| CLOCHE1, subst. fém. A.− Instrument de bronze à percussion en forme de coupe renversée qui, sous le choc d'un battant à l'intérieur ou d'un marteau à l'extérieur, produit un son retentissant. Le dimanche est le jour où l'on entend les cloches (Rodenbach, Le Règne du silence,1891, p. 123): 1. − Qu'est-ce qui sonne là? interrogea Mme Bavoil qui écoutait le tintement prolongé d'une cloche.
− Ce sont les premiers coups des vêpres.
Huysmans, L'Oblat,t. 1, 1903, p. 35. ♦ Noblesse de la cloche. Descendants des maires et échevins : 2. Quelque bourgeois y a gravé [sur la porte] les insignes de sa noblesse de cloches, la gloire de son échevinage oublié.
Balzac, Eugénie Grandet,1834, p. 6. − Expr. fig. Son de cloche. Opinion très particulière sur une affaire ou un événement. Entendre un autre son de cloche. Sonner les cloches à qqn. Le réprimander vertement. Fondre la cloche. Prendre une résolution définitive : 3. Villèle a tort; il était indispensable que j'écrivisse à Mathieu. Il fallait fondre la cloche, comme on dit noblement, et je ne pouvais pas laisser arriver au Conseil la proposition de m'envoyer à Vérone par un autre que par Mathieu, mon ministre, sans le blesser mortellement.
Chateaubriand, Correspondance gén.,t. 3, 1789-1824, p. 135. − Loc. proverbiales. Le Bon Dieu lui-même a besoin de cloches (sous-entendu pour appeler les fidèles au culte). Tout homme a besoin que l'on parle de lui pour faire connaître ses travaux. Qui n'entend qu'une cloche n'entend qu'un son. Un jugement est contestable qui ne s'appuie que sur une seule version des faits. B.− P. anal. 1. [P. anal. de fonction] ♦ Cloche de bois. Instruments qui remplacent les sonneries de cloche du jeudi au samedi saints. ♦ Déménager à la cloche de bois. Déménager en cachette : 4. Mouchefrin ne put payer son deuxième terme rue Racine; il déménagea « à la cloche de bois », c'est-à-dire par escroquerie...
Barrès, Les Déracinés,1897, p. 146. 2. [P. anal. de forme] a) Domaines divers − BOT. Fleur en cloche ou cloche. Fleur monopétale. dont la corolle affecte la forme d'une cloche. − CHIM. Appareil en verre, de formes diverses, servant à recueillir les gaz sur une cuve à eau ou à mercure, à isoler un corps dans une atmosphère gazeuse : 5. Pipette en U permettant le remplissage facile des cloches à gaz sur la cuve à mercure...
Catal. d'instruments de lab. (Prolabo), 1932, p. 105. − CHIR. Cloche à oxygène (cf. tente à oxygène). − CUISINE ♦ Couvercle de verre sous lequel on place le fromage pour l'empêcher de se dessécher. ♦ Ustensile métallique qui sert à couvrir les plats pour les empêcher de se refroidir : 6. Moyen-âge (...). Les plats étaient apportés couverts par des cloches [elles étaient en argent chez les riches] et les gobelets posés sur la table étaient munis de couvercles...
Ali-Bab, Gastron. pratique,1907, pp. 66-67. − HORTIC. Abri de verre servant à hâter la pousse ou la maturité de certaines plantes, de certains fruits ou à les protéger du froid. Au fig. : 7. Un soleil à faire chauffer le fer à blanc frappait sur la toile de notre galère, où nous mûrissions comme des melons sous cloche.
T. Gautier, Tra los montes,Voyage en Espagne, 1843, p. 297. − MATH. [Dans la théorie des probabilités] Courbe en cloche. Courbe représentant la distribution dite normale des erreurs commises dans une série d'épreuves : 8. L'interprétation de tels graphiques doit se faire avec prudence car si le sondage n'a pas porté sur l'ensemble des caractères, il se peut qu'une courbe en J ne soit que la « queue » de la courbe en cloche qui aurait été trouvée si le sondage avait porté sur l'ensemble des caractères.
G. Cullmann, M. Denis-Papin, A. Kaufmann, Éléments de calcul informationnel,1960, p. 36. − TECHNOL. Cloche à/de plongeur. Appareil en forme de cloche permettant de travailler sous l'eau : 9. À la faveur de la marée, ils [les caissons] sont amenés en place au-dessus du massif d'enrochements préalablement dressé au moyen d'une cloche à plongeur suspendue à un titan.
É.-T. Quinette De Rochemont, Cours de travaux mar.,1900, p. 264. b) En appos., HABILL. ♦ Chapeau cloche. Chapeau évasé sur les bords : 10. ... un peu ridicule, avec le grand chapeau cloche qui protège son teint et son chignon...
Colette, Claudine à l'École,1900, p. 244. ♦ Jupe cloche. Jupe qui s'évase vers le bas et dont la forme rappelle celle d'une cloche : 11. Il se compose [le costume de pluie] d'une jupe cloche raisonnablement épanouie et d'un blouson...
Le Monde,16 nov. 1955, p. 9, col. 3. C.− Arg. ou lang. pop. 1. Synon. de tête.Avoir la cloche fêlée. Être fou. 2. Personne sotte et incapable. Quelle cloche! − Emploi adj. Ridicule, stupide : 12. « Dépêche-toi de te faire faire une robe, ma pauvre mère, tu es quand même trop cloche ».
S. de Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 161. 3. Se taper la cloche. Faire un bon repas : 13. Le renard et le bouc s'étant tapés la cloche,
Cherchaient une combine pour picoler un coup.
Marcus, 15 fables célèbres (racontées en arg.),1947, p. 7. Prononc. et Orth. : [klɔ
ʃ]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1remoitié xiies. cloche « instrument à percussion » (Voyage de Charlemagne, éd. P. Aebischer, 359); d'où, p. anal. de forme, xves. cloque « objet creux qui recouvre, protège » (Olla Patella, s.v. repofocilium ds T.-L.); 1718 empl. p. compar. cloche (Leroux, Dict. comique, p. 123 : On dit aussi de ceux qui disent tantôt d'une façon, tantôt de l'autre : qu'ils sont comme les cloches, qu'on leur fait dire tout ce qu'on veut); d'où 2. 1872 cloche « personne incapable, stupide » (D. Poulot, Le Sublime, p. 180). Du b. lat. clocca « id. » (ca 550, domaine angl. ds Latham; cf. 690, Adamnanus [abbé d'Iona en Écosse], Vita Columbae, d'apr. FEW t. 2, p. 792) apporté sur le continent par les moines irlandais. Bbg. Gottsch. Redens. 1930, p. 249, 347. − Goug. Mots. t. 1 1962, pp. 21-22. − Rétif (A.). Affiquets et falbalas. Vie Lang. 1971, p. 455. − Sain. Sources t. 2 1972 [1925], p. 8. − Thurneysen 1884, p. 95. |