| * Dans l'article "DÉMÊLER,, verbe trans." DÉMÊLER, verbe trans. A.− [L'obj. désigne un inanimé concr.] 1. [L'obj. désigne gén. des fibres textiles, des cheveux, etc.] Séparer ce qui est emmêlé. Démêler les cheveux, du fil, un écheveau de soie (Ac.1835-1932).Démêler les rênes de son cheval (Balzac, Méd. camp.,1833, p. 117).Une paire de forts ciseaux à la main, (...) elle démêlait les bouts de corde, coupait les nœuds, quand ils résistaient (Zola, Bête hum.,1890, p. 39): 1. Elle déroula ses cheveux noirs, lourds comme de la laine mouillée. Il aurait fallu les démêler au peigne; elle les tordait seulement sur son poing.
Giono, Le Grand troupeau,1931, p. 48. ♦ Démêler la fusée (vieilli). Débrouiller le fil qui reste sur un fuseau. Proverbial et fig. Débrouiller une affaire compliquée : 2. L'Empire est un homme fini. Ce n'est plus là le Bonaparte de 1795. Il a été usé par la Royauté. Mais, lui pris, comment démêlera-t-on la fusée au point où en sont les choses, comment débrouillera-t-on ce chaos?
Chênedollé, Journal,1812, p. 70. − P. métaph. et au fig. Démêler l'écheveau embrouillé d'une affaire, le fil d'un discours. Toi, le premier, l'Empereur, tu as osé descendre ici vivant pour démêler ce nœud de la vie et de la mort (Claudel, Repos 7ejour,1901, II, p. 836).On s'étonnera de voir Mmed'Orgel, si fine, incapable de démêler des fils si gros (Radiguet, Bal,1923, p. 134). − Emploi pronom. à sens passif. De pareils cheveux ne se démêlent pas facilement. La soie floche ne se démêle qu'à grand'peine (Lar. 19e). 2. P. ext. Démêler une chose d'une autre, avec une autre. Démêler le bon grain avec le mauvais (Ac.1835-1932).Vous démêlez le bon grain de l'ivraie (Hugo, Corresp.,1824, p. 395): 3. Sais-tu seulement, toi [Kiki-La-Doucette], démêler trois, quatre odeurs embrouillées, tressées, fondues : une de taupe, une autre de lièvre, qui a passé vite, une autre d'oiseau qui s'est couché...
Colette, Sept dialogues de bêtes,1905, p. 63. − Spéc., VÉN. Démêler les voies de la bête. Distinguer la voie de l'animal de meute parmi les voies d'autres animaux. Les chiens ont bien démêlé la voie de leur cerf (Baudr.Chasses,1834) : 4. C'est ainsi que le chien distingue la piste du lièvre de celle du renard, (...); que parmi plusieurs cerfs, il démêle, à la trace, celui sur lequel il a d'abord été lancé, sans se laisser égarer par les ruses que l'animal poursuivi s'efforce d'opposer à cet instinct si sûr et si dangereux pour lui.
Cabanis, Rapports du physique et du moral de l'homme, t. 2, 1808, p. 340. B.− Au fig. Discerner un ou plusieurs éléments dans un ensemble de choses. 1. [L'obj. désigne ce à quoi s'applique le discernement] Démêler une affaire, une difficulté, un point d'histoire, une intrigue (Ac.1835-1932).Synon. éclaircir, débrouiller.Les ruses, les subtiles raisons du cœur que Marivaux démêlait si justement (Guéhenno, Jean-Jacques,1948, p. 244): 5. Si la discipline philosophique n'apprend pas à parler, c'est-à-dire à démêler et à communiquer sa pensée, vaut-elle la peine qu'elle coûte?
Amiel, Journal intime,1866, p. 534. ♦ Avoir à démêler avec qqn. Éclaircir, débrouiller avec quelqu'un une affaire complexe, d'où en débattre, se quereller. Avoir qqc. à démêler avec la justice. Qu'avez-vous à démêler ensemble? Ils ont toujours quelque chose à démêler l'un avec l'autre. Je n'ai rien à démêler avec vous (Ac.1835-1932).Synon. avoir affaire avec qqn.Il est parti. Le ciel soit loué, je n'aurai bientôt plus rien à démêler avec ce drôle-là (Leclercq, Proverbes dram.,MmeSorbet, 1835, 7, p. 160). ♦ N'avoir rien à démêler avec qqc. Nous n'avons rien à démêler avec les honneurs et les dignités. La richesse est déjà un assez beau lot (Sandeau, Sacs,1851, p. 2). − Emploi pronom. Se tirer d'une affaire, d'une situation délicate. Se démêler d'un mauvais pas. Il sut habilement se démêler de cet embarras. Il s'en démêlera comme il pourra (Ac.1835-1932).Il fallait tâcher de se démêler et se mettre en devoir de tenir, si l'on était attaqué (Erckm.-Chatr., Hist. paysan,t. 2, 1870, p. 203). 2. [L'obj. désigne le résultat du discernement] Démêler les causes, les influences, la part, le sens de qqc. La mission de la critique est de démêler et de dégager du milieu de ces erreurs les vérités qui peuvent et qui doivent y être mêlées (Cousin, Hist. philos. XVIIIes.,1, 1829, p. 559): 6. Pour Flaubert, (...) décomposer scientifiquement le travail d'une tête humaine, c'est analyser ces images qui affluent en elle, démêler celles qui reviennent habituellement et le rythme d'après lequel elles reviennent.
