| COMMISSION, subst. fém. I.− Charge qu'une personne reçoit de faire quelque chose. Donner, recevoir commission de faire qqc.; donner une commission à qqn. A.− Usuel Charge que quelqu'un donne à autrui de faire une action à sa place et, en partic., de transmettre un message ou un objet, d'effectuer un achat, etc. Charger qqn d'une commission, s'acquitter de sa commission, faire une commission pour qqn. Chargez-vous d'une commission que je vous donnerai pour un ami de ma famille (Musset, La Confession d'un enfant du siècle,1836, p. 195).Je suis tout à vos ordres. Une commission pour Paris, sans doute... Un petit paquet à emporter, n'est-ce pas (Pailleron, L'Âge ingrat,1879, III, 5, p. 115). − P. ext., fam., au plur. Achat(s) de denrées, de provisions pour l'usage quotidien. Faire les commissions. Sa maman l'avait envoyé faire une commission (Frapié, La Maternelle,1904, p. 174): 1. ... Maria, revêtue déjà de sa grande pelisse d'hiver, serrait avec soin dans son porte-monnaie la liste de commissions que lui avait donnée sa mère.
Hémon, Maria Chapdelaine,1916, p. 154. − P. euphém., fam., lang. enfant. Faire la petite, la grosse commission. Uriner, aller à la selle : 2. − Nous autres, les filles, nous devons nous arrêter pour faire les deux commissions. Les chevaux, les vaches font la grosse tout en courant mais sont obligés de s'arrêter pour faire pipi. Au contraire, les garçons s'arrêtent pour faire la grosse, mais font pipi tout en courant.
Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 180. B.− Spécialement 1. Charge temporaire officiellement attribuée à quelqu'un. Exécuter, remplir une commission. Ce garde des sceaux présiderait par commission le parlement de Toulouse (Hugo, Le Rhin,1842, p. 98).J'ai treize pennons sous ma bannière, et je vous obéirai quand le roi vous aura donné commission pour combattre les révoltés (Mérimée, La Jacquerie,1828, p. 191). − De commission (en parlant d'un doc. officiel).Qui atteste le commissionnement de quelqu'un. Lettre de commission ou absol. commission : 3. ... l'agent tirant un papier de son portefeuille, montra à son compagnon une commission signée du directeur de la police centrale.
Verne, Le Tour du monde en 80 jours,1873, p. 105. − P. méton. a) ARM. Titre ou brevet qui conférait un emploi ou un grade militaire. Commission d'officier. Le général dit à Alpy : « J'aime beaucoup ce petit Beyle, il est plein d'esprit. Je désire beaucoup qu'il reçoive sa commission d'aide de camp » (Stendhal, Journal,t. 1, 1801-05, p. 7). b) MAR. Navire en commission. Bâtiment en armement. Les seuls [vaisseaux] que l'on puisse considérer comme actuellement en état de faire un service de guerre, sont (...) ceux qui sont en commission et en croisière devant Madère (Chateaubriand, Correspondance gén.,t. 4, 1789-1824, pp. 36-37). c) JUST. Commission rogatoire. ,,Délégation de pouvoirs donnée par un juge d'instruction ou une juridiction pénale ou civile en vue d'effectuer certaines opérations`` (Lemeunier 1969). Je suis ici pour déposer devant le juge d'instruction de Luxembourg, délégué par commission rogatoire du parquet bruxellois (Hugo, Correspondance,1871, p. 289). 2. DR. Charge qu'une personne (cf. commettant) confère à une autre (cf. commis, commissionnaire) d'agir en son nom. Contrat de commission. − Spéc., COMM. ♦ Ordre qu'une personne, et en partic. un négociant, donne à une autre personne de réaliser une opération commerciale pour son compte. Il [le juge de paix] avait donné commission à un fripier-bouquiniste de Melun, venu exprès à Nemours, et qui déjà s'était fait adjuger plusieurs lots (Balzac, Ursule Mirouët,1841, p. 196): 4. − Monsieur l'expert, lui dis-je, avez-vous acheté le numéro 42 pour votre compte ou par commission?
