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DÉVIDER, verbe trans.
A.− Dérouler du fil. Dévider la soie, du coton, un cocon.
1. Spécialement
a) Dérouler le fil qui est sur le fuseau pour le mettre en écheveau au moyen du dévidoir. Dévider le fil que l'on a filé (Ac.1798-1932).Les fuseaux [de lin] succèdent aux fuseaux. On les met de côté à mesure qu'ils sont terminés. Après quoi on les dévide, on en fait des écheveaux (Pesquidoux, Chez nous,1923, p. 255):
1. ... ils dévident leurs phrases comme dans les filatures on dévide le coton. Voyez quels écheveaux interminables celui-ci s'efforce de tirer! Musset, Le Temps,1831, p. 73.
Emploi pronom. à sens passif. Cette soie se dévide très bien (Littré).
b) Mettre en pelotes le fil qui est en écheveau ou en bobine. Dévider des bobines. Elle a dévidé trois écheveaux dont elle n'a fait qu'un peloton (Ac.1798-1932).
2. P. ext. Dérouler une matière souple enroulée. Dévider des boyaux, des câbles, des tuyaux.
Emploi pronom. à sens passif. Les câbles cessèrent de se dévider (Hugo, Travaill. mer,1866, p. 312).
3. P. anal. Dévider son chapelet, son rosaire. Le faire passer régulièrement entre ses doigts.
B.− P. métaph. et au fig.
1. Dévider sa bobine, son écheveau, son chapelet (cf. chapelet II A 1 c). Exprimer à la suite et sans interruption ce que l'on a à dire, souvent avec véhémence et profusion. Synon. fam. vider son sac.Il se mit alors à débiter ses bons mots de coulisses, à dévider sa bobine de gracieusetés (Huysmans, Marthe,1876, p. 41):
2. « Qu'est-ce que la vieille Katel va me dire? pensait-il. Elle va me dévider son chapelet; elle va me reprocher une si longue absence. » Erckmann-Chatrian, L'Ami Fritz,1864, p. 63.
Emploi pronom., proverbe. La fusée est prête à se dévider. Des événements contraires vont se dérouler (cf. Marat, Pamphlets, Affreux réveil, 1790, p. 239).
2. P. ext.
a) Exprimer à la suite et sans interruption. Dévider son histoire, ses souvenirs. Synon. débiter.C'est un homme qui passe ses idées au laminoir, (...) et qui dévide en vingt pages une pensée qui pourrait s'exprimer en quelques mots (Jouy, Hermite,t. 3, 1813, p. 82):
3. Toutes ces choses ne touchaient guère Hendrijk Van de Goo. Mais comme il s'apercevait du plaisir qu'elle avait à se confier ainsi, il l'écoutait patiemment dévider sa monotone histoire. Van der Meersch, L'Empreinte du dieu,1936, p. 52.
b) Fam. Dévider le jars (« jargon »). Parler argot (cf. Sue, Myst. Paris, t. 1, 1842-43, p. 127).
c) Démêler, débrouiller. Lettre interminable où j'ai eu l'art de dévider toutes les ficelles d'un esprit usé jusqu'au chanvre (Mallarmé, Corresp.,1870, p. 319).
Prononc. et Orth. : [devide], (je) dévide [devid]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) Fin du xies. desvuidier « dévider » (Raschi Blondh., p. 41); b) début xiiies. « défaire, dérouler » (Bible Guiot, 1871 ds T.-L.); 2. mil. xves. « énoncer, raconter, débiter » (Erreurs du Jugement de l'amant banny, 80 ds Romania, t. 34, p. 413); 3. av. 1592 « expliquer, débrouiller » (Cholières, Contes, fo264 ds Lac.); 4. 1830 « faire passer entre ses doigts » (Lamartine, Harm., p. 432 : le mendiant timide Et dont la main dévide Son rosaire enfumé). Dér. de vider*; préf. dé(s)-*. Fréq. abs. littér. : 203. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 188, b) 371; xxes. : a) 380, b) 270. Bbg. Gottsch. Redens. 1930, p. 238. − Sain. Arg. 1972 [1907], p. 123.