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FAIRE1, verbe trans.
I.− [Le suj. désigne un animé] Donner l'être, l'existence à, être l'auteur de.
A.− [Le suj. désigne Dieu; l'obj. désigne un animé ou un inanimé] Créer, donner l'être et la vie à. Dieu fit le ciel et la terre; Dieu a fait l'homme à son image. Ce n'est pas nous qui avons fait le ciel et la terre (Claudel, Père humil.,1920, II, 1, p. 516).« Me voilà, tel que Dieu m'a fait! » (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 129).
Faire + subst. + attribut de l'obj.Dieu (...) a fait toute créature périssable (H. Bazin, Vipère,1948, p. 275).
Loc. fam. Tous les jours que Dieu fait. Chaque jour (Ac.).
B.− [Le suj. et l'obj. désignent un animé] Donner naissance à.
1. Fam. [Le suj. désigne des pers.] Donner la vie à. Faire des enfants. Synon. procréer.La bourgeoisie, grosse famille de gens actifs, faisant des affaires, des enfants (Goncourt, Journal,1859, p. 603).Ils avaient bien besoin d'avoir un enfant! (...) ils n'en avaient sans doute nul besoin. Mais la nature voulait qu'ils en fissent un (France, Bonnard,1881, p. 273).
Loc. fam. Je le/la connais comme si je l'avais fait(e). Je le/la connais très bien. Madame Laure! je la connais comme si je l'avais faite. C'est une cliente (France, Crainquebille,1905, 3etabl., 1, p. 298).
a) [Le suj. désigne une femme] Faire un enfant. Synon. de enfanter.Cf. infra ex. 1.
b) [Le suj. désigne un homme] Pop. Faire un enfant à une femme. La rendre enceinte. Si je ne prenais pas mes précautions, il me ferait un gosse à tous coups (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 350).Ma jeune femme me portait l'affection la plus tendre, je lui faisais de beaux enfants bien sains, deux fils et une fille (Sartre, Mots,1964, p. 153).
2. Usuel [Le suj. désigne la femelle d'un animal] Mettre bas. Faire ses petits :
1. « Ça n'est pas possible (...) que des roses produisent des petits enfants. Non, les roses produisent des roses; ce sont les chattes qui font les petits chats; les mamans qui font les petites filles et les papas qui font les petits garçons. » Gide, Journal,1943, p. 230.
Au fig., fam. Faire des petits. Proliférer, se multiplier.
3. P. anal. [Le suj. désigne une plante] Faire des bourgeons, des feuilles. En France, les pommiers feront toujours des fleurs (Audiberti, Quoat,1ertabl., 1946, p. 30).
C.− [L'obj. désigne un inanimé concr.]
1. [Le suj. désigne un animé] Produire (par une fonction naturelle de l'organisme).
a) [Le suj. désigne une pers.]
α) Faire ses dents. Avoir les dents qui poussent. Faire une dent de sagesse. Aux pieds de l'aïeule, dans son moïse, le dernier né des Poitrine, Jeannot, faisait ses dents (France, Dieux ont soif,1912, p. 482).
β) Fam. Faire pipi, caca (lang. enf.), ses besoins. Uriner ou évacuer des matières fécales. Synon. vulg. pisser, chier.Plus jeune, il lui arrivait souvent de « faire son gros », comme elle dit, dans ses culottes, par paresse ou par incurie (Gide, Journal,1943, p. 214).Les plus malades (...) faisaient leurs besoins ou vomissaient sous eux (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 167).Tout à coup, je fis pipi sur ses genoux (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 123):
2. − Nous autres, les filles, nous devons nous arrêter pour faire les deux commissions. Les chevaux, les vaches font la grosse tout en courant mais sont obligés de s'arrêter pour faire pipi. Au contraire, les garçons s'arrêtent pour faire la grosse, mais font pipi tout en courant. Crois-tu qu'il existe des êtres au monde capables de faire les deux sans être obligés de s'arrêter, en marchant ou en courant? C'est impossible! Même les oiseaux se posent pour lâcher leur crotte, les chéris, qui ne font jamais pipi. Mais la tante sait faire pipi debout, tout comme un homme, sans s'accroupir. Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 130.
[P. ell. du compl. d'obj.] Faire dans sa culotte, dans son lit.
b) [Le suj. désigne un animal] Faire ses crottes, du crottin. Évacuer des excréments.
[P. ell. du compl. d'obj.] Déjà la cour était interdite au petit chien; il pouvait bien faire dehors (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 253).
2. [Le suj. désigne un animé ou un inanimé concr.] Produire, émettre. Tomates qui font du jus, de l'eau (à la cuisson); savon qui fait de la mousse. Synon. donner, sécréter.Elle ferait maintenant du poison avec n'importe quoi, comme les diabétiques font du sucre... (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1492)
3. Rien ne justifie l'excès qu'on impute à la matière blanche ou grise, accessoirement au rôle sensitif et moteur, de « secréter » ainsi que bruit une apparence de paroles, l'intelligence et la volonté, comme le foie fait de la bile. Claudel, Connaissance Est,1907, p. 105.
D.− Réaliser (à l'aide d'éléments).
1. [L'obj. désigne un inanimé concr.] Produire, fabriquer. Faire un bouquet, faire du feu. Le cafetier (...) s'en alla à reculons en faisant des nœuds à sa serviette (Murger, Scènes vie boh.,1851, p. 125).
Loc. fig., vx. Faire feu qui dure. Mon cher enfant, il faut faire vie ou feu qui dure, je ne sais lequel on dit. Mais cela veut dire qu'il faut vous conserver longtemps (Chateaubr., Corresp.,t. 1, 1789-1824, p. 90).
Loc. à valeur adj. Comme on n'en fait plus. Comme on n'en rencontre plus. D'un caractère comme on n'en fait plus, tout d'une pièce, bourru, pas accueillant, peu aimable (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 331).
a) Domaine des réalisations artis. ou industr.Faire une maison. Synon. bâtir, construire.Tout en faisant de petits trousseaux et de petites layettes, tout en cousant de petites robes, de petits corsages et de petites brassières (Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 488).Je fais des ponts, des routes (Camus, Exil et Roy.,1957, p. 1668).
P. anal. [Le suj. désigne un animal] Faire sa toile. Une cigogne a fait son nid autour de la cheminée (Quinet, Ahasvérus,1833, 3ejournée, p. 179):
4. J'ai vu un oiseau faire son nid. (...). À vrai dire, le gros oiseau bleu vif et bleu pâle a déjà construit son nid, mais il le façonne, il le piétine, il l'arrondit... Green, Journal,1948, p. 172.
b) Domaine des préparations (alimentaires, médicinales).Faire des confitures, un flan, une omelette, du pain, une tarte (cf. infra III A 4).Son histoire d'arsenic qu'elle avait pris pour du sucre, en faisant une crème à la vanille (Flaub., MmeBovary,t. 2, 1857, p. 184).Éberlé (...) avait dit qu'en faisant une infusion avec le tissu du pancréas, il avait obtenu un liquide qui émulsionnait la graisse (Bernard, Principes méd. exp.,1878, p. 257).
Proverbe. On ne fait pas d'omelette* sans casser des œufs.
Emploi pronom. à sens passif. Le chocolat, dans ce temps-là, se faisait avec du cacao, du sucre et de la vanille (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 101).
c) Domaine littér. et artistique.Donner sa forme définitive à, élaborer. Faire un livre, des vers; faire un portrait, un tableau. M. Cadet de Gassicourt, poète-pharmacien, faisant des petits vers (Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 70).Dumas fils dessinant, faisant des petits anges du Pérugin avec des ailes (Goncourt, Journal,1855, p. 190).
d) Domaine scol.Faire un devoir, ses devoirs. Le(s) rédiger. J'appris à faire mes devoirs, à étudier mes leçons dans le brouhaha des voix (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 99).
2. [L'obj. désigne une collectivité hum.] Donner l'existence à. Cavour a fait l'Italie. Synon. créer, établir, organiser :
5. Il préparait d'autre part une idéologie du terrorisme. Pour lui, le communisme était seulement le vrai moyen de faire revivre la Chine. − Je ne veux pas faire la Chine, dit Souen, je veux faire les miens avec ou sans elle. Les pauvres. C'est pour eux que j'accepte de mourir, de tuer. Pour eux seulement... Malraux, Cond. hum.,1933, p. 314.
Emploi pronom. En sorte que l'Église de Dieu aille se faisant et s'édifiant dans l'éternel et l'infini (Michelet, Journal,1842, p. 387).
E.− Obtenir, se procurer.
1. [Le suj. désigne une pers.; l'obj. désigne gén. un inanimé concr.] Amasser, obtenir (en assemblant).
a) Se fournir en, prendre. Faire du bois, de l'eau*, de l'essence. Le journal ne faisant pas d'abonnements, il était sans cesse en projets, en innovations (Goncourt, Journal,1853, p. 87).Gros ivrogne toujours satisfait pourvu qu'il fît son plein d'alcool (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 325).
b) Domaine agric.
Faire de l'herbe. Ramasser de l'herbe. Vous seriez bien gentil d'aller jusqu'à la route me faire un peu d'herbe pour mes lapins (A. Daudet, Jack,t. 1, 1876, p. 229).
Faire la/une récolte (de). Récolter, ramasser. Bêchant la terre, sciant les blés, faisant les foins par la chaleur de midi (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 1, p. 397).Au mois d'août, en pleine bataille, on avait trouvé moyen de faire et de rentrer les récoltes (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 19).
c) Gagner, obtenir. Faire de l'argent, de l'or (vx), des bénéfices. Une vingtaine d'objets dont il a fait plus de 100 000 francs... (Goncourt, Journal,1890, p. 1109).Ce spectacle continuait de connaître la faveur du public et faisait toujours de grosses recettes (Camus, Peste,1947, p. 1379).J'ai lu votre pièce, elle est magnifique (...), et je suis sûre qu'elle peut faire beaucoup d'argent (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 269).
