| FRUSTE, adj. A.− [En parlant d'un inanimé] 1. B.-A., HÉRALD. et NUMISM. [En parlant d'une statue, d'un blason, d'une monnaie] Qui présente un relief usé par le temps. Un blason fruste que le plus habile héraut d'armes eût été impuissant à déchiffrer (Gautier, Fracasse,1863, p. 2).Quelques statues frustes recueillies au hasard des fouilles (Arène, Veine argile,1896, p. 225).Ces médailles dont s'est effacée l'effigie, hélas frustes à présent (Gide, Feuillets,1911, p. 344). − Au fig. [En parlant d'un mot, d'une expr.] Qui est presque effacé par l'usage, qui a perdu son sens. Un mot devenu trop fruste d'avoir servi à désigner tout le contraire de ce à quoi on l'applique (Blanche, Modèles,1928, p. 201). 2. Qui présente un relief rugueux, mal poli. L'aspect gris et fruste d'une carrière de pierre (Goncourt, Journal,1871, p. 742).Un mur de granit, à gros blocs frustes, mal équarris, mal ajustés (Van der Meersch, Empreinte dieu,1936, p. 92). ♦ Emploi subst. masc. Aspect usé d'un relief. Une lumière grise et terne d'éclipse, empoussiérant le mousseux des toits, le fruste des murs (Goncourt, MmeGervaisais,1869, p. 57). − Au fig. [En parlant d'un style ou d'une production artistique en gén.] Qui n'est pas élaboré. Les poèmes de M. François Porché, si sobres (...) même si frustes dans leur ton et dans leur forme qu'on leur a quelquefois reproché de manquer un peu d'art (Léautaud, Théâtre, M. Boissard,1943, p. 61). B.− P. ext. [En parlant d'une pers. ou p. méton. d'un trait de comportement ou de caractère] Qui manque de finesse, qui est mal dégrossi. Âme, manière fruste; homme fruste. Synon. balourd, inculte, lourd, lourdaud, sauvage.Ce grand gaillard de Parisien, au mot brutal, au geste fruste, mais au cœur franc (Benjamin, Gaspard,1915, p. 88).L'embarras restituait à son visage cette expression lourde, fruste (Martin du G., Thib.,Belle Sais., 1923, p. 963). Rem. On rencontre ds la lang. parlée la forme frustre due à un croisement sémantique et phonétique avec rustre. REM. Frustement, adv.D'une manière fruste. Là était la maison de Karelina. On y vivait frustement (Van der Meersch, Empreinte dieu,1936, p. 26). Prononc. et Orth. : [fʀyst]. Ds Ac. 1718-1932. Étymol. et Hist. 1. 1580 fruste « usé » [en parlant d'une médaille] (Ronsard, Disc. sur une médaille d'Antinous ds
Œuvres, éd. P. Laumonier, t. 18, p. 411); 2. 1831 « qui manque de finesse, mal dégrossi » (Michelet, Hist. rom., t. 2, p. 76 : Peu à peu s'effaçait le type rude et fruste du génie latin). Empr. à l'ital. frusto, attesté au sens 1 dep. 1remoitié xvies. (l'Arétin ds Batt.), « user », proprement « mettre en morceaux », dér. de frusto « morceau », du lat. class. frustum « id. ». Fréq. abs. littér. : 186. Bbg. Hope 1971, p. 197. − Kohlm. 1901, p. 45. − Quem. DDL t. 3 (s.v. frustement). − Wind 1928, p. 182. |