| COMPTE, subst. masc. I.− Détermination d'une valeur ou d'une grandeur numérique par un calcul ou une suite de calculs, ou, le plus souvent, par une énumération, un dénombrement. Faire le compte de son argent. Il fit le compte de ses économies : douze cents francs (Arland, L'Ordre,1929, p. 100).« Desgrès (H.G.M.) né à Lyon, le ... » Il fit le compte de l'âge, c'était cinquante et un ans (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 366). ♦ Bois de compte. Bois dont on détermine le nombre de rondins, de bûches, par opposition au bois dont on détermine le volume. ♦ Monnaie* de compte. A.− Spécialement 1. Énumération de la suite des nombres entiers. − BOXE. Énumération des nombres de un à dix, correspondant aux dix secondes du knock-out. Le boxeur se relève avant le compte. ♦ Loc. Pour le compte. Jusqu'à la fin de cette énumération. Un uppercut du gauche au plexus qui envoya Martin à terre pour le compte. Martin était k.o. (L'Œuvre,4 févr. 1941).P. métaph. : 1. Je crois qu'il a dû lui faire comprendre que (...) de m'envoyer à la Roquette, c'était pas encore si peinard... (...) Que je m'échapperais peut-être tout de suite... exprès pour venir le buter... et puis qu'alors cette fois-là, je le ratatinerais pour le compte...
Céline, Mort à crédit,1936, p. 394. − Compte à rebours. Énumération à rebours de nombres entiers faite avant un événement important, zéro marquant son début. Compte à rebours avant le lancement d'une fusée. 2. Au plur. Calculs d'argent. Les bons comptes font les bons amis*. Après avoir fait mes comptes, je trouvai qu'avec ces mille francs, je paierais mes petites dettes et que je serais habillée à neuf (J. Champfleury, Les Aventures de MlleMariette,1853, p. 173). B.− Proverbes 1. À tout bon compte revenir. ,,On doit toujours être reçu à recommencer le calcul fait avec le plus de soin, et à s'assurer s'il est exact`` (Ac. 1835, 1878). 2. Erreur n'est pas compte. On peut toujours revenir sur un compte faux, et p. ext., sur une erreur. Il s'était trompé! Ah! Mégarde! Et depuis longtemps! Ah! Erreur n'est pas compte! (Céline, Mort à crédit,1936, p. 556). C.− Locutions 1. Faire son compte a) Vieilli. Espérer. Il fait son compte de partir demain. Il croyait que ses amis l'assisteraient, il faisait son compte là-dessus (Ac.1835-1932). b) Mod., fam. Commettre une maladresse. Fichu malagauche (...) comment diable qu't'as fait ton compte? (Courteline, Le Train de 8 h 47,1888, 2epart., 8, p. 192). 2. (De) compte(s) fait(s), réglé(s) (vieilli); tout/s compte(s) fait(s) (mod.). Après avoir fait un/des compte(s). De compte réglé, la mouture d'un setier revient à 25 l (Marat, Les Pamphlets,Nouv. dénonciation contre Necker, 1790, p. 181).Il [M. de Lescure] a trouvé de compte fait jusqu'à cinquante-six maîtresses connues à ce roi vaillant [Henri IV] (Sainte-Beuve, Nouveaux lundis,t. 9, 1863-69, p. 2).Don Simuel Lévi, trésorier des Castilles, détient, tous comptes faits, dans les coffres royaux, trois mille doubles d'or (Leconte de Lisle, Poèmes tragiques,Les Inquiétudes de Simuel, 1886, p. 154). − Au fig. Tout bien considéré. De compte fait, je serais sans frayeur des républiques, comme sans antipathie contre leur liberté : je ne suis pas roi; je n'attends point de couronne (Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 3, 1848, p. 284): 2. L'autre soir, Catherine et moi nous amusions à nous demander dans la peau de qui elle et moi pouvions souhaiter vivre; et, compte fait, avions conclu que nous ne gagnerions rien à déménager.