Emploi pronom. réfl. indir. Les loyers augmentent tous les jours (...) Monsieur Vabre doit se faire dans les vingt-deux mille francs avec son immeuble (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 9).
Loc. verb. Faire fortune*, recette*; faire de la monnaie*.
2. [Le suj. et l'obj. désignent une pers.]
a) Domaine milit.Faire des troupes (vx), des recrues. Lever des troupes, des recrues. P. ext. [Dans une organisation] Faire une (nouvelle) recrue*.
b) Faire un prisonnier. Constituer quelqu'un prisonnier, le capturer. Le 28 et le 29, nos détachements (...) détruisent encore une quinzaine d'engins et font 200 prisonniers (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 255).
c) Lang. de la prostitution. Faire un client. L'entraîner. Synon. Lever.On se baigne. Celles des femmes dont les rondeurs sont suffisantes viennent là montrer à nu leur étalage et faire le client (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Femme de Paul, 1881, p. 1218).
F.− Constituer (un ensemble).
1. Composer. Couleurs qui font un ensemble harmonieux. Synon. aboutir à, former, produire.Un homme seul ne fait pas une paroisse (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1489).Ah! vous allez faire un trio d'amis (Sartre, Mains sales,1948, 3etabl., 2, p. 84):
6. ... comment que ça se fait que tant de bons chrétiens ne fassent pas une bonne chrétienté. Il faut qu'il y ait quelque chose qui ne marche pas. Péguy, Myst. charité,1910, p. 10.
Ça fait deux [Après 2 termes reliés par et] Ce sont deux choses, deux idées très différentes, à ne pas confondre. Être patient et être poire, ça fait deux (Prévert, Paroles,1946, p. 46).J'ai dit que je l'avais prévue. La prévoir et l'espérer, ça fait deux, non? (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 71).
Loc. verb. Faire bande* à part, corps*, équipe*; faire la paire*; faire cercle*; ne faire qu'un*.
2. Spéc., ARITHM. [En parlant du résultat d'une opération] Constituer ensemble (quant à la quantité). Deux et deux font quatre; cent centimètres font un mètre. Synon. égaler, équivaloir à.Le grand saint Nicolas (...) leur posait des questions faciles, comme, par exemple : « Combien font cinq fois cinq? » (France, Mir. Gd St Nic.,1909, p. 76).Moûlu compte les cigarettes : « Quatre-vingts. Ça fait onze par tête de pipe et il en reste trois à tirer au sort » (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 229).De toute façon, ces opérations sont fausses. Un homme et un homme, ça ne fait pas deux hommes, ça fait à jamais un et un (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 336).
P. plaisant. :
7. Quatre et quatre huit Huit et huit font seize Et seize et seize qu'est-ce qu'ils font? Ils ne font rien seize et seize Et surtout pas trente-deux... Prévert, Paroles,1946, p. 174.
Loc. C'est clair comme deux et deux font quatre. C'est très clair, très simple. Ça ne fait pas assez. Le compte n'y est pas. Ça fait juste. Ça commence à bien faire (fam., au fig.). Ça suffit, en voilà assez, c'en est trop (avec une idée d'impatience).
G.− Loc. proverbiales. L'habit* ne fait pas le moine; l'occasion* fait le larron; une hirondelle* ne fait pas le printemps; les bons comptes font les bons amis*; l'argent ne fait pas le bonheur*; le malheur des uns fait le bonheur* des autres; l'union* fait la force.
II.− Donner une manière d'être à; être le sujet d'(une activité), la cause d'(un effet). [Faire et son compl. sont l'équivalent d'un verbe d'action ou d'état; l'idée dominante est celle d'une manière d'agir ou d'une manière d'être]
A.− Entreprendre et accomplir.
1. [L'obj. est un subst. ou un pron. neutre] Faire l'aumône, la charité, un crime, une erreur. Synon. effectuer, exécuter, opérer.D'ailleurs, vous avez du travail à faire, cela occupera vos après-midi (Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 73):
8. Elle tournait toute la matinée, balayant, époussetant, nettoyant les chambres, lavant la vaisselle, faisant des besognes qui l'auraient écœurée autrefois. Jusqu'à midi, ces soins de ménage la tenaient sur les jambes, active et muette, sans lui laisser le temps de songer à autre chose qu'aux toiles d'araignée... Zola, T. Raquin,1867, p. 160.
Loc. à valeur adj. À tout faire. Apte à toutes sortes de besognes. Bonne* à tout faire. C'était Jeanne (...) qui avait indiqué Cadet comme un bon sujet, un garçon à tout faire, comme on dit (Sand, Jeanne,1844, p. 210).Il arrive que le même mot, (comme liberté), s'emploie à des besognes d'expressions fort différentes. C'est un mot à tout faire (Valéry, Regards sur monde act.,1931, p. 246).
Fam. (Il) faut le faire! [Pour marquer l'admiration ou, p. iron., le dénigrement]
Loc. Faire l'amour, la guerre, la paix; faire du charme, du plat (à qqn); faire des caprices, des embarras, des histoires, des manières; faire une crise, un drame, un malheur, une scène; faire le nécessaire, son possible; faire la loi; faire grâce; faire grève; faire erreur; faire des progrès; faire ça; faire qqc. pour qqn; en faire de belles; faire des siennes*; littér. ce faisant, pour ce faire (cf. ce1). Faire face*, front*, obstacle*, pendant*.
Rem. 1. Dans une lang. plus soutenue, et notamment dans la lang. écrite, on emploie un verbe plus précis. Perpétrer (un crime), commettre (une erreur), pratiquer (l'aumône) ou un verbe équivalent à faire + subst. Faire la cuisine/cuisiner; faire les vendanges/vendanger, etc. Mais dans le lang. fam. ou enfant., on rencontre de nombreuses loc. équivalant à un verbe d'action. Faire la bise, coucou, dodo, joujou, risette, trempette, etc. 2. Dans qq. cas le compl. d'obj. a valeur d'obj. interne. Faire une bonne mort. Tu vas te mettre au lit et tu vas faire un bon gros sommeil (Audiberti, Quoat, 1946, 2etabl., p. 74). 3. Le verbe faire est aussi compatible avec l'idée de repos. « Je n'ai pas dormi de la nuit, j'aimerais faire une sieste, prendre un bain » (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 312).
2. [L'obj. est un mot interr. ou un pron. antécédent d'une sub.]
a) [L'obj. est un pron. antécédent d'une sub.] Faire ce qu'il faut, ce qu'on peut. Onze heures seulement. Une fois de plus, il s'interrogea sur ce qu'il allait faire (Green, Moïra,1950, p. 236).« Ce que je fais, bonnes gens? Hé, je m'occupe à vieillir... Ça n'a l'air de rien, eh bien ça me prend tout mon temps! » (Martin du G., Souv. autobiogr.,1955, p. C).Proverbe. En mai*, fais ce qu'il te plaît.
[En corrélation et en oppos. avec dire] C'est plus facile à dire qu'à faire. « Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais » devient parfois, à peine avoué, un : « Faites ce que je fais, ne faites pas ce que je dis » (Mounier, Traité caract.,1946, p. 413).
Ne plus savoir ce que l'on fait. Avoir l'esprit ailleurs, s'affoler; déraisonner. « Je suis anéantie. Je ne sais plus ce que je fais. Je ne sais plus ce que je dis. Je pars travailler comme une automate » (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 188).
b) [L'obj. est un mot interr. ou concessif] Quoi qu'il fasse. Mais que faisons-nous pour mériter un tel honneur? (H. Bazin, Vipère,1948, p. 61).
[Pour marquer l'impatience, lorsqu'on attend qqn] (Mais) qu'est-ce qu'il fait? Synon. fabriquer, ficher (fam.), foutre (pop.).Personne encore! s'écria-t-il. Que font donc nos amis? (Musset, Mimi Pinson,1845, p. 223).
[Pour remédier à qqc.] Que faire? Quelle attitude prendre? Quelle ligne de conduite adopter? Je crus qu'on cherchait à me voler mon sac (...). Je ne sus que dire ni que faire : je ne bronchai pas (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 161):
9. Vous me regardez? Vous vous demandez tous « Que faire? » Et c'est pour ça que vous êtes venus ici, ce soir... Eh bien, je vais vous le dire! Car il y a quelque chose à faire! Il y a encore une possibilité de salut! Une seule! L'union dans la résistance! Le refus! ... Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 494.
Pour quoi faire? À quoi cela sert-il? Quel est le but de l'opération? Le typo cligne des yeux et dit : « Pour quoi faire? Puisqu'on va à Châlons » (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 279).
[P. allus. littér.] Que diable allait-il faire dans cette galère*?
c) Familier
Le/la faire à + subst. déterminé. Agir d'une certaine façon, prendre telle attitude pour éblouir ou tromper quelqu'un. Le faire au bluff, à l'épate, au chiqué, au sentiment. Les comiques, au contraire, « la faisaient » à la simplicité. Ils s'abordaient d'un air piteux et bonhomme, s'appelant entre eux « ma pauv'vieille » (A. Daudet, Fromont jeune,1874, p. 272):
10. Deux jours plus tard Nadine m'a dit d'un air mi-furieux, mi-flatté : « Il est inouï, ce mec-là! il me la fait au chantage. Il dit qu'être correspondant de paix, c'est un métier qui l'emmerde et que si je ne vais pas avec lui, il laissera tomber. Beauvoir, Mandarins,1954, p. 203.
Il ne faut pas me la faire, on ne me la fait pas à moi. Il ne faut pas essayer de me tromper, de me leurrer. La faire à qqn. Faire une mauvaise plaisanterie :
11. l'homme (...). − Madame, je viens pour le gaz. madame (...). − On passera payer. l'homme (...). − On passera payer! V'là huit fois que vous me la faites, celle-là, je commence à la connaître. Courteline, Vie mén.,Invite Monsieur, 1891, p. 74.
