| FLATTEUR, EUSE, adj. et subst. A.− Adj. et subst. (Personne) qui flatte, qui adresse des louanges exagérées et intéressées à quelqu'un. (Quasi)-synon. courtisan, enjôleur, flagorneur.Vous me sauvez, vous me prolongez de dix ans, ma bonne dame... ce n'est pas une flatterie, c'est ce que je pense, aussi vrai que voilà une lampe qui nous éclaire. Non, je ne suis pas flatteuse... (Zola, Page amour,1878, p. 996).S'il n'y avait plus d'imbéciles à jouer, le métier des sycophantes et des flatteurs du peuple tomberait bien vite (Renan, Avenir sc.,1890, p. 341): 1. Peut-être, après tout, suis-je laide, et Nofré est-elle une flatteuse lorsqu'elle prétend que, de la source inconnue du Nil jusqu'à l'endroit où il se jette dans la mer, il n'y a pas de plus belle fille que sa maîtresse... non, je suis belle : les yeux ardents des hommes me l'ont dit mille fois...
Gautier, Rom. momie,1858, p. 250. − P. méton. [En parlant des attributs, du comportement d'une pers.] Qui manifeste, dénote la flatterie. Et le bon Popelin, appuyant tous les dires de la princesse de dodelinements de la tête flatteurs, soudain, s'est emporté contre mes Mémoires (Goncourt,Journal,1891,p. 51).« ... ô Empereur du bas! » fit-il d'une voix flatteuse de marchand juif, « toi qu'il n'aime pas, mais qui nous aime! ... » (Jouve, Scène capit.,1935, p. 129): 2. ... à cet instant, on plonge dans sa robe avec une révérence savante, la bouche s'entr'ouvre comme une rose épanouie, un sourire angélique et inquiétant erre sur le coin des lèvres flatteuses et moqueuses, et, tout d'un coup, comme une cascade de perles, les compliments coulent et roulent à la rencontre d'autres compliments.
Taine, Notes Paris,1867, p. 71. B.− Adjectif 1. Peu usité. Caressant. Ce peuple napolitain a, dans sa vivacité, je ne sais quoi de doux et de flatteur (France, Bonnard,1881, p. 302). 2. Littér. Agréable, séduisant. Et Maurras distillait à ses auditeurs l'art subtil − et combien flatteur! − de muer en tranquillité morale les inquiétudes que le socialisme leur donnait sur la légitimité de la possession (J.-R. Bloch, Dest. du S.,1931, p. 108).On compte cent peintres ne retenant de la vie que son visage le plus flatteur (Lhote, Peint. d'abord,1942, p. 134): 3. Le songe où je croyais avoir vu le sage Mentor descendre aux Champs-Élysées achevait de me décourager : une secrète et douce langueur s'emparait de moi. J'aimais déjà le poison flatteur qui se glissait de veine en veine et qui pénétrait jusqu'à la moelle de mes os.
Larbaud, F. Marquez,1911, p. 181. 3. Élogieux, avantageux, qui flatte l'amour propre, l'orgueil. Une distinction, un succès flatteur; un murmure flatteur; une alliance flatteuse. Nous serons heureux et fiers d'avoir obtenu votre confiance, vous êtes un de ces royalistes conséquents dont on peut être l'ennemi politique, mais dont l'estime est flatteuse... (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 270).Ces jours-là paraissait de lui un nouveau livre, et il recevait beaucoup de lettres et d'articles flatteurs (Montherl., Pitié femmes,1936, p. 1097): 4. Nous passions en effet sous la domination de M. Mougeot qui nous parlait comme à de grandes personnes et nous tenait un langage d'autant plus flatteur pour la plupart d'entre nous qu'il était incompréhensible. À cause de cela, nous l'aimions; sa colère même nous plaisait.
Green, Journal,1933, p. 157. ♦ Loc. C'est flatteur, c'est peu flatteur (de/que...). Son habit a dû être bien neuf et ses bottes reluisent joliment. C'est flatteur pour nous qu'il y ait des confrères si comme il faut (Dumas père, Comte Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 642).C'est fort peu flatteur pour une femme, je suppose, de n'arriver à dérider un homme que lorsqu'on l'entretient d'un autre! (Huysmans, Là-bas,t. 2, 1891, p. 133).La Dame. − Qu'une dame Pons, née demoiselle Lempoumas, vienne à une consultation gratuite, c'est en effet assez extraordinaire. Knock. − C'est surtout flatteur pour moi (Romains, Knock,1923, II, 5, p. 12). 4. Embelli par rapport à la réalité, au modèle. Sans doute j'étais fou de m'exalter ainsi sur une flatteuse image vraisemblablement vieille de plus de quinze ans (Gide, Isabelle,1911, p. 636).L'autre école, qui nous vaut des effigies flatteuses, mais inconsistantes, est celle du XVIIIesiècle, siècle dangereux à consulter à une époque comme la nôtre, paresseuse et pourrie (Lhote, Peint. d'abord,1942, p. 114): 5. Les âmes parisiennes se miraient dans cette pièce qui leur renvoyait, comme un tableau flatteur, l'image de leur fatalisme alangui, de leur nirvâna de boudoir, de leur mœlleuse mélancolie. De volonté, aucune trace. Nul ne savait ce qu'il voulait. Nul ne savait ce qu'il faisait.
Rolland, J.-Chr.,Foire, 1908, p. 698. − Qui avantage. Couleurs flatteuses, éclairage flatteur. ♦ ,,Miroir flatteur. Miroir où l'on se voit plus beau qu'on est`` (Ac.). Prononc. et Orth. : [flatœ:ʀ], fém. [-ø:z]. Ds Ac. dep. 1694. Ac. 1694 et 1718 : flateur; cf. aussi Fér. Crit. t. 2 1787. Étymol. et Hist. A. Subst. ca 1220 flateour « personne qui donne des louanges exagérées ou fausses » (Traduction de Martin de Braga, 272 ds T.-L.); B. Adj. 1. mil. xves. flateresse « id. » (Le Mistére du Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 35474); 2. a) 1556 « qui berce d'un espoir, d'une illusion » (O. de Saint-Gelais, Sophonisbe, p. 74 ds
Œuvres complètes, éd. P. Blanchemain, t. 3 : flatteresse esperance); 1558 flateuse esperance (J. du Bellay, Les Regrets, éd. H. Chamard, t. II, p. 71, 2); b) 1640 flatteur « qui affecte une manière douce, agréable » (Corneille, Cid, II, 5, 537); 3. 1690 « qui représente en beau (p. ex. d'un miroir) » (Fur.). Dér. de flatter*; suff. -eur2*. Fréq. abs. littér. : 990. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 327, b) 1 000; xxes. : a) 918, b) 1 135. |