Gide, Journal,1946, p. 298. 3. Faire bon compte à qqn. Donner quelque chose à quelqu'un en grande quantité. − Au fig. Bien traiter quelqu'un. Faire à l'oppresseur trop bon compte (Ponge, Le Parti pris des choses,1942, p. 18). 4. À ce compte (là), au compte, selon le compte de qqn. D'après cette manière, la manière de quelqu'un d'effectuer un compte. C'est à mon compte le dix-neuvième mariage qu'elle manque tout-à-fait par sa faute (Leclercq, Proverbes dram.,Le Mariage manqué, 1835, 8, p. 88).Il était venu là deux mille personnes, à l'estimation des républicains, et six mille au compte des Dracophiles (A. France, L'Île des pingouins,1908, p. 228). − Au fig. En tenant ce raisonnement, selon l'avis de quelqu'un. À ton compte, Lénine ne devait pas prendre le partage des terres comme mot d'ordre (Malraux, La Condition humaine,1933, p. 286). D.− Loc. adv. 1. De bon compte. Au moins. Voici, de bon compte, la troisième lettre que je vous écris depuis votre dernière (Balzac, Lettres à l'Étrangère,t. 2, 1850, p. 114). 2. Fam. En fin de compte, à la fin du compte, au bout du compte. Finalement. Voilà huit jours que je mets, toutes les après-dînées, mes bottines (...) qui me font mal aux pieds. C'était plus une vie, à la fin du compte! (Huysmans, Les Sœurs Vatard,1879, p. 153).On aurait (...) voulu qu'elle finisse par se marier en fin de compte (Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 336).Et vient Thermidor, Bonaparte, et au bout du compte Louis XVIII (Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 88). II.− P. méton. Le résultat de cette détermination. A.− Vx. ,,Petit nombre que l'on jette de la main, et qui, étant plusieurs fois réitéré, fait la somme, le nombre que l'on demande.`` (Ac. 1835, 1878). À compter quatre à quatre, il faut vingt-cinq comptes pour faire cent (Ac.1835, 1878). B.− Total, somme. Compte borgne, rond. Tout le compte de tes années ne va peut-être pas jusqu'à trente (Claudel, La Ville,2eversion, 1901, I, p. 445).Ils sont donc douze, plus Gagou qui fait le mauvais compte (Giono, Colline,1929, p. 12).Chez moi il y a tellement d'argent que je n'en sais jamais le compte (Montherlant, Celles qu'on prend dans ses bras,1950, I, 1, p. 769): 3. ... la veuve Meyrion, porteuse de pain (...) allait dans les rues (...) portant, pendue à sa taille, une planchette de bois blanc à laquelle elle faisait avec son couteau des coches qui représentaient le compte des pains qu'elle avait livrés.
A. France, Les Dieux ont soif,1912, p. 166. − Spéc. Total, somme qui convient, qui est nécessaire (cf. également infra II C 3). Si tu rentres chez le père sans ton compte de galoches, gare à tes fesses! Te rappelles-tu au moins où tu l'as perdue, nigaude? (Bernanos, Nouvelle Histoire de Mouchette,1937, p. 1273).Le compte y est... j'avais raison de dire que nous étions trente pécores dans l'étable du bœuf (Audiberti, Les Femmes du Bœuf,1948, p. 115): 4. Deux francs et deux francs vingt, ça nous fait quatre francs vingt. Bénin se hâta de tendre une pièce de cinq francs, et il ouvrait la main pour recueillir la monnaie. − Ça fait juste le compte : trente centimes pour l'éclairage... (...) et cinquante centimes pour les deux bicyclettes...
Romains, Les Copains,1913, p. 126. ♦ P. métaph. : 5. On a vécu, joué, aimé. Ceux que l'on a écartés ou meurtris se plaignent? Que me voulez-vous? Je vous ai payé en joies et en souffrances, et vous aussi vous avez grandi, le compte y est.
Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 217. ♦ Loc. Être loin de/du compte. Être loin du total, de la somme qui convient, qui est nécessaire. Misère! il ne doit plus avoir que treize sous! (...) Ici, le litre de rouge coûte vingt et un sous. Il est loin de compte (Barbusse, Le Feu,1916, p. 156). ♦ Loc. fig. Être loin de compte. Ne pas obtenir ce que l'on souhaite ou juge souhaitable : 6. lia. − (...) nous ne nous aimons plus?
jean. − Le sais-je! Tu le dis. Mais si tu le dis parce que ton amour a disparu (...) je ne suis pas celui qui peut le deviner.
lia. − O mon petit Jean, tu le vois. Nous avons toujours été loin de compte, et je te le fais dire.
Giraudoux, Sodome et Gomorrhe,1943, I, 3, p. 73. Se tromper. : 7. eugénie. − (...) Soudain le froid te prend, tes dents se serrent, la parole te manque, ta chair devient du marbre.
lucile. − Tu sais pourquoi.
eugénie. − Je sais. C'est que l'amour est passé!
lucile. − Tu es loin de compte.
eugénie. − C'est qu'une femme ravissante passe...
Giraudoux, Pour Lucrèce,1944, I, 2, p. 21. C.− État détaillé des dépenses et des recettes, du doit et de l'avoir (cf. également infra II C 4 a spéc.) : 8. Je réclame (...) le compte détaillé de ma dette. On me présente un morceau d'enveloppe sur lequel on a griffonné :
♦ Compte d'apothicaire* (cf. ex. 5). ♦ Vieilli, fam. Comptes de cuisine, de cuisinière. Comptes mesquins et/ou mal tenus : 9. Combien vous faut-il de livres de beurre par jour dans votre maison? Combien d'œufs? Combien de viande? Combien de pain?
− Bah! Des comptes de cuisinières...
Reybaud, Jérôme Paturot,1842, p. 271. ♦ Comptes de tutelle. Comptes de la gestion du patrimoine d'un pupille, tenus par le tuteur. Le Capitaine (...) s'était fâché rouge lorsque son fils avait réclamé ses comptes de tutelle (Flaubert, L'Éducation sentimentale,t. 1, 1869, p. 20). 1. Spécialement a) État détaillé des dettes d'un particulier chez un commerçant. Notre épicier présente un relevé de compte : nous lui devons près de 500 couronnes, 700 francs (Bloy, Journal,1899, p. 373).Amélie, donne-moi un bout de pain et marque-le sur le compte (Giono, Le Grand troupeau,1931, p. 21): 10. « Ce doit être, pensai-je, quelqu'un de ces paresseux, comme on en voit traîner dans la vieille ville. Ils ont un compte au cabaret... »
Romains, Les Hommes de bonne volonté,La Douceur de la vie, 1939, p. 199. − P. métaph. : 11. ... Laurent-le-borgne a toujours un compte ouvert chez moi. La blessure mortelle pour ce raté serait qu'on montrât son impuissance littéraire, ce qui est au moins facile.
