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ENLEVER, verbe trans.
I.− Soulever de terre.
A.− Porter en soulevant rapidement.
1. [L'obj. désigne un inanimé concr.] Enlever un cerf volant (Ac. 1932). Le ballon enlève la nacelle; les palans enlèvent les fardeaux. La chaloupe elle-même est enlevée et suspendue à la poupe du bâtiment (Chateaubr., Natchez,1826, p. 369).
2. [L'obj. désigne un animé] Enlever une femme, un enfant dans ses bras, comme une plume. Il se pencha, la prit, l'enleva, la porta sur son lit (Maupass., Contes et nouvelles,t. 1, Martine, 1883, p. 115).Marie (...) fut enlevée au ciel par les anges (Claudel, Processionnal,1910, p. 297):
1. Je lui sautai au cou [de l'abbé] Il m'enleva et me tint un instant suspendue en l'air, tandis que Madame de Curel (...) nous regardait horrifiée. Gyp, Souvenirs d'une petite fille,1928, p. 137.
Enlever un cheval. Le faire partir au galop. Elle enleva son petit attelage leun seul coup, avec une incomparable virtuosité (Halévy, Abbé Const.,1882, p. 117).P. anal. Enlever une barque (cf. canotier ex.).
Emploi pronom. réfl. MlleSpessivtseva et Serge Lifar (...) s'enlèvent et retombent sur le ressort plié de leurs souples jarrets (Levinson, Visages danse,1933, p. 142).
a) [Le suj. désigne un oiseau] Prendre son envol. Elles [les hirondelles] s'enlevaient, serrées et frémissantes, d'un vol plus rapide (Bourget, Disciple,1889, p. 179).
P. anal., à sens passif :
2. Souvent, il allait voir partir les ballons qui, tous les deux jours, s'enlevaient de la gare du Nord, emportant des pigeons voyageurs et des dépêches. Zola, La Débâcle,1892, p. 576.
b) [Le suj. désigne un cheval] Se dresser en levant les jambes de devant et partir au galop. Les chevaux s'enlèvent et sautent, à la manière souple et ramassée des félins (Pesquidoux, Chez nous,1921, p. 99).
[En parlant d'un trotteur] Prendre le galop. Là, patatras! sa jument s'enleva une seconde fois, perdant un terrain tel que ce n'était plus la peine de lutter (Zitrone, Courses,1962, p. 454).
B.− Au fig.
1. Transporter, soulever d'enthousiasme. Cet orateur enlève son auditoire (Ac.1878-1932).Cette péroraison enleva l'auditoire. Tout le monde en fut charmé, excepté moi (About, Roi mont.,1857, p. 226).
Emploi abs. L'air du matin, l'entrain de la besogne, la vision de la justice, cela enlève. La fureur d'une chanson le jetait de l'avant. Et il commençait de chanter (Pourrat, Gaspard,1930, p. 90).
2. LITT., MUS. Composer ou exécuter une œuvre avec rapidité ou puissance et justesse de ton, à la manière d'un virtuose, et de façon à susciter l'enthousiasme. Enlever un morceau de piano. C'est ainsi que le travail du Dictionnaire dit « de Richelet » fut enlevé en quinze ou seize mois (Sainte-Beuve, Causeries lundi,t. 5, 1851-62, p. 290):
3. J'écris avec toutes sortes de lenteurs la dernière scène dont le mouvement est extrêmement rapide. Je me suis toujours méfié de ce qui était « enlevé ». Green, Journal,1935, p. 45.
3. B.-A. Exécuter avec rapidité et d'un seul jet. Esquisses enlevées au pastel :
4. ... il esquissait sur une vieille toile, en deux heures, son tableau : « il n'y a que les choses qu'on enlève comme cela qui sont bonnes ». Goncourt, Journal,1875, p. 1090.
Emploi pronom. à sens passif. Se détacher sur le fond du tableau. Ce dernier [tableau] est d'un effet de lumière extraordinaire (...) au second [plan] il y a des personnages qui s'enlèvent sur un fond de tapisserie (Mérimée, Lettres à Mmede la Rochejacquelein,1870, p. 283).
P. métaph. C'est assurément parce que sa vie s'enlève sur un fond de révolte impuissante que la femme a tant de facilité à pleurer (Beauvoir, Deux. sexe,1949, p. 434).
