| DÉBALLER, verbe trans. A.− [Le compl. d'obj. désigne le contenu d'un emballage] Déballer (des objets). Les extraire de leur emballage. Déballer des achats, des livres, des cadeaux, des provisions, des bouteilles. Mes papiers sont dans 3 malles et viennent d'être déballés (Balzac, Corresp.,1840, p. 211).Il saisit sa trousse, (...) il la tendit au médecin : « Ouvrez ça quelque part. (...) Déballez tout » (Martin du G., Thib.,Belle Sais., 1923, p. 872): 1. C'était M. Gouttman, négociant en articles de piété; il en déballa quelques-uns, enfermés dans des boîtes, ...
Flaubert, Bouvard et Pécuchet,t. 2, 1880, p. 116. − [Avec un compl. secondaire désignant le contenant] Qui avait pu avoir la bizarre idée de déballer de leurs caisses les mannequins et de les dénuder (Peyré, Matterhorn,1939, p. 132). − Emploi abs. Les contrôleurs de porcs, les inspecteurs aux boucheries, et mille autres employés, allant, venant, tâtant, regardant, ouvrant, déballant (Erckm.-Chatr., Hist. paysan,t. 1, 1870, p. 65). − Spéc. [Le compl. d'obj. désigne des articles de marchand ambulant] Déballer (des marchandises). En faire un étalage passager et sommaire pour les exposer à la vente. Ses rêves de grands comptoirs modernes, déballant des millions de marchandises sur les trottoirs de Paris (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 165). − P. ext., péj. Exhiber. Cet éditeur (...) s'est déterminé, (...) à déballer son papier, actuellement en vente à peu près partout (Bloy, Journal,1893, p. 75). B.− P. ext. [Le compl. d'obj. désigne un contenant] Déballer une caisse. L'ouvrir pour la vider de son contenu. Déballer une boîte, un paquet, un carton, sa valise, son bagage. Barois a déballé devant lui sa serviette bourrée de paperasses (Martin du G., J. Barois,1913, p. 404). ♦ Emploi abs. Charles rentre, apportant le paquet, en effet volumineux, du baron. (...) Courpière déballe (Hermant, M. de Courpière,1907, p. 7). − P. ext., vieilli. [Le compl. d'obj. désigne un véhicule] Déballer (un véhicule). Le décharger des bagages ou marchandises qu'il contient : 2. Les précieux fourgons, venus de Paris, furent déballés avec soin. On en tira les pâtés de foie gras, les terrines de Nérac, les rillettes de Tours...
Reybaud, Jérôme Paturot,1842, p. 329. ♦ [Avec un compl. second. désignant le contenu du véhicule, son chargement] On déballait du fourgon le matériel nécessaire (Zola, Débâcle,1892, p. 299). ♦ Emploi pronom. à sens passif. Des voitures de roulage venues de Paris, se succédaient de jour en jour à la porte [de l'hôtel] et se déballaient dans la cour (Balzac, Curé vill.,1839, p. 24). ♦ P. ext. méton., fam., vieilli. [Le compl. d'obj. désigne le passager d'un véhicule] Déballer (un passager). Le faire descendre du véhicule, le déposer quelque part. [Avec un compl. second. désignant le véhicule] Déballer qqn d'(un véhicule). Une horde de gens armés entoure la voiture (...) nous brûlons le pavé. Nous arrivons!... Tout s'arrête!... (...) on se jette sur moi, on m'enlève, on me déballe! (Sardou, Rabagas,1872, V, 4, p. 225).Montez dans ma voiture! (...) je vais aux halles, je vous déballerai avec mes légumes (Zola, Ventre Paris,1873, p. 605): 3. À cette apparition, qui annonçait un milord voyageant à petites journées, Chicot (c'était le nom de l'aubergiste) accourut, (...). On déballa les suivantes, non sans les faire rougir un peu, attendu les difficultés de la descente; et la berline accoucha 1) d'un milord (...) 2) de deux miss (...) 3) d'une milady...
Brillat-Savarin, Physiol. du goût,1825, p. 363. C.− P. métaph. ou au fig.; fam., pop. ou arg.; péj. 1. [P. réf. à la notion d'étalage et à celle de contenant vidé de son contenu; dans le domaine de l'expression le plus souvent orale; le compl. d'obj. désigne ce qui est exprimé, étalé] − Déballer une formule, une phrase, un discours, etc. Dire, débiter une formule, une phrase, un discours. Cf. sortir (fam.).Et votre fille? Comment va-t-elle? Six mots ajoutés au reste, tels qu'on en déballe par politesse à chaque rencontre avec une personne de connaissance (Estaunié, Appel route,1921, p. 60): 4. Et il plaça son discours sur la grandeur et les bienfaits de l'Internationale, celui qu'il déballait d'abord, dans les localités où il débutait.
Zola, Germinal,1885, p. 1347. − Déballer des idées, des souvenirs, des plaisanteries, des potins... Les exposer, les raconter en faisant étalage de tout ce que l'on sait, avec ostentation, sans retenue... Et chacun de déballer son bagage personnel de mots historiques (Barbusse, Feu,1916, p. 44): 5. Mendès excellait à capter en l'éblouissant, en l'esbrouffant, n'importe quel homme d'affaires devant lequel il déballait son érudition à tiroirs...
