| DÉPLAIRE, verbe trans. indir. A.− Emploi trans. indir. 1. [Le suj. désigne une chose ou une pers.] Ne pas plaire, ne pas être agréable (à). a) [Le suj. désigne une chose concr. ou une pers. considérée dans son aspect physique] Déplaire à qqn. Ne pas répondre aux goûts, à la sensibilité de quelqu'un. Cela me répugnerait trop. Ton aspect me déplaît souverainement (Soulié, Mém. diable,t. 1, 1837, p. 25).Madame, la fumée de tabac vous déplaît-elle? (Soulié, Mém. diable,t. 1, 1837p. 160). − Emploi abs. Ne pas répondre au goût général, à des critères esthétiques. Le goût : (...) est l'instinct prompt et délié de ce qui doit plaire ou déplaire. C'est la conscience du beau (Chênedollé, Journal,1833, p. 162): 1. La musique concrète s'inscrira, s'il se trouve, dans un phénomène de mode, plaira et déplaira, surprendra et lassera aussi vite. L'expérience concrète en musique n'a rien à voir, pour le moment, avec le goût du public et l'humeur de la mode.
Schaeffer, À la recherche d'une mus. concr.,1952, p. 124. b) [Le suj. désigne une chose abstr. ou une pers. considérée dans son comportement] Synon. coûter, faire souffrir, rebuter; anton. charmer, plaire, ravir. − Ne pas procurer de satisfaction psychologique, morale; ne pas répondre aux aspirations de : 2. C'est l'unanimité que j'aime et que je demande. Une seule voix discordante, et le monde me déplaît, me dégoûte, me fait horreur. (...) Il voudrait, de toute son âme, être un conciliateur. C'est un rôle qui lui plaît et qu'il joue avec grâce.
Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Désert de Bièvres, 1937, p. 194. − Emploi réfl. ou réciproque. Quand on se déplaît et qu'on se hait ou se méprise en soi-même, on peut se plaire, se glorifier et s'honorer en Dieu (Maine de Biran, Journal,1817, p. 91).Lucien et lui se déplurent mutuellement (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 370). ♦ Souvent en tournure négative avec un suj. pronom. neutre et fam. On me regarde beaucoup, ça ne me déplaît pas (Colette, Cl. école,1900, p. 301).Sa voiture légère, qu'il poussait à fond. Ce n'était pas pour me déplaire (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 292). ♦ À la tournure impers. Il (ne) me déplaît (pas) que/de. Il déplaît à l'homme d'être inférieur, et toute obligation nous met dans cet état subalterne (Amiel, Journal,1866, p. 101).Bien qu'il ne se permît pas de discuter les actes de son héros, il lui déplaisait que celui-ci eût pensé à des choses laides (Rolland, J. Chr.,Aube, 1904, p. 81). − En partic., domaine des relations amoureuses. Ne pas susciter l'amour. Je ne lui déplais pas. Aussi tout mon esprit, tout ce que je puis avoir de charme, lui est consacré, avec un abandon et une soumission entière (Constant, Journaux,1814, p. 418): 3. Mais si grande était ma crainte de vous déplaire par trop de hardiesse, que les termes dans lesquels je vous écrivis ne vous permirent sans doute pas d'être fixé sur mes sentiments. Je n'osais vous parler de mon amour, et j'en mourais.
Montherlant, Les Jeunes filles,1936, p. 919. 2. [Le suj. désigne une personne et son comportement] Heurter quelqu'un dans son amour-propre, dans ses sentiments; causer de la peine; offenser. Cette fille-là me choque et me déplaît (Collin d'Harl., Vieux célib.,1792, IV, 7, p. 104).Regard froid, âme brûlante. Cela fait peur, irrite, déplaît, suscite la méfiance (Barrès, Cahiers, t. 3, 1902-04, p. 278). − Loc. fam. [Pour marquer une opposition] a) N'en déplaise à (cf. Constant, Journaux, 1804, p. 142).(Quasi-)synon. en dépit de, malgré. b) Ne vous déplaise (cf. Huysmans, En route, t. 1, 1895, p. 180)variante du précédent ne vous en déplaise (cf. Jouy, Hermite, t. 5, 1814, p. 209). ♦ Avec une nuance d'excuse. Que cela ne vous fâche pas. ♦ Avec une nuance d'ironie. Tant pis si cela vous fâche. SYNT. a) Déplaire + adv. : déplaire également, fort, singulièrement. b) Déplaire + prép. à + subst. : déplaire à une altesse, au maître, aux/à des personnes, au roi. c) Subst. + prép. de + déplaire : malheur, peur, (au) risque de déplaire. d) Déplaire + prép. à/de + verbe : déplaire à/de voir; verbe + prép. de + déplaire : craindre de déplaire. e) Verbe auxil. + déplaire : devoir, pouvoir déplaire. PARAD. a) (Quasi-)synon. blesser, choquer, contrarier, fâcher, froisser, gêner, indisposer, offusquer, vexer. b) (Quasi-)anton agréer, plaire. B.− Emploi pronom. (comme verbe subjectif). Être mal à l'aise dans un lieu. Synon. ne pas être à son aise, dans son élément, s'ennuyer; anton. être à son aise, se plaire. 1. [En parlant de pers.] :
4. Sans doute, chaque fois que je lui avais demandé si elle ne se déplaisait pas chez moi, elle m'avait toujours répondu qu'elle ne savait pas où elle pourrait être plus heureuse. Mais souvent ces paroles étaient démenties par un air de nostalgie, d'énervement.
Proust, La Prisonnière,1922, p. 177. 2. P. anal. [En parlant de plantes ou d'animaux] Ces plantes se déplaisent en cet endroit (Ac.1835). Rem. Le part. passé déplu est toujours inv. même accompagné de l'auxiliaire être à la forme pronom. Cf. complaire rem. Prononc. et Orth. : [deplε:ʀ], (je) déplais [deplε]. Enq. : /deple, (D)/ (il) déplaît. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1160 « ne pas plaire (à quelqu'un), le mécontenter » (Eneas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 4371); 1577 se desplaire « être fâché, être triste » (R. Belleau, La Reconnue, IV, 3 ds Hug.); 1613 n'en desplaise a (Regnier, éd. G. Raibaud, XIV, 130); 1643 « s'ennuyer, ne pas se plaire (quelque part ou avec quelqu'un) » fig. (Rotrou, St Genest, éd. E.-T. Dubois, II, 7). Dér. de plaire*; (préf. de(s)-), d'apr. le lat. class. displicere « déplaire ». Fréq. abs. littér. : 1 912. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 3 039, b) 2 627; xxes. : a) 2 516, b) 2 616. |