Bourget, Essais de psychol. contemp.,1883, p. 124. ♦ Démêler le vrai du faux, le vrai avec le faux. Il est bien difficile de démêler le vrai du faux dans ce que je raconte (Camus, Chute,1956, p. 1535). − [L'obj. est une prop. sub. interr.] « Il ne faut pas me juger » me disait-il parfois, sans que je puisse démêler s'il m'adressait une prière ou s'il me donnait un ordre (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 323). SYNT. Ne pas savoir démêler; il est facile, difficile, impossible de démêler; s'efforcer de démêler; arriver à, chercher à, parvenir à, avoir peine à démêler. C.− Fam. [L'obj. désigne une pers.] 1. Reconnaître quelqu'un dans un ensemble. Il [le chien] saura me démêler dans la foule, et me retrouver si quelque accident l'a séparé de moi (J. de Maistre, Soirées St-Pétersb.,t. 1, 1821, p. 357). 2. Comprendre une personne en discernant les mobiles de ses actes, de ses projets. Il n'est pas aisé à démêler (Ac.1835-1932) : 7. Anne-Marie écoutait Elmire et la démêlait mieux. Elle n'est pas venue me signifier qu'elle a barre sur moi par mon secret : simplement, elle a peur de Robert et des siens.
Pourrat, Gaspard des Montagnes,La Tour du Levant, 1931, p. 14. Rem. On rencontre ds la docum. a) L'adj. démêlable « qui peut être démêlé » en emploi subst. avec valeur de neutre. Nous sommes loin, en tout ceci, de vouloir réduire la part du démêlable (Breton, Les Manif. Surréal., 2eManif., 1930, p. 143). b) Le verbe trans. désemmêler synon. intensif de démêler au fig. Les mauvais jours, elles [mes idées] se pressent ensemble, s'enchevêtrent, et j'ai le plus grand mal à les désemmêler (Gide, Journal, 1902, p. 126). Prononc. et Orth. : [demεle], (je) démêle [demεl]. Ds Passy 1914, demi-longueur de la voyelle rad. Voyelle rad. fermée : Pt Rob., ou facultativement fermée : Warn. 1968. Enq. : /demel/ (il) démêle. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. « Faire cesser l'emmêlement » 1. a) ca 1170 desmedler « séparer et mettre en ordre » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 1157), attest. isolée; de nouv. 1497 (O. de Saint-Gelais, Ep. d'Ov. ds Gdf. Compl.); b) 1538 avoir à démêler qqc. (avec qqn) « être en contestation avec quelqu'un » (Est., s.v. habeo); 2. 1521 « deviner, comprendre » (Prec. des confer. de Calais ds Gdf. Compl.), attest. isolée; de nouv. 1643 (Corneille, Pompée, I, 3 ds
Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 4, p. 40); 1644 démêler qqc. de/d'avec « le discerner de » (Id., Rodogune, IV, 5, ibid., p. 487); av. 1654 « reconnaître une personne au milieu d'autres » (Sarasin, Poésies ds Rich. 1680) − 1878, Ac. B. 1. 1195 desmeler la meslee « mettre fin à un combat » (Ambroise, Guerre sainte, 164 ds T.-L.) − 1636 demeler un combat (Monet); 1475 desmeller un debat « apaiser un différend » (Archives du Nord, B 1698, fo16 rods IGLF); 1474 demeslé subst. masc. (Lettre de Louis XI ds Bartzsch, p. 62); 2. a) [1463 demeller des causes « mener un procès » (Ordonnance, ibid., p. 66)]; 1538 « rendre claire, intelligible une affaire compliquée » (Est., s.v. nodus); b) ca 1490 se desmeler de qqc. (Ph. de Commynes, Mémoires, III, 12, éd. J. Calmette, t. 1, p. 250). Dér. de mêler*; préf. dé-*. B 1 prob. dér. de se mêler « s'engager dans un combat » (début xiies., Roland, éd. J. Bédier, 257 − 1675, Mmede Sévigné, Lettres, éd. Monmerqué, t. 4, p. 34). Fréq. abs. littér. : 746. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 354, b) 1 007; xxes. : a) 1 194, b) 757. DÉR. 1. Démêlage, subst. masc.[Le compl. prép. de exprime un obj. concr.] Action de démêler. Démêlage des cheveux, d'un écheveau. a) Brasserie. Opération qui consiste à mêler l'eau chaude et le malt. Synon. brassage.b) Text. Action de démêler la laine pour la filer. Le démêlage des fibres. Les opérations principales communes à tous les genres de fils sont (...) le démêlage des touffes de fibres par cardage pour constituer un ruban (Encyclop. sc. et techn., Paris, Lidis, t. 2, 1974, p. 94).− [demεla:ʒ]. Demi-longueur de la voyelle rad. ds Passy 1914. Ds Ac. 1878 et 1932. − 1resattest. a) 1836 « action de démêler des objets » (Ac. Suppl.), b) 1836 « action de mélanger l'eau chaude et le malt » (ibid.), c) 1838 « action de démêler la laine pour la filer » (Ac. Compl. 1842); de démêler, suff. -age*; au sens b, dé- a une valeur intensive. − Fréq. abs. littér. : 1. 2. Démêlement, subst. masc.a) Vieilli. Action de démêler (une chose concrète). Je n'ai pu arriver au démêlement de mes cheveux (Lar. 19e). b) Au fig. Travail de démêlement de notions (Du Bos, Journal,1928, p. 89).Démêlement d'une intrigue (Nouv. Lar. ill.-Lar. encyclop.). − [demεlmɑ
̃]. − 1resattest. a) 1606 demeslement « action de débrouiller une intrigue, de négocier une affaire » (Boyvin du Villars, Mémoires, I ds Gdf. Compl.), b) 1611 « action de démêler des objets emmêlés » (Cotgr.); de démêler, suff. -ment1*. BBG. − Gohin 1903, p. 239 (s.v. démêlement). − Gottsch. Redens. 1930, p. 238. − Quem. 2es. t. 3 1972 (s.v. démêlage). |