléans, toujours indiscret dans ses galanteries, s'était vanté un jour à table d'avoir un cabinet orné du portrait de toutes les dames qui lui avaient accordé leurs faveurs (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 3, 1821-24, p. 5). ♦ Vx. Maladie vénérienne. Donner, attraper une galanterie (Ac. 1798-1835). La maladie de cette vieille reine (...) c'était une suite de galanteries si mal guéries qu'elle ne pouvait tomber sans se casser un os (Stendhal, Souv. égotisme,1832, p. 121).V. aussi abstenir ex. 9. − Au sing., péj. [À propos de femmes uniquement] Prostitution pratiquée dans des milieux généralement élégants; p. méton., monde des courtisanes et des prostituées. Les hideurs de ce combat du mâle et de la femelle, dans ce que la politesse désigne du nom élégant de galanterie, et qu'il appelle, lui, avec vérité, du nom cruel de prostitution (Bourget, Nouv. Essais psychol.,1885, p. 31).Il n'y a pas de galanterie à Naples (...). Sans les étrangers, les Napolitaines ignoreraient certainement que l'amour peut se porter au marché (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 206).Et où grouille dès le déclin de l'après-midi et tard dans la nuit, la galanterie du trottoir (Arnoux, Rêv. policier amat.,1945, p. 293). 3. [À propos d'un mode d'expr. littér. ou artistique] Caractère d'une œuvre qui traite avec grâce de sujets amoureux. Tout consommé qu'était Mellin dans la galanterie du sonnet et du madrigal, l'obscénité de l'épigramme ne l'a pas rebuté (Sainte-Beuve, Tabl. poés. fr.,1828, p. 38).[Boucher] Son élégance, sa mignardise, sa galanterie romanesque, sa coquetterie, sa facilité, sa variété, son éclat, ses carnations fardées, sa débauche (Nolhac, Boucher,1907, p. 168). − P. méton.
Œuvre d'inspiration amoureuse : 5. N'est-ce pas, madame, que voici un madrigal vraiment méritoire, et aussi emphatique que vous-même? En vérité, j'ai eu tant de plaisir à broder cette prétentieuse galanterie, que je ne vous demanderai rien en échange.
Baudel., Poèmes en prose,1867, p. 81. Prononc. et Orth. : [galɑ
̃tʀi]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1537 « mauvais tour » (Messire Baltazar de Castillon, Le Courtisan, traduction de J. Colin, Livre second, p. XXXI, ro); 2. 1611 « distinction, élégance dans l'esprit et les manières » (Cotgr.) 3. a) ca 1630 « petit cadeau particulier à une dame » (Peiresc, Lettres aux frères Dupuy, I, 484 ds Brunot t. 4, p. 270); b) av. 1648 « propos flatteur, écrit galant (adressé à une femme) » (V. Voiture, Lettres, 25 ds Littré); c) 1667 « empressement à plaire à une femme » (Molière, Sicilien, XI ds
Œeuvres, éd. H. de Bouillane de Lacoste, 224); 4. 1665 « intrigue amoureuse » (La Rochefoucauld, Réflexions, 73, ibid., éd. M. D. L. Gilbert, I, 62). Dér. de galant*; suff. -erie*. D'apr. H. Estienne (Deux Dialogues, éd. P. Ristelhuber, I, 238), il s'agirait d'un italianisme (cf. galanteria attesté vers 1523-35 ds Batt.). Fréq. abs. littér. : 590. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 340, b) 1 071; xxes. : a) 932, b) 229. Bbg. Flutre (L. F.). Termes commerciaux des 17es. et 18es. R. Ling. rom. 1961, t. 25, p. 280. - Spitzer (L.). Über einige Wörter der Liebessprache. Leipzig, 1918, p. 18. - Tracc. 1907, p. 145. |