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DÉMON, subst. masc.
A.− MYTHOLOGIE
1. Esprit bon ou mauvais qui préside aux destinées de l'individu, de la communauté :
1. Ces âmes humaines divinisées par la mort étaient ce que les Grecs appelaient des démons ou des héros. Les Latins leur donnaient le nom de lares, mânes, génies. Fustel de Coulanges, La Cité antique,1864, p. 20.
2. P. ext.
a) Génie qui détermine les sentiments, les comportements humains, qui inspire les productions artistiques. Étouffez les conseils du démon qui vous pousse (Delavigne, Enf. d'Édouard,1833, I, 6, p. 37):
2. ... car ce sont eux qu'on retrouvera, quand ils auront trop cruellement porté la peine de leur affectation, passant toute une vie à essayer vainement de réparer, par une tenue sévère, protestante, le tort qu'ils se sont fait quand ils étaient emportés par le même démon qui pousse des jeunes femmes du faubourg Saint-Germain à vivre d'une façon scandaleuse, à rompre avec tous les usages, à bafouer leur famille, ... Proust, Sodome,1922, p. 623.
3. ... dans l'excitation du jeu et du succès, porté par sa propre musique, il [Mozart jouant ses concertos] dépassait d'un bond ce qu'il avait conçu, ce qu'il venait d'exécuter, il lâchait son démon... Ghéon, Promenades avec Mozart,1932, p. 262.
Expressions
Le Démon de Socrate. Le génie inspirateur de Socrate. Puisque Socrate avait son bon démon, pourquoi n'aurais-je pas mon bon ange (...)? Il existe cette différence entre le démon de Socrate et le mien, que celui de Socrate ne se manifestait à lui que pour défendre, avertir, empêcher, et que le mien daigne conseiller, suggérer, persuader (Baudel., Poèmes prose,1867, pp. 216-217).
Démon familier. Bon génie souvent attaché à une personne. Tes démons familiers ont accompli ton vœu! (Leconte de Lisle, Poèmes trag.,1886, p. 136):
4. En prenant les noms des figurants de notre troupe, ce matin, nous sommes étonnés de la quantité de garçons et de filles qui portent le nom de Zigla. C'est aussi le nom d'un démon familier de la brousse que vont invoquer (et auquel vont sacrifier un cabri) les femmes qui attendent en vain un enfant. Si elles obtiennent enfin une grossesse, elles font vœu de donner à l'enfant le nom du génie. Gide, Le Retour du Tchad,1928, p. 886.
Avoir de l'esprit comme un démon. Avoir de l'esprit, être spirituel :
5. la comtesse. − Oh! que je voudrais voir un bal masqué, ...! marton. − ... elle qui, à visage découvert, a de l'esprit comme un ange, sous le masque, elle en aurait comme un démon. Dumas père, Un Mariage sous Louis XV,1841, II, 7, p. 142.
b) En partic. (avec influence de B). Personnification d'un vice, d'un défaut. Démon de la jalousie, de l'orgueil. Ces dérisions amères caractérisent ce véritable démon de la guerre (Michelet, Hist. romaine,t. 2, 1831, p. 47):
6. Le démon de la luxure m'a tenté toute ma vie de diverses manières, et les plus rudes tentations ne me vinrent pas de la rencontre d'une femme, même belle et parfumée. Elles me vinrent de l'image d'une femme absente. A. France, L'Île des pingouins,1908, p. 25.
3. Au fig.
Démon, petit démon. Enfant vif, espiègle, turbulent :
7. (...) j'aime mieux Cet essaim d'innocents, petits démons joyeux [les enfants] (...) Que la foule acceptant le crime en pleine fête (...). Hugo, L'Art d'être grand-père,1877, p. 227.
Comme un démon. Vigoureusement, énergiquement, avec ardeur. Je travaille comme un démon, me levant à trois heures et demie du matin (Flaub., Corresp.,1835, p. 21).
Faire le démon (vieilli). Faire du bruit, tourmenter. Elle a donc bien fait le démon? (Leclercq, Proverbes dram.,1835, 8, p. 88).
B.− RELIG. [Dans la tradition chrétienne]
1. Ange révolté contre Dieu, damné, qui pousse les hommes à faire le mal. Œuvre du (d'un) démon; piège du démon; possédé du (par un) démon :
8. Persévère, Antoine! C'est par la pénitence que tu vaincras le démon. Fais-toi souffrir, mortifie-toi, macère-toi! Et quand le cal sera venu sur la croûte sèche de tes plaies et que ton esprit n'imaginera plus rien pour tourmenter ta chair fatiguée, va-t'en, cours au martyre! Flaubert, La Tentation de St-Antoine,1849, p. 272.
9. ... et l'enfer s'ouvrait sous ses pieds. Elle en ressentait les horreurs, ce feu si vif, si dévorant, les hurlements rauques des damnés, et ces effroyables profondeurs de ténèbres et de brasiers. Sa pensée s'arrêtait sur les démons; elle eût voulu être l'un d'eux, car ils sont seulement bourreaux, et les tourmenteurs, assurément, souffrent moins que les tourmentés. Bourges, Le Crépuscule des dieux,1884, p. 258.
