| CRISTAL, AUX, subst. masc. A.− CHIM., MINÉR. 1. Solide polyédrique, plus ou moins brillant, à structure régulière et périodique, et dont la forme est constante pour une substance donnée dans des conditions de formation données. Des cristaux de glace, en forme de feuilles de fougère, fleurissaient les vitres des fenêtres (A. France, Bonnard,1881, p. 267): 1. Le spath d'Islande est un carbonate de calcium qui, comme tous les cristaux, est un milieu anisotrope dont les propriétés varient suivant la direction considérée dans un tel milieu.
Prat, L'Optique,1962, p. 116. SYNT. a) Cristal + adj. Cristal aciculaire, bacillaire, lenticulaire; cristal cubique, cristal mixte, pur; cristal hémièdre, holoèdre; cristal droit (dextrogyre), gauche (lévogyre); b) Cristal + subst. Cristal de givre, de quartz; cristal de vitellus (Husson, Graf, Manuel biol. gén., 1965, p. 33). c) Subst. + cristal. Angle, face, facette, plan (réticulaire) du cristal; cohésion, croissance, décroissance du cristal; clivage du cristal; (substance) en cristaux. d) Verbe + cristal. Cliver un cristal. ♦ Cristaux de soude et absol. cristaux. Carbonate de sodium cristallisé du commerce, à usage domestique. Un chemin aussi blanc que si une armée d'esclaves fût venue préalablement le laver avec du « cristaux » (Jouhandeau, M. Godeau,1926, p. 214).Si le linge reste jaune (...) c'est que vous avez employé trop de lessive riche, trop de cristaux de soude (Lar. mén.1926, p. 199). − P. ext. Cristaux liquides. Liquides anisotropes (cf. supra ex. 1). Rem. Le mot entre comme second élément de compos. dans la formation de termes savants : micro-cristaux (Prat, L'Optique, 1962, p. 128). 2. Cristal de roche (et absol. cristal). Variété de quartz incolore, remarquable par sa limpidité et sa pureté. Boîte, coupe, flacon de cristal de roche. Synon. quartz hyalin.Une atmosphère limpide comme du cristal de roche (Du Camp, Hollande,1859, p. 191).Cette source si limpide et si lente que son eau (...) semblait (...) du cristal de roche refroidissant posé au fond d'un réservoir (J. Lorrain, Sens. et souv.,1895, p. 12): 2. C'est fort bien, dit-il, c'est fort bien! mais je crains qu'on n'ôte à l'affaire Pyrot sa belle simplicité. Elle était limpide; ainsi que le cristal de roche, son prix était dans sa transparence. On y eût vainement cherché à la loupe une paille, une faille, une tache, le moindre défaut. Au sortir de mes mains, elle était pure comme le jour; elle était le jour même.
A. France, L'Île des pingouins,1908, p. 283. Rem. Le mot désigne parfois l'ensemble des variétés de quartz, colorées ou non, et partic. les variétés limpides, utilisées en joaillerie (cf. Pérès, Pierres et roches, 1896, p. 17). B.− P. anal. Verre incolore, limpide comme du cristal de roche, généralement à base de plomb, et sonore lorsqu'il se présente sous une faible épaisseur. Cristal de Baccarat, de Bohême, de Venise. Les éclairages de Lalique, en cristal dépoli, déroulaient dans les coins leurs paysages d'athlètes et de pigeons (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 477): 3. Sa main heurta gauchement un verre. Sous le choc de l'alliance, le cristal émit un chant frêle, mais long, qu'ils suivirent tous deux jusqu'à l'extrême résonance.
Arland, L'Ordre,1929, p. 459. SYNT. Cristal taillé; boule de cristal; glace, larme, lustre de cristal; service de cristal; grotte, palais de cristal. ♦ P. compar. Clair, limpide, pur, transparent comme du (le) cristal; briller, sonner comme du cristal. Jenny (...) se raidissait en vain contre son tremblement : elle vibrait des pieds à la tête, comme un cristal heurté (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 170).Marie est sûrement bonne et pure, mais je la sens tranchante comme du cristal. Elle me fait peur (Anouilh, Sauv.,1938, III, p. 233).L'air était sec, froid, cassant, comme du cristal (Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948, p. 23). − P. méton. Objet en cristal et partic. verrerie de table. Ces mets extractifs et transparents qui ne sont servis que dans l'or ou le cristal (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 280): 4. ... elle s'avança doucement vers la table de nuit pour voir si le verre de Valentine était vide. Il était encore plein au quart (...). Mme de Villefort le prit et alla le vider dans les cendres (...) puis elle rinça soigneusement le cristal...
