| CHALOIR, verbe défectif impers. Arch. et littér. [Ne s'emploie guère qu'à la forme négative et interr., et dans des loc. figées] Importer. A.− Emplois à la forme négative ou interr. ♦ Il ne me chaut, il ne m'en chaut guère. Il ne m'importe, cela ne m'intéresse pas. Il ne nous chaut de ce que nous allons devenir (A. France, Vie de Jeanne d'Arc,1908, p. 11). ♦ Point ne m'en chaut. Que le coche arrive au haut ou roule en bas, point ne m'en chaut (Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 3, 1848, p. 47). ♦ Rien plus ne leur chaut (L. Veuillot, Les Odeurs de Paris,1866, p. 472). ♦ Que me chaut! (Verlaine, Correspondance,Lettres à Edmond Lepelletier, 1872, p. 47). Rem. 1. Le subj. prés. est rare et désuet (cf. R. Martin du Gard, La Gonfle, 1928, p. 1203). 2. L'inf. prés. ne se rencontre qu'avec les semi-auxiliaires devoir et pouvoir. Que pouvait lui chaloir [à Manarès] le mépris de pareils êtres et leurs fortunes, à lui qui s'était employé à fond et qui renonçait à tout? (J. de La Varende, Contes fervents, Dans le goût espagnol, 1946, p. 33). 3. L'inf. substantivé a donné le composé non-chaloir, devenu nonchaloir (cf. Alain, Propos, 1932, p. 1058; v. aussi chaland2, achalander et nonchalant, de la même famille). B.− Emplois à la forme affirmative. 1. Loc. figée. Peu me chaut, peu m'en chaut. Peu m'importe, je ne m'en soucie guère. − Constructions ♦ Peu me chaut + suj.Peu nous chaut ce qu'il [Heinrich Schenker] y voit! Il nous faut la [la musique] voir − ou mieux, l'entendre (R. Rolland, Beethoven, t. 1, 1928, p. 120). ♦ Peu me chaut, il me chaut peu que + subj.Il me chaut très peu que tel ou tel bonze ait été rossé plus ou moins fraternellement par ce Caïn (Bloy, La Femme pauvre,1897, p. 239). ♦ Peu me chaut si + ind. prés.Voilà des faits où je m'intéresse. Mais peu me chaut si l'on me montre la voie sacrée (Barrès, Le Voyage de Sparte,1906, p. 80). ♦ Peu me chaut de + inf. prés.Me chaut peu de te passer au doigt une bague (J. Laforgue, Poésies complètes,1887, p. 208). 2. Rare. Il me chaut de. Si c'est un prêtre, il me chaut de lui demander pardon (Audiberti, L'Ampélour,1937, p. 97). 3. [Dans des tournures personnelles] Il [Racadot] peut nous parler de trente-six choses, s'enthousiasmer, s'indigner : une seule lui chaut, cette liasse [de billets de banque] (Barrès, Les Déracinés,1897, p. 349): La sincérité ne me chaut, en art, que lorsqu'elle est difficilement consentie. Seules les âmes très banales atteignent aisément à l'expression sincère de leur personnalité.
Gide, Journal,1909, p. 278. Prononc. et Orth. : [ʃalwa:ʀ]; (peu me) chaut [ʃo]. Ds Ac. 1694-1932 avec la mention : ,,vieux``. Homon. chaud, chaux. Étymol. et Hist. ixes. chielt impers. « il importe » (Eulalie, 13-14 ds Henry Chrestomathie, p. 3 : Il li enortet − dont lei nonque chielt − Qued elle fuiet lo nom christiien); ca 1100 chalt (Roland, éd. Bédier, 227); ca 1175 chaut (Chr. de Troyes, Chevalier Lion, éd. W. Foerster, 2996), qualifié de ,,vieux mot`` par Fur. 1690. Empr. au lat. calere « être chaud » au sens propre dep. Plaute (ds TLL s.v., 147, 23) et fig. « s'inquiéter, être sur les charbons » (Cicéron, ibid., 148, 9). [Pour l'image, cf. l'expr. cela ne me fait ni chaud ni froid.] Fréq. abs. littér. : 9. |