− Par commission. J'avais ordre de ne le lâcher à aucun prix.
− Pouvez-vous me dire le nom de l'acquéreur?
− Je suis désolé de ne pouvoir vous satisfaire. Mais cela m'est tout à fait interdit.
A. France, Le Crime de Sylvestre Bonnard,1881, p. 332. ♦ Profession de celui qui fait des transactions commerciales pour le compte d'un tiers moyennant une remise, soit au nom de celui-ci (cf. mandataire) soit en son nom propre (cf. commissionnaire). Faire la commission; être dans la commission; courtier, représentant à la commission : 5. La fortune d'Ambroise devenait prodigieuse, depuis que le vieil oncle Du Hordel était mort en lui laissant la maison de commission...
Zola, Fécondité,1899, p. 659. − P. méton. Rétribution perçue par le commissionnaire et p. ext., par tout intermédiaire. Droit de commission : 6. Mon père a été sollicité par une banque qui lançait des actions d'une société nouvelle. Le banquier lui a promis une commission importante sur chacun des titres qu'il ferait acheter...
Montherlant, Celles qu'on prend dans ses bras,1950, III, 4, p. 823. ♦ Péj. Commission (secrète). ,,Gratification donnée à une personne qui conclut une affaire plus ou moins régulière en usant de son influence`` (Lar. Lang. fr.). Les pourboires, les commissions en sous-main (Van Der Meersch, Invasion 14,1935, p. 468): 7. Est-ce qu'on ne devait pas partager par moitié toutes les commissions, tous les pots-de-vin des fournisseurs?
A. Daudet, Les Rois en exil,1879, p. 189-190. II.− P. méton. Ensemble de personnes officiellement chargées d'une mission à caractère public. Membre, président, rapporteur d'une commission. A.− Réunion de personnes commises par une autorité ou choisies en son sein par une assemblée pour étudier un projet, préparer ou contrôler un travail, mener une enquête ou prendre une décision. Nommer une commission, débats en commission, commission d'experts. La commission du dictionnaire vient d'installer « déraciner » dans le dictionnaire avec le sens que je lui donne (Barrès, Mes Cahiers,t. 7, 1908, p. 90).Une commission où siègent les étudiants a été réunie par le ministère de l'Éducation nationale pour promouvoir une réforme... (Combat,19-20 janv. 1952, p. 8, col. 6). SYNT. a) Rapport, conclusions, vœux de la commission; amendement proposé par la commission; renvoi à la commission, en commission. b) Commission municipale, régionale, nationale; commission consultative, préparatoire; commission de contrôle, d'arbitrage, de surveillance. − Commission administrative. Commission chargée de la gestion des établissements de bienfaisance tels que les hôpitaux, hospices, etc. (cf. L'Organ. hospitalière en France, 1957, p. 12). − DR. CONSTIT. et ADMIN. ♦ Commission départementale. Corps composé de conseillers généraux élus au sein du Conseil Général et chargé, dans l'intervalle des sessions de ce conseil, de contrôler l'action préfectorale et de surveiller l'exécution des décisions arrêtées par le Conseil Général (d'apr. Cap. 1936) : 8. En cas de désaccord entre la Commission départementale et le Préfet, l'affaire peut être renvoyée à la plus prochaine session du Conseil général qui statuera définitivement.
H. Bacquias, Le Conseil général et le conseil d'arrondissement,1934, p. 69. ♦ Commission parlementaire. Organe composé d'un nombre restreint de membres du Sénat ou de la Chambre des députés (actuelle Assemblée nationale) et chargé soit d'informer l'assemblée dont il est issu sur une question déterminée, soit de suivre l'exécution d'une décision préalablement décidée par celle-ci : 9. Il a fallu lui expliquer tous les rouages du mécanisme parlementaire; lui apprendre qu'il y avait une commission de l'Armée, une commission des Finances, des sous-commissions, des rapporteurs, une discussion du budget.
