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ENFIN, adv.
I.− Valeur temp. [Sans qu'il soit tenu compte d'un interlocuteur présent : gén. en corrélation avec un autre mot; pour indiquer qu'un procès se déroule en dernier lieu]
A.− [Le procès est le dernier d'une série] Synon. à la fin, finalement, pour terminer; anton. d'abord, en premier lieu, puis, ensuite.Le lendemain, dès l'aube, elle se présenta chez le docteur (...). Puis elle resta dans l'auberge (...). Enfin, au petit jour, elle prit la diligence de Lisieux (Flaub., Cœur simple,1877, p. 27):
1. Madame Lepic sert elle-même les enfants, d'abord grand frère Félix parce que son estomac crie la faim, puis sœur Ernestine pour sa qualité d'aînée, enfin Poil de Carotte qui se trouve au bout de la table. Renard, Poil de Carotte,1894, p. 96.
B.− [Le procès se déroule après un long espace de temps] Anton. déjà.Elle chercha partout son oncle, le bon abbé don Cesare, et enfin le trouva à la chapelle, où il priait avec ferveur (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 421):
2. Il [le comte de Restaud] regarda son fils pendant longtemps, et lui dit enfin d'une voix affaiblie : − Ernest, mon enfant, tu es bien jeune; mais tu as bon cœur... Balzac, Gobseck,1830, p. 431.
[Ou après une longue attente] :
3. J'implorai l'assistance du ciel pour ma famille; chaque intervalle de courrier étoit pour moi une année de souffrance. Enfin, je reçus de Philadelphie une lettre de mon fils. Fiévée, La Dot de Suzette,1798, p. 77.
C.− [Le procès marque le terme d'une énumération]
[dans le temps du procès] Avec lui j'appris vite l'hébreu, le sanscrit, et enfin le persan et l'arabe (Gide, Immor.,1902, p. 373):
4. Après les huîtres, qui furent trouvées très-fraîches, on servit des rognons à la brochette, une caisse de foie gras aux truffes, et enfin la fondue. Brillat-Savarin, Physiol. du goût,1825, p. 179.
[dans l'espace-temps du discours] Terme d'une description, d'un développement. Et enfin, enfin et surtout. Il y a à Paris trois polices : primo : la police du royaume (...) secondo : celle du régent (...) enfin celle de Dubois (Dumas père, Fille du régent,1846, II, 11, p. 199):
5. Dieu est esprit et vérité. Il voit tout, il sait tout, il contient en lui toutes choses. Dieu est justice : il punira toutes les fautes. Dieu est bonté : il pardonne au repentir. Enfin Dieu est miséricorde : il a pitié de tous nos maux. Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 126.
II.− [En tenant compte d'un interlocuteur présent; gén. avec un autre mot plus ou moins grammaticalisé]
A.− Valeur log. [Pour mettre fin à son propre discours ou l'abréger ou l'interrompre momentanément en présence d'autrui et par égard pour lui]
1. [À la fin d'une énumération, d'un développement, pour conclure, abréger, résumer] Synon. bref, en un mot.Enfin, voilà; enfin bref (fam.); enfin, passons. Enfin, vous ne vous êtes pas trompé, c'est le principal, conclut-elle (Huysmans, Oblat,t. 2, 1903, p. 38).D'ailleurs le ministre m'a donné Passeports autorisations Enfin tout ce qui est nécessaire (Apoll., Coul. temps,1918, I, 1, p. 921):
6. ... ces petites grandes filles m'agacent, ça a peur de se déchirer aux ronces (...), ça crie, c'est fatigué, − insupportables enfin. Colette, Claudine à l'école,1900, p. 9.
Rem. Pour résumer, enfin est souvent suivi de tout. Ne m'a-t-il pas appris la musique, le dessin, la grammaire, enfin tout ce que je sais? (Balzac, Peau chagr., 1831, p. 132).
