| DON1, subst. masc. I.− A. Action de donner, de céder gratuitement et volontairement la propriété d'une chose : 1. En 1953 j'avais fait remarquer que la vente ou le don du sang, lors des transfusions sanguines, constituait une transaction sur des biens aliénables...
David, La Cybernétique et l'humain,1965, p. 138. ♦ Loc. verbale. Faire don. On lui faisait don de ce manoir qu'elle habiterait toujours lorsqu'elle serait mariée (Maupass., Une vie,1883, p. 6). − DR. Synon. de donation.Don mutuel entre époux, entre vifs; don manuel*; don testamentaire. Un arrêté du préfet autorise l'acceptation des dons et legs (Baradat, Organ. préfect.,1907, p. 273). B.− P. ext. Action d'offrir quelque chose. Un don sans amour ne vaut guère mieux qu'un refus (Jankél., Je-ne-sais-quoi,1957, p. 99): 2. ... je m'entremets entre la finalité sans fin qui paraît dans les spectacles naturels et le regard des autres hommes; je la leur transmets; par cette transmission, elle devient humaine; l'art est ici une cérémonie du don et le seul don opère une métamorphose...
Sartre, Situations II,1948, p. 103. − Loc. verbale. Faire don. Je te ferai don du seul rosier qui te puisse augmenter car j'en exigerai la rose (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 893).À l'occasion des étrennes Auguste faisait don de pièces rares ou belles à son entourage (Hist. et ses méth.,1961, p. 373). C.− Au fig. 1. Action de (s')abandonner, de (se) remettre aux soins de quelqu'un, en se fiant à lui. Je crois qu'à vrai dire il n'y a pas de conversion s'il n'y a pas de don total (Green, Journal,1955-58, p. 5): 3. Son grand charme, (...) était sa naïveté de vierge, comme si son attente ignorée de l'amour lui avait fait réserver le don de son être, son anéantissement dans l'homme qu'elle aimerait.
Zola, Le Docteur Pascal,1893, p. 174. ♦ Spéc. Le don de son cœur*; le don de sa main*. Elle eût aimé à récompenser par le don de sa main celui qui la lui avait demandée quand elle était méprisée et pauvre (Gautier, Fracasse,1863, p. 452): 4. ... je suis au désespoir que Dieu n'ait pas inventé pour la femme une autre façon de confirmer le don de son cœur que d'y ajouter celui de sa personne.
Balzac, La Duchesse de Langeais,1834, p. 278. − Loc. verbale. [Le suj. désigne une femme] Faire don. Faire don de soi, de sa personne. Accorder ses dernières faveurs (cf. supra ex. 4). Elles [les anecdotes] incommodaient Ortensia, devenue prude depuis qu'elle avait appris l'amour, et le don de soi-même (Arnoux, Rossignol napol.,1937, p. 155). 2. Action de renoncer à quelque chose (en faveur de quelqu'un ou quelque chose) : 5. ... Il avait cru trouver une belle cause à laquelle faire le don de sa vie, qui ne l'intéressait plus que pour la sacrifier; ...
Rolland, Jean-Christophe,Les Amies, 1910, p. 1248. − Spéc. Don de soi, de sa personne a) Action de se sacrifier; renoncement, abnégation. L'erreur vécue en toute bonne foi, héroïquement et jusqu'au don de soi-même, participe à la vérité (Mauriac, Journal 3,1940, p. 216). ♦ Loc. verbale. Faire don de sa personne à la France (Mauriac, Bâillon dén.,1945, p. 389). b) Action de se dévouer entièrement à une personne ou à une cause. Il professait le socialisme avec une foi ardente, ayant fait le don de sa personne entière à l'idée d'une prochaine rénovation sociale (Zola, Argent,1891, p. 39): 6. Pour Claire, l'amour n'est qu'un commencement, un prétexte, une lumière; c'est le don de soi, constant et multiple, qui lui est nécessaire...
Chardonne, Claire,1931, p. 137. II.− P. méton. A.− Ce qu'on donne sans rien recevoir en retour. Faire, recevoir un don; combler qqn de dons. Le soir, en dînant, on cause des dons au clergé, de la main à la main, et qui échappent à la justice (Goncourt, Journal,1863, p. 1244).On trouva, au milieu de modestes offrandes, un don anonyme de deux cent mille florins (Michelet, Chemins Europe,1874, p. 320): 7. L'avenir départagera l'Allemagne et la France... il fera à toutes deux ce don magnifique, l'Europe...
Hugo, Actes et paroles 3,1876, p. 348. ♦ En don. Une aide annuelle d'environ 140 millions de dollars en dons et prêts bilatéraux (Univ. écon. et soc.,1960, p. 3802). − HIST. Don gratuit. ,,Don que les assemblées du clergé, ou les états des provinces, faisaient au roi, pour subvenir aux besoins de l'État`` (Ac. 1835, 1878). Le clergé, en France, ne consentait au prince qu'un don gratuit et le percevait lui-même (Lefebvre, Révol. fr.,1963, p. 49). B.− P. ext. 1. Bienfait, faveur. Chaque jour est un don de Dieu. La beauté est-elle un piège? Je ne puis le croire. Qui oserait dire qu'elle n'est pas un don de Dieu? (Green, Journal,1950-54, p. 178): 8. Mais, quelques mois après, dans un riche équipage,
Entouré de valets, d'esclaves, de flatteurs,
Comblé de dons et de faveurs,
Il vient de sa fortune au vieillard faire hommage : ...