3. [L'obj. est un pron. indéf.]
Faire quelque chose (cf. chose2C).
(Il n'y a) rien à faire. On ne peut empêcher cela; il n'y a pas de remède à cette situation. Il est trop tard à présent pour s'en retirer. Rien à faire : ils devront boire l'amer calice et le vider jusqu'à la lie (Gide, Journal,1943, p. 189):
12. − J'ai eu beau chercher, je n'ai pas trouvé de solution, dit Elsa. − Il n'y en a pas, dit Cyril. C'est un engouement, une influence, il n'y a rien à faire. − Si, dis-je. Il y a un moyen. Vous n'avez aucune imagination. Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 107.
Il n'y a (plus) rien à faire (en parlant notamment de la santé de quelqu'un). On ne peut plus rien tenter pour sa santé.
Rien à faire! Je m'y refuse absolument, je ne céderai pas.
Littér. N'en rien faire. Ne pas exécuter l'ordre donné ou la tâche imposée. Frontin − Allez devant, je reviens tout de suite. Séverin. − Je n'en ferai rien, je veux attendre (Camus, Esprits,1953, I, 5, p. 469).
[Dans une formule de politesse] Je n'en ferai rien (pour laisser passer quelqu'un en s'effaçant devant lui). Après vous, je vous en prie. − Je n'en ferai rien, à vous l'honneur. Cf. infra 5 faites donc.
N'avoir rien à faire, n'avoir que faire (quelque part). Ne pas être à sa place, être importun ou inutile (dans un endroit, une situation). De peur que ton amour de la justice, là où elle n'a que faire, répande un jour le sang inutile (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 976).
Ne rien faire. Être oisif, paresseux, inactif, sans travail. Ne rien faire de ses dix doigts*. J'étais notée par toutes les maîtresses et tous les professeurs comme ne faisant absolument rien (Sand, Hist. vie,t. 3, 1855, p. 115).À quatre heures du matin, on ne fait rien en général et l'on dort (Camus, Peste,1947, p. 1307).C'est l'heure où ceux qui ne font rien se risquent sur les boulevards (Camus, Peste,1947p. 1315).
Ne rien faire
Ne rien faire pour qqn.Se désintéresser de quelqu'un.
Ne rien faire pour + inf.Ne pas intervenir pour. De multiples attentats furent commis contre des Français dans des localités syriennes sans que la gendarmerie fît rien pour les empêcher (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 189).
Ne rien avoir à faire
Ne rien avoir à faire avec qqn.N'avoir aucun rapport avec lui.
Ne rien avoir à faire avec qqc.Ne pas en avoir besoin, n'y avoir aucun intérêt.
Tout faire/faire tout
Tout faire/faire tout pour qqn/qqc.Être très dévoué à, se dépenser au service de.
Tout faire/faire tout pour + inf.Tout mettre en œuvre pour. Je ferai tout pour lui faire plaisir (Anouilh, Répét.,1950, II, p. 39).
N'avoir que faire de
N'avoir nul besoin de. Le valet n'a que faire de certaines vertus du maître : elles ne lui conviennent pas plus que le thym et la marjolaine à nos lapins de choux (Bernanos, Dialog. Carm.,1948, 3etabl., 2, p. 1615).Le chauffeur n'a que faire de cultiver en lui ces capacités individuelles. Pour ne point faillir à sa fonction de vitesse, il a besoin surtout de réflexes sûrs (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 41).
Ne faire nul cas de. Et qu'ai-je à faire d'eux, tous ces êtres qui ne sont pas l'aimée? (Vogüé, Morts,1899, p. 62).J'exigerai ton audience en retour. Je n'ai que faire de l'ami qui ne me connaît pas et réclame des explications (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 971).
Avoir de quoi faire. Avoir des moyens. Dès qu'ils [ces braves ouvriers] avaient de quoi faire le dimanche et le lundi, et vivre au courant tant bien que mal, ils étaient contents (Sue, Myst. Paris,t. 4, 1842, p. 97).
4. Loc. verb.
a) Domaine des loisirs.
Faire la bombe*, la bringue*, la fête*, la noce*, la nouba*; faire bombance*, etc.
Faire la grasse* matinée.
Vieilli. Faire + subst. désignant une fête. Célébrer. Je vais tous les ans faire les Rois chez mon vieil ami Chantal (Maupass., Contes et nouv.,t. 2, MllePerle, 1886, p. 626).La pâque avait été depuis longtemps négligée. La dix-huitième année de son règne, le roi [Josias] fit une pâque solennelle, qui fit une profonde impression (Renan, Hist. peuple Isr.,t. 3, 1891, p. 196).
b) Domaine du jeu
Faire (une partie de). Jouer à. Faire une belote. Une partie d'échecs que nous devions faire, après dîner (Gide, Journal,1941, p. 95).Son beau-père était allé comme d'habitude faire sa partie de bridge à la « Brasserie du Remblai » (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 35).
Faire les cartes. Battre et distribuer les cartes.
Emploi abs. À qui est-ce de faire? C'est à vous de faire; je viens de faire (Ac.1932).
Faites vos jeux*, les jeux* sont faits.
c) Domaine milit.
Faire la garde, le guet, le quart, la ronde, etc. Exercer une activité de surveillance, de veille.
Faire la revue. Passer la revue. Au fig. Prêt à terminer mes recueils, faisant la revue autour de moi, j'aperçois des femmes que j'ai involontairement oubliées (Chateaubr., Mém.,t. 4, 1848, p. 543).
5. Emploi abs. Agir, se comporter. Comment faire? faites pour le mieux; faites comme vous voulez; croire bien faire de/en; regarder faire qqn; faire de son mieux; façon de faire. Je tuerais volontiers. Ne serait-ce que pour faire comme tout le monde (Montherl., Malatesta,1946, I, 7, p. 451).Arrivez donc! Faites vite! (Audiberti, Mal court,1947, I, p. 142).Jean-Jacques abandonna son projet et fit bien (Guéhenno, Jean-Jacques,1948, p. 123):
13. À Votre inspiration profonde, d'abord, qui me commande d'être, je répondrai par le soin à ne jamais étouffer, ni dévier, ni gaspiller ma puissance d'aimer et de faire. Teilhard de Ch., Milieu divin,1955, p. 79.
Proverbe. Bien faire et laisser dire. Ne pas s'occuper du qu'en dira-t-on.
Locutions
Faire comme chez soi. Agir en toute liberté, en toute simplicité. Péj. Agir avec trop de liberté, de familiarité.
(N')en faire (qu')à sa tête. Agir sans tenir compte de l'aide d'autrui. Vous êtes le seul élève de votre division à être externe libre. « Libre » : se lier le moins possible, faire à sa tête... (Montherl., Ville dont prince,1951, I, 3, p. 864).
Ça fait bien (de + inf.). C'est à la mode, bien porté, bien considéré (de). La Belle Angerie est si grande que nous en avions une [Chambre] pour chacun, dès l'âge le plus tendre... Ça fait bien (H. Bazin, Vipère,1948, p. 23).
Avoir beau* dire et beau faire; avoir beau* faire.
Faites donc, je vous en prie. [Formule de politesse, pour inviter quelqu'un à passer devant soi, à agir librement] .
B.− En partic.
1. Loc. [Sans compl. d'obj. subst.; désignant une action spécifique]
Avoir à faire. Avoir du travail, de l'occupation. Je m'en vais : j'ai à faire (Montherl., Ville dont prince,1951, III, 1, p. 907).
Avoir à faire à/avec. (Confusion avec avoir affaire*). Aujourd'hui, on a à faire à une expression de la nature humaine (Sartre, Existent.,1946, p. 111).Il reste que c'est avec la plus grande prudence qu'il faut user de la psychanalyse lorsqu'elle n'a pas à faire à des productions déréglées, mais aux créations supérieures de la conscience (Ricœur, Philos. volonté,1949, p. 380).
Avoir mieux à faire que de + inf. Avoir quelque chose de plus important, de plus intéressant que de. De quoi faire rigoler Hitler s'il n'avait pas mieux à faire que d'écouter nos speakers (Gide, Journal,1940, p. 21).Il ne lui vient pas à l'esprit qu'on puisse jamais avoir mieux ou plus urgent à faire que de graviter autour de lui (Martin du G., Souv. autobiogr.,1955, p. lxvi).
Faire bien, mieux de + inf. Avoir avantage à. Nous ferions mieux de descendre du trottoir un instant (Malègue, Augustin,t. 2, 1933, p. 218).On m'a parlé de lui l'autre jour. Tu feras bien de décourager ses visites (Green, Moïra,1950, p. 109).
Savoir y faire (fam.). Savoir s'y prendre (avec habileté, ruse, débrouillardise). Tu es un drôle de numéro toi. D'ailleurs, vous êtes des rigolos (...). Vous ne savez pas y faire. Il faut que je te donne des conseils (Cendrars, Main coupée,1946, p. 249).Enfin, on peut dire que tu as su y faire avec Lulu. Qu'est-ce que tu lui bouffes comme fric! (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 69).
2. Dire, exprimer, formuler.
a) Faire + subst. déterminé.[Le syntagme verbal est l'équivalent d'un verbe d'action] Faire des compliments, des injures, des reproches; faire des adieux, des remontrances. Les veux-tu? Mais j'aimerais mieux te les redonner en te faisant de vive voix des observations (Flaub., Corresp.,1853, p. 198).Ils causaient avec elle, faisant les demandes et les réponses, riant pour elle et pour eux (Zola, T. Raquin,1867, p. 176):
14. Tout en faisant des généralités, la vieille fille parlait de telle sorte que la femme de l'avoué en prit une bonne part. Ce moyen de conversation épuisé, la vieille fille ne parlait que de prêtres et d'affaires de sacristie. Champfl., Bourgeois Molinch.,1855, p. 27.
b) [En incise (souvent accompagné d'un adv.)] Dire, répondre. Fit-il, fit-elle. − Lâchez ma main, fit brutalement Steeny, et il regretta aussitôt cette inconvenance (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1546).
