| FATALITÉ, subst. fém. A.− Puissance occulte qui, selon certaines doctrines, déterminerait le cours des événements d'une façon irrévocable. Le point d'honneur jouait dans les comédies espagnoles le rôle de la fatalité dans les tragédies grecques (Gautier, Tra los montes,1843, p. 289).Nous sommes dans la main des dieux. La fatalité est la poésie du monde (Chardonne, Claire,1931, p. 19): 1. L'ascèse nietzschéenne, partie de la reconnaissance de la fatalité, aboutit à une divinisation de la fatalité. Le destin devient d'autant plus adorable qu'il est plus implacable.
Camus, Homme rév.,1951, p. 97. − Toute espèce de nécessités, de déterminations, de contraintes irrémédiables. La fatalité de la république est à la fois de provoquer l'anarchie et de la réprimer très durement (Renan, Réf. intellect.,1871, p. 69): 2. Telles ont été les fatalités de notre politique, dont le fruit, dans l'immédiat, est l'immobilité et le « pourrissement ».
Mauriac, Bloc-Notes,1958, p. 56. B.− Ce qui est fatal; ce qui ne peut manquer d'arriver. Pour comble de maux je ne pourrai vous voir encore aujourd'hui, mais à quelque chose malheur est bon, et cela me fera rompre la fatalité du dimanche (Chateaubr., Corresp., t. 4, 1823, p. 392): 3. Jeté hors de son ordre et, l'on peut dire, hors de la loi, séparé de toute société, sauf de quelques pauvres gens qui se serrent contre lui, François est retourné à cette sorte de fatalité qui pèse sur un paysan ignorant...
Barrès, Colline insp.,1913, p. 251. C.− ,,Suite de coïncidences inexpliquées, qui semblent manifester une finalité supérieure et inconnue; et plus spécialement, série persistante de malheurs`` (Lal. t. 1 1932). Une sorte de fatalité semble s'être attachée à poursuivre les grandes œuvres de Léonard (Gautier, Guide Louvre,1872, p. 217).Il y a d'étranges fatalités dans la vie des femmes... (Augier, Mme Caverlet,1876, VI, p. 518): 4. Dites à Gilberte qu'il ne faut pas trop me juger sur l'enveloppe, et que ce n'est pas ma faute, après tout, si, par une fatalité malheureuse, ceux qui aiment le mieux sont presque toujours ceux qui savent le moins bien parler d'amour.
Meilhac, Halévy, Froufrou,1869, I, 11, p. 31. Prononc. et Orth. : [fatalite]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. xves. (Pierre de Lanoy, Legende de St Antoine, 40, Guigne ds Delb. Notes). Empr. au b. lat. fatalitas « nécessité du destin; fatalité ». Fréq. abs. littér. : 1 418. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 127, b) 2 484; xxes. : a) 1 611, b) 1 914. Bbg. Short (J.-P.). The Concept of fate in the tragedies of Racine. In : [Mél. Lawton (H.W.)]. Manchester, 1968, pp. 315-329. |