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DÉBÂCLE, subst. fém.
A.−
1. Dislocation des glaces recouvrant un cours d'eau, qui sont emportées par le courant. La débâcle des glaces. La débâcle, signe du printemps (Morand, Chron. homme maigre,1941, p. 177):
1. ... entendez-vous ce craquement profond et formidable? C'est la débâcle! c'est la Néva qui s'écroule! c'est le fleuve qui reprend son cours! c'est l'eau vivante, joyeuse et terrible qui soulève la glace hideuse et morte et qui la brise! Hugo, Napoléon le Petit,1852, p. 16.
Rare. Faire débâcle. L'eau de la Mercy courait sous une voûte de glace qui, à chaque flux et reflux, faisait débâcle et se brisait avec fracas (Verne, Île myst.,1874, p. 202).
En partic. Dislocation des glaces des mers polaires. Choc incessant des glaçons, précipités les uns contre les autres pendant la débâcle des mers polaires (Lautréam., Chants Maldoror,1869, p. 251).
2. [P. réf. au mouvement impétueux d'un cours d'eau, à la masse d'eau emportée, à ce qu'il charrie] La débâcle des pluies d'automne (Zola, Ventre Paris,1873, p. 627):
2. Voici, (...) comme une débâcle, comme une inondation de débris sous la tristesse dense du ciel, voici un homme étendu comme s'il dormait; ... Barbusse, Le Feu,1916, p. 167.
B.− P. anal. Synon. diarrhée.Débâcle diarrhéique. Ces périodes d'arrêt étaient suivies de débâcles qui me forçaient à l'[un animal] exiler pour un temps dans un panier (Gide, Feuillets,1949, p. 1119).
C.− Fig. et fam.
1. Rare. [L'accent est mis sur le mouvement]
a) Jaillissement :
3. La digestion du peu qu'elle a mangé semble faire jaillir d'elle une expansion vivace de récits, de souvenirs, de portraits des gens à l'emporte-pièce, des débâcles de phrases à la Saint-Simon. Goncourt, Journal,1868, p. 452.
b) [En parlant de pers.] Déferlement. Chez nous, par quel miracle Tous ces nouveaux venus? Quelle est cette débâcle D'invités inconnus? (Labiche, Si jamais je te pince,1856, III, 3, p. 315).Il y avait une débâcle de créanciers, (...) qui venaient chaque jour s'installer sur une banquette de l'antichambre (Zola, Nana,1880, p. 1124).
2. [L'accent est mis sur le résultat du mouvement]
a) [En parlant de la bonne marche de qqc., ou de la bonne tenue morale de qqn] Retournement de situation entraînant un effondrement, un désarroi total. (Être) en débâcle. L'Angleterre avait (...) jeté chez l'ennemi des liasses de faux assignats et combiné, faute d'effondrement militaire, une débâcle financière (P. Rousseau, Hist. techn. et invent.,1967, p. 197):
4. Tu ne saurais te figurer dans quel état de crise se trouve la librairie depuis le mois de novembre dernier. Le commerce des livres est presque absolument paralysé; des faillites multipliées ont eu des contre-coups qui ont ébranlé nos plus fortes maisons. Toutes les affaires sont ou en débâcle ou en stagnation. Hugo, Correspondance,1826, p. 432.
b) [En parlant d'un groupe de pers. homogène] Changement brusque de situation entraînant une fuite désordonnée, une débandade. Un cri éclata : « Les gendarmes! les gendarmes! » Ce fut une débâcle, un sauve-qui-peut si éperdu, qu'en deux minutes la route se trouva libre (Zola, Germinal,1885, p. 1455).
D.− Spéc. Débandade, déroute d'une armée. La Débâcle (roman de Zola). La débâcle avait commencé à Moscou; les routes de Kazan étaient couvertes de fugitifs (Chateaubr., Mém.,t. 2, 1848, p. 435).La retraite allemande tournait en débâcle (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 420).
Prononc. et Orth. : [debɑ:kl̥]. Ds Ac. 1694, s.v. desbacle; ds Ac. 1718-1932 sous la forme moderne. Étymol. et Hist. 1. 1680 debacle « action de débarrasser un pont des vaisseaux qui l'encombrent » (Rich.); 2. 1690 « rupture des glaces dans une rivière » (Fur.); 3. 1803 fig. « révolution » (Boiste). Déverbal de débâcler*. Fréq. abs. littér. : 310. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 124, b) 412; xxes. : a) 925, b) 433. Bbg. Tetu (F.). Lex. de l'hiver. Fr. Monde. 1973, no101, p. 35.