Bloy, Journal,1901, p. 52. b) État détaillé des opérations affectant les fonds qu'un client a déposés dans un établissement bancaire ou financier; p. méton., ces fonds eux-mêmes. Compte bancaire; extrait, relevé de compte; numéro de compte. Lulu fit ouvrir à leur banque un compte de un million au nom de MlleDual (Druon, Les Grandes familles,t. 2, 1948, p. 160): 12. On peut bien pour vingt-cinq sous acheter un superbe carnet de chèques, mais à quoi sert de posséder un carnet de chèques, si on n'a pas de compte à la banque?
Miomandre, Écrit sur de l'eau,1908, p. 178. SYNT. a) Compte courant, compte d'épargne, de dépôt, compte chèque postal. b) Crédit, débit, solde d'un compte. c) Ouvrir, arrêter, clore, solder un compte; créditer, débiter un compte; porter, passer en compte; virer une somme d'un compte à un autre; apurer, vérifier un compte. − P. métaph. : 13. ... un personnage de commerce presque impossible (...) une façon de Chicaneau, processif, astucieux, retors, éternellement en bisbille avec le compte courant de la vie.
Courteline, L'Article 330,1900, p. 261. c) État détaillé des opérations affectant chacun des éléments matériels ou financiers qui constituent une entreprise, une collectivité ou qui sont relatifs à son fonctionnement. Comment se fait-il que le compte Lambert frères soit débiteur de 7.832 francs? (Pagnol, Fanny,1932, III, 1, p. 169). SYNT. a) Cf. supra, synt. b, c. b) Comptes d'actif, de passif; comptes de bilan; comptes financiers [compte (de) caisse, compte (de) banque]; comptes de gestion; comptes de charges, de produits; comptes de résultats; compte d'exploitation générale, de pertes et profits (ou profits et pertes) : 14. ... il ne se rencontra pas un seul récalcitrant parmi les créanciers. Personne ne pensait à passer sa créance au compte de profits et pertes ...
Balzac, Eugénie Grandet,1834, p. 179. − P. métaph. : 15. Il se sentit magnanime, et marqua le sacrifice qu'il faisait au compte de doit et avoir qu'il tenait déjà avec la famille Dandillot.
Montherlant, Le Démon du bien,1937, p. 1285. 2. Loc. et emplois métaph. ou fig. a) [P. réf. aux techn. comptables] − Vieilli. Ne tenir ni compte ni mesure. Ne pas tenir de comptabilité, être désordonné dans ses affaires. − Avoir qqc. en compte. S'occuper de quelque chose, en être responsable. − En compte sur. À valoir sur. Prêter (...) en compte sur les bénéfices de l'année prochaine, la somme nécessaire à parfaire les sommes dues (Balzac, César Birotteau,1837, p. 395). − Vx. À compte. ♦ Loc. adv. À valoir sur. Il donna cent cinquante francs à compte. Il a payé le reste en trois mois (Ponson du Terrail, Rocambole,t. 1, L'Héritage mystérieux, 1859, p. 108). ♦ Loc. subst. Acompte. Les peines incroyables qu'on avait à toucher de légers à comptes (Marat, Les Pamphlets, Nouv. dénonciation contre Necker, 1790, p. 190). b) [P. réf. au fait que l'on n'ouvre un compte que pour des choses importantes] On ouvre un compte aux fredaines, on les crédite, on consacre à ce chapitre certains bénéfices; mais entamer son capital!... ce serait une folie (Balzac, La Cousine Bette,1847, p. 282).Croyez-en ma vieille expérience : Le hasard ne peut pas en compte être passé (E. Augier, La Jeunesse,1858, III, p. 380). − Être de compte (vieilli); entrer en (ligne de) compte(s) (mod.). Avoir de l'importance, être pris en considération. Cet acte d'amour (...) n'entrait plus en ligne de comptes (Gide, Les Faux-monnayeurs,1925, p. 1046).À New York, on n'a égard qu'à l'utile et l'aspect que cela peut avoir n'entre pas en ligne de compte (Green, Journal,1943, p. 19): 16. Il est justement indifférent que M. Léon Brunschvicg se réveille chaque matin avec une bonne haleine et une bonne conscience : ses livres, ses enseignements et leurs suites réelles entrent seuls dans nos comptes.
Nizan, Les Chiens de garde,1932, p. 131. − Faire compte de (vieilli); tenir compte de (mod.). Prendre en considération : 17. Échinez-vous toute une vie pour faire vivre vos enfants comme vous n'avez jamais vécu! Quand vous croirez avoir un pauvre mot de merci, vous aurez ça qu'on n'en fera même pas compte. On ne se soucie ni de vous ni de vos peines.