Florian, Fables,Le Renard déguisé, 1792, p. 127. ♦ Don gratuit. Don totalement désintéressé. Ce que tu auras de vie est un don gratuit; mille qui valaient mieux que toi ont été écrasés dès leur naissance (Taine, Notes Paris,1867, p. 265). − Littér. Les dons de la terre; les dons de Bacchus, de Cérès, de Flore, de Pomone. Les dons de la Fortune. Les richesses. 2. En partic. Qualité ou faveur extraordinaire, avantage venant de Dieu ou de la nature. La foi est un don de Dieu (Ac.). La continence est un don (Sainte-Beuve, Volupté,t. 2, 1834, p. 42).Vous avez ce grand don de l'écrivain : rendre le lecteur pensif (Hugo, Corresp.,1870, p. 261).La sincérité est un don rare dans l'art (Rolland, Beeth.,t. 2, 1937, p. 381): 9. L'esprit [selon Helvétius] doit être considéré non comme un don de la nature mais comme un effet de l'éducation.
Cousin, Philos.,1857, p. 174. 10. Je songe aux quatorze belles vierges qui, au porche nord de la cathédrale de Chartres, représentent les quatorze dons sublimes de l'âme et du corps, les quatorze béatitudes qui fleuriront quand le monde aura été jugé et renouvelé, ...
Barrès, Cahiers,t. 14, 1922-23, p. 14. SYNT. Le don de prophétie, d'ubiquité, de voyance, de seconde vue; le don d'autoscopie des somnambules; le don des langues, des miracles, de la divination; les sept dons du Saint-Esprit. a) Qualité, disposition innée, inclination naturelle (pour quelque chose). Chez lui, comme chez Bossuet, les dons oratoires éclipsent les autres (Bremond, Hist. sent. relig.,t. 3, 1921, p. 592).Les financiers, (...) ne sont clairvoyants qu'en finances. C'est un don, une bosse; pour le reste, des idiots (Morand, Lewis,1924, p. 92).Suzanne admirait beaucoup de si grands dons de comédien (Duhamel, Suzanne,1941, p. 225): 11. J'ai souvent pensé, monsieur, qu'il y avait en moi, du fait non de mes faibles dons, mais de circonstances que vous apprendrez peut-être un jour, un trésor d'expérience, ...
Proust, Le Côté de Guermantes 1,1920, p. 287. ♦ P. iron. C'est un don. Les Sescourt sont malheureux dans toutes leurs entreprises (FrancePt bonh.,1898, 1, p. 53). − Avoir le don de + subst. Avoir le don de l'arithmétique, de la musique, des dates, de l'imitation. b) Faculté, pouvoir. − Avoir le don de + inf. Mon attitude eut le don de calmer le ministre (Joffre, Mém.,t. 1, 1914, p. 207).Vous avez le don de plaire. Respectez cette vertu qui a été mise en vous (Barrès, Cahiers,t. 14, 1922-23, p. 105): 12. Le sujet était du petit nombre des faits historiques qui, dès lors, avaient par exception le don de m'émouvoir beaucoup.
Fromentin, Dominique,1863, p. 56. En mauvaise part ou p. iron. Deschartres qui avait le don de rendre ennuyeuses des choses plus intéressantes (Sand, Hist. vie,t. 1, 1855, p. 62).Vous avez le don de me porter sur les nerfs (Courteline, Ronds-de-cuir,1893, 2etabl., 1, p. 59).Nos excellents camarades et amis révolutionnaires ont le don de m'agacer (Valéry, Corresp. [avec Gide], 1898, p. 308).♦ Le don des larmes. La faculté de pleurer. Je n'ai jamais eu de sensibilité, j'ai toujours ignoré le don des larmes (Lorrain, Phocas,1901, p. 287). − Spéc. [Dans les contes de fées] Faculté le plus souvent merveilleuse accordée par une fée à un enfant. La fée décida de distribuer ses dons à la fille et au garçon (Guéhenno, Jean-Jacques,1950, p. 155). Prononc. et Orth. : [dɔ
̃]. Ds Ac. dep. 1694. Homon. dom, donc (en cas d'élision), dont. Étymol. et Hist. 1. 2emoitié xes. faire don (Passion, éd. d'A. S. Avalle, 302); 2. ca 1100 « ce qui est donné » (Roland, éd. J. Bédier, 3210); 3. a) ca 1130 « sort, lot, destin (malheureux) » (Couronnement Louis, 707 ds T.-L.); plus souvent 1370-72 « bénédiction, grâce, faveur du ciel » don de Dieu (Oresmes, Trad. Ethiques d'Aristote, éd. A. D. Menut, I, 14, p. 129); b) xvies. « faculté innée » don de prophétie (Amyot, Agis et Cléom., 11 ds Littré). Du lat. class. donum « action de donner, présent ». STAT. − Don1 et 2. Fréq. abs. littér. : 5 428. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 8 337, b) 11 701; xxes. : a) 5 081, b) 6 645. BBG. − Don et ses dér. Actual. terminol. 1974, t. 7, no3, p. 4. |