II.− Déplacer un objet en le sortant de l'endroit qu'il occupait.
A.− [En le mettant ailleurs] Enlever le bouchon du réservoir, le couvercle d'une casserole, un échafaudage, la poussière avec un balai; enlever les assiettes, le couvert. Fréq. [L'obj. désigne ce qu'on porte sur soi] Enlever son chapeau, la cigarette de sa bouche, sa cravate, un vêtement. On ne sait comment se vêtir et, vingt fois le jour, j'enlève ou remets mon sweater (Gide, Journal,1943, p. 192):
5. Au lit ils enlevaient leurs lunettes d'abord et leurs râteliers ensuite dans un verre et plaçaient le tout en évidence. Ils n'avaient pas l'air de se parler entre eux, entre sexes, tout à fait comme dans la rue. Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 250.
Emploi pronom. à sens passif. Cette robe s'enlève facilement (cf. Michaux, Plume,1930, p. 147).
Spécialement
1. Au fig. et fam. Enlever un poids de sur le cœur, de derrière le cœur. Soulager. Cf. Flaub., Corresp., 1871, p. 245.
2. Enlever un corps. L'emporter à l'église, au cimetière. La justice a enlevé le corps. Elle s'est saisie du cadavre d'une personne décédée par mort violente (Ac. 1798-1878). Les vingt-quatre grenadiers sans armes enlevèrent le corps [de Napoléon] et eurent l'honneur de le porter sur leurs épaules jusqu'à la sépulture (Chateaubr., Mém., t. 2, 1848, p. 668).
3. Enlever un corps d'armée, une division, le/la déplacer sur/vers le front. Cf. Joffre, Mém., t. 1, 1931, p. 172.
4. CHASSE. Enlever les chiens. Déplacer les chiens pour les remettre par un plus court chemin à l'endroit où on a vu le cerf. Enlever la meute (Ac.1798-1932).Cf. Jouy, Hermite, t. 4, 1813, p. 174.
5. COMM. Enlever des marchandises. Les acheter et les emporter rapidement. C'était le triomphe : dix mille exemplaires enlevés en deux jours (Sartre, Mots,1964, p. 157).P. ext. Débarrasser rapidement de quelque chose. Enlever un paquet [à la gare].
Pop. Enlevez le bœuf. C'est prêt, vous pouvez emporter (attesté ds Rob. et Carabelli).
Emploi pronom. à sens passif. Marchandise qui s'enlève facilement, bien. La vente des ouvrages qu'a laissés Girodet en mourant se fait en ce moment. Tout s'enlève à des prix extravagants (Delécluze, Journal,1825, p. 180).Fam. S'enlever comme des petits pains. Être vendu très rapidement.
B.− [En le séparant] Enlever les bavures des bords d'une pièce au burin, la peau [d'un poisson], la pelure [d'un fruit]; le vent enlève les feuilles des arbres :
6. Le vieillard présenta son stylet à l'inconnu, qui le prit et tenta d'entamer la peau à l'endroit où les paroles se trouvaient écrites; mais, quand il eut enlevé une légère couche de cuir, les lettres y reparurent... Balzac, La Peau de chagrin,1831, p. 35.
Emploi pronom. à sens passif. La peau [des larves] qui s'enlève par couche, dans le temps de la mue (Cuvier, Anat. comp.,t. 2, 1805, p. 560).
Spécialement
1. [Avec l'idée de violence] Synon. de emporter.Un boulet lui enleva la cuisse (cf. Miomandre, Écrit sur eau,1908, p. 106).
Fréq. [L'obj. désigne une partie du corps, une grosseur] Enlever l'appendice, l'estomac, un kyste, une verrue; se faire enlever les amygdales. Synon. opérer.Je me suis fait enlever trois dents de la mâchoire (Flaub., Corresp.,1845, p. 159).
2. Au fig. et fam.
a) Enlever le pain de la bouche. Priver une personne de son entourage du nécessaire par sa faute. Cf. Zola, Bonh. dames, 1883, p. 556.
b) Fam. Enlever la peau des fesses. Enlever la peau du derrière (Zola, Germinal, 1885, p. 1205). Donner un coup de pied au derrière, battre quelqu'un.