Pourrat, Gaspard des Montagnes,Le Pavillon des amourettes, 1930, p. 148. 18. Je m'adressais de rapides remontrances, dont la légère griserie de ma tête, la vitesse acquise du discours m'empêchaient de tenir compte.
Romains, Les Hommes de bonne volonté,La Douceur de la vie, 1939, p. 105. ♦ Compte tenu de. Il devait, compte tenu des meubles vendus (...) et des mois de location impayés, quelque chose comme soixante-cinq mille francs (Fargue, Le Piéton de Paris,1939, p. 150). ♦ Littér. Prendre compte de. Un homme marqué de qui nul ne prend compte (Claudel, Poésies diverses, Vers d'exil, 1952, p. 17). c) [P. réf. au fait qu'un compte représente les intérêts d'une pers.; p. méton., la pers. elle-même] :
19. Ne savez-vous pas que les morts n'ont jamais de pitié? Leurs griefs sont ineffaçables, parce que leur compte s'est arrêté pour toujours.
Sartre, Les Mouches,1943, II, 2, p. 47. − Savoir bien son compte, entendre son compte. Ne pas être facile à tromper en affaires. − Au compte, sur le compte de qqn. Aux frais de quelqu'un : 20. Je passe ordre pour vous de deux cents Sonchelles demain, en fin de bourse. Si elles baissent, elles sont à mon compte, si elles montent, je les tiens à votre disposition.
Druon, Les Grandes familles,t. 2, 1948, p. 88. ♦ Spéc. À compte d'auteur. Aux frais de l'auteur : 21. Bernard Grasset accepta de publier ma nouvelle, mais à compte d'auteur (...). Toutefois, Grasset, bon prince, s'engageait par contrat à éditer, à ses frais, mon prochain roman.
R. Martin du Gard, Souvenirs autobiographiques et littéraires,1955, p. LV. − Au compte de qqn, pour le compte de qqn. Pour quelqu'un. Les applaudissements étaient pour son compte, et les sifflets pour celui de l'acteur (Ac.1835-1932).Non seulement je reçois du papier timbré pour mon compte, mais encore pour les autres, pour les domestiques! (Flaubert, Correspondance,1880, p. 325).Au compte de qui m'interrogez-vous? À son compte ou au vôtre? (Cocteau, Les Parents terribles,1938, II, 9, p. 251).Chien qui chasse pour son propre compte et qui garde trop longtemps la perdrix dans sa gueule (Mauriac, Journal 3,1940, p. 276). ♦ C'est pour mon compte. Tant pis pour moi. ♦ Spéc. [Dans la vie sociale, professionnelle] J'avais, autrefois, voyagé en Irlande pour le compte de la maison Claremoris and Son (Larbaud, A. O. Barnabooth,1913, p. 345): 22. ... j'ai pendant sept ans, pour le compte d'un huissier de Charonne, assuré l'expulsion de locataires insolvables.
Giraudoux, La Folle de Chaillot,1944, I, p. 49. À son compte. En étant son propre patron. Être à son compte. Anciens serveurs installés à leur compte et dont l'affaire périclitait (Druon, Les Grandes familles,t. 2, 1948, p. 222).− À/de compte à demi. En partageant les profits et les pertes : 23. Il débaucha de Grasse un ouvrier avec lequel il commença de compte à demi quelques fabrications de savon, d'essences et d'eau de Cologne.
Balzac, César Birotteau,1837, p. 43. ♦ P. métaph. : 24. ... ce mariage, n'est-ce pas, n'a pas trompé grand monde... sans aucune des joies ni de femme, ni de mère (...) ... Et cela au fond, un peu à cause de vous Simon. − À cause de nous deux, ma chère, dit-il. Vous y êtes de compte à demi, je crois.
Druon, Les Grandes familles,t. 1, 1948, p. 180. − Pour mon compte. En ce qui me concerne. Son Eminence avait ordonné des prières publiques afin d'obtenir la pluie : pour mon compte, j'eusse bien fait un pacte avec la sécheresse (Mauriac, Journal 1,1934, p. 23). − Sur le compte de. Au sujet de. Marguerite m'a questionnée sur votre compte (A. Dumas Fils, La Dame aux Camélias,1848, p. 120).Popaul, je le croyais régulier, loyal et fidèle. Je me suis trompé sur son compte. Il s'est conduit comme une lope (Céline, Mort à crédit,1936, p. 123). − [Avec une idée de responsabilité] ♦ Prendre à/sur son compte. S'attribuer, prendre la responsabilité. Il a consenti à prendre sur son compte le crime d'un autre (Balzac, Le Père Goriot,1835, p. 185).Le soldat qui prend à son compte les aventures des camarades − et à qui, somme toute, il n'est rien arrivé (Gide, Journal,1914, p. 501). ♦ Mettre, imputer, passer au/sur le compte. Attribuer, faire porter la responsabilité. Mes mélancolies, mes caprices, on les passait au compte de la puberté (A. Arnoux, Les Gentilshommes de ceinture,1928, p. 97).Des mots grossiers et balourds (...) qui seraient imputés au compte de sa folie passagère (Queffélec, Un Recteur de l'île de Sein,1944, p. 61). d) [P. réf. au fait qu'un compte est un instrument de relation entre des pers.] − Être en compte avec qqn. Être en relations d'affaires avec quelqu'un. Martial n'a pas voulu d'argent : il dit qu'il est en compte avec vous (Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 2, 1812, p. 11). ♦ Rare, fam. : 25. ... messieurs les fermiers sont en compte courant avec la Kommandantur! Ils lui achètent et lui vendent, en reçoivent de l'argent!
Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 29. − Fam. Être de bon compte. Être loyal en affaires. ♦ P. ext. : 26. ... je vous fais de légers reproches, comme je vous en ai fait de tout temps, et vous vous amusez à m'impatienter par une sécheresse de réponses qui n'a pas d'exemple. Soyez de bon compte : Me répondiez-vous ainsi dans les premiers temps que je vous ai connu?
Leclercq, Madame Sorbet,1835, 4, p. 133. ♦ Être de mauvais compte : 27. Dans la chambre voisine Alphonsine renâcla, en proie à un cauchemar. Didace, volontiers de mauvais compte quand il s'agissait de la bru, songea :
− Elle sait seulement pas se moucher!
G. Guèvremont, Le Survenant,1945, p. 80. − Pour solde de tout compte. Pour interrompre toute relation d'affaires. Je vous expédie par mandat postal la somme de 128 fr. 30 dont vous voudrez bien m'envoyer quittance pour solde de tout compte (Bloy, Journal,1903, p. 199). 3. P. méton. Solde, généralement débiteur; p. ext. somme due (cf. également supra II B). Emma (...) envoyait aux malades le compte des visites, dans des lettres bien tournées qui ne sentaient pas la facture (Flaubert, Madame Bovary,t. 1, 1857, p. 46): 28. marie. − Il me semblait bien, Monsieur Dupuis, que mon père s'était acquitté avec vous.
dupuis. − Ne me dites pas cela, vous me feriez de la peine.
marie. − Je suis certaine cependant, autant qu'on peut l'être, que mon père avait réglé son compte dans votre maison.
Becque, Les Corbeaux,1882, IV, 10, p. 243. a) Locutions − À bon compte ♦ Moyennant une somme modique. Une bicoque mal close (...) qu'on loue à bon compte parce que nul n'en voudrait (G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Les Maîtres, 1937, p. 81). ♦ P. ext. Sans se soucier de qui payera. Boire, manger à bon compte. ♦ Au fig. Facilement, sans grand dommage. Ninon respira et s'estima bien heureuse d'en être quitte à si bon compte (Boylesve, La Leçon d'amour dans un parc,1902, p. 245). − Laisser qqc. pour compte. Laisser une chose à un vendeur, un créancier; ne pas acheter. Rester pour compte. Être laissé à un vendeur, un créancier; ne pas être acheté. La réserve des bagages oubliés, et parfois laissés pour compte par les clients qui sont partis sans payer (Fargue, Le Piéton de Paris,1939, p. 221): 29. Le marchand d'Anvers se refusait à prendre, au prix prévu, les trois cents tonnes de lentilles du Cantal (...). D'autre part, les lentilles du Chili, qui sont de bonne vente, risquaient aussi de rester pour compte, car le marché français était pour l'instant saturé...
G. Duhamel, Chronique des Pasquier,La Passion de Joseph Pasquier, 1945, p. 205. ♦ Au fig. Rester, être laissé pour compte. [En parlant d'une pers. ou d'une chose] Ne pas être pris en considération, être abandonné. S'il n'y a plus assez de jeunes gens pour toutes les filles, nous pouvons très bien rester pour compte (Maurois, Les Silences du colonel Bramble,1918, p. 124).[En parlant d'une chose désagréable] Rester. L'on t'a dit : la crainte de Dieu est le commencement de la sagesse; puis, Dieu absent, la crainte t'est restée pour compte (Gide, Journal,1933, p. 1193). b) Spécialement − Somme due par un employeur à un salarié. Faire son compte (vx); donner son compte (mod.). Congédier. Si Madame me croit une voleuse, Madame n'a que me donner mon compte (Mirbeau, Le Journal d'une femme de chambre,1900, p. 93).Demander son compte. Quitter un emploi. − Juste rétribution d'une affaire, d'une action; ce qui revient de plein droit. Faire, trouver son compte; ne pas trouver son compte avec qqn (de plus habile que soi en affaires). Il a bien fait son compte dans cette recette (Ac.1835, 1878) : 30. Comme le vétérinaire protestait qu'il était lésé, à cause de la dot de Juliette qui avantageait la maison d'Honoré, le père lui répondit : − C'est comme ça, mais tu as raison de gueuler. Il faut toujours essayer d'avoir plus que son compte.
