| CISAILLER, verbe trans. A.− Couper, découper (quelque chose) avec une (ou des) cisaille(s). Machines à cisailler et poinçonner (R. Champly, Nouv. encyclop. pratique,t. 12, 1927, p. 53).L'un cisaillait la haie qui confinait son clos d'avec el' jardin ed' son voisin (R. Martin du Gard, La Gonfle,1928, III, 2, p. 1228). − Emploi pronom. passif. Le poinçon (...) doit avoir très peu de jeu (...) sinon (...) la pièce fléchit (...) au lieu de se cisailler franchement (P. Gorgeu, Machines-outils,1928, p. 270). 1. En partic. Couper les pièces de monnaie de rebut. On cisaille les pièces de monnaie altérées, de crainte qu'elles ne circulent dans le commerce (Ac.1932). 2. P. anal. a) Détériorer, user (quelque chose) par cisaillement. [Avec les chaînes Galle,] les boulons frottent contre les dents des roues : les maillons tendent à les cisailler (P. Gorgeu, Machines-outils,1928p. 37). b) Entailler, taillader (quelqu'un) avec un objet tranchant comme avec des cisailles : 1. ... de sa main droite qui tenait un objet dur, aux arêtes coupantes − une pierre? un coup de poing américain? − il s'est mis, par en-dessous, à me marteler le visage. Il m'a porté ainsi quatre coups. (...), le troisième m'a cisaillé la joue...
P. Vialar, La Mort est un commencement,Risques et périls, 1948, p. 128. Rem. On rencontre ds la docum. cisailler avec le sens de « couper avec des ciseaux ». Ces coquillages se coupant facilement, avec des ciseaux, vous cisaillez les bords très doucement pour qu'ils ne se brisent pas (Rousset, Travail des petits matériaux, 1928, p. 172). Au fig. Censurer (un texte). Une censure invisible... cisaille de coupures furieuses les plus beaux morceaux (Morand, Chroniques de l'homme maigre, 1941, p. 10). B.− P. métaph. ou au fig. 1. [Avec l'idée de couper, de diviser] a) [Cf. cisaillement A 2] Faire cesser la continuité d'une chose, ou interrompre le cours : 2. ... certains transports parallèles au front (...) ne pouvaient être que postérieurs aux principaux transports de concentration, sous peine de les cisailler.
Joffre, Mémoires,t. 1, 1931, p. 193. b) ART. MILIT. Rompre une ligne de défense ennemie : 3. ... le « clou » de l'attaque étant l'action des chars B, qui, obliquant de l'ouest vers l'est, ont mission de cisailler l'arrière de la ligne allemande.
De Gaulle, Mémoires de guerre,1954, p. 36. 2. [Avec l'idée de dégrader, de détériorer] a) Arg. Dépouiller quelqu'un de tout son argent, le ruiner : 4. Je ne pouvais écrire [mon livre] qu'au bistrot et j'ai été cisaillé par les consommations... je crains fort que tous mes droits d'auteur ne me remboursent qu'à peine.
F. Trignol, Pantruche,1946, p. 199. b) Pop. Rendre quelqu'un incapable de réagir, le stupéfier. L'inconnu se sentit à bout, vaincu. (...) les impressions contraires avaient été trop fortes; elles l'avaient cisaillé (J. de la Varende, L'Homme aux gants de toile,1943, p. 139). 3. [D'apr. la forme du fer à repasser qui ressemble à des ciseaux cf. cisaille A 1] Repasser une pièce (bonnet, collerette) en la tuyautant. Rem. Sens attesté ds Lar. 19e-20e, Littré, DG, Guérin 1892, Quillet 1965 et Lar. Lang. fr. Rem. On rencontre ds la docum. a) Le part. prés. adjectivé cisaillant. [En parlant de l'intonation, de la voix d'une pers.] Péremptoire, tranchant. Ce ton cisaillant, irrévocable, qu'il prenait quand il ne savait plus où donner de la tête (A. Arnoux, Suite variée, 1925, p. 231). b) Le part. passé adjectivé cisaillé, arg. [En parlant d'une pers.] Ruiné, sans argent. Je l'ai toujours vu sortir du champ [de courses] cisaillé (A. Simonin, Le Pt Simonin ill., 1957, p. 68). c) Le subst. masc. cisailleur. Ouvrier qui coupe ou découpe du métal, du carton, etc. avec une ou des cisailles. Cisailleur de série, sur tracé (Mét. 1955; attesté ds Lar. 19e, Guérin 1892, Nouv. Lar. ill., Lar. 20e, Quillet 1965 et Lar. Lang. fr. qui enregistre aussi la forme fém. du mot). d) Le subst. fém. cisailleuse. Machine-outil servant à couper les barres, plaques ou feuilles métalliques. Lame de cisailleuse (R. Champly, op. cit., t. 4, 1927, p. 54; attesté ds Lar. 20e, Lar. Lang. fr.). Prononc. et Orth. : [sizɑje], (je) cisaille [sizɑ:j]. Ds Ac. 1694-1932, ,,terme de monnaie``. Étymol. et Hist. 1450 « couper avec des cisailles (ici les monnaies du rebut) » (A.N. JJ 180, pièce 153 ds Gdf. Compl.). Dér. de cisaille*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 10. DÉR. Cisaillage, subst. masc.,technol. Action de cisailler, de découper, avec une (ou des) cisaille(s), une feuille de métal suivant un tracé donné. Attesté ds Lar. encyclop. et Lar. Lang. fr. ainsi que ds Termes techn. et nouvelles acceptions introduits dans le dict. [de l'Académie], communiqué du jeudi 5 nov. 1970.− [sizɑja:ʒ] (d'apr. Lar. Lang. fr.). − 1reattest. 1961 (Lar. encyclop.); du rad. de cisailler, suff. -age*. |