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DISLOQUER, verbe trans.
I.− Emploi trans.
A.− [Le compl. désigne un élément d'un tout]
1. [En parlant du corps hum.] Faire sortir (un membre) de son articulation. Disloquer un bras, un pouce, une clavicule. Synon. déboîter, désarticuler, luxer.Je parvins à faire tourner la clef; mais je déchirai mes gants jaunes et me disloquai la paume de la main (Mérimée, Dern. nouv.,1870, p. 19).
2. P. anal. Sortir de son attache (une partie d'un objet). Disloquer un pied de table. C'était odieux, à la fin, ce remue-ménage! À croire vraiment qu'il [Pierre] le faisait exprès. Pas un joli objet qu'il ne disloquât (Morand, Homme pressé,1941, p. 281).
B.− [Le compl. désigne ce qui forme un tout]
1. [En parlant du corps hum.] Désarticuler. Disloquer un condamné. Le soumettre à une torture qui consiste à lui disloquer les articulations des bras et des jambes. Quand j'ai su, reprit-elle [Belette à Colas], ta rixe avec cet autre (...). Je ne veux pas d'un mari détrenché, disloqué. Je te veux tout entier (Rolland, C. Breugnon,1919, p. 131).
P. ext. Déformer, désorganiser. Une sorte de danse de Saint-Guy disloque tous ses mouvements (Sarraute, Être soupçon,1956, p. 24).
2. P. anal. [L'obj. désigne des choses]
a) Disjoindre les éléments d'un tout de manière à causer des dissociations, des déboîtements. Disloquer un bahut, une chaise, un perron, un escalier, un livre. Ce jardin où les racines ont disloqué les tombes (Tharaud, Rabat,1918, p. 203).
P. métaph. Forces qui disloquent l'édifice du moi (Mounier, Traité caract.,1946, p. 528).
b) P. ext. Déformer, briser (quelque chose), détruire la linéarité, la continuité de. Disloquer une ligne, une forme. Dans les opéras les plus célèbres on entend chaque jour des passages où les vers de l'auteur du livret ont été disloqués par le compositeur (Berlioz, Grotesques mus.,1869, p. 218).Phrases qui ne peuvent se lire tout haut sans disloquer la voix (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 115).L'éclairage caravagesque avait commencé par disloquer la forme (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 158).
3. P. ext. Séparer les éléments de (un groupe, un rassemblement, etc.) souvent d'une manière plus ou moins violente, désordonnée. Masse chargée de disloquer le front ennemi (Joffre, Mém.,t. 1, 1931, p. 405):
1. Quel évènement avait pu soudain métamorphoser ces groupes de Sévillans rieurs, si vite disloqués par la curiosité et la sieste, en un bloc de force et de haine? Morand, Le Flagellant de Séville,1951, p. 51.
P. métaph. État disloqué par vingt ans de guerre civile; disloquer un ménage, une alliance :
2. Ces vitesses désormais utilisables (...) répandent le goût d'une mobilité sans frein ni mesure et favorisent des modes de vie qui, disloquant la famille, troublent profondément l'assiette de la société... Le Corbusier, La Charte d'Athènes,1957, p. 504.
4. [Sans idée de violence ni de désordre] Décomposer ce qui forme un tout en ses différentes parties. Disloquer une machine. La démonter. Synon. démonter, défaire, dissocier.Plongé dans des températures incroyables, le naphte y est disloqué, décomposé en essence et sous-produit (Morand, Route Indes,1936, p. 249):
3. ... la tête protégée par un sac, les mains gantées, des hommes disloquent une fournée faite de colonnes d'argile rose où, dans sa coque de brique, la porcelaine ivoirine mûrit comme une amande. Chardonne, Les Destinées sentimentales,Pauline, 1934, p. 177.
− Domaine milit.Disloquer une armée, une troupe. La répartir entre divers points au cours d'un combat, divers cantonnements après un combat, diverses garnisons en temps de paix. Voilà une brigade qu'on disloque en deux morceaux, placés très loin l'un de l'autre (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 19).
II.− Emploi pronom.
A.− [En parlant d'un élément] Se désarticuler, se déboîter (supra I A). Soudain, le dossier de la chaise craqua et se disloqua entre ses grosses mains [de Léopold] (Aymé, Uranus,1948, p. 160).
B.− [En parlant de ce qui forme un tout] Se disloquer dans des tours d'adresse; ses articulations se disloquent à merveille. Son corps semblait se disloquer à chaque pas qu'il faisait (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 321).
C.− P. ext.
1. Se défaire, éclater, se désagréger. La banquise, les champs de glace se disloquent. La couverture jaune se fane et s'écorne, le dos se fend, le livre se disloque sans qu'on en prenne le moindre soin (France, Vie littér.,1892, p. 20).La chambre des cartes, le rouf se disloquèrent, les panneaux volèrent en éclats (Peisson, Parti Liverpool,1932, p. 249).
Au fig. Le parti du gouvernement se disloque; la société se disloque; sa personnalité, son moi se disloque; les choses se disloquent dans sa tête :
4. Mourir, oui, mourir. Se disperser, se disloquer, et, comme cet iceberg spongieux, s'anéantir soudainement par déliquescence. S'évanouir. Cendrars, Les Confessions de Dan Yack,1929, p. 175.
2. [Sans idée de désordre, ni de violence; en parlant d'un groupe] Le cortège de disloque. Le groupe se disloqua. Marcelline s'en alla seule; les autres reprirent leur promenade (Daniel-Rops, Mort,1934, p. 55).
Rem. On rencontre ds la docum. a) Le part. prés. et adj. disloquant, ante. Qui disloque, est propre à disloquer. La dialectique perpétuellement disloquante par laquelle la vérité, comme la vie, se reproduit et progresse (Mounier, Traité caract., 1946, p. 663). b) Le subst. masc. disloquement. État de ce qui est disloqué, dislocation. Alors il [l'Africain] se mit à chanter Izéphar, à rire (...) à gambader malgé le disloquement de ses membres, et tout à coup il tomba mort (Chateaubr., Natchez, 1826, p. 482).
Prononc. et Orth. : [dislɔke], (je) disloque [dislɔk]. Passy 1914 admet également la prononc. [diz-]. Mais l'action sonorisante de la liquide est rare à cause de la graph. s qui protège le son dur. Cette infl. de l'orth. sur la prononc. est caractéristique du fr. Comme pour disjoindre et peut-être davantage, la prononc. en [z] paraît relâchée. Le verbe est admis ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1546 méd. (R. Est., Dict. Latino-gallicum, 752bd'apr. Vaganay, Hist. fr. mod.); 2. 1580 fig. « rompre l'unité d'un ensemble » ici en parlant de l'âme (Montaigne, Essais, III, X, éd. A. Thibaudet, p. 1125); 1831 pronom. (Hugo, Feuilles automne, p. 711); 3. 1842 p. ext. « séparer violemment » (Balzac, Autre ét. femme, p. 408). Empr. au lat. méd. médiév.dislocare « disloquer » ca 1250 d'apr. Latham; disloquer est le doublet savant de desloer, desloier « luxer » (1168-91 Chr. de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 4387 − xvies., Hug.) issu d'un lat. vulg. *dis-locare. Fréq. abs. littér. : 144. Bbg. Quem. 2es. t. 3 1972.