Aymé, La Jument verte,1933, p. 34. c) Au fig. − [En bonne part] Ce qui convient, ce qui plaît. La jointure de la vie édifiante avec la prospérité temporelle, où le pharisaïsme trouve son compte (et en particulier un certain protestantisme anglo-saxon) (Mauriac, Journal 1,1934, p. 81).Dans ce naufrage de la raison, l'angoisse, la déchéance solitaire, la lâcheté piteuse et le mauvais aloi trouvaient leur compte (G. Bataille, L'Expérience intérieure,1943, p. 59). ♦ P. ext., loc. (En) avoir (pour) son compte. Avoir (une chose) en quantité suffisante, en trop grande quantité. Quant à moi, je fuis, j'ai mon compte, j'ai senti la corruption de ce lieu empesté qui me saisissait aux entrailles (Claudel, Le Soulier de satin,1929, 2ejournée, 12, p. 760).Une soutane, pauvre garçon! qui en a son compte d'argile et de déchirements (Audiberti, L'Ampélour,1937, p. 94).Un litre, dame! lorsqu'on a déjà son compte! J'ai dû m'arrêter de biberonner, à bout de souffle (Bernanos, Nouvelle Histoire de Mouchette,1937, p. 1286).Spéc. Avoir reçu une blessure mortelle : 31. Sylvestre (...) se jeta sur la gauche, voyant la direction du coup qui allait partir. Mais, dans le mouvement de détente, le canon de ce fusil dévia par hasard dans le même sens. Alors, lui, sentit une commotion à la poitrine, et (...) il détourna la tête vers les autres marins qui suivaient, pour essayer de leur dire, comme un vieux soldat, la phrase consacrée : « Je crois que j'ai mon compte! »
Loti, Pêcheur d'Islande,1886, p. 147. − [En mauvaise part] Désagrément, mauvais traitement, résultant d'une erreur, d'une faute; p. méton., différent entre des personnes. Partir sans demander son compte : 32. Il me faut recourir à tout un jeu de caleçons et de gilets, que j'enlève et remets vingt fois le jour. Si parfois je tente d'échapper à cette servitude et de me persuader qu'elle tourne à la manie, mon compte est sûr : je prends froid et j'en ai pour longtemps avec un rhume.
Gide, Journal,1943, p. 214. ♦ Régler, donner son compte à qqn; recevoir son compte. Il m'a fait un affront. Nous avons un compte à régler ensemble (Montherlant, Les Bestiaires,1926, p. 496).Règlement de comptes. Les sanglants règlements de comptes entre danseurs, soupeurs, gangsters, entraîneuses, drogués, souteneurs, prostituées et apprentis voleurs (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 247).Spéc. Tuer; être tué. Nous n'avons relevé dans la maison, ni dans le parc, aucune trace de sang. Le type a reçu son compte juste à l'endroit où il est tombé (Bernanos, Un crime,1935, p. 776).Belle camelote, ton espion! Fous-y son compte, imbécile! (R. Martin du Gard, Les Thibault,L'Été 1914, 1936, p. 758). ♦ Son compte est bon. Il subira le désagrément, le mauvais traitement qu'il mérite : 33. Si les gendarmes ainsi, m'avaient pincé en vadrouille, je crois bien que mon compte eût été bon. On m'aurait jugé le soir même, très vite, à la bonne franquette, dans une classe d'école licenciée.
Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 26. 4. P. ext. a) État, rapport détaillé de choses non évaluables en argent et, p. ext., non quantifiables (cf. compte rendu). L'Ambigu donnait une pièce nouvelle dont le compte devait être rendu par Lucien (Balzac, Les Illusions perdues,1843, p. 429).La Guillaumette, d'un lent regard, s'était rendu un compte exact de la disposition des lieux (Courteline, Le Train de 8 h 47,1888, 2epart., 5, p. 150).Vous êtes prudent, et vous tenez un compte exact de tout ce que vous faites (Claudel, L'Échange, 1reversion, III, 1894, p. 717): 34. Choisir les formes de courage auxquelles on se trouve spontanément porté. De là, s'élever aux autres. Saisir les bonnes occasions. Tenir un compte scrupuleux des succès et des échecs.
G. Duhamel, Journal de Salavin,1927, p. 19. ♦ Littér. Prendre compte (cf. infra, se rendre compte). L'expression physique de la luxure (...) c'est en feuilletant les albums de maladies vénériennes que nous en prendrons mieux compte (Claudel, Un Poète regarde la Croix,1938, p. 48). − Spéc. Rapport détaillé que l'on présente à une autorité supérieure pour se justifier; p. ext., justification. Demander des comptes à qqn. Je n'ai pas de compte à vous rendre; je ne suis pas en votre puissance et vous êtes dans la mienne (Scribe, Bertrand et Raton,1833, IV, 12, p. 213): 35. « ... J'estime que le refus de tuer est un signe d'élévation morale qui a droit au respect. Si vos codes et vos juges ne le respectent pas, c'est tant pis pour eux : tôt ou tard, ils auront un compte à rendre... »
R. Martin du Gard, Les Thibault,L'Été 1914, 1936, p. 539. ♦ Loc. verbales Demander compte. Il est écrit qu'au jour du jugement il nous sera demandé compte proportionnellement aux dons qui nous auront été faits (Estaunié, L'Empreinte,1896, p. 50).Devoir compte. Un peuple, dont les mandataires ne doivent compte à personne de leur gestion, n'a point de constitution (Robespierre, Discours,Sur la constitution, t. 9, 1789-93, p. 504): 36. Celui-ci sera un jouet pour que je m'en amuse, − sur celui-ci je serai roi, à cette connaissance de hasard je devrai compte de mes actes comme l'intendant à son maître.