Pop. C'est pourtant vrai, que je lui fais, tu vas voir qu'ils vont nous cerner entre les deux étangs (Aymé, Jument,1933, p. 57).Hé dis donc! qu'elle me fait comme ça, viens voir par ici, Ferdinand! (Céline, Mort à crédit,1936, p. 209).
c) [L'obj. est un subst. ou une onomat.] Pousser, émettre. Faire des oh! et des ah! faire les hauts cris; faire chut, ouf. J'entends le petit oiseau Qui fait pi i i i! (Claudel, Annonce,1948, IV, 2, p. 212).L'infirmière fit simplement : « Ts... ts... » et s'en alla (Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948, p. 17).
C.− Effectuer (un geste, un mouvement, un déplacement).
1. [L'obj. désigne un subst. d'action] Faire un pas, un geste, une grimace, la révérence.
Au fig. :
15. Et à votre Providence enveloppante, ensuite, qui m'indique à chaque instant, par les événements du jour, le pas suivant à faire, l'échelon à gravir, je m'attacherai par le souci de ne manquer aucune occasion de monter « vers l'esprit ». Teilhard de Ch., Milieu divin,1955, p. 79.
2. [L'obj. désigne une distance, un parcours] Franchir, parcourir. Chemin* faisant; faire un voyage, un cent mètres. À la manière du philosophe Platon faisant sa randonnée autour de son idée (Chateaubr., Mém., t. 3, 1848, p. 539).En faisant le tour du jardin après déjeuner, avec le vieux fermier qui m'a vu naître (Lamart., Tailleur pierre,1851, p. 398).
Mon sang* n'a fait qu'un tour; faire son chemin*.
a) [Avec un compl. de distance] Faire x kilomètres à pied. Quatre hommes me portèrent de Paris à Chalon, en faisant six lieues par jour (Dumas père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 112).
[Pour exprimer la vitesse] Faire du 100 (km) à l'heure. Il y sera dit certainement : « Moi je fais du soixante à l'heure » (France, Pierre bl.,1905, p. 24).Il plongea dans l'auto, claqua la portière et démarra brutalement. Odette le regarda du coin de l'œil : le mieux était de se taire; il fait au moins du quatre-vingts (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 157).
b) Parcourir successivement ou visiter. Faire la Grèce, les châteaux de la Loire; faire les grands magasins. Le soir, faisant trois, quatre théâtres, courant les foyers, les corridors (Goncourt, Journal,1861, p. 976).Bien sûr, ils ne comptaient pas faire toute la foire, seulement quelques pas devant les premières baraques (A. Daudet, Rois en exil,1879, p. 2).Les fiancés allaient danser. Nous fîmes tous les dancings d'Anvers (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 83).
Pop. ou arg. Effectuer l'inspection de, examiner pour fouiller, voler. Faire le portefeuille de qqn; faire les poubelles :
16. Il [Michel] les épaterait bien, les copains! (...) il pourrait « leur payer un verre » (...) sans pour cela avoir besoin de faire les poches de Flavien... Vialar, Éperon arg.,1952, p. 226.
Dévaliser, cambrioler. Faire une banque, un joaillier. J'ai moi-même été fait d'une somme de 60 frs par un individu (Lucas, Dangers prost.,1841, p. 65):
17. À un moment donné, les naïves étrangères, notamment les riches Américaines, qui fréquentent les dancings, étaient « faites » de la façon suivante : un indicateur et danseur mondain leur volait adroitement leurs bijoux... L. Daudet, Police pol.,1934, p. 154.
c) En partic.
Effectuer l'ascension de. Chamonix est à quelques heures de Genève, je ferai le Mont-Blanc avant lui [Costecalde]! En êtes-vous, mes enfants? (A. Daudet, Tartarin Alpes,1885, p. 218).
Faire le trottoir*. Faire le mur*. Faire la queue*.
3. [L'obj. désigne une partie du corps]
a) Prendre, montrer, offrir (un air, une expression). Faire bon visage*, grise* mine, les yeux doux*; faire le gros dos*; faire la tête* (fam.), la gueule* (pop.).
Loc. verb. Faire contre mauvaise fortune bon cœur*; faire bonne mine* en mauvais jeu.
b) Faire de l'/du + subst. (à qqn). Faire signe de (pour exprimer un signe de connivence avec quelqu'un et entrer en contact avec lui). Faire du coude, du genou, de l'œil, du pied à qqn.
4. [L'obj. précédé de l'art. déf. désigne un exercice phys.] Faire la planche*, le pont*, le poirier*, la roue*, le grand écart*.
D.− Exercer (une activité suivie de façon régulière), employer son temps à. Ils feront des heures supplémentaires qui leur seront comptées plus tard dans le royaume de mon père (Prévert, Paroles,1946, p. 35).Le pharmacien qui herborise et qui fait de la radiesthésie (Abellio, Pacifiques,1946, p. 101):
18. − Que faites-vous l'hiver dans l'île? − Nous tressons des filets, nous pêchons les étangs, en faisant des trous dans la glace; le dimanche nous allons à la messe et aux vêpres, où nous chantons des cantiques; et puis nous jouons sur la neige et nous voyons les garçons chasser les ours blancs. Chateaubr., Mém.,t. 1, 1848, p. 269.
1. Domaine scol. et universitaire.Faire des études*, faire l'école buissonnière*; faire un doctorat, une licence.
En partic.
Faire + art. partitif + subst.Étudier, pratiquer (une matière, une discipline). Faire des maths :
19. − Personne ne t'oblige à faire de la chimie. C'est pour nous offenser que Nadine avait choisi la chimie, elle n'en était que trop punie. − Ce n'est pas la chimie qui m'emmerde, dit-elle, c'est d'être étudiante. Beauvoir, Mandarins,1954, p. 59.
Faire + adj. poss. + subst.Suivre le cycle de. Il [Jean] avait fait ses classes avec soin, pour n'être pas puni, et terminé ses études de droit avec régularité (Maupass., Pierre et Jean,1888, p. 403).J'ai fait mes trois premières années de médecine. La mort de mon père a interrompu mes études (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 54).Antonho Prado (...) frais émoulu de la Sorbonne, où il était venu faire son droit (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 344).
Faire + subst. désignant une école.Suivre les cours de. Faire les Beaux-Arts, Navale, Polytechnique. Passé leurs bachots (...) elles feraient l'École du Louvre ou la Croix-Rouge (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 152).
2. Domaine prof.
a) Fam. ou région. Faire dans. Travailler dans, pratiquer le commerce de. Faire dans les cuirs.
b) Pratiquer (un métier, une discipline). Que faites-vous dans la vie? Faire du journalisme. Parce qu'il gagne à peu près sa vie en faisant du commerce (Champfl., Avent. MlleMariette,1853, p. 230).Aurez-vous jamais fini de faire la classe? − Je ... suis... professeur, Madame Marchal (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1545).Brunet se demande ce qu'il peut faire dans le civil. Petit commerçant? Employé? (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 202).
c) Vendre. Faire le gros, le demi-gros, le détail. Je ne me connais pas en toile; mais pour les draps j'en réponds. Seulement, si je fais les draps, il me faut un voyageur; car c'est de Sedan et d'Elbeuf que viennent les meilleures sortes (A. Daudet, Fromont jeune,1874, p. 153):
20. La marchande s'anime à son tour. Elle sait très bien ce que veut la cliente, elle a possédé l'article mais, depuis trois ans, on ne le fait plus; ce modèle-ci est plus récent, plus avantageux... Sartre, Mots,1964, p. 202.
3. Domaine du sp., des loisirs.[L'obj. est un subst. précédé de l'art. partitif] Pratiquer, s'adonner à.
a) [L'obj. désigne un sp., une discipline] Faire de la musique, du tennis. J'ai connu plusieurs femmes distinguées qui disaient ne pouvoir bien penser, ni bien causer, qu'en faisant de la tapisserie (Michelet, Peuple,1846, p. 24).
[L'obj. désigne l'instr.] Faire du ski, du vélo, de la voile. Il y a un petit prêtre qui fait de la bicyclette (Claudel, Poés. div.,1952, p. 877).
b) [L'obj. désigne une activité] Faire du camping, du tourisme, du sport.
Faire de l'exercice. Se dépenser, marcher. Travaillant toujours, sortant peu, ne faisant presque pas d'exercice, moi qui marchais tant autrefois (Hugo, Corresp.,1852, p. 73).Qu'il bouge, qu'il se promène, qu'il fasse de l'exercice (Mounier, Traité caract.,1946, p. 335).
4. Domaine pol. et soc.Faire de la politique, de l'opposition, du social.
E.− Exécuter (une prescription, une obligation); accomplir le temps prescrit pour. Faire son devoir; faire ses Pâques; faire pénitence; faire la volonté de Dieu; faire un régime; faire de la prison; faire son service militaire. Elle a des principes, elle fait maigre (Balzac, Autre ét. femme,1842, p. 383).Karlsbad, où j'avais été faire une cure, pour soigner je ne sais plus trop quoi (Gide, Ainsi soit-il,1951, p. 1197).
21. − Tu vois, me dit-elle d'une voix triomphante. Tu compliques toujours tout. D'abord, Lambert est toujours content de faire ce que je lui demande, c'est un bon petit garçon... Beauvoir, Mandarins,1954, p. 333.
P. ext. Faire les caprices, les fantaisies, les quatre volontés de qqn. Céder à (la volonté, aux désirs de quelqu'un). Vous n'ordonnez jamais que le cœur n'obéisse (...). On fait toujours le bien, en faisant son caprice (Lamart., T. Louverture,1850, III, 7, p. 1335).
F.− Être la cause (directe ou indirecte) de, l'agent de.
