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DOUTER, verbe.
I.− Emploi trans. et abs. Être dans le doute sur l'existence de quelque chose, la valeur ou la vérité d'une affirmation.
A.− Emploi trans. indir. Douter + prép. de.
1. Vieilli et littér. [Le compl. est un inf.] Hésiter à. Une seconde, il douta de pouvoir continuer (Estaunié, Ascension M. Baslèvre,1919, p. 293):
1. [le duc]. − Est-ce que vous douteriez d'intervenir, vous, Monsieur, si féru d'honneur, quand le renom, la gloire d'une famille seraient menacés par des éléments vils? J. de La Varende, L'Homme aux gants de toile,1943, p. 271.
2. Usuel
a) [Le compl. désigne un inanimé] Douter du zèle, de la probité de qqn, du succès de qqc. (Ac. 1835-1932). Coterie (...) où il était convenu qu'on est intelligent dans la mesure où on doute de tout (Proust, Swann,1913, p. 279).J'espère que tu ne doutes pas de l'affection que j'ai pour mes enfants (H. Bazin, Vipère,1948, p. 218).Cf. douteux ex. 1 et doute ex. 4 :
2. L'homme incertain est celui qui, en présence d'une représentation sensible ou intellectuelle, doute de ses propres fonctions et des rapports qu'elles posent, ou de la réalité d'un objet qu'ils semblent impliquer : ... Renouvier, Essais de crit. gén. 3eessai,1864, p. XXXI.
3. ... alors, pour la première fois, le Tarasconnais douta. Il douta du Monténégro, il douta de l'amitié, il douta de la gloire, il douta même des lions; et, comme le Christ à Gethsémani, le grand homme se prit à pleurer amèrement. A. Daudet, Tartarin de Tarascon,1872, p. 123.
[Accompagné d'une négation à valeur d'affirmation atténuée] Je ne doute pas de. Je suis sûr de. Je ne doute pas du résultat, de vos talents.
Ne douter de rien. Témoigner d'une assurance excessive en tranchant hardiment en matière d'opinion, en entreprenant des affaires hasardeuses. Un grand clerc d'avoué (...) fier et fort impertinent, ne doutant de rien, tranchant sur tout (Musset, Lettres Dupuis Cotonet,1836, p. 659).La jeunesse ne doute de rien (G. Leroux, Myst. ch. jaune,1907, p. 110).
[En incise avec en] À n'en pas douter. De façon certaine. Je sais, à n'en pas douter, que ces jeunes gens ressentent l'un pour l'autre (...) une tendresse réciproque (Guilbert de Pixér., Coelina,1801, p. 15).J'en doute fort. Il vaincra! − Peut-être! − En douterais-tu? − J'en doute (Cladel, Ompdrailles,1879, p. 253).[Avec négation] Je n'en doute pas, n'en doutez pas. Je reviendrai vous voir demain matin, reprit-il, n'en doutez pas, Corinne (Staël, Corinne,t. 1, 1807, p. 218).
SYNT. Douter de l'authenticité, de l'existence, de la réalité de qqc.; douter de l'amour, du courage, des intentions, de la parole, des sentiments, de la sincérité de quelqu'un.
b) [Le compl. désigne une pers.] Ne pas avoir confiance en quelqu'un, se défier de lui :
4. Doute du bonheur, fruit mortel; Doute de l'homme plein d'envie; Doute du prêtre et de l'autel; Mais crois à l'amour, ô ma vie; ... Hugo, Les Contemplations,t. 2, 1856, pp. 70-71.
Douter de soi. Ne pas être sûr de ses sentiments, de ses possibilités. Moment difficile pendant lequel on doute de soi, quand ce n'est pas des autres (Fromentin, Dominique,1863, p. 192):
5. Il est certain que j'ai trop douté de moi, jusqu'ici. Le doute de soi n'est pas l'humilité, je crois même qu'il est parfois la forme la plus exaltée, presque délirante de l'orgueil, une sorte de férocité jalouse qui fait se retourner un malheureux contre lui-même, pour se dévorer. Bernanos, Journal d'un curé de campagne,1936, p. 1221.
