| DOGUE, subst. masc. A.− [Désigne un animé] 1. Chien de chasse et de garde, trapu, au museau écrasé, à fortes mâchoires et lèvres pendantes. Dogue allemand; féroce, fidèle, vigoureux comme un dogue. Cf. alain, ex.Autour de lui [le roi Krogold], les 23 dogues jappent, bondissent, escaladent... Sa meute est célèbre dans les combats d'ours et d'aurochs... Ils ont dépecé, ces molosses, des forêts entières (Céline, Mort à crédit,1936, p. 175): 1. Du reste Augustine avait le physique du dogue, une figure courte et ramassée, de petits yeux bridés, des pommettes saillantes, un nez écrasé, des dents que la lime avait séparées et qui ressemblaient à des crocs.
E. de Goncourt, La Fille Élisa,1877, p. 123. 2. P. métaph. et au fig. Personne ou chose dont la physionomie, le comportement, la fonction rappellent ceux d'un dogue. a) [En parlant d'une pers.] Le vétérinaire écarquillait les yeux, avec un froncement du nez et de la bouche, tout un remûment de son museau de dogue bonhomme et brutal (Zola, Terre,1887, p. 51).Le dogue, qui est le propriétaire et l'interprète, me dit, à voix presque basse, avec un fort accent : « Monsieur le Directeur de l'Hôpital français, il est venu dîner ici, cette semaine » (Malraux, Conquér.,1928, p. 18).Cf. aussi bouche ex. 14. − P. plaisant., vx. [P. allus. aux fonctions de Cerbère aux enfers et au caractère acariâtre gén. attribué aux concierges] Portier, portière. L'affreux dogue coiffé sortit de sa loge (Gautier ds Lar. 19e). − Personne fruste et violente. C'est un dogue. Si un moment les dogues qui font la garde à la porte de « l'ergastulum » se relâchaient de leur violence, malheur! ce serait fini (Renan, Avenir sc.,1890, p. 333). ♦ Fam. Humeur de dogue. Méchante humeur. Les amours, ça ne devait pas marcher sur des roulettes. D'où cette humeur de dogue (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 361). b) [En parlant d'un obj.] Sur les sept Océans erraient des escadres pareilles, croiseurs et cuirassés, chiens de garde, dogues de l'Empire, qui imposaient à l'univers le respect du plus humble citoyen anglais! (Tharaud, Dingley,1906, p. 53). B.− P. anal., dans l'anc. mar. Dogue d'amure. Trou pratiqué dans le plat-bord d'un navire, présentant à son orifice extérieur un masque de chien aboyant et abritant un réa destiné à faciliter la manœuvre de l'amure de la grande voile (d'apr. Jal1) : 2. L'ouragan, comme un bourreau pressé, se mit à écarteler le navire. Ce fut, en un clin d'œil, un arrachement effroyable, les huniers déralingués, le bordage rasé, les dogues d'amures déboîtés, les haubans saccagés...
Hugo, L'Homme qui rit,t. 1, 1869, p. 103. Prononc. et Orth. : [dɔg]. Demi-longueur de la voyelle ds Passy 1914. Commentaire intéressant de Rouss.-Lacl. 1927 : ,,Les voyelles toniques suivies, dans la prononciation, d'une des consonnes sonores b, d, g, l, n, n̬, m (...) tendent à s'allonger, ce qui porte a, e, o à s'ouvrir légèrement, et i, u, ou à se fermer``. Précisions quant au degré d'ouverture à partir duquel jouent respectivement l'infl. fermante et l'infl. ouvrante ds G. Straka, Durée et timbre vocaliques ds Calzia Festschrift, Z. Phonet. Sprachwiss. Enq. /dog/. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Fin xives. Franche dogue [dist un Anglois] « chien de Français » (E. Deschamps, éd. Queux de St Hilaire, t. V, p. 48, 1); 1406 terme d'injure à l'égard des Français (Comm. marit. de Rouen, II, 281, éd. Fréville ds Bonn.); 1480-81 dougues ... venuz d'Angleterre (Douët-d'Arcq, Comptes de l'Hotel, Paris, 1865, p. 388); 2. au fig. 1536 fém. (R. de Collerye, Dialogue de deux enfants, p. 109 ds Hug. : des vieilles dogues); 3. 1806 fam. être d'une humeur de dogue (Courier, Lettres Fr. et It., p. 707). Empr. à l'angl.dog « chien ». Fréq. abs. littér. : 207. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 398, b) 468; xxes. : a) 282, b) 119. Bbg. Pamart (P.). Néol. Vie Lang. 1971, p. 370. − Sain. Sources t. 1 1972 [1925], p. 172, 417. |