A. France, Le Lys rouge,1894, p. 343. Commission spéciale, temporaire; commission à mandat général; commission permanente. Commission du budget (A. France, L'Île des pingouins,1908, p. 343).Commission d'enquête (Barrès, Mes Cahiers,t. 1,1897-98, p. 213).Commission mixte paritaire (Doc. d'hist. contemp.,t. 2, 1852-59, p. 211).− Commission d'examen. Ensemble des examinateurs chargés de faire passer un examen. Les commissions d'examen pour le certificat d'aptitude pédagogique sont nommées par l'inspecteur d'académie (Encyclop. pratique de l'éduc. en France,1960, p. 364). − P. ext. Groupe de personnes choisies pour accomplir une mission précise, telle que l'érection d'une statue, l'organisation d'une fête. On élève en Italie une statue à Beccaria. Une commission s'est formée pour cela (Hugo, Correspondance,1865, p. 487).Je suis d'avis qu'il faut nommer une commission des fêtes et divertissements. Et il faut nommer un président (G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Désert de Bièvres, 1937, p. 166). ♦ P. plaisant. Je demande que l'on me nomme président de la commission des dépravés. Je mettrai ça sur mes cartes (G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Désert de Bièvres, 1937p. 220). B.− Tribunal d'exception jugeant des faits graves, en général politiques. Un pays où l'institution des jurés a sans cesse été suspendue, la liberté des tribunaux violée, les accusés traduits devant des commissions (Constant, Principes de pol.,1815, p. 156). − Commission militaire. Tribunal militaire jugeant rapidement et sans recours. La commission militaire a jugé le duc d'Enghien, mais avec douleur et repentir (Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 2, 1848, p. 165). − HIST. Commission mixte. Tribunal d'exception institué par le gouvernement issu du coup d'état du 2 décembre 1851. Une de ces commissions mixtes qui déshonorèrent la justice française (Zola, La Curée,1872, p. 379). Rem. La docum. atteste le sens spécial en théol. « Action de commettre une faute en transgressant un précepte défendant le mal ». Péché de commission. ,,On l'oppose à péché d'omission`` (Ac. 1798-1878). Prononc. et Orth. : [kɔmisjɔ
̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. xiiies. « ordre, mission » (Cout. d'Artois, 124 ds Delb. Notes; 1690 commission rogative (Fur.); 1606 comm. traffiquer par commission « faire du commerce par l'entremise d'un commissionnaire » (Texte cité ds Kuhn, p. 50); 1675 « pourcentage, somme gagnée pour une opération de courtage » (Savary, Parfait négociant, ibid., p. 214); 1690 plur. « charge de faire des emplettes pour quelqu'un » (Fur.); 1794 p. ext. « emplettes effectuées pour quelqu'un » (Mmede Staël, Lettres inédites à L. de Narbonne, p. 222). B. 1311 commission de la paine « exécution de la peine » (Cart. de Ponthieu, Richel. 1. 10112 ds Gdf.) attest. isolée. C. Av. 1755 « réunion de personnes chargée d'un objet précis » (Montesquieu ds Lar. 19e). D. 1587 pecher en commission (Cholières, 2eAp. Disnée, p. 66 ds Hug.); 1656 « faute » (Pascal, Prov. 4 ds Littré). Empr. au lat. class. commissio du supin commissum de committere v. commettre proprement « action de mettre en contact » qui en lat. chrét. a développé les sens de « action de commettre une faute, un péché » et « réunion d'hommes »; sens A d'apr. commettre « préposer, confier une charge »; à rapprocher de B le m. fr. commetre une paine « infliger une peine » (ca 1360 Modus et Ratio, éd. G. Tilander, § 195, 59). Fréq. abs. littér. : 1 962. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 3 054, b) 3 453; xxes. : a) 2 304, b) 2 501. Bbg. Gohin 1903, p. 294. − Grandpré (J. P. de). Qq. termes d'assurance sur la vie. Meta. 1971, t. 16, no3, p. 171. − Termes techn. fr. Paris, 1972, p. 95. |