B.− Emploi trans. dir. Douter + prop.
1. Vieilli et littér. Douter + prop. interr. indir. + ind. ou cond.Je doute si je partirai demain (Ac.1878).Longtemps j'ai pu douter si Proust ne jouait pas un peu de sa maladie pour protéger son travail (Gide, Journal,1921, p. 694).
2. Usuel. Douter + prop. complétive
a) Douter que + subj.Je doute que le remède soit efficace (Flaub., Corresp.,1874, p. 163).
b) Ne pas douter que + ne explétif et le subj.Je ne doute pas qu'il ne vienne bientôt (Ac.1835-1932).Quant à mademoiselle Fellaire, il ne doutait pas qu'elle ne fût très riche (France, Jocaste,1879, p. 40).
[Avec suppression de ne pour exprimer un fait incontestable] Je ne doute pas que cela soit vrai, qu'il vienne.
[Avec l'ind.] Je ne doute pas que c'est un honnête homme. Il n'y a pas à douter que tous sauront retrouver (...) la même admirable unanimité (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 347).
Rem. Dans les phrases interr., on peut exprimer ou non le ne explétif. Doutez-vous qu'il ne vienne? Doutez-vous que je sois malade? (Ac. 1835, 1878).
C.− Emploi abs. Être dans le doute; avoir des doutes. Avoir le droit, des raisons de douter. On s'observe. On se scrute. On doute. On n'a jamais confiance en l'amour (Géraldy, Toi et moi,1913, p. 61).Et Michel n'a pas interrogé, pas douté. Il a accepté cette histoire grotesque, sans hésiter, sans se dire que c'était fou! (Cocteau, Par. terr.,1938, II, 12, p. 264).Cf. aussi doute ex. 2 :
6. Or, qui est-ce qui examine, qui est-ce qui doute, qui est-ce qui juge qu'il ne faut pas juger encore afin de mieux juger? Évidemment l'intelligence... Cousin, Hist. de la philos. du XVIIIes.,t. 2, 1829, p. 503.
Spécialement
1. PHILOS. Mettre en doute tout ce qui est proposé à l'intelligence. P. ext. N'être sûr de rien, faire preuve de scepticisme. En philosophie, en critique, c'est avoir beaucoup profité que d'avoir appris à douter (Ac.1878-1932).Cf. affirmer ex. 25 :
7. ... s'il existe à-la-fois dans la nature, seulement deux sceptiques, bien certains de cette seule chose, de se sentir douter, d'exister doutans, lequel des deux consentira à n'être qu'une modification de la vertu sentante et doutante de son camarade? Destutt de Tracy, Éléments d'idéologie,Logique, 1805, p. 296.
8. Celui qui doute ne peut pas, en doutant, douter qu'il doute. Le doute, même généralisé, n'est pas un anéantissement de ma pensée, ce n'est qu'un pseudo-néant, je ne peux pas sortir de l'être, mon acte de douter établit lui-même la possibilité d'une certitude... Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception,1945, p. 457.
2. RELIG. Être en proie au doute. Ne pas adhérer à la foi. Anton. croire.Oui, c'est entendu, je ne crois pas. Mais je doute, et mon doute est en faveur du mythe (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 270).Cf. doute ex. 8 :
9. Au delà des horizons de la science, il n'est pas plus sage de nier que d'affirmer. On doute, quelquefois on espère, puis la foi entre dans l'âme sans qu'on sache pourquoi ni comment; ... Ménard, Rêveries d'un païen mystique,1876, p. 201.
10. Ainsi perpétuellement je crois et je doute, je crois par un geste de mon cœur, je doute par une répulsion de mon intelligence; ... Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1906, p. 316.