1. [Le suj. désigne une pers.] Causer, provoquer, susciter.
a) [L'obj. désigne un inanimé concr.] Faire du bruit, faire une blessure à qqn. Il fallait, dès le seuil de la porte, les lancer [les casquettes] sous le banc, de façon à frapper contre la muraille, en faisant beaucoup de poussière (Flaub., MmeBovary,t. 1, 1857, p. 2).Ils chantaient tous en chœur et faisaient un boucan de tous les diables (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 326).Un de nos critiques nous fustigeait du proverbe chinois : « Ce qui fait du bruit ne fait pas de bien, ce qui fait du bien ne fait pas de bruit » (Schaeffer, Rech. mus. concr.,1952, p. 73).
b) [L'obj. désigne un inanimé abstr.] Faire du bien, du mal; faire mal à. Je ne suis plus seulement capable de faire mal à une mouche (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1453).Et cela avait suffi pour lui faire une petite réputation dans le monde restreint du théâtre et lui susciter déjà des jalousies (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 69).
Loc. verb.
Faire envie, mal, peur, pitié, sensation :
22. Clark (...) me fait très bonne impression. Non seulement parce qu'il dit avec netteté ce qu'il a à dire, mais aussi parce qu'il demeure simple et droit dans l'exercice du commandement. De Gaulle, Mém. guerre,1956, p. 269.
Faire les délices, les beaux jours de. Néron tuant sa mère et Titus faisant les délices du genre humain (Lacord., Conf. N.-D.,1848, p. 182).
Faire qqc. à qqn. Lui faire du mal, mal agir envers lui, lui causer du tort. Qu'est-ce qu'ils pourraient bien lui faire? Qu'est-ce que je t'ai fait? Qu'est-ce que j'ai fait à Dieu pour avoir mis au jour un fils si coupable! (France, Révolte anges,1914, p. 3).« Qu'est-ce qu'ils t'ont fait, mon pauvre vieux? Tu n'as pas l'air de les avoir à la bonne. » « Ils ne m'ont rien fait, dit Brunet sèchement. Mais je les entends » (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 212):
23. Ils étaient trop, il ne pouvait rien contre eux; ils étaient tous d'accord − eux qui étaient divisés sur tant de choses − pour l'outrager et l'écraser. C'était plus que de l'incompréhension : il y avait de la haine. Que leur avait-il donc fait à tous? Rolland, J.-Chr.,Révolte, 1907, p. 506.
Proverbe. Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fît.
2. [Le suj. désigne une chose]
a) Produire un effet, entraîner des conséquences. Rien n'y fait, cela ne fait rien à la chose. Ça me fera du bien. Cela me sera bénéfique. Le changement d'air lui fera du bien à cette petite (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 133).Attends, petit, j'ai son nom sur les lèvres..., Terra..., Terra..., marquis de Terranova..., de Terrasecca, ... rossa, ... puzzosa, non, ce n'est pas cela, cela ne me revient pas, ça n'a aucune importance, le nom ne fait rien à l'affaire (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 150).Et quand nous serions dans la rue, quand même tu me prendrais dans la rue, qu'est-ce que cela peut faire? Que veux-tu que cela fasse? (Gracq, Syrtes,1951, p. 182).
Familier
Faire un coup à qqn. L'impressionner, le bouleverser. Elle pensa : « Le pauvre vieux, ça va lui faire un coup, tout de même » (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 192).
Ça me (te, lui, etc.) fait une belle jambe*.
Ça lui fera les pieds*.
Ça fait des histoires. Cela entraîne des complications ou des réactions hostiles. Il regrettait le temps où elle râlait en silence (...) ça faisait moins d'histoires (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 59).
Grand bien lui fasse! (souvent p. iron). Que cela lui soit profitable. Je marie Fortuné. Séverin. − J'en suis heureux et que grand bien lui fasse (Camus, Esprits,1953, III, 9, p. 519).
b) Être important :
24. ... on ne peut dire que de tels travaux soient inutiles. Car ils font pour la connaissance des langues anciennes, et la connaissance des langues anciennes fait pour la philosophie de l'esprit humain. Renan, Avenir sc.,1890, p. 244.
Cela ne fait rien
C'est sans importance, je n'y attache pas d'importance. Croyez-vous que ce soit bien une conversation à tenir devant cette enfant? dit la baronne Schoudler (...). L'accouchée tourna légèrement la tête et lui sourit. − Ça ne fait rien, ma mère, ça ne fait rien, murmura-t-elle (Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948, p. 13).
Synon. de peu importe.Il t'nait pas à les voir! Est-ce que j'y tenais, moi? Seulement, ça fait rien, je m'figurais pas la guerre comme ça (Benjamin, Gaspard,1915, p. 74).
Qu'est-ce que cela peut (bien) me/te faire? En quoi cela me/te concerne-t-il? T'as pas l'air de tenir à savoir si je l'ai tué ou non, le petit gars? − Qu'est-ce que ça peut bien me faire, mon amour? (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1480).Son égoïsme lui crée une sorte d'invulnérabilité. Il oppose à tout l'avenant un : « Qu'est-ce que cela peut bien me faire? » (Gide, Journal,1943, p. 167):
25. louise. − Mais la foi, comment vous est-elle venue? clérambard. − Que voulez-vous que ça me fasse? J'ai la foi. Je ne veux rien savoir d'autre. Peu importe d'où elle me vient. Je crois en Dieu, je crois en Notre Seigneur, je crois à saint François d'Assise. Aymé, Cléramb.,1950, IV, 5, p. 216.
Si cela ne te/vous fait rien (formule de politesse). Si cela ne te/vous dérange pas. Si cela ne te fait rien, je vais continuer mon travail. J'ai à finir la lecture de Roméo et Juliette (Green, Moïra,1950, p. 82).
Ça ne vous fait rien que...? Ça ne vous dérange pas que...? Mais dites donc, Madame Codomat, ça ne vous fait rien que votre mari soit tout le temps avec cette jeune femme? (T. Bernard, M. Codomat,1907, II, 3, p. 161).
Cela ne me/lui etc. fait ni chaud* ni froid.
3. Faire que + complétive.
a) À l'ind. Avoir pour résultat que. Sa négligence a fait que... Salammbô n'en racontait pas davantage (...) par un excès de candeur faisant qu'elle n'attachait guère d'importances (sic) aux baisers du soldat (Flaub., Salammbô,t. 2, 1863, p. 87).« Lois de la représentation », qui font que nous ne pouvons penser l'être qu'en l'objectivant (J. Vuillemin, Essai signif. mort,1949, p. 71):
26. ... tous obligés à protéger leur secret, mais ayant leur part d'un secret des autres que le reste de l'humanité ne soupçonne pas et qui fait qu'à eux les romans d'aventure les plus invraisemblables semblent vrais... Proust, Sodome,1922, p. 617.
[Reprenant une question incluant le verbe faire] Qu'est-ce que j'ai fait? − Tu as fait que tu nous as laissés.
Fam. Ça fait que; ce qui fait que. C'est pour cela que, c'est la raison pour laquelle. Synon. voilà pourquoi.Une pièce toute noire, on n'y voyait pas... Ça fait que je ne sais pas si elle pleurait ou si elle se taisait pour ne pas parler... (Goncourt, Journal,1879, p. 35).Je ne songe plus qu'à ce que je veux enfanter; peut-être est-ce là ce qui fait que tout le reste m'insupporte (Gide, Corresp.[avec Valéry], 1892, p. 156).
b) Au subj. Les circonstances peuvent faire un jour que vous soyez commis à la garde de ce pacte (Gracq, Syrtes,1951, p. 149).
[Pour exprimer un souhait] Dieu fasse que, fasse le ciel que... Fasse le ciel que la jeunesse d'aujourd'hui (...) se montre aussi sage qu'elle sera ardente (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 2, 1823, p. 52).Enfin, Dieu fasse que cela tourne bien! (Camus, Chev. Olmedo,1957, 2ejournée, 1, p. 754).
4. Faire en sorte* de + inf.; faire en sorte* que + compl.
5. Laisser* faire.
G.− [Le suj. désigne une pers. ou une chose; l'obj. est un subst.] Présenter (un aspect physique, extérieur).
1. Former naturellement. Faire un angle, une bosse, des plis. Synon. constituer.Moustaches tristes, yeux faisant la virgule à l'angle extérieur (Chateaubr., Mém.,t. 1, 1848, p. 408).Dorothée (...) s'avance dans la rue déserte (...), faisant sur la lumière une tache éclatante et noire (Baudel., Poèmes prose,1867, p. 117):
27. La vallée se prolongeait, tantôt faisant des coudes, tantôt s'étranglant en défilés, selon que les blocs et les mamelons de la chaîne bifurquée faisaient saillie ou retraite. Gautier, Rom. momie,1858, p. 159.
[Dans des loc. verb., faire + subst. non déterminé] Jouer le rôle de, rappeler par sa forme, tenir lieu de. De jolies maisons de campagne, quelques-unes faisant châteaux, s'étalaient sur les collines (Michelet, Journal1839, p. 301).Mal abritée sous un petit acacia faisant dôme, elle regardait tristement la pluie qui commençait à mouiller sa robe (Murger, Scènes vie boh.,1851, p. 145).Rodolphe s'assit brusquement à son bureau, sous la tête de cerf faisant trophée contre la muraille (Flaub., MmeBovary,t. 2, 1857, p. 41).
Faire tapisserie*.
Au fig., fam. Ça ne fait pas un pli*.
2. GRAMM. Avoir pour variante morphologique ou syntaxique. « Cheval » fait au pluriel « chevaux »; « faire » fait à la 3epersonne de l'indicatif présent « font ».
