| CHAMPIGNON, subst. masc. A.− BOT. Végétal cryptogame, sans racine, tronc ni feuille (plante à thalle), dépourvu de chlorophylle, caractérisé par un appareil végétatif fait de filaments microscopiques nucléés et se reproduisant au moyen de spores. Champignons inférieurs, supérieurs, parasites; maladie de la vigne provoquée par un champignon. Il existe un grand nombre de champignons, visibles seulement au microscope, qui peuvent être à l'origine de maladies (mycoses) (Lar. méd.1970).Le pourridié est un champignon qui pourrit les ceps (Huysmans, L'Oblat,t. 2, 1903, p. 247). SYNT. Champignon du blé. La levure de bière (champignon microscopique unicellulaire, ...) (H. Camefort, A. Gama, Sc. nat., 1960, p. 350). B.− Lang. cour. Plante charnue, comestible ou non, dont la forme évoque généralement un chapeau muni d'un pied, qui sont les développements extérieurs de l'appareil végétatif. Champignons comestibles, vénéneux, mortels. Ramasser le champignon blanc, rosé dans sa conque comme un coquillage (Colette, La Maison de Claudine,1922, p. 69): 1. Il retourna le champignon, l'examina, le sentit, trancha avec son couteau la partie du pied piquée des vers,...
Châteaubriant, M. des Lourdines,1911, p. 26. 2. Mieux nourri, maintenant que les girolles orangées, les boules de neige et les champignons roses poussaient par bandes sous les pins ou dans les clairières herbues, il lui arrivait à Raboliot de flâner, de suivre ses pas au hasard.
Genevoix, Raboliot,1925, p. 304. 3. Dans le fumier d'une meule qui a déjà produit des fructifications, on trouve en effet des filaments blancs, qui constituent le mycélium et que les champignonnistes appellent du « blanc de champignon ». Ils désignent sous les noms de « mises » ou de « lardons » les fragments de blanc qui leur servent de boutures.
F. Moreau, Les Champignons,Paris, P. Lechevalier, t. 2, 1953-54, p. 29. SYNT. Champignon de couche, de Paris. Agaric cultivé par les horticulteurs. Champignon de bois, de pré; chapeau, pied, volve, spores du champignon; manger une omelette, une tarte aux champignons, un plat de champignons; intoxication par les champignons. − Expr. fig. [P. réf. à la naissance et à la croissance rapide du champignon] 1. Fam. Croître, pousser comme un champignon. Grandir très vite. Elle [ma petite-fille qui est impérialiste] a poussé comme un champignon étrange et baroque dans une famille dévouée uniquement aux Bourbons (Gyp, Souvenirs d'une petite fille,1928, p. 71). 2. Vieilli. Naître comme un champignon. ,,Se dit malicieusement d'un enfant dont le père n'est pas connu, et que l'on suppose, par plaisanterie, être né spontanément`` (Lar. 19e, Lar. encyclop.). 3. Proverbial. Il est venu comme un champignon. ,,Homme qui s'est élevé en peu de temps`` (Ac. 1798-1878) : il est venu en une nuit comme un champignon (Ac.1798-1878).Un champignon de cet hiver, le savant à la mode (Pailleron, Le Monde où l'on s'ennuie,1869, I, 10, p. 39). 4. Mod. Ville champignon. Ville de création récente qui s'est édifiée rapidement. Cette partie de Paris a changé du tout au tout, avec les fortifications comblées, et la cité champignon qui a poussé, barrant la vue au nord (Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 333). C.− P. anal. 1. [Anal. de nature] a) Bouton spongieux qui se forme à la mèche d'une bougie qui brûle mal. La chandelle, qu'on ne devait pas moucher, brûlait avec une flamme rouge et triste, grossie par les champignons charbonneux de la mèche (Zola, L'Assommoir,1877, p. 663). b) MÉD. Excroissances de chair spongieuse qui se forment dans les plaies, dans certains organes (cf. Toepffer, Nouvelles genevoises, 1839, p. 262). 2. [Anal. de forme] a) [Pour chapeaux, perruques, vêtements] Support horizontal ou vertical dont l'extrémité arrondie sert à retenir l'objet. Champignon de blanchisseuse (cf. Zola, L'Assommoir, 1877, p. 513).Champignon de portemanteau. Pas de cintres ici, nul champignon de bois, nulle patère aux belles courbes (A. Arnoux, Roi d'un jour,1956, p. 181). b) [Dans une fontaine jaillissante] Vasque en forme de champignon renversé. Le jet supérieur, échappé du champignon, retombe en cascade dans une vaste coupe, et descend en nappes dans les bassins inférieurs (Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 1, 1811, p. 20). c) CH. DE FER. Partie du rail au profil arrondi sur laquelle roule le bandage des roues. Le rail à coussinets ou rail à double champignon remonte à la création des chemins de fer (Ch. Bricka, Cours de ch. de fer,t. 1, 1894, p. 