2. [En appos. ou en incise, dans un énoncé, pour introduire une information]
a) [complémentaire]
[explicative] :
7. courpière. − Eh bien, madame... vous me forcez à vous dire... des choses... enfin, vous savez aussi bien que moi combien ma situation était impossible... votre mari est... chez mes parents... Hermant, M. de Courpière,1907, p. 10.
[approximative, dubitative] Ça doit être la femme d'un boursier ou d'un médecin, enfin je ne sais pas, quelque chose dans ce genre (Zola, Bonheur dames,1883, p. 481).Je suis arrivé de Berlin il y a vingt ou vingt-cinq minutes... Enfin le temps de venir de la gare! (Guitry, Veilleur,1911, p. 20):
8. Il a un plaisant nom, il s'appelle Quatre-temps, Pâques-Fleuries, Mardi-Gras, je ne sais plus! Un nom de fête carillonnée, enfin! Hugo, Notre-Dame de Paris,1832, p. 285.
En partic. [Lorsque le locuteur bafouille ou cherche ses mots (interj. comme euh!... hem!... eh bien! etc.)] J'ai fait inscrire des dates... oui des dates qui... enfin... (H. Bataille, Maman Colibri,1904, p. 8).Monsieur... Monsieur... Mann... enfin ton monsieur (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 278):
9. Monsieur, je viens au sujet de l'emprunt japonais chercher vos instructions. C'est-à-dire... (il éternue). C'est-à-dire vous demander pour le... pour les... pour la... enfin, voilà. Flers, Caillavet, M. Brotonneau,1923, I, 9, p. 6.
b) [rectificative, restrictive] Synon. du moins.Enfin disons, enfin à mon sens. Autour de vous, vos camarades sont tous pareils? − Tous... enfin, tous ceux qui existent, qui réfléchissent (Daniel-Rops, Mort,1934, p. 468):
10. − Rue Blanche? Oui, j'y suis passé l'autre jour avec Décugis. C'est... c'est très bien. Enfin, c'est suffisant. C'est-à-dire... il y manque le téléphone, je crois? Arland, L'Ordre,1929, p. 157.
3. [Pour signifier « en dernière analyse, tout compte fait, tout bien considéré »] Car enfin, mais enfin. Synon. après tout, en somme, somme toute, finalement :
11. MmeÉvrard. − Pourquoi n'est-ce pas à moi qu'on vous adresse? Mais je verrai bientôt si vous me convenez : car enfin, c'est à moi que vous appartenez, et vous êtes vraiment entrée à mon service. Collin d'Harleville, Le Vieux célibataire,1792, p. 85.
4. [Comme adv. de liaison, pour exprimer l'oppos. (Parfois en corrélation avec il est vrai, évidemment, etc.)] Mais enfin. Synon. cependant, néanmoins, toutefois, malgré tout, quoi qu'il en soit.Oh! nous avons un jardin, dirent-elles, avec non pas de l'orgueil, mais enfin un peu de joie d'avoir quelque objet de luxe à montrer (Stendhal, Souv. égotisme,1832, p. 81):
12. Évidemment, il ne faut pas avoir peur de répéter, ni de crier le commandement; mais enfin, je le constate, une réunion d'enfants ressemble à une mécanique bien engrenée : inutile que le conducteur touche toutes les pièces de la machine, il suffit de mettre en branle la force motrice. Frapié, La Maternelle,1904, p. 40.
[En emploi ell., avec valeur de prop. sub. concessive, oppositive] Je sais bien que, sur vos clichés, tous ces microbes ne sont qu'en reproduction. Mais, enfin... (Romains, Knock,1923, II, 2, p. 10).
B.− Valeurs affectives (le plus souvent en emploi d'interj.) [Pour exprimer une réaction devant l'attitude de son vis-à-vis]
1. [Pour marquer la fin d'une longue attente ou recherche] Suis-je heureux, tu te montres plus heureuse Encore, et je suis plus heureux, d'enfin! te voir heureuse (Verlaine, Œuvres compl.,t. 5, Odes en son honn., 1893, p. 16).Vous voilà tous enfin! C'est pour vous que je suis resté seul ici si longtemps à vous attendre (Claudel, Nuit Noël,1915, p. 573).
