| BECQUER, verbe. A.− Emploi trans. 1. Prendre par becquées, prendre du bec; frapper à coups de bec. Ami des petits oiseaux qui vont becquer le raisin (Yver dansLar. 19e). − Spéc., FAUCONN. ,,Prendre la becquée à plein bec`` (Littré, Quillet 1965). 2. Région. Embrasser. ,,Viens béquer poupa = viens baiser ton papa`` (Canada1930);cf. Dul. 1968). 3. Arg. ,,Regarder`` (Esn. 1966). Rem. 1. On rencontre dans l'arg. le part. prés. substantivé bécant (écrit aussi becquant et bécan), subst. masc. ,,Oiseau; poulet, moineau (au propre et au fig.); animal, « bestiau » quelconque`` (Esn. 1966; cf. aussi J. Rictus, Les Soliloques du pauvre. 1919, p. 158); ,,convive, homme en train de manger`` (L. Rigaud, Dict. d'arg. mod., 1888, p. 398). 2. Becquabo, becquebois, bèque(-) bois (composé de becquer et bois), subst. masc. ,,Nom donné au pivert et à la sittelle, oiseaux qui frappent avec leur bec l'écorce des arbres pour en faire sortir les insectes dont ils font leur nourriture`` (DG); p. ext., au fig. ,,mitrailleuse, canon-revolver`` (Esn. Poilu 1919, p. 83, s.v. bec-bois). Cf. aussi bèque-fleur, subst. masc. ,,Nom vulgaire des colibris`` (Ac. Compl. 1842, Littré). B.− Emplois abs. ou intrans. 1. Bégayer (cf. becqueter A 2 d et bécasser « parler difficilement » dans J.-M. Rougé, Le Folklore de la Touraine, 1943) : Un enfant d'hospice, bousculé, bégaya par forts hoquets qui ébranlaient sa tête aux cheveux piqués en crins de brosse. Il chercha la tranquillité hors du logis à tumulte et, seul, chanta, très bas. Un petit aux mains sans haine, venu doucement l'écouter, lui toucha l'épaule :
− Comment ça se fait que tu becques point quand tu chantes?
L'effaré ne put répondre rien de distinct car, privé de solitude, il « becquait » de nouveau, à voix de chien.
Hamp, Vin de Champagne,1909, p. 111. 2. ,,Éclore`` (Canada 1930). ,,Se dit du poussin quand il commence à montrer son bec à travers la coque de l'œuf`` (Lar. 19e-20e). PRONONC. ET ORTH. − 1. Forme phon. : Seule transcr. du mot (sous les formes becquer et bécher) dans Littré : bè-ké, bé-ché. 2. Forme graph. − Ac. Compl. 1842 note parallèlement becquer, becqueter ou bécher (cf. aussi Besch. 1845, Littré : becquer ou bécher). Lar. 19e, Nouv. Lar. ill. et Lar. 20edonnent becquer en soulignant : on disait aussi bécher (Lar. 19e), bêcher [sic!] (Nouv. Lar. ill. et Lar. 20e). DG écrit uniquement béquer. Quillet 1965 admet becquer, béquer ou bêcher. ÉTYMOL. ET HIST. − Fin xiie-début xiiies. bechier (Gervaise, Bestiaire, Brit. Mus. add. 28260, fo96b dans Gdf. : Es eiuz lor pere[s] vont bechier Et lor vuelent des testes traire), forme encore répertoriée par Littré; ca 1330 bequer (Hug. Capet, 4957, A. P. dans Gdf.) − 1611, Cotgr., qualifié de ,,vx mot`` par Lar. 19eet Lar. 20e; 1690 spéc. fauconn. becquer, becqueter ou becher (Fur.).
Dér. de bec* étymol. 1; dés. -er. La forme attendue est béch(i)er (cf. peccátu > pech(i)é); mais soit infl. des formes pic. (cf. becquet), soit réfection sur bec, le rad. beq- apparaît dès le m.fr. et finit par l'emporter. BBG. − Goosse (A.). Le Pic. et le wallon, source du jargon des coquillards. Cah. Lexicol. 1970, t. 16, no1, p. 108. − Guiraud (P.). Le Jargon de la Coquille. Cah. Lexicol. 1967, t. 11, no2, p. 53. − Tilander (G.). Étymol. rom. St. neophilol. 1946/47, t. 19, p. 297. |