Rem. Le Démon, subst. déterminé par l'art. déf., signifie le Prince des démons. Synon. Le Diable, Belzébuth, Lucifer, Satan :
10. Les anges sont tombés à cause de la faiblesse de leur volonté. Les philosophes ont appelé le diable le Prince des démons. Théol. cath.,t. 4, 1, 1920, p. 347.
2. P. anal. Individu qui incarne le mal; personne méchante, néfaste :
11. ... cet homme est un démon. Et elle demeura comme foudroyée par ce dénouement imprévu, en se demandant si elle ne luttait point avec l'enfer en personne, ... Ponson du Terrail, Rocambole,t. 3, 1859, p. 201.
Rare. Monstre.
12. Elle accoucha en plein champ par un matin de printemps. Quand les sarcleuses, accourues à son aide, virent la bête qui lui sortait du corps, elles s'enfuirent en poussant des cris. Et le bruit se répandit dans la contrée qu'elle avait mis au monde un démon. C'est depuis ce temps qu'on l'appelle « La Diable ». Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, La Mère aux monstres, 1883, p. 369.
3. Au fig. Démon de midi. Exacerbation sentimentale et sexuelle qui se manifeste chez les êtres humains, en particulier chez les hommes, vers le milieu de leur vie :
13. ... et sa prière faite, il se remettait à écrire. Rien d'aussi pacifiant. Écrire, c'est-à-dire, vivre sans vivre, s'occuper de soi et s'oublier. Après la prière, les anciens moines copistes n'avaient pas d'arme plus sûre contre le démon de midi. Ainsi de nos solitaires. Bremond, Hist. littér. du sentiment relig.,t. 4, 1920, p. 249.
Rem. On rencontre ds la docum. a) Le subst. masc. démoncule. Petit démon. Je défie les fées et les satanilles, le paludisme et les démoncules (Arnoux, Rhône, 1944, p. 354). b) Le subst. fém. démonisation. Action de rendre démon, démoniaque. La possibilité du consentement ne peut être comprise que si l'on fait abstraction de cette divinisation du vouloir, qui est en réalité sa démonisation (Ricœur, Philos. volonté, 1949, p. 27). c) Le subst. fém. démone, rare. Démon féminin; femme méchante. Sous le faix de tresses enlacées en haut de la nuque laiteuse, elle se riait des propos, des sourires, des brocards et des louanges, telle une démone ironique sachant les causes inconnues de l'univers, des hommes et de leurs esprits (Adam, Enf. Aust., 1902, p. 394).
Prononc. et Orth. : [demɔ ̃]. Ds Ac. dep. 1694. Accord sur la forme d'un éventuel fém. démone (cf. Dupré 1972). Étymol. et Hist. 1. Début xives. « divinité, idole » demoygne (Psautier, BN 1761, fo126eds Gdf. Compl. [Ps 105, 38 : sacrificaverunt sculptilibus Chanaan]); spéc. 1690 dans la tradition chrét. « ange déchu, condamné au feu charnel » prince des démons (Fur.); 1663 « personne qui a les attributs d'un démon » (Molière, Etourdi, I, 10 ds Littré); 2. 1546 bons Daemons « êtres intermédiaires entre les dieux et les hommes » (Rabelais, Tiers Livre, éd. Marty-Laveaux, II, p. 17); spéc. 1552 le Daemon de Socrate (Rabelais, Quart Livre, II, 505); fig. 1652 « génie qui préside à la destinée d'une collectivité » (Balzac, Socr. chrétien, disc., 10 ds Littré : la peine et la recompense sont les deux démons qui gouvernent les choses humaines); 3. fig. 1694 « personnification d'un défaut » le demon du jeu (Boileau, Sat., 10 ds DG). Empr. au lat. daemon (empr. au gr. δ α ι ́ μ ω ν) impérial « esprit, génie », chrét. « esprit impur, mauvais ange, diable; idole ». La forme demoygne d'apr. le lat. deamonium même sens. Fréq. abs. littér. : 2 309. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 3 009, b) 2 857; xxes. : a) 3 689, b) 3 501.
DÉR.
Démonerie, subst. fém.Action, agissement de démon. Se livrer à des démoneries ridicules (Lar. 19e-20e). P. méton. Croyance aux agissements de démon. En tout, ne saurait-on avoir le Socrate sans les démoneries, comme dit Montaigne? (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 3, 1848, p. 274).Ex. cité ds Littré et Guérin 1892. 1resattest. a) 1588 ses ecstases et ses demoneries [de Socrate] (Montaigne, Essais, éd. A. Thibaudet, III, XIII, p. 1256); b) 1850 « frénésie, ardeur démoniaque » (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 3, p. 168); de démon, suff. -erie*. Fréq. abs. littér. : 1.
BBG. − Gottsch. Redens. 1930, p. 358, 361. − Henning (C. N.). Mortel, ange et démon. Mod. Lang. Notes. 1938, t. 53, p. 119.