L. Daudet, L'Entre-deux-guerres,1915, p. 139. ♦ Déballer sa marchandise ,,Montrer ce qu'on peut, ce qu'on sait, ce dont on est capable`` (Littré). − [Le compl. d'obj. désigne qqc. que l'on a longtemps tenu caché, gardé pour soi] Déballer des confidences, des reproches, la vérité, etc. Les dévoiler et les étaler au grand jour, en abandonnant toute réserve, toute pudeur, toute crainte. Sylvie, se fâchant, déballa les vieux reproches amassés (Rolland, L'Âme enchantée,t. 2, 1925, p. 191).Alors Paul s'expliqua, détachant les syllabes, chuchotant, déballant toute la vérité (Cocteau, Enf. terr.,1929, p. 182). ♦ Déballer son sac, déballer (tout) le paquet, tout déballer. Dire tout ce que l'on pense, tout ce que l'on a sur le cœur. Synon. vider son sac (pop.).Il (...) le confessa si finement que le pauvre déballa tout le paquet (Pourrat, Gaspard,1922, p. 163).Mais nous ne serons pas sincères. Le sac ne sera pas déballé. L'explication n'aura pas lieu. Nous jouons au plus fin, au plus fort (H. Bazin, Vipère,1948, p. 267).Arg. Déballer son truc. ,,Dire tout ce que l'on sait`` (Carabelli, [lang. pop.]) [Dans la police judiciaire] Déballer ses outils. Faire des aveux complets. Cf. Sandry, Carrère, Dict. arg. mod., 1953 et Riv.-Car. 1969.Synon. se mettre à table (pop.). ♦ Emploi abs. : 6. Gide (...) doit perdre, (...) jusqu'au sentiment de l'existence de l'autre, lorsque son plaisir est en jeu. Et à quel point Rousseau n'avait-il pas cela! Et c'est pourquoi, quand ils se confessent, l'un et l'autre déballent − et déballent sans gêne aucune. Par où apparaît que la pudeur, (...) c'est avant tout le sentiment d'autrui...
Du Bos, Journal,1925, p. 266. ♦ Emploi pronom. réfl. [Wagner] qui l'[Liszt] attend, l'appelle, et s'impatiente, tellement est impérieux en lui le besoin de se déballer cœur et cerveau (Pourtalès, Liszt,1925, p. 161).La discrète et nouvelle attention qu'on lui réservait lui était sensible et l'antiquaire se déballa (La Varende, Am. sacré et am. prof.,1959, p. 311). 2. [P. réf. à la notion d'emballage (appliquée soit aux vêtements soit au corps même), à la notion d'étalage et à celle de contenant vidé de son contenu] Arg. − [Le suj. désigne une femme] (Se) déballer. (Se) déshabiller. Déballe, et au pieu, viv'ment! (Bruant, 1901, p. 158). − [P. allus. aux artifices vestimentaires féminins] Se déballer d'(une robe). S'extraire d'(une robe) : 7. Elle s'est grisée, comme on se grise quand on le veut, (...) dans un accès d'étourdissement de la femme qui se voit vieillir, ses joues rougir, qui se déballe de sa robe quand elle se déshabille...
Goncourt, Journal,1862, p. 1088. ♦ [Le compl. d'obj. désigne une partie du corps féminin] Déballer (une partie du corps). La dénuder et l'exhiber. Cf. Larch. 1872, p. 112. ♦ En partic. [Le suj. désigne les seins] S'échapper du vêtement. Cf. Sandry, Carrère, Dict. arg. mod., 1953. Rem. Pour Id., ibid., p. 128, l'expr. déballer ses outils (supra C 1) signifie également ,,sortir ses accessoires intimes``. − Trivial. Faire déballer qqn.Synon. faire chier* qqn : 8. J'entends dans la rue qu'on dit : demain départ à 2 h 45. Et je vous dirai sans ambages que ça me fait déballer. Je n'ai en fin de compte aucun goût pour la vie militaire. Ça me dégoûte, que ça me dégoûte, mon Dieu.
Rivière, Correspondance[avec Alain-Fournier], 1911, p. 304. D.− Emploi intrans., rare. [Le suj. désigne une pers.] Arriver. Cf. débarquer : 9. rené. − Elle ne s'amène pas au trot allongé, votre bonne amie!
la gosse. − Elle va déballer, ne t'inquiète pas.
rené. − Elle est en retard d'une demi-heure.
H. Lavedan, Le Vieux marcheur,1895, p. 69. Prononc. et Orth. : [debale]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1480 « ôter quelque chose (d'une balle, d'un ballot) » (Guillaume Alexis,
Œuvres poétiques, Le passe temps de tout homme et de toute femme, éd. A. Piaget et E. Picot, t. II, p. 128, vers 510); 2. 1866 au fig. « sortir ce qu'on a sur le cœur » (Amiel, Journal, p. 289). Dér. de balle3*; préf. dé-*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 104. Bbg. Quem. 2es. t. 2 1971. |