| DORIEN, IENNE, adj. et subst. A.− HIST. GR. (Qui est) originaire ou habitant de la Doride, région de la côte sud-ouest de l'Asie Mineure. Peuple dorien; race dorienne. Les Doriens. Peuple grec, venu du Nord, qui envahit la Grèce au cours du xiiesiècle avant J.-C. La main herculéenne des Doriens se retrouve dans les ruines des cités de la grande Grèce et de Sicile, dans les restes d'Agrigente, dans les colonnes de Pestum (Michelet, Hist. romaine,t. 2, 1831, p. 166): 1. ... à partir du xiiesiècle arrivèrent par flots successifs tous ces peuples du Nord-Ouest dont une partie sera connue un jour sous le nom de Doriens. Ce fut un bouleversement général. Les vieilles monarchies croulèrent; la splendeur de Mycènes s'évanouit à jamais.
G. Glotz, La Cité gr.,Paris, Albin Michel, 1968 [1928], p. 21. B.− Qui est relatif à la Doride, aux Doriens. Architecture dorienne. Synon. dorique.Amusante conversation sur l'opposition de l'art dorien et de l'art ionique, qui, pour Gide, symbolisent les deux courants éternels de l'art (Martin du G., Notes Gide,1951, p. 1402). 1. LING. Le dialecte dorien, le dorien. Langue parlée par les Doriens (supra A), l'une des quatre principales familles de dialectes de la langue grecque ancienne. Tout le groupe du dorien et des parlers dits occidentaux représente de façon certaine les dialectes des derniers envahisseurs survenus en Hellade (...) : cette invasion est communément désignée dans les traditions légendaires sous le nom de Retour des Héraclides (P. Chantraine, Morphol. hist. du gr.,Paris, Klincksieck, 1961 [1945], p. 20): 2. Les parlers doriens se ressemblent par leur aspect général; ils ont beaucoup de traits communs; mais presque pas un de ces traits ne leur est tout à fait propre; presque aucun n'est une innovation commune à tout le dorien et qui ne se retrouve par ailleurs. Si l'on n'avait des témoignages historiques précis qui établissent l'unité du dorisme, on serait très embarrassé pour en fournir la preuve linguistique.
A. Meillet, Aperçu d'une hist. de la lang. gr.,Paris, Hachette, 1913, p. 104. Rem. Dans ce sens, on emploie également, mais rarement, la forme dorique*. 2. MUS. Mode dorien. Mode principal de la musique grecque ancienne (considéré comme le seul digne de citoyens libres et honnêtes et utilisé pour les hymnes religieux et les chants lents et nobles). Deux lyres, dont l'une laisse échapper les tons graves du mode dorien, et l'autre les accords voluptueux de la molle Ionie (Chateaubr., Martyrs,t. 3, 1810, p. 91): 3. Au centre du système musical grec, s'inscrit le mode dorien, constitué par les huit sons compris entre les deux mi; au-dessous de lui se trouve le mode phrygien, compris entre deux ré; le mode lydien entre deux ut; le mode mixolydien entre deux si. Au-dessus du dorien, il y a le mode hypolydien construit sur l'échelle de fa, le mode hypophrygien sur l'échelle de sol, le mode hypodorien sur l'échelle de la.
O. Tiby dsHist. de la mus.,t. 1, 1974 [1960], p. 379 (encyclop. de la Pléiade). − P. ext. Relatif au plus grave des modes du plain-chant, commençant son octave au ré d'en bas et la finissant au ré d'en haut, la dominante étant à la quinte la. La Toccata dorienne [en ré mineur, de Bach] n'a pas d'introduction (Dupré, Improvis. orgue,1925, p. 70). Rem. On rencontre ds la docum. a) Qq. emplois subst. p. ell., dans ce sens. Le dorien ecclésiastique. Le dorien liturgique (Marnold, Mus. autrefois et auj., 1902-10, p. 297). b) Un emploi fig., connotant la discipline, la rudesse, la sévérité. En face de cet asiatisme [celui de Loti], combien je me sens dorien (Gide, Journal, 1932, p. 1134). Prononc. et Orth. : [dɔ
ʀjε
̃], fém. [-εn]. Ds Ac. 1762-1878. Étymol. et Hist. Av. 1658 luth dorien [Δ
ω
ρ
ι
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α
ν
φ
ο
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μ
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γ
γ
α] (Racine, Remarques sur Pindare, Ode I, éd. Hachette, t. III, 1864, p. 390). Empr., avec changement de suff., au gr.
Δ
ω
ρ
ι
́
ο
ς « dorien » (-ien*). Fréq. abs. littér. : 64. |