| CRASSEUX, EUSE, adj. et subst. I.− Adjectif A.− [En parlant d'une pers. et, plus gén., du corps, de vêtements, d'objets personnels] Qui est d'une saleté répugnante. Col crasseux, mains crasseuses. Il [l'agent] tira de sa poche un calepin crasseux (A. France, Crainquebille,1904, p. 18).Déjà à partir du tunnel, les street boys pullulent pieds nus, crasseux (Taine, Anglet.,1872, p. 36). SYNT. Ongles, visages crasseux; chapeau, haillons crasseux; jeu de cartes, mobilier crasseux. − [Employé comme terme d'injure] On continua à m'appeler « le miteux » ou « le crasseux » (Vialar, Faux fuyants1953, p. 31). − [En constr. expressive antéposée du type adj. + de + subst.] Je le vois encore, tiens, coiffé d'un grand vieux crasseux de feutre si déchiré qu'il lui tombait sur le nez (Pourrat, Gaspard,1925, p. 190). − P. ext. Hôtel, café crasseux; rue crasseuse. Un bouquet de grands arbres ondoie dans ce paysage crasseux et immobile (Arnoux, Paris,1939, p. 310): 1. ... les quelques réjouissances solitaires et honteuses que des privilégiés se procuraient à prix d'or, au fond d'une arrière-boutique crasseuse.
Camus, La Peste,1947, p. 1430. Rem. La docum. atteste l'adj. crassi, ie (rare). Même sens. Ces choses sont étalées sur des petits dressoirs en bois crassi et vermoulu (Loti, Maroc, 1889, p. 329). B.− Au fig. 1. [Avec une idée de mépris, de dégoût au plan moral, soc., esthétique] Dégoûtant, ignoble. a) [En parlant de pers.] Les bruyants, gesticulants et crasseux fantoches de la troupe à Gambetta (L. Daudet, Dev. douleur,1931, p. 26).Des gens crasseux et morts de peur qui plastronnent (Giono, Hussard,1951, p. 305). − Crasseux de...Couvert d'une couche de. Les gens moraux, crasseux de légalisme et de moralisme (Mounier, Traité caract.,1946, p. 688). b) [En parlant d'une chose, d'un événement] :
2. Dans l'ombre grouille la faune habituelle (...) l'interdit de séjour (...) le type qui n'en revient pas et qui lit avec effarement sur les murs crasseux l'histoire encore plus crasseuse des abonnés aux menottes.
H. Bazin, La Tête contre les murs,1949, p. 142. 2. En partic. [Par transpos. adj. des emplois II et III de crasse1] a) [Correspond à crasse1II B 2 a] Vx et fam. D'une avarice sordide, mesquine. Synon. ladre, pingre, chiche.Il y avait chez ces juives de Bordeaux une crasseuse rapacité (A. Daudet, N. Roumestan,1881, p. 323). b) [Correspond à crasse1II B 2 b] Inadmissible au regard des normes, grossier. Ignorance, bêtise, éducation crasseuse. II.− Emploi subst., arg. Peigne (généralement sale). Le Noiraud, déjà habillé, ratissait de son éternel crasseux son cuir chevelu fraîchement tondu (Le Breton, Hauts murs,1954, p. 169). Prononc. et Orth. : [kʀasø], fém. [-ø:z]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Prob. ca 1500 craceuse (Therence en frçs, fo170 rods Gdf. Compl.); 1538 (Est.); 2. fin xviies. fig. (St-Simon, 427, 170 ds Littré : La bassesse plus que très-crasseuse de sa naissance); 3. 1718 (Ac. : On dit aussi Crasseux, pour sordidement avare. Il vit en crasseux). Dér. de crasse1*; suff. -eux*. Fréq. abs. littér. : 219. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 159, b) 230; xxes. : a) 339, b) 467. |