| DÉSARMER, verbe. I.− Emploi trans. A.− Enlever les armes ou l'armement ou les réduire. Anton. armer. 1. [L'obj. désigne une pers. ou un groupe de pers.] a) Vx. Débarrasser de ses armes ou de son armure. L'aimable Sylvia désarma les chevaliers (Genlis, Chev. Cygne,t. 2, 1795, p. 175). − Emploi pronom. réfl. Chacun se désarma et rentra dans sa tente (Barante, Hist. ducs Bourg.,t. 3, 1821-24, p. 275). b) Contraindre à rendre les armes. Désarmer l'adversaire, les gardes : 1. ... le gouvernement hellénique était décidé à désarmer et à interner toutes les troupes serbes, françaises et anglaises qui pénétreraient sur le territoire grec.
Joffre, Mémoires,t. 2, 1931, p. 137. 2. ... les insurgés, dont le premier acte devait être de désarmer la police pour armer leurs troupes, doublaient leurs chances.
Malraux, La Condition humaine,1933, p. 185. − ESCR. Faire sauter l'arme des mains de l'adversaire. Le duel a eu lieu : (...). Dieu a permis que je désarmasse deux fois mon adversaire (Dumas père, P. Jones,1838, V, 5, p. 199). 2. [L'obj. désigne un inanimé concr.] a) Désarmer une place forte, une forteresse. Lui ôter ses moyens de résistance, ,,tout ce qui lui servait de moyen offensif et défensif`` (Ac. 1932). b) P. méton. Désarmer une arme à feu. En détendre le ressort de percussion ou la mettre au cran de sûreté. Rocambole désarma le pistolet (Ponson du Terr., Rocambole,t. 5, 1859, p. 294). c) P. ext. Désarmer un navire. Le dégarnir de son équipage, de son matériel, de ses approvisionnements (de son artillerie dans le cas d'un navire de guerre) et le laisser au port : 3. Tous les autres navires de guerre de surface (y compris ceux de rivière) devront être réunis et complètement désarmés dans les bases navales allemandes désignées par les alliés et les États-Unis, et y être placés sous la surveillance des alliés et des États-Unis. L'armement militaire de tous les navires de la flotte auxiliaire sera débarqué.
Foch, Mémoires,t. 2, 1929, p. 313. 3. DIPLOM. [L'obj. désigne un pays militairement organisé] Réduire ou supprimer le potentiel militaire d'un pays ou d'une troupe : 4. Ils [Malvy et tous] avaient si peu la conscience de leur responsabilité qu'ils voulaient désarmer la France; voir L'Humanité du 27 mars 1914, contre la Folie des armements.
Barrès, Mes cahiers,t. 11, 1917-18, p. 214. B.− P. métaph. et/ou au fig. 1. a) Emploi pronom. réfl., vieilli. Se montrer moins hostile. L'amiral (...) fort cuirassé au départ, se désarmait insensiblement (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 90). b) Rendre moins sévère, apaiser une personne, une attitude ou une chose hostile. Désarmer la colère, la critique, l'envie, l'opposition. ... Allez fléchir son cœur, désarmer son courroux... (Chénier, Élégies,1794, p. 22): 5. ... pareil à un malade sans cesse occupé à guetter en lui-même les symptômes de son mal, le regard tourné vers lui-même, il se scrute, il s'épie : c'est pour les amadouer, pour se les concilier, c'est pour les désarmer qu'il se démène ainsi...,
Sarraute, L'Ère du soupçon,1956, p. 25. − Emploi abs. Les persuadés persuadent, comme les indulgents désarment (Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 129). 2. Affaiblir, rendre impuissant quelqu'un. Dès que la maladie me désarme, le cercle de famille se resserre autour de mon lit (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 148). II.− Emploi intrans. A.− Quitter les armes, pratiquer une politique de désarmement : 6. La paix n'est point un état que l'on atteigne à travers la guerre. Si je crois à la paix conquise par les armes et si je désarme, je meurs.
Saint-Exupéry, Citadelle,1944, p. 566. B.− Au fig. 1. [Le suj. désigne une pers.] Renoncer à une attitude hostile ou combative. Avec elle, il désarmait, il ôtait mas que et plastron, déposait sa brillante insolence (Maurois, Disraëli,1927, p. 41). − Emploi abs., fam. Ne pas désarmer. Résister à l'âge ou à la maladie : 7. Il [Christophe] dut se mettre au lit. Il sentait que, cette fois, c'était sérieux; mais il ne désarmait pas; il n'était pas de ceux qui, quand ils sont malades, s'abandonnent à la maladie; il luttait, il ne voulait pas être malade, et surtout, il était parfaitement décidé à ne pas mourir.
Rolland, Jean-Christophe,La Foire sur la place, 1908, p. 806. 2. [Le suj. désigne un sentiment hostile] S'apaiser. Un ressentiment qui ne désarmait pas (Martin du G., Thib.,Sorell., 1928, p. 1204). Prononc. et Orth. : [dezaʀme], (je) désarme [dezaʀm̥]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1100 sei desarmer « se dépouiller de ses armes » (Roland, éd. Bédier, 2498); 2. au fig. a) 1588 désarmer l'injure (Montaigne, Essais, éd. A. Thibaudet, III, IX, p. 1098); b) 1664 désarmer qqn « fléchir, rendre traitable » (J. Racine, La Thébaïde, éd. L. Aimé Martin, III, 4, t. 1, p. 255); 3. 1681 intrans. « cesser de se tenir sur le pied de guerre » (Vaugelas, Quinte-Curce, 579 ds Littré). Dér. de armer*; préf. dé(s)-*. Fréq. abs. littér. : 489. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 662, b) 738; xxes. : a) 720, b) 684. |