Pop. Enlever le ballon. ,,Donner un coup de pied au derrière`` (Larch. 1880). Cf. Gyp, Souv. fille, 1928, p. 332 et v. aussi ballon ex. 14.Se faire enlever le ballon (cf. Aragon, Beaux quart.,1936, p. 358).
C.− [En l'effaçant, en le supprimant] Enlever un nom d'une liste, une phrase, un paragraphe dans un texte; médicament qui enlève la douleur; savon, produit qui enlève les taches. Elles [les femmes du monde] commentent, elles amplifient, elles querellent, et finissent par enlever leurs torts comme on enlève une tache par un petit savonnage (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 459).Il faut enlever deux dimanches et quatre jours de chômage : donc, ça vous fait neuf jours de travail (Zola, Germinal,1885, p. 1289):
7. Croyant rendre un service important à la géographie, si je parvenais à enlever des cartes ces noms oiseux qui désignent des îles qui n'existent pas (...) je voulus, (...) prolonger ma route... Voyage de La Pérouse,t. 2, 1797, p. 110.
Enlever une pièce de l'affiche. Ne plus la jouer. Cf. L. Schneider, Maîtres opérette fr., Lecocq, 1924, p. 226.
D.− Au fig. Priver quelqu'un d'une valeur morale, d'une qualité naturelle. Enlever [à qqn] son courage, l'envie de recommencer, l'espérance, ses illusions, la possibilité de ses prérogatives :
8. Il faut bien le dire, la peste avait enlevé à tous le pouvoir de l'amour et même de l'amitié. Car l'amour demande un peu d'avenir, et il n'y avait plus pour nous que des instants. Camus, La Peste,1947, p. 1365.
Ne rien enlever à qqn, à qqc. Laisser intact. L'ironie n'enlève rien au pathétique; elle l'outre au contraire (Flaub., Corresp.,1852, p. 43).
Rien ne m'enlèvera de l'idée que. Je suis sûr(e) que; je ne démordrai pas. Enlever une idée de la tête. Cf. Proust, Temps rétr., 1922, p. 765.
III.− Obtenir, gagner par la force, la ruse (ce qui ne vous appartient pas).
A.− [L'obj. désigne un inanimé]
1. S'emparer de quelque chose. Des voleurs ont enlevé sa voiture. Il (...) se contente de faire restituer aux Veïens les terres que les Romains leur avaient enlevées (Michelet, Hist. romaine,t. 1, 1831, p. 83).
Spéc. [une position milit.] Enlever un fort, une redoute, une tranchée; d'assaut, à la baïonnette. Drapeaux enlevés à l'ennemi. Il n'y a pas eu d'assaut donné au fort de Douaumont, enlevé par surprise (Bordeaux, Fort de Vaux,1916, p. 38):
9. ... toute l'armée, après avoir enlevé si vaillamment les meilleures positions de l'ennemi, les lui abandonna avec autant d'empressement qu'elle avait mis d'ardeur à les conquérir. Recueil textes hist.,1820, p. 180.
Enlever [un vaisseau]. S'en rendre maître par la force. La situation extérieure, en 1652, devient tragique : Cromwell fait enlever les vaisseaux français (Brasillach, Corneille,1938, p. 268).
2. Au fig. Obtenir, gagner ce qui fait l'objet d'une lutte, d'une compétition. Enlever de haute lutte, à la pointe de l'épée, par surprise qqc.; enlever une adhésion, une affaire, un contrat, un poste avantageux. Il me dit que je devais enlever, si je voulais, le premier prix d'histoire et de géographie à la fin de l'année (Renard, Poil carotte,1894, p. 168).
Enlever le morceau (cf. Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 349). Synon. de emporter le morceau.
B.− [L'obj. désigne une pers.] Se rendre maître d'une personne et la prendre avec soi. Enlever le duc d'Enghien sur la terre étrangère qui devait lui servir d'asile (Staël, Consid. Révol. fr.,t. 2, 1817, p. 106).
1. [En parlant d'une femme, consentante ou non, enlevée à sa famille, à son mari] Romulus a enlevé les Sabines; femme séduite et enlevée; jeune fille enlevée et séquestrée. Si! si! tu me seras fidèle! partons, veux-tu? je t'enlève! partons! (Feydeau, Dame Maxim's,1914, II, 9, p. 52):
10. Laurent voulait Thérèse; il la voulait à lui tout seul, toujours à portée de sa main. S'il ne faisait pas disparaître le mari, la femme lui échappait. Elle l'avait dit : elle ne pouvait revenir. Il l'aurait bien enlevée, emportée quelque part. Zola, Thérèse Raquin,1867, p. 54.