Gracq, Un Beau ténébreux,1945, p. 33. Amener en compte (rare) : 37. [On voit] pourquoi, lorsqu'on les poursuivait pour les amener en compte [les administrateurs] il [Necker] les consola si affectueusement de cette humiliation.
Marat, Les Pamphlets,Nouv. dénonciation contre Necker, 1790, p. 185. Rendre ses derniers comptes. Mourir. Le patron va rendre ses derniers comptes (...) la mort le travaille (Balzac, Gobseck,1830, p. 438).b) Rendre compte (loc. verbale) − Emplois trans. ♦ [Le suj. désigne une pers.] Présenter un rapport détaillé, spécialement à une autorité supérieure pour l'informer, se justifier auprès d'elle. [Constr. nom.] :
38. Mais, chère Fanny, si cette femme [mademoiselle des Touches] était une sainte, elle n'accueillerait pas votre fils (...). J'irai la voir, moi (...) je vous en rendrai compte.
Balzac, Béatrix,1839-45, p. 64. [Constr. verbale (+ complétive)] Rare. Le commandant du 9ecorps rend compte qu'il tient la ferme Nozet (Foch, Mémoires,t. 1, 1929, p. 131).Emploi abs. Aller rendre compte à l'inspecteur-chef (Bernanos, Un Mauvais rêve,1948, p. 982):39. Ce fut Jacqueline qui parvint à dissuader le vieux Siegfried de continuer à faire lui-même l'aumône à ses gueux. (...). Jérémie, le valet de chambre, fut chargé de la distribution. Il s'en acquittait avec des airs dégoûtés d'archiduc et venait ensuite rendre compte à son vieux maître.
Druon, Les Grandes familles,t. 2, 1948, p. 214. ♦ [Le suj. désigne une chose] Expliquer. L'impuissance du mécanisme à rendre compte de la vie psychologique par des enclenchements de réflexes, si complexes fussent leurs rouages (Mounier, Traité du caractère,1946, p. 258): 40. ... n'est-il pas étrange qu'une théorie, qui commence par opposer plaisir et douleur, finisse par invoquer les mêmes principes pour rendre compte des phénomènes cliniques de la mélancolie et de l'hilarité?
J. Vuillemin, Essai sur la signif. de la mort,1949, p. 108. − Emploi pronom. réfl. Se rendre compte. Remarquer, comprendre, s'apercevoir. ♦ [Constr. nom.] J'ai fait un croquis d'un chêne, pour me rendre compte de la distribution des branches (E. Delacroix, Journal,1856, p. 44).Avec ce que j'ai dit précédemment on peut se rendre compte de ce que je ressentais (Verlaine, Confessions,1895, p. 161). ♦ [Constr. verbales] Se rendre compte que, ou plus rarement, de ce que + complétive.Elle avait essayé d'« écrire », mais s'était vite rendu compte qu'elle n'avait pas de talent littéraire (Montherlant, Les Jeunes filles,1936, p. 954).Mortier (...) se rendit compte de ce que le Duc allait lui rester sur les bras (Aragon, La Semaine Sainte,p. 473 ds Grev. 1969, p. 1013).Se rendre compte + interr. indir.Je remarquai que mes souliers étaient déchirés et sales et (...) je me rendis compte combien je marquais mal (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 76): 41. ... il m'était infiniment plus difficile qu'en mai d'écrire cette lettre-envoi, et que seule l'expérience me permettrait de me rendre compte si je parviendrais à y éviter le factice...
Du Bos, Journal,1928, p. 172. Rem. Les constr. verbales sont condamnées par les puristes. ♦ Emploi abs. Je te dis tout ça mon petit, C'est pour que tu te rendes compte, Que tu saches... (Géraldy, Toi et moi,Tendresse, 1913, p. 57).Il ne se rendit pas bien compte tout d'abord. Très vite pourtant il eut conscience qu'il était seul, sans le trot d'Aïcha près de lui (Genevoix, Raboliot,1925, p. 167).Fam. [À la 2epers. du sing. ou du plur. de l'ind. ou de l'impér.; sert à souligner une affirmation] Rendez-vous compte! Un million! tu te rends compte, Anny, un million qui me file sous le nez (Druon, Les Grandes familles,t. 2, 1948, p. 134). Prononc. et Orth. : [kɔ
̃:t]. p entre 2 consonnes et implosif par rapport à t pouvant faire partie de la syll. tonique ne se prononce pas : comptabilité, comptable, comptant, compter (et composés), compteur, comptoir, comptonie, domptable (in-), domptage, dompté (in-), dompter, dompteur, escompter, incompté, se mécompter, promptement, sculptable, sculpteur, sculpture, sculptural (cf. Fouché Prononc. 