II.− Emploi pronom. à valeur subjective. Se douter (de), (que).Avoir (une) idée de quelque chose, croire sur certains indices à une chose qu'on peut redouter. Être loin de se douter, avoir l'air de se douter de/que. (Quasi-) synon. conjecturer, deviner, pressentir, soupçonner.
A.− Se douter + prép. de.Se douter de l'infidélité de qqn, du retentissement de qqc., du travail de qqn. Elle [votre lettre] ne m'a rien appris de neuf, ou du moins je me doutais de tout ce que vous me dites (Flaub., Corresp.,1870, p. 120).
[En incise, avec en] Je m'en doutais bien, depuis longtemps; je m'en suis toujours douté; pouvais-je m'en douter; j'aurais dû m'en douter; on s'en doute! on s'en serait douté!
Fréquemment à la forme négative. Ne pas se douter de qqc.; ne se douter de rien. Ignorer (et de ce fait n'avoir aucune appréhension). Le dix-huitième siècle, qui ne s'est douté de rien, n'a douté de rien (Maistre, Constit.,1810, p. 24).À lire vos articles, si robustes, si puissants, personne ne se douterait de vos fatigues et de vos insomnies (Hugo, Corresp.,1869, p. 194).
[En incise avec en explétif] Je ne m'en doutais guère, pas, point :
11. Surtout, faites semblant de ne rien savoir, hein? Il croit que personne ne s'en doute. Chaque fois qu'il va la voir, il cherche des prétextes et il me donne des explications pendant dix minutes. Pagnol, Marius,1931, I, 4, p. 37.
B.− Se douter + complétive.Fréquemment à la forme négative
1. Se douter que + ind.Il ne se doutait pas qu'on l'avait vu. « Elle ne m'aimera jamais! elle ne se doute pas même que je l'adore! » (Gobineau, Pléiades,1874, p. 215).
2. Se douter que + cond.Et quand il [Bossuet] mit au net pour son royal élève ses rédactions d'école, il ne se doutait pas qu'un jour, on les prendrait si fort au sérieux (Massis, Jugements,1923, p. 30).
Rem. 1. On peut relever l'emploi du subj. après une prop. princ. à la forme négative, le subj. exprimant alors le doute. [Félicité] ne se doutant même pas qu'elle eût rien fait d'héroïque (Flaub., Trois contes, Cœur simple, 1877, p. 17). De même ds Littré : Je ne me doutais pas qu'il vînt; pouvais-je me douter qu'il dût venir si tôt; et Ac. 1798-1932 : Il ne se doutait pas qu'on eut des preuves contre lui. 2. On rencontre ds la docum. a) Doutant, ante, part. prés. employé comme adj. Vertu sentante et doutante (cf. ex. 7 supra). b) Doutable, adj., rare. Dont on peut douter. « Comment le savez-vous? » Il répondit : « C'est pas doutable » (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Père Judas, 1883, p. 103). c) Un adj. synon. et doublet du précédent dubitable. Dont on peut douter, sujet à caution. La transcription dubitable d'un interviewer (Bloy, Journal, 1894, p. 112).
Prononc. et Orth. : [dute], (je) doute [dut]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 « craindre » (Roland, éd. J. Bédier, 1186); 2. 1130-40 « être dans l'incertitude au sujet de quelque chose » doter de (Wace, Conception Notre-Dame, 1134 ds Keller, p. 69b); 3. id. « ne pas savoir que faire » emploi abs. (Id., 669, ibid., p. 91b); 4. 1580 « n'être sûr de rien, professer le scepticisme » (Montaigne, Essais, éd. A. Thibaudet, II, XII, p. 559); 5. début xives. se douter de (qqc.) (Vraie croiance, ms. Cambrai, C 246 fo6cds Gdf. Compl.). Du lat. class. dubitare « hésiter, douter ». Fréq. abs. littér. : 9 564. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 13 817, b) 12 558; xxes. : a) 13 152, b) 14 243. Bbg. Darm. Vie 1932, p. 156.