| CHAMPION, ONNE, subst. A.− Subst. masc., HIST. Celui qui combattait en champ clos pour défendre la cause d'une autre personne ou la sienne propre. Un brave, un vaillant champion; il s'offrit à cette dame pour être son champion. Ces champions sont des braves, dont le métier est de se battre pour le compte d'autrui, en combat judiciaire, à l'épée ou au bâton (Faral, La Vie quotidienne au temps de st Louis,1942, p. 77). − P. ext. Combattant de grand mérite. Fam. Tout combattant opposé à un autre. Un grand vieillard (...) qui avait dû, au temps des guerres de Vendée, être un rude champion, un redoutable adversaire des Bleus (Ponson du Terrail, Rocambole,t. 1, L'Héritage mystérieux, 1859, p. 403). ♦ Expr. proverbiale, fam., iron. C'est un vaillant champion. Un homme peu courageux (cf. Ac. 1798-1878). − Au fig. Celui qui se consacre à la défense d'une cause ou d'une personne, se fait l'incarnation des aspirations, des idées d'un groupe. Louis IX champion infatigable de la justice, de l'opprimé, du faible; personnification sublime de la chevalerie chrétienne dans toute sa pureté (Montalembert, Hist. de ste Élisabeth de Hongrie,1836, p. LXXX; cf. audacieux ex. 3): 1. Quelque chose de pharamineusement paradoxal et d'éminemment drolatique, c'est de voir ce porcin, ce pignouf, ce muflard, cet ouvreur de portières, aussi bien au physique qu'au moral, se faire le champion de l'art spiritualiste, le chevalier de l'idéal, le lord protecteur des aspirations bleu de ciel, ...
E. et J. de Goncourt, Journal,1885, p. 411. 2. Bientôt, il put se mouvoir facilement dans ce monde assez compliqué. Il y devint même une force morale : le champion des femmes auxquelles on manque d'égards, et la bête noire de quelques-uns de ces petits messieurs qu'on voit trop à la suite de certaines beautés.
Larbaud, Fermina Marquez,1911, p. 37. SYNT. Champion de la démocratie, des droits de l'homme, de l'Église, d'une idée, de l'ordre établi, de la royauté; se faire ouvertement le champion de... B.− Subst. masc. ou fém. 1. SP. Athlète ou équipe qui a remporté la première place dans un concours, une épreuve sportive ou un match organisé pour l'obtention de ce titre. Elle était championne internationale de golf (S. de Beauvoir, Mémoires d'une jeune fille rangée,1958, p. 152).P. ext. Athlète de premier ordre représentant son pays (cf. athlète ex. 3) : 3. Je n'ai qu'un tout petit rôle vous savez. Je suis champion du monde de boxe et le jeune premier qui n'est autre que Valmègue me met nokaoute au troisième round et devient à son tour champion du monde.
Queneau, Loin de Rueil,1944, p. 173. SYNT. Un très grand champion; un champion olympique; champion de France, du monde; champion de boxe, de ski; des titres de champion. − JEUX. Champion de bridge, d'échecs. 2. Fam. Personne qui excelle dans une activité, un domaine quelconque. La mère Bertine, championne du battoir et du pilon à beurre (H. Bazin, Vipère au poing,1948, p. 43; cf. aussi athlète ex. 5). − Emploi adj., fam. ou pop. De premier ordre, excellent. Cette fille est championne!; pour faire des gaffes, il est champion. ♦ Adj. inv. [En parlant de pers., d'actes] Digne d'admiration. C'est champion, c'est un coup champion (Rob.Suppl.1970).Alors on voyage aussi? Champion, hein, l'Acropole? (Daninos ds Colin1971) : 4. Il [Sandre] me disait : « Le liège, c'est vivant, c'est classique, c'est champion, c'est la vie éternelle... »
L. de Vilmorin, Migraine,1959, p. 17. Rem. Le fém. est inus. sauf en des emplois fam. au sens A. En revanche, il est empl. dans le vocab. des sp. au xxes. sans nuance péjorative. Prononc. et Orth. : [ʃ
ɑ
̃pjɔ
̃], fém. [-pjɔn]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. I. Champion 1. ca 1100 campiun « celui qui combat en champ clos pour soutenir une cause » (Roland, éd. J. Bédier, 2244); 1130-60 champïon (Couronnement de Louis, éd. E. Langlois, 501 ds T.-L.) − av. 1507 (Molinet, Chron., éd. G. Doutrepont et O. Jodogne, t. II, p. 313 [année 1492]), devenu ensuite terme hist.; 1704 [en Angleterre] champion du roi (Trév.); 2. p. ext. 1552 « combattant quelconque (pour une cause) » (Est.); 1668 « homme qui combat » (La Fontaine, Fables, I, 13 ds Littré); n'est plus empl. dans la lang. class. que dans le style burlesque (Brunot t. 4, p. 329); 3. 1560 fig. « celui qui défend une pers., une cause » (E. Pasquier, Recherches de la France, 799 ds IGLF); 4. 1877, 14 juill., sports, v. championnat. II. Championne 1. 1558 « femme qui soutient un combat contre qqn » (Des Périers, Nouvelles récréations, 63, éd. L. Lacour, p. 227); 1663 (Molière, L'Étourdi, V, 9), rare; 2. 1803 « femme hardie » (Boiste); 3. 1922 championne à la course (Colette, La Maison de Claudine, p. 50). I du germ. *kampjo « combattant dans un duel judiciaire » (J. Brüch ds Z. rom. Philol., t. 38, 1914-17, pp. 697-698 et t. 40, 1920, pp. 691-695; REW3, no4671; FEW t. 16, p. 299b; Bl.-W.5; Dauzat 1973; v. aussi Diez5, p. 83) par l'intermédiaire du lat. médiév. campio « id. » attesté en 643 ds Mittellat. W. s.v., 132, 30 sous la forme camfio, var. campio, v. aussi Nierm.; le germ. *kampjo (que l'on peut déduire de l'a. h. all. chempf(j)o, m. h. all. kempfe « combattant dans un combat singulier », ags. cempa, a. nord. kappi « combattant », Kluge20, s.v. Kämpfe) est dér. du germ. kamp « lieu du combat », lui-même empr. par les mercenaires germ. au lat. class. campus (champ1*) « lieu du combat », p. méton. « combat » qui au vies. prit le sens de « champ clos du duel judiciaire », Nierm. et de « duel judiciaire », ibid. L'hyp. d'une orig. frq. du fr. (EWFS2; Gam. Rom.2t. 1, p. 278) semble à écarter étant donnée l'apparition relativement tardive du mot dans le domaine franc (ixes., v. Brüch, loc. cit., t. 40, p. 694 et Mittellat. W.). Le syntagme fr. champion du roi est le calque de l'angl. champion of the king 1672 ds NED; un empr. sém. à l'angl. pour 4 (Mack. t. 1, p. 165; Barbier ds Mod. Lang. R., t. 16, 1921, p. 93) est improbable, ce sens attesté dans toutes les lang. européennes, étant facilement dér. des sens précédents. II fém. de I. Fréq. abs. littér. : 376. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 443, b) 396; xxes. : a) 424, b) 753. Bbg. Becker (K.). Sportanglizismen im modernen Französisch. Meisenheim, 1970, p. 24, 25, 94, 333. − Brüch 1913, p. 39. − Goug. Mots t. 1, 1962, p. 62. |