[En partic., pour exprimer]
a) [la satisfaction] À la bonne heure! dit Pierre Gringoire, en voilà un enfin qui parle un langage chrétien (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 95).La voici, enfin! cette « Femme pauvre » que vous avez tant désirée sans la connaître (Bloy, Femme pauvre,1897, p. 5).
b) [le soulagement] Enfin seuls! :
13. Il pense : « Elle est morte... C'est fini... Enfin! » Une sensation de détente, de bien-être, de repos. Puis, brusquement, en un éclair, il imagine sa vie sans elle, et il se précipite dans l'escalier, comme un forcené. Martin du Gard, Devenir,1909, p. 196.
2. [Pour marquer la résignation] Enfin!... Mais enfin! Enfin, que voulez-vous! Enfin, puisqu'il le faut! Allons, fit Louisa, le voilà avec une autre folie, à présent!... Enfin, puisqu'il lui en faut une, j'aime encore mieux celle-là (Rolland, J.-Chr.,Révolte, 1907, p. 377):
14. ... et quant à ma pauvre Virginie, elle veut aller vivre dans notre château de Lorraine, chez mon père, avec son tourment. Enfin! ... Elle a son petit pour la consoler! Adam, L'Enfant d'Austerlitz,1902, p. 17.
3. Fam. [Pour marquer l'impatience, la colère, dans une interrogation ou une exclamation] Mais enfin, où voulez-vous en venir? Enfin! quoi! vous la verrez bien vous-mêmes tout à l'heure (Claudel, Soulier,1944, 1repart., 2ejournée, I, p. 996).L'Abbé. − Enfin, c'est inadmissible : qu'est-ce que vous fabriquez ici à cette heure? (Montherl., Ville dont prince,1951, II, 7, p. 903):
15. jean (perdant patience). − « Mais enfin, si l'on vous demandait, à l'une ou à l'autre, de renier vos croyances religieuses pour conserver un emploi, qu'est-ce que vous répondriez? » Martin du Gard, Jean Barois,1913, p. 298.
[Postposé] Ah! laissez-moi passer enfin! cria-t-il, enjambant le corps de Protos (Gide, Caves,1914, p. 859):
16. Écoute-moi donc, Omer! Écoute-moi, te dis-je!... Tu ne veux pas, sacripant! ... M'écouteras-tu enfin! Adam, L'Enfant d'Austerlitz,1902p. 56.
4. [Pour marquer l'étonnement ou la peur, comme particule renforçative d'une interrogation] :
17. Brusquement, elle (...) lui dit, d'une voix étouffée par la peur que les domestiques n'entendissent et par sa propre angoisse : − Enfin, Antoine, qu'est-ce que tu as? Tu as quelque chose... Si! tu caches quelque chose... Est-ce qu'il y a un malheur? Est-ce que tu es souffrant? Rolland, Jean-Christophe,Antoinette, 1908, p. 852.
Prononc. et Orth. : [ɑ ̃fε ̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1119 en fin « résume ce qui a été dit précédemment souvent après une énumération; marque une conclusion logique » (Ph. de Thaon, Comput, 2701 ds T.-L., s.v. fin); 2. 1636 « marque qu'une chose arrive après s'être fait attendre » (Corneille, Le Cid, IV, 3 : Mais enfin, sa clarté [du jour] montre notre avantage); 1792 « amène une restriction, une précision » (Collin d'Harl., Vieux célib., II, 15 : Sans doute ... enfin dans la semaine). Dér. de fin*; préf. en-*. Fréq. abs. littér. : 39 224. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 60 159, b) 54 688; xxes. : a) 57 060, b) 51 860. Bbg. Muller (C.). Rem. syntactico- sém. sur certains adv. de temps. Fr. mod. 1975, t. 43, pp. 18-38.