| ENTÊTER1, verbe trans. A.− Vieilli 1. [Le suj. désigne une odeur, une vapeur ou la pers. qui exhale l'odeur, la vapeur] Monter à la tête, troubler l'esprit. Se musquer au point d'entêter ses amis (Goncourt, Journal,1858, p. 572).Ces gens qui aiment les fleurs, et que leur parfum entête (Radiguet, Bal,1923, p. 123).L'odeur de miel amer entêtait un peu (Pourrat, Gaspard,1925, p. 19): 1. le deuxième bourreau.
− Pas d'Houbigant, pas de Guerlain
Dans mon eau de toilette!
Quelque condamné sans entrain
Dirait que je l'entête!
Giraudoux, Intermezzo,1933, II, 4, p. 127. 2. Au fig. Enivrer, exalter, tourner la tête. Toutes les bouffées de l'existence somptueuse de Paris et du château arrivent et entêtent ces imaginations de quinze ans (Goncourt, Journal,1862, p. 1069). − Emploi pronom. subjectif. S'engouer, se captiver pour quelqu'un, pour quelque chose. S'entêter de qqn, de qqc., pour qqn, pour qqc.Ces Visitandines (...) pour le plaisir d'intriguer, s'entêtent d'un conflit qui ne les regarde point (Bremond, Hist. sent. relig.,t. 4, 1920, p. 230).Un jour elle s'entêta d'une robe lie-de-vin (Montherl., Pitié femmes,1936, p. 1086). B.− P. ext. 1. Vieilli. Entêter qqn dans qqc.Persuader, captiver entièrement l'esprit de quelqu'un pour quelque chose au point d'annihiler son jugement. Les murs eux-mêmes l'entêtaient dans son idée (Barrès, C. Baudoche,1909, p. 185).Le camarade Lévy (...) qui lui inculque des principes de marxisme, l'entête dans son égoïsme et fournit des bases solides à sa goujaterie spontanée (Gide, Journal,1943, p. 200). − [Sans compl. prép.] :
2. Une rage l'entêtait, une de ces rages imbéciles qui ne s'abaissent point à discuter, le « quand même » sourd et aveugle d'un gaillard peu habitué à se voir marchander ses caprices et qui se bute à son idée fixe.
Courteline, Le Train de 8 h 47,1888, 2epart., 3, p. 116. 2. Cour., emploi pronom. subjectif. S'entêter à + inf.S'obstiner à. S'entêter dans qqc.S'obstiner, se buter dans une opinion, une décision. Elle ne veut rien entendre et s'entête dans ses idées (Champfl., Avent. MlleMariette,1853, p. 118): 3. ... une poignée de vaillants garçons s'entêta dans la Résistance, et l'on vit l'inertie concertée triompher de la brutalité aveugle.
Ambrière, Les Grandes vacances,1946, p. 279. Prononc. et Orth. : [ɑ
̃tεte] ou p. harmonis. vocalique et malgré l'accent circonflexe [ɑ
̃tete], (j')entête [ɑ
̃tεt]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. 1. 1176-81 « étourdir [en frappant à la tête] » (Ch. de Troyes, Chevalier Lion, éd. M. Roques, 6246); 2. ca 1280 [vins] entestans « qui porte à la tête » (Ph. de Beaumanoir, Jehan et Blonde, 3853 ds T.-L.). B. Ca 1223 [li] entestés « qui a de l'entêtement » (G. de Coincy, éd. V. F. Kœnig, 2 Mir 30, 331); fin xiiies. [ms.] « s'obstiner » (1recontinuation de Perceval, éd. Roach, 10054, var. de M.). Dér. de tête*; préf. en-*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 493. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 79, b) 547; xxes. : a) 1 809, b) 646. Bbg. Rat (M.). Il n'y a pas de synon. S'enticher, s'engouer, s'entêter. Vie Lang. 1965, pp. 645-647. |