1959, p. 353). G. Straka (La Prononc. parisienne ds B. de la Faculté des Lettres de Strasbourg, 1952, p. 18, 23, 27) note que le p se prononce dans le Midi et que sous l'infl. de l'orth. on l'entend aussi parfois au nord de la Loire, ce qu'il juge être une prononc. déplaisante. Dans une communication faite au colloque C.N.R.S. en 1961, G. Straka pose la question de savoir jusqu'à quel point un dict. a ,,le droit de codifier des prononciations plus ou moins récentes, à l'origine populaire ou, au contraire, façonnées sur l'orthographe, qui, non conformes aux lois orthoépiques, ne cessent de gagner du terrain``. Admis ds Ac. 1694-1932. Homon. comte, conte. Dupré 1972, p. 488, souligne que les expr. compte courant et compte rendu ne prennent pas de trait d'union et que chacun des termes s'écrit avec s au plur. Il note que les mots composés du type compte-fils, compte-gouttes, etc. sont inv., leur 2eterme prenant s même au singulier. Étymol. et Hist. I. A. 1. Ca 1100 cunte « calcul d'une quantité » (Roland, éd. J. Bédier, 3078); 1165-70 p. méton. conte « quantité dénombrée » (Chr. de Troyes, Erec, éd. W. Foerster, 6950); 1220-25 à hicest conte « de ce point de vue » (G. de Cambrai, Barlaam et Josaphat, éd. H. Zotenberg et P. Meyer, p. 34, 16); ca 1350 fin de conte « finalement » (Gilles Li Muisit, Li Maintiens, éd. Kervyn de Lettenhove, t. 1, p. 27 4) − av. 1615 (Pasquier, Recherches, 439 ds IGLF), puis 1690 en fin de compte (Fur.); fin xves. à bon compte « à un prix relativement bas » (Coquillart, Poésies, éd. Ch. d'Héricault, I, 82); 1549 compte rond (Est.); 1572 fig. être loin de son compte « être éloigné de son calcul » (Font. perill., fo6 vods Gdf. Compl.); 1595 au bout du compte (Montaigne, Essais, livre 2, chap. 12, éd. A. Thibaudet, p. 571); 2. 1549 trouver son compte (Est.); 1634 trouver son compte « trouver son profit dans » (Corneille, La Veuve, acte 5, scène 2); 1634 avoir son compte « avoir sa part, ce que l'on désire » (Corneille, op. cit., acte 5, scène 3); 1675 id., se dit de quelqu'un à qui il arrive malheur (Widerhold, Dict. all.-fr. d'apr. FEW t. 2, p. 997a); 1680 (Rich.); av. 1704 régler ses comptes avec « mettre au net une situation » (Boss., Sulp., 2 ds Littré); 1798 faire le compte à un domestique « lui payer ce qui lui est dû en le renvoyant » (Ac.); 1798 donner son compte à qqn « lui infliger la punition méritée » (Ac.); 1835 son compte est bon, son compte sera réglé (Ac.). B. « État détaillé des recettes et des dépenses » 1. au fig. 1155 cunte rendre de « rendre raison de » (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 6626); fin xiiies. absol. rendre conte (J. de Meung, Testament, éd. M. Méon, p. 14, vers 258); 1283 demander conte (à qqn de qqc.) (Ph. de Beaumanoir, Coutumes Beauvaisis, éd. A. Salmon, chap. XII, § 395); av 1710 pronom. se rendre compte de « trouver l'explication de » (Fléch. ds Lar. 19e); 1220-25 tenir conte de « faire cas de » (G. de Cambrai, Barlaam et Josaphat, p. 138, 14); 2. au propre 1231 apeler de compe « appeler à rendre compte des recettes et des dépenses » (A.N. J 197 ds Gdf. Compl.); 1247 compe « état contenant le calcul du crédit et débit » (Règl. de la drap. de Châl.-s.-M. ds Gdf. Compl.); 1262 rendre compte (à nos Gens, de leur recette et de leur dépense) (Instruction de St Louis ds Du Cange t. 2, p. 473c); 1602 passer et allouer une somme ès comptes de (Henri IV ds Sully, IV, 208 ds Kuhn, p. 172, note 55); 1309 chambre des comptes (Ordonnance ds Isambert, Recueil général des anc. lois fr., t. 3, p. 40); 1663 prendre sur son compte « en assumer la responsabilité » (Molière, Critique de l'École des femmes, scène 6); 1678 pour leur propre compte « pour eux » (La Fontaine, Fables, livre 8, fable 13, éd. H. Régnier, t. 2, p. 278); 1740 à compte « à valoir, en déduction d'une somme » (Ac.). II. 1675 compte courant (J. Savary, Le parfait négociant, p. 355). I du b. lat. computus attesté au sens de « calcul », « quantité dénombrée »; « estimation, considération ». La graphie étymol. compte (3etiers xiiies. J. Le Teinturier, Mariage sept Arts ds T.-L.) s'est spécialisée au sens de « calcul », la graphie conte étant réservée au sens de « récit », v. conte. II, calque de l'ital. conto corrente, attesté dep. 1447-64 (Corrispondenza di una filiale dei Medici ds Batt.). Fréq. abs. littér. : 12 298. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 13 843, b) 16 131; xxes. : a) 16 228, b) 22 079. Bbg. Gohin 1903, p. 334. − Gottsch. Redens. 1930, p. 241, 256, 276. − Guiraud (P.). Mél. d'étymol. arg. et pop. Cah. lexicol. 1970, t. 17, no2, p. 12, 14. − Rog. 1965, p. 132, 137, 138, 234. |