3. [Pour exprimer une mesure de l'espace ou du temps]
a) [Dimensions, poids, prix, volume, etc.] Équivaloir à, égaler. Le bassin fait 10 m de long. Songez qu'à nous deux (...) nous ne faisions pas trente-quatre ans (A. Daudet, Pt Chose,1868, p. 226).Tous comptes faits, l'emprunt de la Libération produit 165 milliards qui en feraient 1 200 d'aujourd'hui (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 37).
b) Domaine de l'habillement.Mesurer. Vous faites du combien? Quelle pointure, quel tour de taille faites-vous?
c) Avoir une durée de, être en usage pendant + compl. de temps. Ce manteau m'a fait trois ans, il fera bien encore la saison. Qui pourrait supputer ou peser ce qu'il entre D'aliments, de boissons, au gouffre de son ventre? Un cachalot lui fait six jours, quelquefois sept (Pommier, Colifichets,1860, p. 177).
d) [Pour exprimer la durée écoulée, à partir d'une date fixe] Ça fait x temps que... Synon. de il y a, depuis.Il n'avait jamais voulu prendre la montagne et c'est après lui que je l'ai prise. Ça fait donc quinze ans maintenant (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 196):
28. Et depuis combien de temps dure cette... liaison? (...). − Trois mois, répondit-elle. − Et il y a trois mois que tu es dans cet état? − Non. Ça doit faire six semaines. Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948, p. 126.
e) [Pour exprimer une fréquence] Cela fait. C'est. S'il n'est pas arrivé, me dis-je, c'est que le métro est encore en panne; d'ailleurs, cela fait la troisième aujourd'hui. On dirait que c'est un fait exprès (J. Vuillemin, Essai signif. mort,1949, p. 125).
4. Domaine phys. et psychique.[L'obj. désigne une maladie, un trouble phys. ou psychique] Faire une bronchite; faire de la température; faire une dépression, de la neurasthénie; faire de la tension. Mon premier malade fut un cancéreux d'une maigreur effroyable qui « faisait » − comme on disait − des troubles cérébraux (L. Daudet, Dev. douleur,1931, p. 60):
29. Et la réaction individuelle, ici encore, est capitale : on peut gaver certains types maigres, ils ne grossiront guère, d'autres feront de l'embonpoint avec le régime le plus strict... Mounier, Traité caract.,1946, p. 126.
Faire des complexes*; faire un rêve, un cauchemar.
Loc. fig. En faire une maladie*. Cf. infra III D 2 a.
III.− Déterminer (quelqu'un/quelque chose) dans un état, une qualité, une manière d'être ou d'agir. [L'existence de ce qui est désigné par l'obj. est présupposée]
A.− [Le suj. désigne une pers.; l'obj. désigne un inanimé concr.] Mettre, remettre en état, en ordre.
1. Loc. verb.
a) Domaine des tâches domestiques.Faire les cuivres*, faire un lit*, faire sa valise*. (Quasi-)synon. nettoyer, arranger.
Faire une chambre, une pièce. La nettoyer, la remettre en ordre. Faire sa chambre à fond. Le domestique, en faisant les chambres, redescendait les bougeoirs (Duranty, Malh. H. Gérard,1860, p. 319).
Faire ses chaussures. Les nettoyer, les cirer.
Faire la vaisselle. La laver, l'essuyer. Un après-midi, j'aidais maman à faire la vaisselle; elle lavait des assiettes, je les essuyais (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 105).
b) Domaine des soins de beauté.Synon. entretenir, embellir, soigner.
Faire la barbe (à qqn). Tailler, raser la barbe. En me faisant faire la barbe, devant moi un bocal (Goncourt, Journal,1858, p. 442).
Faire les mains, les ongles à qqn. Synon. manucurer (fam.).Elle s'assied et fait ses ongles (Laforgue, Moral. légend.,1887, p. 232).Il a demandé un bain aux Allemands, il s'est rasé, s'est fait faire les mains (Anouilh, Répét.,1950, I, p. 21).
Emploi pronom. réfl. indir. Se faire les yeux. Se maquiller (les yeux). Elle [l'enfant prodige] était en train de se faire les yeux; elle ne s'est même pas retournée (Colette, Music-hall,1913, p. 189).Je m'étais lavé les mains et fait les ongles, j'avais mis un col propre (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 58).
c) Domaines divers.[Faire remplace, notamment ds la lang. fam., un verbe d'action plus précis] Alors, elle si discrète [Martine], parla de ses travaux de jardinage, dit qu'elle trouvait le temps de faire les légumes, afin d'éviter quelques journées d'homme (Zola, Dr Pascal,1893, p. 150).Être là un peu avant deux heures pour m'aider, comme elle aurait dit à des maîtres d'hôtel extras d'arriver d'avance pour faire les compotiers (Proust, Guermantes 1,1920, p. 216).Un fantassin, au retour des cuisines allemandes où il avait été « faire les peluches » (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 43).
SYNT. Faire le col (d'une chemise). Le repasser. Faire son jardin. Le cultiver, l'entretenir. Faire la vigne. La tailler, lui donner les soins nécessaires. Faire les rosiers. Les tailler.
2. Domaine culinaire.Apprêter, préparer, faire cuire ou chauffer (un plat, un repas). Faire un bœuf bourguignon, un œuf sur le plat, du veau. Ce fut la concierge qui vint lui faire son petit déjeuner et ouvrir les fenêtres (Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948, p. 172):
30. ... elle se met déjà à vous parler de sa vieille maman qui est si seule et avec qui il faudra être bien gentil, des petits plats qu'elle sait si bien faire, du prénom qu'aura son bébé. Anouilh, Répét.,1950, IV, p. 108.
Faire la salade. La laver, l'assaisonner.
B.− [L'obj. désigne une pers.] Former. Faire des soldats, des hommes, de bons élèves. Synon. éduquer, instruire :
31. Les Lanson croient nous avoir répondu quand ils disent : c'est entendu, nous ne vous fournissons pas des élèves qui aient du génie, mais connaissez-vous une méthode pour faire des hommes de génie? Barrès, Cahiers,t. 8, 1910, p. 143.
C.− Donner une qualité, un caractère, un état à.
1. Faire qqn + subst. (attribut de l'obj.) non déterminé.Élever au rang de, donner le titre, la dignité de. Faire qqn héritier, chevalier de la Légion d'honneur. Synon. nommer, instituer, constituer.En le faisant roi, on l'avait condamné à mourir sur le sol où s'est mêlée la poussière de saint Louis et de Henri IV (Chateaubr., Mém.,t. 3, 1848, p. 650).Le jeune marquis avait cru s'acquitter envers sa femme en la faisant marquise (Sandeau, Sacs,1851, p. 46).
P. ext. Rendre, faire devenir. Cette aventure me fait homme (Ricœur, Philos. volonté,1949, p. 179).
Faire qqn juge de. Laisser à quelqu'un le soin de juger, d'apprécier.
2. Faire qqn + adj. (attribut de l'obj.)
a) Rendre, faire devenir. Faire qqn riche. « Merci, mon bon Monsieur, merci (...). Vous êtes très bon. Je prierai la Sainte Vierge de vous faire très heureux » (Ségur, Auberge ange gard.,1863, p. 10).C'est dimanche, à l'heure du déjeuner, qu'on s'est aperçu que les petites manquaient. Je les avais faites belles pour la messe de huit heures (A. Daudet, Sapho,1884, p. 120).
b) [L'attribut est un adj. poss.] Faire sien qqc. S'approprier, se rendre maître de; adopter (un jugement, un point de vue, une attitude). Un étude à laquelle a procédé le général de Larminat et dont je fais miennes toutes les conclusions (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 448).Je déterrai cette religion féroce et je la fis mienne pour dorer ma terne vocation (Sartre, Mots,1964, p. 148).
En emploi abs. Consentir c'est prendre sur soi, assumer, faire sien (Ricœur, Philos. volonté,1949, p. 322).
c) Représenter, donner comme. Ne le faites pas plus méchant qu'il n'est :
32. Mais l'autre quart chez Montaigne a donné l'éveil; en mettant expressément à part la religion, en la faisant si grande et si haute, et la voulant si fort révérer, qu'il lui coupe toute communication avec le reste de l'homme, il s'est trahi... Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 2, 1842, p. 413.
3. Faire qqc. (à) + compl. de prix.Je vous fais cet article (à) 50 F. Synon. évaluer à, fixer à.
Faire un prix* (d'ami). Fixer un prix. Si le commerce était mieux fait, c'est le client qui devrait faire son prix (Aymé, Cléramb.,1950, I, 7, p. 52).
4. Faire qqc. + adj. (attribut de l'obj.) à qqn.Rendre. Je lui faisais la vie impossible (Laforgue, Moral. légend.,1887, p. 240).Et je ne veux point vous faire le cœur dur à la mort (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 791).
5. Faire + adj. substantivé.Causer, entraîner. Faire des jaloux, des mécontents. Ainsi elle traversait sa jeunesse, l'esprit flottant à tous les vents de l'imprévu, faisant beaucoup d'heureux (Murger, Scènes vie boh.,1851, p. 236).
D.− Faire qqn/qqc. de (qqn/qqc.).Changer, transformer en passant d'un état à un autre.
1. [L'obj. désigne une pers.] Faire d'un capitaine un commandant; nous en ferons un médecin; vous en avez fait un monstre, un enfant gâté. Mais que je prenne en main cette petite aristocrate (...), et je vous en ferai une vraie Carmélite, aussi bonne à la chapelle qu'au lavoir (Bernanos, Dialog. Carm.,1948, 3etabl., 3, p. 1618).La famille de Gouvon qu'il servait avait reconnu sa valeur. Elle voulait en faire un secrétaire, lui faire apprendre l'italien, le latin (Guéhenno, Jean-Jacques,1948, p. 51):
33. Quand un homme choisit une jeune fille pour en faire sa femme, c'est qu'il a été sensible à certaines séductions qui ne sont pas toutes du cœur ni de l'esprit. Aymé, Cléramb.,1950, II, 8, p. 116.
