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CONTRADICTOIRE, adj.
Qui est en contradiction.
A.− [L'oppos. est dans l'esprit, l'attitude, l'acte des pers.]
1. Vieilli [En parlant de pers.] :
1. « ... − Peut-être, répliqua l'indigène, l'homme est-il né vindicatif et féroce, ou peut-être l'est-il devenu par l'habitude et la nécessité. Mais comment analyser un être aussi contradictoire, qui tantôt s'élève jusqu'à la sublimité des plus hautes vertus, et tantôt descend jusqu'au dernier degré du vice et jusqu'au crime le plus atroce; un être dont la nature s'amuse quelquefois à faire un Attila ou un Marc-Aurèle, un imbécile ou un Newton »? Crèvecœur, Voyage dans la Haute Pensylvanie,t. 2, 1801, p. 220.
2. [En parlant de leurs actes] :
2. Peu après, le Maréchal, par un autre « acte constitutionnel » apparemment contradictoire avec le précédent et destiné, celui-là, à être publié, précisait que, si lui-même venait à décéder avant d'avoir promulgué la constitution qu'il était censé préparer, les pouvoirs que lui avait conférés l'« Assemblée Nationale » de 1940 reviendraient à cette même assemblée. De Gaulle, Mémoires de guerre,1956, p. 161.
− P. méton. Réunion, débat contradictoire. Réunion, débat où des opinions différentes peuvent s'affronter :
3. Peu de temps après, Petitbeaudau fit la connaissance de Décugis, au cours d'une réunion contradictoire qui se donnait sous les auspices d'un parti conservateur. Arland, L'Ordre,1929, p. 131.
− DR. [En parlant d'un procès, d'une enquête] Où les parties antagonistes ont pu s'exprimer. Anton. par défaut :
4. Le tribunal d'Angoulême, ému par la belle plaidoirie de Cachan, rendit un jugement contradictoire entre toutes les parties, qui donna la propriété des meubles meublants seulement à Madame Séchard, repoussa les prétentions de Séchard père et le condamna net à payer quatre cent trente-quatre francs soixante-cinq centimes de frais. Balzac, Les Illusions perdues,1843, p. 611.
− PHILOS. (log.) Proposition, thèse contradictoire. Les deux propositions contradictoires auxquelles nous étions arrivés précédemment se concilient (Ruyer, Esquisse d'une philos. de la struct.,1930, p. 134):
5. Non, il n'y a pas d'espace absolu; ces deux propositions contradictoires : « la terre tourne » et « la terre ne tourne » ne sont donc pas cinématiquement plus vraies l'une que l'autre. Affirmer l'une, en niant l'autre, au sens cinématique, ce serait admettre l'existence de l'espace absolu. H. Poincaré, La Valeur de la sc.,1905, p. 272.
B.− [L'oppos. est dans des choses, des entités] Qui contient une contradiction intrinsèque par l'union d'éléments incompatibles :
6. Bien peu d'hommes savent ce qu'ils veulent : ils désirent des choses contradictoires et qui s'excluent; il faut embrasser tout un système d'idées pour bien savoir ce qu'on veut. Maine de Biran, Journal,1816, p. 155.
7. Tout est également incompréhensible dans ce qui se passe. Une conduite pareille à la vôtre n'est pas dans la nature; elle est contradictoire et cependant elle m'est démontrée. Guéhenno, Jean-Jacques,Grandeur et misère d'un esprit, 1952, p. 211.
− P. ell. de principe, proposition, thèse (supra A 2 philos.)
♦ Au masc. ou au fém. plur. « ... Ainsi les contradictoires sont résolus. L'ombre permet la lumière, le froid mêlé au chaud produit la température, l'organisme ne se maintient que par la destruction de l'organisme, partout un principe qui divise, un principe qui enchaîne » (Flaubert, Bouvard et Pécuchet,t. 2, 1880, p. 101).Et, deux contradictoires ne pouvant être vraies à la fois, il ne doit s'y trouver aucune contradiction (Renan, Souvenirs d'enfance et de jeunesse,1883, p. 292).
♦ Au masc. sing. L'être, qui est le contradictoire du non-être (Jankélévitch, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien,1957, p. 18).
♦ Au fém. sing. Il fit deux ou trois pas, à travers la turne, formulant tout haut la contradictoire (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 344).
− P. ext. [En parlant de choses opposées, inconciliables] Ainsi il logeait dans son cœur toutes les contradictoires : l'attrait du renoncement total, du « donne-moi tout », et aussi l'amour des siens (Malègue, Augustin,t. 1, 1933p. 145).
Prononc. et Orth. : [kɔ ̃tʀadiktwa:ʀ]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. Ca 1360 (Oresme ds Meunier, Essai sur la vie et les ouvrages de Nicole Oresme, p. 169); 1585 jugement contradictoire (Noël du Fail, Contes d'Eutrapel, éd. Assézat, t. 2, p. 178); av. 1679 subst. (Retz, Mém., t. II, liv. III, p. 465 ds Littré). Empr. au b. lat. contradictorius « qui contredit [d'un écrit] » et subst. contradictoriae (oppositiones) « propositions contradictoires ». Fréq. abs. littér. : 1 116. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 121, b) 825; xxes. : a) 1 611, b) 2 378.