2. Spécialement
a) Enlever un mineur, un enfant. Quiconque aura, par fraude ou violence, enlevé ou fait enlever des mineurs, ou les aura entraînés, détournés ou déplacés, ou les aura fait entraîner, détourner ou déplacer des lieux où ils étaient mis par ceux à l'autorité ou à la direction desquels ils étaient soumis ou confiés, subira la peine de la réclusion criminelle à temps de cinq à dix ans (Code pénal, Paris, Dalloz, 1969-70, art. 354, p. 194).
b) Fam. Soustraire quelqu'un pour un temps à son entourage :
11. Oh! messieurs, vous permettez, j'enlève M. Mouret pour une minute. C'est bien le moins, puisqu'il m'a vendu un manteau affreux, qu'il me prête ses lumières. Zola, Au Bonheur des dames,1883, p. 691.
P. ext. Emmener à l'improviste. Enlever la bande en voiture (Cocteau, Enf. terr.,1929, p. 118).
c) Littér. La mort (soudaine), la maladie enlève quelqu'un (à l'affection des siens). Synon. emporter.Un second catarrhe s'est déclaré, en cinq jours il l'a enlevée malgré deux bons médecins (Lamart., Corresp.,1832, p. 322).Souvent au passif. L'ange céleste qui fut le nôtre vient de nous être enlevé en cinq jours de maladie de poitrine (Lamart., Corresp.,1832p. 322).
Rem. On relève ds la docum. a) Qq. emplois adj. du part. prés. au sens I B 1. Prédicateur, qui prêche avec un enthousiasme enlevant (E. de Guérin, Lettres, 1838, p. 221). b) Enlevée, subst. fém. (Correspond à enlever II B 2) signifiant « réprimande », chez L. Daudet : sous l'enlevée [de Marie-Antoinette], Manuel, éperdu baissait la tête (Lys sangl., 1938, p. 239). Cf. ci-dessus enlever le ballon.
Prononc. et Orth. : [ɑ ̃lve], (j')enlève [ɑ ̃lε:v]. Enq. : /ãlev/ (il) enlève. Ds Ac. 1694-1932. Conjug. Devant syll. muette, change [ə] muet du rad. en [ε] ouvert. Étymol. et Hist. A. 1. [1130-60 « lever, élever (d'une position où on était) » (Couronnement de Louis, éd. E. Langlois, 997 : Tu l'en levas)]; 1260 enlevé « en relief » (E. Boileau, Métiers, 209 ds T.-L. : Toute euvre enlevee) − 1660, Oudin ds FEW t. 5, p. 277a, s.v. levare; 2. 1671 fig. « ravir, enthousiasmer » (Mmede Sévigné, Lettres, éd. A. Régnier, t. 2, p. 376 : Un plaisir qui m'enlève); 1838 part. passé adj., art, mus. « bien exécuté » (Ac. Compl. 1842). B. 1. [Ca 1215 « emporter avec soi » (R. de Houdenc, Eles, 395 ds T.-L., s.v. lever, 368, 41 : S'uns autres un bial don en lieve)]; 1611 « id. » (Cotgr.); 2. 1538 « ravir, détourner (quelqu'un) » (Est.); 3. 1573 « prendre d'assaut » (Garnier, Hippolyte, 688 : Je ne puis [...] luy enlever la place). C. xiiies. [ms.] « ôter, déplacer » (Merlin, BN fr. 747, fo74 ds Littré). Dér. de lever*; préf. en-*. Fréq. abs. littér. Enlever : 4 359. Enlevant : 235. Fréq. rel. littér. Enlever : xixes. : a) 6 204, b) 6 668; xxes. : a) 6 424, b) 5 807. Enlevant : xixes. : a) 299, b) 460; xxes. : a) 501, b) 195. Bbg. Gohin 1903, p. 254 (s.v. enlevée).La Landelle (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 133, 277. − Quem. Fichier. − Repina (T.-A.). L'Emploi des prép. servant de compl. aux verbes. Učenye z̊apiski. Leningradskij gosudarstvennyj institut. 1961, t. 299, pp. 172-176.