| CERBÈRE, subst. masc. [P. réf. à Cerbère, chien monstrueux à trois têtes, gardien des enfers dans la myth. gr.] Tous ces êtres, dragons, cerbères orageux, Que le bronze et le rêve ont créés dans leurs jeux (Hugo, La Légende des siècles,Eviradnus, t. 1, 1859, p. 357).A.− [Symbole du monstre] Les antiques chansons Des cithares et luths, des poètes et pères Qui les yeux ravissaient des monstres et cerbères (Moréas, Sylves,Astre brillant, 1896, p. 222). B.− Fam. [Symbole du gardien sévère] 1. Gardien intraitable à l'entrée : 1. Marcel, qui avait refait dix fois, et du haut en bas remanié cette toile, attribuait à une hostilité personnelle des membres du jury l'ostracisme qui le repoussait annuellement du salon Carré; et, dans ses moments perdus, il avait composé en l'honneur des cerbères de l'Institut un petit dictionnaire d'injures, avec des illustrations d'une férocité aiguë.
Murger, Scènes de la vie de bohème,1851, p. 179. 2. Gardien de maison a) Par dérision. [En parlant d'un chien] :
2. Mon roquet famélique et galeux traînait encore, dans l'éloignement, ses glapissantes lamentations; aux douloureux accents de ce cerbère de tripot, un matou enroué mêlait par intervalles son amoureuse plainte.
Milosz, L'Amoureuse initiation,1910, p. 12. b) Souvent péj. et iron. Portier, concierge, gardien intraitable sur les conditions de passage et, de plus, d'abord et d'humeur difficiles. Le vigilant cerbère; le fidèle cerbère de la loge; ce vieux cerbère; un cerbère femelle. Et il se dirigea lestement vers l'antre du cerbère, ou, si l'on veut, la maison du concierge (Musset, La Mouche,1854, p. 288): 3. Mais il n'y a encore de visible que ce vieil ours de l'hôtel Plédron, le concierge borgne, qui bat insupportablement son tapis brosse. Une poussière dense entoure le cerbère.
J. de La Varende, Le Roi d'Écosse,1941, p. 13. Prononc. et Orth. : [sε
ʀbε:ʀ]. Ds Ac. 1798-1932. Étymol. et Hist. « Chien à trois têtes qui gardait la porte des enfers » d'où xvies. « gardien intraitable » (Marg. de Valois, Mém., an. 1576 ds Gdf. Compl. : Les cerberes que l'on avoit mis a ma porte); 1668 (La Fontaine, Fables, III, 18 ds Littré : Que ce chat exterminateur, Vrai cerbère, était craint une lieue à la ronde); 1690 (Fur. : On appelle figurement & par exaggeration un Suisse ou un Portier trop rebarbatif, un Cerbere). Empr. au lat. Cerberus, nom du chien à trois têtes qui gardait la porte des enfers (Cicéron ds TLL s.v., 332, 46), lui-même empr. au gr. κ
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ς (Hésiode ds Liddell-Scott). Fréq. abs. littér. : 24. |