| FANTASQUE, adj. et subst. A.− [En parlant d'une pers. ou de son comportement] 1. Qui suit sa fantaisie. Esprit fantasque. Synon. fantaisiste, farfelu, original.C'était un être d'apparence très libre, fantasque, plein d'humour et de gaieté (Gide, Si le grain,1924, p. 400).Fantasque, primesautière, indisciplinée, elle s'entendait mal avec ses professeurs (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 75). − P. méton. Qui traduit la fantaisie. Certain art de présenter sous l'aspect le plus fantasque et le plus déconcertant son opinion (Gide, Si le grain,1924, p. 536).Des idées fantasques et des rêves insensés (Durry, Nerval,1956, p. 59). 2. Péj. Qui manifeste une humeur inégale, qui est imprévisible. Caractère, homme, humeur fantasque. Synon. capricieux, lunatique.Théophile rappelait avec désespoir sa douceur languissante de jeune fille, tandis que maintenant elle le torturait, fantasque, changeant d'humeur vingt fois en un jour (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 52).C'est la faute de mon caractère violent, exagéré, fantasque! Je passe du plus sombre découragement aux plus futiles espérances (Martin du G., Thib.,Cah. gr., 1922, p. 622).Cf. autoritaire ex. 5 : 1. Tu avais un caractère égal... Je me souviens combien ton calme et ta douceur me plaisaient (...). Berthe écoutait cette voix sage, d'une belle sonorité. Elle ne songeait pas à se défendre. Elle connaissait bien cette étrange susceptibilité, qui lui paraissait maintenant redoutable parce qu'il s'en apercevait. Si ce mal allait grandir; si elle était vraiment faible, irritable, fantasque...
Chardonne, Épithal.,1921, p. 188. − Emploi subst. Elle devinait la fantasque et la violente qu'elle aurait pu devenir, tandis qu'il ne lui avait donné que de la passion et du courage (Zola, Dr Pascal,1893, p. 332).Cf. ceci ex. 13. − P. anal. [En parlant d'un animal] La mule est un animal fantasque (Ac.1798-1878).La ruse et la patience, avec lesquelles les oiseleurs finissent par saisir les oiseaux les plus défiants, les plus agiles, les plus fantasques et les plus rares (Balzac, Honorine,1843, p. 353). Rem. La docum. atteste fantasquerie, subst. fém., rare. Caractère fantasque. La comtesse plaisait à sa fille par son animation, sa vivacité et ce qu'elle appelait elle-même « sa fantasquerie » (La Varende, Am. Bonneville, 1955, p. 116). P. méton., au plur. Manifestations de ce caractère. Comme elle [la régente] était veuve depuis longtemps et que ses fantasqueries cérébrales tenaient beaucoup à un grand manque, elle avait pensé à des folies (L. Daudet, Astre noir, 1893, p. 55). 3. En partic. [En parlant d'un auteur, d'un artiste ou p. méton. de son œuvre] Qui donne libre cours à sa fantaisie, qui s'écarte du classicisme par l'originalité, la liberté de son inspiration. Synon. baroque.Les deux novateurs [Paolo Ucello et Cézanne] apparaissent comme des visionnaires aussi fantasques l'un que l'autre (Lhote, Peint. d'abord,1942, p. 132): 2. ... le vieillard choisissait toujours ses cadeaux parmi les œuvres dont les ornements appartenaient à ce genre fantasque nommé arabesque, et qui ne parlant ni aux sens ni à l'âme, s'adressent seulement à l'esprit par les créations de la fantaisie pure.
Balzac, Enf. maudit,1831-36, p. 410. B.− [En parlant d'un inanimé concr.] Qui s'écarte de l'ordre commun, se distingue par l'étrangeté de son aspect. Synon. bizarre, étrange, extravagant, insolite.J'allais, sous les plus fantasques travestissements, me poster à certain coin de rue obscur (Milosz, Amour. initiation,1910, p. 189).Un monument fantasque, le Triunfo, que j'aime parce qu'il réalise l'extravagance dans le mauvais goût (T'Serstevens, Itinér. esp.,1963, p. 175): 3. Oh! ces étranges plantes du Mexique! Ces plantes grasses, géantes (...), ces plantes toutes hérissées de piquants, de poils, et dont quelques-unes présentent l'aspect d'une fourrure. Et parmi ces plantes fantasques, le Pelocereus senilis, qui a l'air d'une colonne d'un temple de treillage du xviiiesiècle, (...) qu'on dirait surmontée de la flamme en faïence violette d'un vieux poêle rocaille.
Goncourt, Journal,1889, p. 1059. Prononc. et Orth. : [fɑ
̃task]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. [xves. « qui est capricieux, bizarre » (Gerson ds le dict. de Dochez ds Littré)]; 1575 « (d'une chose) extraordinaire » (Thevet, Cosmogr., XI, 16 ds Hug.); 1580 « fantastique, imaginaire » (Montaigne, Essais, éd. Thibaudet, CI, VIII, p. 53); 1606 « sujet à des inégalités d'humeur » (Crespin ds FEW t. 3, p. 365b). Réfection d'apr. fantastique*, de fantaste « fantasque » (Ronsard, Poemes, L. V, La Lyre (V, 47) ds Hug.), lui-même forme abrégée de fantastique*. Fréq. abs. littér. : 347. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 498, b) 643; xxes. : a) 621, b) 331. DÉR. Fantasquement, adv.D'une manière fantasque. Synon. bizarrement, étrangement, insolitement.Cet ensemble de matras, de cornues, de métaux, de cristallisations fantasquement colorées (Balzac, Rech. absolu,1834, p. 260).Il commença d'une voix glapissante, dont il variait fantasquement les intonations, cette harangue emphatique et burlesque (Gautier, Fracasse,1863, p. 176).− [fɑ
̃taskəmɑ
̃]. Ds Ac. 1694-1878. − 1reattest. 1602 « d'une manière fantasque » (Du Bartas, 1resemaine, 2ejour, 132 ds Gdf. Compl.); de fantasque, suff. -ment2*. − Fréq. abs. littér. : 6. |