Dumas père, Le Comte de Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 571. ♦ Emploi plur. Les cristaux de la table; boutique, marchand de cristaux. Cette salle à manger superbe, éclairée du reflet de l'argenterie et des cristaux (Zola, Nana,1880, p. 1365).Un petit restaurant discrètement illuminé où dansèrent tout à coup devant elle la blancheur des nappes et le miroitement des cristaux (Roy, Bonheur occas.,1945, p. 95). − P. métaph. ou au fig. 1. [P. réf. à l'éclat, à la limpidité, à la transparence du cristal] Pas un nuage au ciel, toute une gaieté volait dans l'air bleu, d'une transparence de cristal (Zola, Bonh. dames,1883, p. 522).Je dois noter le premier choc qui raya d'un trait léger le cristal transparent de mon amour (Maurois, Climats,1928, p. 47). : 5. « Ah, oui, tout était beau, c'était du cristal! Et qu'en est-il résulté? Hein? Nous avons crevé l'abcès : nous comptions sur la guérison; et, maintenant, c'est la gangrène! »
Martin du Gard, Jean Barois,1913, p. 465. ♦ Spéc. [Emploi en appos.] Papier cristal. Papier translucide. Une enveloppe de papier cristal (Druon, Gdes fam.,t. 1, 1948p. 168).Sirop cristal : Les sirops de glucose, très épais et transparents, désignés sous le nom de sirop cristal (Brunerie, Industr. alim.,1949, p. 27).Vernis cristal : Le plus grand défaut reproché aux vernis cristal est d'être poisseux (Coffignier, Vernis,1921, p. 541) 2. [P. réf. à la sonorité du cristal] Carillon, gamme, son, voix de cristal. Les notes expiraient dans l'air, avec un tremblement de cristal (Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 252).Les rumeurs de toute nature vibrant dans ces nuits de gelée, d'une sonorité de cristal (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 46).Deux brèves petites notes de son léger rire de cristal, tintèrent dans l'air du salon (Malègue, Augustin,t. 2, 1933, p. 39): 6. Hier à Notre-Dame des Victoires. Il y avait un salut solennel; chants admirables; plus les voix d'enfants montaient, plus elles étaient pures, pas une fois ce cristal ne s'est brisé.
Green, Journal,1949, p. 259. 3. En partic. [En parlant de l'eau] Elle avançait sur le miroir du parquet comme les saintes de la Légende dorée sur le cristal des eaux (A. France, Bonnard,1881, p. 405).L'on entendait la fontaine, à l'éternel chant de cristal (Zola, Pascal,1893, p. 56).Elle [la source] sourd avec un murmure léger, un bruit de cristal, parmi des touffes de cresson (Pesquidoux, Livre raison,1925, p. 139). ♦ Littér. Le mot est synon. de l'eau. Les ruisseaux épanchaient le même cristal frais (Pergaud, De Goupil,1910, p. 180).Les chiens enfoncèrent leurs museaux rosés ou noirs dans le cristal gazouillant (La Hêtraie, Chasse, vén., fauconn.,1945, p. 178). Prononc. et Orth. : [kʀistal]. Ds Ac. 1694-1932. Var. crystal ds Ac. 1694-1878. La forme avec y est, seule, considérée comme étant conforme à l'étymol. ds Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787, Land. 1834 et Gattel 1841. Cette rem. vaut pour le mot et ses dér. La graph. avec y est encore mentionnée ds Lar. 19e. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1100 « quartz hyalin » (Roland, éd. J. Bédier, 1263); b) id. « ornement fait en cette matière » (ibid., 2296); 2. xives. « verre d'une grande transparence » (de Laborde, Émaux, p. 234 ds Littré); 3. 1690 chim. plur. « sels cristallisés à l'apparence de roches cristallines » (Fur.) − 1798, Ac.; 4. 1889-1901 « carbonate de sodium en morceaux utilisé pour le nettoyage » (DG). Empr. au lat. crystallus « glace; cristal de roche; objet en cristal » (gr. κ
ρ
υ
σ
τ
α
λ
λ
ο
ς « glace, cristal »). Fréq. abs. littér. : 1 266. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 569, b) 2 087; xxes. : a) 2 070, b) 1 680. DÉR. Cristallier, subst. masc.a) Graveur en cristal. b) Armoire où l'on range les cristaux. − [kʀistalje]. Cf. cristal. − 1resattest. a) 1260 « ouvrier qui taille ou grave le cristal de roche » (E. Boileau, Métiers, 71 ds T.-L.). b) 1820 « collection de cristaux » (Lav.), 1829 « lieu où l'on range cette collection » (Boiste); de cristal, suff. -ier*. − Fréq. abs. littér. : 1. |