| CROISEMENT, subst. masc. A.− Usuel 1. Action de croiser deux ou plusieurs choses. a) [À propos d'inanimés concr.] Le croisement de ses jambes (Giraudoux, Bella,1926p. 188): 1. ... Natacha continua de le fixer dans une angoisse incompréhensible. Ah! Le croisement de ces deux regards! La scène muette entre ces deux jeunes gens dont l'un voulait se faire comprendre et dont l'autre semblait redouter par-dessus tout d'avoir été comprise!
G. Leroux, Rouletabille chez le tsar,1912, p. 107. b) [À propos d'inanimés abstr.] Le croisement des questions (Valéry, Entret. avec F. Lefèvre,1926, p. 144). 2. P. méton. État de choses qui se croisent, tout ou partie. Le croisement de leur paletot (Goncourt, Journal,1871, p. 775). − En partic. Point d'intersection de deux voies. Croisement de chemins(s), de route(s), de rues(). Des pièces de croisement pour les aiguilles des voies ferrées (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 49).Nœuds et croisements routiers (J. Thomas, Route,1951, p. 313). − P. métaph. Ô tête d'or au croisement des routes (Claudel, Gdes odes,1910, p. 259). 3. Rencontre sur un même trajet, de personnes ou de véhicules venant en sens opposé ou différent. Feux de croisement. Entre deux valises, dans le croisement des porteurs (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 199). B.− Emplois spéc. 1. BIOL. et BOT. ,,Mode de reproduction entre deux individus de races différentes (métissage) ou entre deux individus d'espèces ou même de genres différents (hybridisme)`` (Thinès-Lemp. 1975). Croisement entre deux espèces; produits de croisement. Un chien énorme, croisement de montagnard et de terre-neuve (Maupass., Contes et nouv., t. 1, 1880, p. 308); Mendel (...) son fameux mémoire sur les croisements de pois (J. Rostand, Vie et ses probl.,1939, p. 23). − P. ext. [En parlant des hommes] :
2. Le croisement des races, le mélange des civilisations opposées, est pourtant l'auxiliaire le plus puissant de la liberté. Les fatalités diverses qu'elles apportent dans ce mélange s'y annulent et s'y neutralisent l'une par l'autre.
Michelet, Introd. à l'Hist. universelle,1831, p. 446. 2. Autres domaines a) ESCR. et ART MILIT. Action de croiser son arme avec celle de l'adversaire. Croisement des fers à la clarté obscure des étoiles (Brasillach, Corneille,1938, p. 144): 3. ... M. de Charlus, ne se tenant pas de joie, se mit à faire des contre-de-quarte qui rappelaient Molière, nous firent rapprocher prudemment de nous nos bocks, et craindre que les premiers croisements de fer blessassent les adversaires, le médecin et les témoins.
Proust, Sodome et Gomorrhe,1922, p. 1070. − En partic. Croisement de la baïonnette. Action de présenter le fusil, baïonnette en avant. Le croisement de la baïonnette d'un factionnaire (Goncourt, Journal,1894, p. 507). b) LING. ,,Action de deux mots agissant l'un sur l'autre par contamination`` (Ling. 1972). c) MUS. Chevauchement des voix ou des parties, en harmonie. Effet de croisement avec cette inflexion des mobiles qui se croisent (Schaeffer, Rech. mus. concr.,1952, p. 19). Rem. On rencontre chez Giraudoux (Bella, 1926, p. 143) une création métaph., à partir d'un emploi empr. au lang. de la vén., non mentionné ds les dict. gén. : C'était le premier croisement de gibier, c'était Bella et Redendart. Prononc. et Orth. : [kʀwazmɑ
̃]. [ɑ] post. à la 1resyll. ds Passy 1914, et comme 1revar. à côté de [a] ant. ds Warn. 1968. Cf. croix. Admis ds Ac. 1798-1932. Étymol. et Hist. 1. 1195 « action de se croiser, de partir pour la croisade » (v. croisade); 2. 1539 « action de disposer en forme de croix » ici « signe écrit en forme de croix » (Ordonnance sur la juridiction du grand conseil, juill. ds Gdf. Compl.); 3. 1809 génét. (Lamarck, Philos. zool., t. 2, p. 230); 4. 1866 « rencontre de deux objets venant de directions opposées » [de deux lettres] (Flaubert, Corresp., p. 199). Dér. de croiser*; suff. -ment1*. Fréq. abs. littér. : 176. |