2. [L'obj. désigne une chose]
a) Faire d'un métal une médaille; faire qqc. de rien :
34. Mais un vent sort des cieux sans bornes, Grondant comme les grandes eaux, Et souffle sur ces pierres mornes, Et de ces pierres fait des os... Hugo, Contempl.,t. 3, p. 407.
Faire un drame, une histoire, une maladie, une montagne (de qqc.). Dramatiser la situation, s'affliger ou s'affoler démesurément de quelque chose. Il fait un monde de rien et soupçonne un cancer dans chaque cor au pied (Camus, Cas intéress.,1955, 1ertemps, 2etabl., p. 627).
Loc. fig. et/ou proverbes. Faire d'une pierre deux coups*; faire feu*; faire flèche* de tout bois; faire ses choux* gras de; faites en des choux* et des raves*; en faire sa chose*; faire des gorges* chaudes de; ne faire qu'une bouchée* de. On ne saurait faire d'une buse un épervier. On ne peut faire d'un sot un homme habile (Ac.). Faire d'une mouche, d'une puce un éléphant. Grossir exagérément la portée d'une affaire, dramatiser une situation. Faire de nécessité* vertu.
b) Utiliser comme, aménager en. Faire un salon d'une salle à manger; faire un hôpital d'un bâtiment privé; faire un parc public d'un jardin privé. De la source, sa cuvette, La fleur, faisant son miroir, Dit : « Bonjour », à la fauvette (Hugo, Contempl.,t. 1, 1856, p. 107).« Des assiettes! » dit-il en désignant une pile d'assiettes ébréchées au fond noirci. « Qu'est-ce que vous voulez en faire? Les manger? » (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 223).
Emploi pronom. Se servir de quelque chose comme de. Des écureuils circulaient sur les branches (...) en se faisant un pavillon de leur queue (Chateaubr., Mém.,t. 3, 1848, p. 68).J'ai aperçu le traître Eusévio dans les fourrés de la montagne. C'est en vain qu'il se fait un rempart de ces rochers (Camus, Dév. croix,1953, p. 579).
3. [Dans un cont. interr.]
a) [L'obj. indir. désigne une pers.] Qu'avez-vous fait de lui? Sobres et vertueux, − de vrais sauvages... − Que faire d'eux? soupirait ma mère. Ils étaient si doux que nul ne les pouvait atteindre ni diviser (Colette, Sido,1929, p. 130):
35. Que dois-je faire des coupables, Herr Sonderführer? − Mais... les laisser continuer, puisqu'ils n'ont commis ni contravention à l'ordre de l'OKW relatif aux rapports des prisonniers avec les femmes allemandes, ni manquement au travail, ni attentat public à la pudeur! Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 212.
b) [L'obj. indir. désigne un inanimé] Qu'est-ce que j'ai fait de mes lunettes? Où les ai-je mises?
E.− Représenter, tenir la place de.
1. [Le suj. désigne une pers.]
a) Domaine des loisirs.Représenter (un personnage), tenir le rôle de.
α) Domaine du spectacle.Faire Esther, les soubrettes. Je changeai vite de costume, et, faisant l'apothicaire, je commençai l'intermède, en brandissant l'instrument classique au-dessus de ma tête (Sand, Hist. vie,t. 3, 1855, p. 240).Je connais la pièce par cœur. Je l'ai jouée autrefois avec Monsieur de Molière : c'est moi qui faisais don Diègue (Claudel, Raviss. Scapin,1952, p. 1317):
36. Ces scènes de la vie de couvent [dans le film de Bresson « Les Anges du Péché »] les ont transportées et non contentes de nous les décrire, elles se sont mises en tête d'en jouer une devant nous. Louise faisait la mère supérieure... Green, Journal,1946, p. 20.
β) Domaine des jeux d'enfants.Faire le chat, le gendarme, le loup, les voleurs.
γ) Domaine des jeux de société.Faire le mort*. Me rendre utile et agréable aux maîtresses de maisons en faisant le quatrième de quelque table boiteuse de joueuses et de joueurs dépareillés (Lamart., Confid.,1851, p. 80).
b) Exercer les fonctions, la responsabilité de.
α) [L'activité est permanente, régulière] C'est que jamais un militaire, poursuivit-il, n'a été fichu de faire un bon ministre de la guerre (Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948, p. 139).Il se mariera un jour, par coup de tête; et peut-être il fera un bon père de famille (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 293):
37. Mon fils, il fait le couillon. Il fait le berger. C'est comme ça. Dans ce village, et dans les autres, il y a des enfants d'épiciers ou de simples charcutiers qui passent le bachot pour être colonels. Moi, le mien, il fait le berger. Je n'en rougis pas. Audiberti, Femmes Bœuf,1948, p. 118.
Pop. Faire + subst. non déterminé.Faire professeur. Y veut faire soldat dedans l'aussiliaire (Musette, Cagayous poilu,1919, p. 2).
β) [L'activité est occasionnelle] Faire le domestique. Je faisais le nègre à la Mazarine, copiant à la main (...) les épais romans de chevalerie (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 380).Tu trouveras aussi des verres. Tu nous sers; tu fais la jeune fille de la maison (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 126).
c) Imiter intentionnellement, chercher à passer pour. Synon. contrefaire, imiter, simuler.
α) Faire le + subst. ou adj. subst.Faire le difficile, le dégoûté, l'idiot, l'innocent, le pitre, le malade. Tous les anges du Bon Dieu viendront et ils me diront : « Allons, viens, Alonso, viens, ne fais pas le méchant ». Et moi, je dirai « non » (Camus, Révolte Asturies,1936, II, 3, p. 418).Cela se raidit, cela fait la fière, cela veut se conduire comme une vraie dame (Anouilh, Répét.,1950, IV, p. 110).Que vous ne travailliez pas et fassiez le pantin devant la glace, c'est votre affaire! (Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 119):
38. ... jamais Charles ne lui paraissait aussi désagréable (...). Alors, tout en faisant l'épouse et la vertueuse, elle s'enflammait à l'idée de cette tête dont les cheveux noirs se tournaient en une bouche vers le front hâlé... Flaub., MmeBovary,t. 2, 1857, p. 26.
Faire le jeune homme. Être galant, se donner un air jeune. Alors il va faire le jeune homme dans les bals costumés? (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Masque, 1889, p. 1163).
Faire la princesse. Prendre de grands airs. Notre Mélancolie est petite-maîtresse, Elle prend des grands airs, elle fait la princesse (Gautier, Poésies,1872, p. 214).
[Loc. verb. au fig., où le compl. désigne un animal symbolique] Faire le singe, le zèbre. C'est étonnant comme il fait le paon, papa, avec cet hôtel (Maupass., Bel-Ami,1885, p. 33).Lâche-moi, nom de Dieu, ou je fais la vache (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 114).Doña Inès. − Ne m'a-t-il pas écrit? Tello. − Quel âne je fais! voici la lettre, Madame (Camus, Chev. Olmedo,1957, 2ejournée, 10, p. 772).
Proverbe. Qui veut faire l'ange* fait la bête.
Rem. Lorsque le suj. est fém., faire peut être suivi néanmoins de le. Elle fait le/la bravache.
β) Faire son/sa + subst.Faire sa mijaurée, son petit malin. Le baron préférait faire son lézard au soleil sur le galet (Maupass., Une Vie,1883, p. 36).
d) Loc. verb. Faire semblant* (de), mine* (de).
Faire celui qui, comme si. Jouer à celui qui, simuler. La consigne universelle, la ridicule fiction est de faire comme si on ne savait rien, quoique tout le monde sache très bien à quoi s'en tenir; chacun joue la comédie, chacun affecte de croire le vieillard immortel, le malade guérissable (Jankél., Je-ne-sais-quoi,1957, p. 172).
En emploi abs. Partout, l'on triche. Partout, l'on fait comme si... C'est insupportable. C'est horrible (Audiberti, Mal court,1947, III, p. 185).
2. [Le suj. désigne un inanimé] Tenir lieu de, faire aussi office de. Salle à manger qui fait salon, cuisine qui fait salle de séjour. Au fond, dans le logis « faisant hôtel », une « comtesse » (Proust, Guermantes 1,1920, p. 16).
F.− Paraître, sembler.
1. Faire + adj. ou subst. non déterminé (gén. inv.)Avoir l'air de, donner l'impression de. Elle fait vieux/ vieille pour son âge; faire jeune, grand; faire très vieille France; faire très femme; faire sérieux, vrai. Ricarda, lui, faisait très « fils de bourgeois » (Abellio, Pacifiques,1946, p. 29).Il faisait très orphelin dans son complet de flanelle dont le revers était barré d'un crêpe noir (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 294):
39. Ils choisissent de préférence des sujets tirés de l'histoire sainte ou de l'histoire ancienne, et ils parlent constamment de faire distingué, comme si la distinction ne venait point de la manière dont on traite un sujet et non du sujet lui-même. Tenez que la plupart n'ont reçu aucune éducation, qu'ils n'ont rien vu et rien lu, que « faire distingué », pour eux, c'est tout bonnement ne pas faire vivant et ne pas faire vrai. Huysmans, Art mod.,1883, p. 8.
Ne pas faire son âge. Paraître très jeune, plus jeune que son âge réel.
2. Faire + adv. de manière (fam.).Produire tel effet, avoir telle allure. Faire bien (dans le décor, le tableau), sur une photo, dans un film. Les serviteurs à tête blanche font bien dans une grande maison (Augier, Pierre de Touche,1854, III, p. 80).Tes vieux messieurs à col dur? Ils feraient très bien dans les vitrines du Musée de l'Homme (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 91):
40. Lequel fait mieux, des fleurs ou bien des plumes blanches? Quelle parure sied? − quelle couleur va bien? Gautier, Albertus,1833, p. 138.
IV.− Emplois partic.
A.− Emplois pronom. spécifiques. V. faire2(se).
B.− Emplois impers.
