| ENGAINER, verbe trans. A.− [Le compl. désigne gén. des armes] Mettre dans une gaine. Engainer des couteaux (Ac.). Toujours l'engainer [un fusil] quand il le transportait au grand air, afin de ne pas trop l'exposer aux duretés des intempéries (Guèvremont, Survenant,1945, p. 74). Rem. 1. La docum. atteste surtout des emplois au part. passé. Cinq coutelas bien engainés de cuir. Il avait au côté sa « joyeuse » engainée dans un fourreau d'or (Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 317). 2. On rencontre un emploi p. anal. et p. ext. [Le testament de son père] paginé, divisé en chapitres, subdivisé en paragraphes comme un rapport, terminé par une table; le tout engainé dans un cartonnage (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1326). B.− P. anal. 1. Emplois techn. a) ANAT. Recouvrir d'une gaine. Cette périostose forme un manchon plus ou moins opaque, (...), qui engaine tout l'os (Ravault, Vignon, Rhumatol.,1956, p. 572).Les fibres nerveuses (...) ont toutes la même structure fondamentale : un « cylindraxe » qui garde sur toute sa longueur un diamètre constant et qu'un manchon engaine (Camefort, Gama, Sc. nat.,1960, p. 219). b) BOT. [Le suj. désigne des feuilles ou des pétioles] Envelopper depuis la base. Dans les graminées, les feuilles engainent les tiges (DG). Rem. La docum. atteste uniquement des emplois au part. passé. Espèces de glaïeuls dont les fruits, les tiges et les feuilles engaînées donnèrent à l'homme ses premiers aliments (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p. 59). En emploi adj. Les pétioles sont longs et engaînés dans des membranes ouvertes (Kapeler, Caventou, Manuel pharm. et drog., t. 2, 1821, p. 536). 2. [En parlant du vêtement d'une pers.] Enserrer, entourer en tenant étroitement. Dans son amazone bleu marine qui l'engainait, courte et replète, jusqu'à la ligne rose pâle du cou? (A. Daudet, Pte paroisse,1895, p. 130). − Au part. passé. Un dieu Pan (...) dansait un pas de caractère, engaîné dans une culotte de velours à bretelles (Flaub., Corresp.,1850, p. 275).Certains hommes ou adolescents portent des pagnes; d'autres ont le membre engaîné dans un étui de paille (Gide, Retour Tchad,1928, p. 951). C.− Au fig., dans le domaine de la sensation, de la vie intellectuelle.Enserrer, envelopper. Toute impression est double, à demi engainée dans l'objet, prolongée en nous-même par une autre moitié que seul nous pourrions connaître (Proust, Temps retr.,1922, p. 891). Cette phrase [de M. Proust] (...) étourdissante dans ses parenthèses (...) vous engaînait dans un réseau d'incidentes si emmêlées qu'on se serait laissé engourdir par sa musique, si l'on n'avait été sollicité soudain par quelque pensée d'une profondeur inouïe ou d'un fulgurant comique.
Morand, Le Visiteur du soir,1949, p. 11. Rem. La docum. atteste a) Engainé, ée en emploi adj., dans le domaine de l'ameubl. et de la sculpt. [En parlant d'une statue ou d'un motif ornemental représentant une figure humaine ou humanisée] Qui est enserré depuis le bas du torse dans une gaine qui va se rétrécissant jusqu'à sa base. Prétendant maintenir les dieux dont il formait l'image engaînée par la base dans une posture hiératique, donc incapables de mouvement (Gide, Thésée, 1946, p. 1431). Les tables à manger (...) utilisent quelquefois des piètements qui rappellent l'Empire : figures ailées ou engainées (Viaux, Meubles Fr., 1962, p. 151). b) Engainant, ante, part. prés. et adj.
α) Qui engaine.
β) P. anal., anat. Qui recouvre d'une gaine. Les ostéophytoses ou hyperostoses engainantes vertébrales sont fréquentes chez les sujets âgés (Ravault, Vignon, Rhumatol., 1956, p. 553). Bot. [En parlant d'une feuille ou d'un pétiole] Dont la base enveloppe plus ou moins la tige à laquelle elle est fixée. Quelquefois le pétiole seul est engainant, comme dans beaucoup d'Ombellifères (Privat-Foc. 1870). Prononc. et Orth. : [ɑ
̃gεne] ou p. harmonis. vocalique [ɑ
̃gene], (j')engaine [ɑ
̃gεn]. Ds Ac. 1740-1932. Certains auteurs écrivent engaîner; cf. gaine. Étymol. et Hist. Ca 1330 (G. de Digulleville, Pél. vie humaine, 1280 ds T.-L. : le biau glaive a engäiné). Dér. de gaine*; préf. en-*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 2. Bbg. Sain. Lang. par. 1920, p. 218. |