| DÉLÉGATION, subst. fém. I.− Action de déléguer quelqu'un (personne physique ou morale), quelque chose. A.− Action de charger quelqu'un d'une mission, généralement officielle, avec tout pouvoir pour la remplir; action de transmettre, de confier quelque chose, généralement des attributions officielles, à quelqu'un; p. méton., acte, charge correspondante. Délégation expresse; avoir délégation d'une autorité; agir en vertu d'une délégation. La justice du comte (...) était une délégation, libre ou forcée, du roi de France (Proudhon, Créat. ordre,1843, p. 491): 1. Pour opérer, le ministre doit démultiplier son pouvoir de décision en le confiant, par voie de délégation, à des responsables administratifs ou à des collaborateurs personnels dans lesquels il a confiance.
Belorgey, Le Gouvernement et l'admin. de la France,1967, p. 89. B.− Spécialement 1. DROIT a) DR. ADMIN., CONSTIT. − Délégation de compétence, de pouvoir(s). Parfois même la commission reçoit délégation de pouvoirs de l'Assemblée (Ginestet, Ass. parlem. europ.,1959, p. 103). − Délégation de crédit(s). Acte par lequel un ministre donne pouvoir à un fonctionnaire d'ordonnancer certaines dépenses jusqu'à concurrence d'une somme déterminée; charge correspondante (cf. Belorgey, op. cit., p. 207). − Délégation de signature. Acte par lequel une autorité administrative permet à un subordonné de signer à sa place et donc de prendre certaines décisions; charge correspondante (cf. Belorgey, op. cit., p. 305). − Délégation législative. Pouvoir donné par le Parlement au gouvernement de prendre, par ordonnances, des mesures relevant habituellement de la compétence du Parlement; charge correspondante (cf. Vedel, Dr. constit., 1949, p. 582). b) DR. PÉNAL. Délégation judiciaire. Acte par lequel le procureur de la République ou le juge d'instruction remet une partie de ses pouvoirs entre les mains de la police judiciaire, dans l'instruction d'une affaire; charge ainsi transmise. V. commission rogatoire (cf. commission I B 1 c).M. Jeancourt, commissaire de police aux délégations judiciaires (A. France, Révolte anges,1914, p. 383). c) DR. et FIN. − Acte par lequel une personne (le délégant) invite une autre (le délégué, généralement son débiteur) à verser une somme d'argent (par exemple tout ou partie de sa dette) à une troisième (le délégataire) en remboursement d'une somme que la première personne doit à cette dernière : 2. J'offris dix mille francs; la princesse en accepta vingt, en me proposant en retour une délégation sur son intendant de l'Ukraine. (...) j'avais (...) une hypothèque en première ligne sur les bords fortunés du Don.
Reybaud, Jérôme Paturot,1842, p. 309. − Autorisation donnée par un marin ou un soldat à sa famille de toucher une partie de sa solde en son absence; somme correspondante. Elles vont toucher leur « délègue » (lisez : délégation), la solde que ces marins leur abandonnent (Loti, Mon frère Yves,1883, p. 358). Rem. Cet ex. atteste un synon. vraisemblablement fam. et région. délègue. − Valeur mobilière à laquelle certains droits ont été attachés pour une durée limitée : 3. ... un titre n'est pas richesse lorsqu'il (...) n'est autre chose qu'une délégation fournie par le gouvernement au prêteur, afin que celui-ci puisse, chaque année, prendre part aux revenus encore à naître entre les mains d'un contribuable.
Say, Traité d'écon. pol.,1832, p. 544. ♦ Spéc. Bons de délégation. Le risque que venait de courir la solidité des bons de délégation de la Ville (Zola, Curée,1872, p. 463). 2. ENSEIGN. (du second degré). Délégation ministérielle, rectorale. Acte par lequel, en cas de besoin, une personne est nommée pour un temps limité par le ministre ou le recteur, à un poste d'enseignement, bien qu'elle ne remplisse pas toutes les conditions requises pour occuper ce poste (cf. Encyclop. éduc., 1960, p. 377). II.− P. méton. A.− Groupe de personnes chargées par une autorité morale, une collectivité, d'une mission officielle, et plus particulièrement de la représenter à une réunion, au sein d'un organisme. Délégations nationales; recevoir une délégation. Nous ne sommes pas même élus par la totalité des citoyens d'un département, mais par une assez petite délégation d'entre eux (Le Moniteur,t. 2, 1789, p. 358): 4. − « Il n'y a plus d'espoir que dans cette conférence avec Müller », murmura Jacques (...). En avant, au bout du trottoir, la délégation des députés socialistes formait un petit peloton distinct.
Martin du Gard, Les Thibault,L'Été 1914, 1936, p. 585. B.− Assemblée délibérante formée de personnes mandatées; organisme composé de représentants ayant une mission officielle; bâtiment abritant un tel organisme. Dans la ville endormie, la délégation veillait de toutes ses fenêtres illuminées (Malraux, Cond. hum.,1933, p. 287). C.− Spécialement 1. ADMINISTRATION a) Organisme chargé de l'étude de problèmes scientifiques et/ou techniques. Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (D.A.T.A.R.; cf. Belorgey, Gouvern. et admin. Fr.,1967, p. 129).Délégation générale à la recherche scientifique et technique (D.G.R.S. T.; cf. Documentaliste,t. 10, no1, 1973, p. 51). b) Délégation cantonale. Assemblée, organisme réunissant les délégués cantonaux (cf. délégué II B 3 a). Bonjour, m'sieur l'président de la délégation cantonale! (Frapié, Maternelle,1904, p. 182). c) Délégation municipale ou spéciale. Organisme chargé par le gouvernement d'administrer temporairement une commune en cas de démission ou de dissolution du conseil municipal (cf. De Gaulle, Mém. guerre, 1956, p. 571). 2. HIST. Délégation (générale). Organisme créé par le général de Gaulle en France occupée, destiné en particulier à coordonner les mouvements de résistance et à leur répartir les fonds nécessaires. Claude Bouchinet-Serreulles et Jacques Bingen (...) assurèrent l'intérim de la délégation (De Gaulle, Mém. guerre,1956p. 165). Prononc. et Orth. : [delegasjɔ
̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. xiiies. (Cout. d'Artois ds DG). Empr. au lat. class. delegatio de même sens. Fréq. abs. littér. : 336. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 114, b) 103; xxes. : a) 325, b) 1 080. Bbg. Delisle (J.), Gautier (F.). La Gestion de l'entr. Meta. 1970, t. 15, no1, p. 39. |