1. [Suivi d'un adj. ou d'un subst. gén. non déterminé; pour indiquer ou suggérer des conditions météor., climatiques ou un moment de la journée ou de la nuit]
a) Faire + adj.Il fait chaud, clair, doux; il fait noir comme dans un four. Mets ton collet, il fait plus frais (Mauriac, Myst. Frontenac,1933, p. 90).L'homme est arrivé à créer, parmi les grandes eaux froides et noires, une zone habitable où il fait à peu près clair et chaud (Teilhard de Ch., Milieu divin,1955, p. 172).
Au fig. littér. Je savais pourtant combien il peut faire noir dans un cœur (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 248):
41. Il fait bleu il fait bon Il fait aujourd'hui Il fait bon il fait bleu Et je suis née juste aujourd'hui Si vous voulez savoir mon nom Mon nom est Iris bleu! Claudel, Poés. div.,1952, p. 743.
b) Faire + subst.Il fait presque jour; il fait nuit (noire); il fait (du) soleil, du brouillard, une chaleur torride, un beau soleil; quel temps fait-il? Il ne faisait pas de lune ni d'étoiles. Mais une sorte de lumière diffuse et l'air était si épais qu'on l'aurait coupé au couteau (Barrès, Cahiers,t. 7, 1908, p. 71).A cinq heures (...) quelque temps qu'il fasse, MmeLouise descend au village avec la bonne (Bernanos, Mauv. rêve,1948, p. 1004).
P. anal., fam. Il fait faim, soif. J'ai/nous avons faim, soif. Il fait soif à bord (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 232):
42. ... quand, à la maison, il faisait faim, c'est toi qui chantais encore (...) et nous donnais le courage de chanter, nous aussi! E. de Goncourt, Faustin,1882, p. 33.
2. Il fait bon/mauvais (à/de) + inf. Il est agréable/ désagréable, dangereux de; cela fait du bien/ne fait pas de bien de. Auprès de ma blonde, qu'il fait bon dormir (vieille chanson française). Que la forêt était belle sous le soleil d'avril! Qu'il faisait bon à respirer, loin des baraques fétides et des sueurs recuites! (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 367).Il [le loriot] dit qu'il fait bon labourer (Claudel, Annonce,1948, I, 3, p. 160):
43. Le remblai, jusqu'au bout cette fois, y compris la maison du docteur Bellamy qui était le type même de ces demeures que les passants regardent avec envie en pensant : − Qu'il doit donc faire bon y vivre... Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 25.
3. Il ferait beau* voir.
C.− Emplois factitifs. V. faire3.
D.− Emplois passifs
1. Locutions
Ce qui est fait. Il n'y a plus à y revenir, n'en parlons plus (en parlant généralement d'une action regrettable). « ... un ennemi de notre religion? Mais c'est abominable! Élevé comme tu l'as été! » Jean (répondant à Cécile seule, sur un ton angoissé et sombre). − Ce qui est fait est fait. Tu souffres? Moi aussi... (Martin du G., Barois,1913, p. 299).Eh bien oui (...) tu aurais dû rester à Paris (...) − Enfin! ce qui est fait est fait (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 161).
Voilà qui est fait. C'est terminé (en parlant d'une action délicate ou importante). (Il ouvre la porte, la mère le suit avec hésitation jusque sur le seuil.) Voilà qui est fait (Camus, Cas intéress.,1955, 1ertemps, 3etabl., p. 635).
Croire que tout est fait. Croire que tout est joué. Une fois qu'il a parlé, il croit que tout est fait (Mounier, Traité caract.,1946, p. 400).
2. Être fait pour + subst. ou inf. Être destiné à.
a) [Le suj. désigne une pers.] . Être prédisposé à, avoir des talents pour. Elisabeth et Paul, faits pour l'enfance, continuaient à vivre comme s'ils eussent occupé deux berceaux jumeaux (Cocteau, Enf. terr.,1929, p. 96):
44. (Thierry, mécontent, regagne son bureau et s'assied.) Ta loi morale, mon vieux, faut jamais oublier ça : c'est nous qui l'avons faite, pour nous, pour notre utilité sociale! Ce n'est pas nous qui avons été faits pour elle! Alors, le jour où ça ne colle plus bien... Martin du G., Taciturne,1932, I, 10, p. 1264.
b) [Le suj. désigne une chose] Avoir tel usage, être créé en vue d'un but précis. L'antiquité a peut-être été faite pour être le pain des professeurs (Goncourt, Journal,1894, p. 499).Mais il [le système électoral] semblait fait tout exprès pour décourager des débuts irréguliers comme ceux de Benjamin Disraëli (Maurois, Disraëli,1927, p. 59).
P. iron., péj. C'est bien fait pour lui/pour elle, Il/elle l'a bien mérité. S'il finit sa vie en taule, c'est bien fait pour lui, ajoutai-je avec rage (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 200).
P. plaisant. Et ces sales fleurs qui ne vivent ni ne se fanent jamais Tu les as appelées immortelles... C'était bien fait pour elles... (Prévert, Paroles,1946, p. 76).
Fam. C'est fait pour (avec ellipse du complément de destination). C'est adéquat, c'est exactement la forme, l'usage qui convient.
3. Être fait à. Être habitué à. J'étais fait à mon visage, comme certains se font à leur misère ou à leur crasse (Mounier, Traité caract.,1946, p. 502).
4. Littér. C'en est fait (de). C'en est fini (de). C'en est fait de lui; c'en est fait de la vie de château. C'en était fait, la séparation était sans recours (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 57).Je me sentais déjà tout investi par l'accablant souci de nouveaux devoirs. C'en serait fait des rêveries, des promenades contemplatives (Gide, Feuillets d'automne,1949, p. 1088):
45. Je porte aux études latines un amour désespéré. Je crois fermement que, sans elles, c'en est fait de la beauté du génie français. France, Vie littér.,1888, p. 287.
Rem. Certains emplois passifs de faire n'ont pas de forme active correspondante. Invitation lui a été faite de se présenter au plus tôt.
E.− Emplois substitutifs. V. faire4.
Prononc. et Orth. : [fε:ʀ], (je) fais [fε]. En syll. non finale, radicaux [f(ə)-] : je ferai, etc., et [f(ə)z-] : nous faisons, etc.; v. aussi bienfaisant, faiseur, etc. dans lesquels il y a cependant flottement [(ə)]/voyelle antérieure. Unanimité en revanche en faveur de la voyelle ant. dans malfaiteur, bienfaiteur. Dans le cas de l'absence de [ə], assimilation de sonorité entre [f] et le contexte : assimilation progressive dans (je) ferai [fʀ ̭e], régressive dans le cas de (nous) faisons [f̬zɔ ̃]. En ce qui concerne le timbre de la voyelle en finale absolue (je fais, etc.), Rouss.-Lacl. 1927 notent, p. 135 : ,,Beaucoup de personnes, surt. parmi les plus jeunes, ont un e moyen``. Enq. : /fe, D/ (c'est) fait; /fet, (D)/ (vous) faites. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Faire employé comme substitut d'un autre verbe 1. 842 suppléant d'un verbe d'action déjà exprimé (Serments de Strasbourg ds Bartsch Chrestomathie 2, 10); ca 1100 le verbe est précisé par le pronom neutre le (Roland, éd. J. Bédier, 2617-18); 2. 1225-30 suppléant d'un 1erverbe exprimé dans une comparaison (Guillaume de Lorris, Le Roman de la Rose, éd. F. Lecoy, 639). B. Faire suivi d'un verbe à l'inf. ca 880 (Ste Eulalie, 4 ds Bartsch Chrestomathie : voldrent la faire diaule servir); 2emoitié xes. (St Léger, éd. J. Linskill 186 : Poble ben fist credrë in Deu); mil xies. (St Alexis, éd. C. Storey, 112 : Par multes terres fait querre sun amfant). C. « Être le sujet d'une activité, la cause de quelque chose » 1. 2emoitié du xes. « exercer une activité » (St Léger, éd. J. Linskill, 81); 2. 2emoitié du xes. « accomplir une action » (ibid., 40), d'où mil. xies. tant faire que (St Alexis, éd. C. Storey, 464); ca 1100 faire que + subj. (Roland, éd. J. Bédier, 596); ca 1190 ne faire que + inf. (Renart, éd. M. Roques, 13015); 3. mil. xies. faire + adv. (St Alexis, éd. C. Storey, 47 : Quant vint al fare, dunc le funt gentement); 4. ca 1170 « exprimer par la parole, dire » (Livre des Rois, éd. E. R. Curtius, p. 31). D. « Déterminer quelqu'un ou quelque chose dans sa manière d'être » 1. 2emoitié du xes. « donner une qualité à quelqu'un » (St Léger, éd. J. Linskill, 48); 2. ca 1100 « donner une qualité à quelque chose, rendre » (Roland, éd. J. Bédier, 950 : Nus les [espees] feruns vermeilles de chald sanc); 3. 1172-74 « imiter, chercher à passer pour » (G. de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg [1936], 4824). E. 1. Ca 1100 « créer, réaliser une chose » (Roland, 457); 2. id. « constituer » (ibid., 3052); 3. ca 1164 n'avoir que faire de (Chr. de Troyes, Erec et Enide, éd. M. Roques, 2717); 4. 1216 « constituer quant à la quantité » (R. de Clari, La Conquête de Constantinople, éd. Ph. Lauer, § 34, p. 36); 5. 1372 « produire, engendrer, enfanter » (Propriétés des choses, I, 30 ds T.-L.). F. Faire avec un suj. impers. 1. 1119 pour exprimer les conditions atmosphériques (Ph. de Thaon, Comput, 2636 ds T.-L.); 2. 1160 faire + adj. + inf. (Enéas, 7088 ds T.-L.). Issu du lat. class. facere « réaliser quelque chose; créer, commettre » et servant de substitut à un verbe précédemment exprimé.