304). d) Nuage en forme de champignon, spéc. champignon atomique. Nuage qui se produit après une explosion. Le 6 août 1945, à 9 h. 15 du matin, un champignon d'une monstrueuse réalité : éclair, nuages, fumées, vent, explosion (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 117). e) Fam. Accélérateur d'automobile (ayant à l'origine la forme d'un champignon). Champignon au plancher, appuyer sur le champignon. Accélérer. La rue [de Glaréola] s'étant vidée, j'en profitai pour appuyer sur le champignon, sortir de la ville dans la pétarade de mon échappement libre et franchir en trombe le vieux pont de bois branlant (Cendrars, Le Lotissement du ciel,1949, p. 200). Rem. 1. Champignon désigne encore des objets fort variés dont la forme rappelle celle du champignon : des coquillages, champignons de mer; en technol., un rond de tôle destiné à abriter l'orifice d'un tuyau de cheminée, etc. (cf. E. Robinot, Vérification, métré et pratique des travaux du bâtiment, 5, 1928, p. 90); un dispositif de lessiveuse permettant l'arrosage régulier du linge; un kiosque servant d'abri (cf. Boylesve, La Leçon d'amour dans un parc, 1902, p. 23); un siège de jardin; en mar., un engin en forme de champignon renversé servant à ancrer les bouées et lester les câbles au fond de la mer. 2. On relève ds la docum. le subst. masc. champignonniste. Horticulteur cultivant les champignons de couche ou de Paris (cf. supra ex. 3). Prononc. et Orth. : [ʃ
ɑ
̃piɳ
ɔ
̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1398 bot. (Ménagier, II, 185 ds T.-L.); 1690 proverbe (Fur. : il est venu tout en une nuit comme un champignon); 2. p. anal. a) 1636 pathol. (Monet, Invantaire des deus langues françoise et latine, Lyon); b) id. d'une mèche qui brûle (ibid.); c) 1694 archit. d'une fontaine (Corneille); d) 1771 d'une perruque (Encyclop. Planches, 8, 11, planche VI, 10). Issu par substitution de suff. (-on*) de l'a. fr. champignuel (canpegneus ca 1200, Aucassin et Nicolette, 31, 8 ds T.-L.; champineul ca 1350, Gloss. abavus, éd. M. Roques, 7023), dér. en -ŏlu de campania, littéralement « produit de la campagne ». Fréq. abs. littér. : 354. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 333, b) 484; xxes. : a) 530, b) 642. DÉR. 1. Champignonner, verbe intrans.a) Souvent p. métaph. Proliférer et grossir à vue d'œil comme les champignons (cf. balcon ex. 2). Maisons neuves qui champignonnent dans les banlieues. Sur le fumier révolutionnaire champignonnèrent une foule de libelles et de pamphlets (L. Daudet, Bréviaire du journ.,1936, p. 210).b) Rare. Chercher des champignons. Nous nous livrions, (...) à la cueille des cèpes et des oronges, (...) Nous champignonnions dans la compagnie de MllesFerraud, filles d'un vieux docteur (Jammes, Mémoires,t. 1, 1921, p. 135).Ce dernier sens n'est pas mentionné ds les dict. Quillet 1965 (qui qualifie le verbe de néol. fam.), Rob. Suppl. 1970, Lar. Lang. fr. lequel ajoute en revanche : ,,vx former des champignons, en parlant de la mèche d'une lampe ou d'une bougie``.− [ʃ
ɑ
̃piɳ
ɔne]. − 1reattest. 1771 « (de la matière des briques) se boursoufler sous l'influence de la chaleur » (Encyclop. Suppl., s.v. briquetier); de champignon, dés. -er. − Fréq. abs. littér. : 5. 2. Champignonneux, euse, adj.,rare. Couvert de champignons. Les sous-bois restaient humides, champignonneux à souhait (Colette, Le Képi,1943, p. 92).Les dict. gén. mentionnent en outre « qui appartient aux champignons ». La matière champignonneuse de la teigne (Nouv. Lar. ill.). − Seule transcr. ds Littré : chan-pi-gno-neû, fém. -neû-z'. − 1reattest. 1876, 18 mai « garni de moisissures » (L'Opinion nationale, p. 2, 2ecol. ds Littré); de champignon, suff. -eux*. 3. Champignonnière, subst. fém.,hortic. Lieu souterrain, souvent aménagé dans des carrières désaffectées, où se pratique la culture des champignons de Paris. Carrières, devenues des champignonnières (E. et J. de Goncourt, Journal,1879, p. 49).Spéc. Couche de terreau et de fumier préparée pour la culture des champignons de Paris; caisse de bois renfermant cette préparation. On fait des champignonnières portatives (Lar. 19e;cf.F. Moreau, Les Champignons, Paris, P. Lechevalier, t. 2, 1953-54, p. 31).− [ʃ
ɑ
̃piɳ
ɔnjε:ʀ]. Ds Ac. 1694 et 1718 ainsi que ds Ac. 1932. Gattel 1841 écrit champignonière avec un seul n à la finale. − 1reattest. 1694 (Ac.); de champignon, suff. -ière*. − Fréq. abs. littér. : 5. BBG. − Dub. Dér. 1962, p. 56. − Gottsch. Redens. 1930, p. 26. − Quem. Fichier. − Quem. 2es., t. 1, 1970. |