| BALIVEAU, subst. masc. A.− SYLVIC. ,,Jeune arbre réservé dans la coupe des taillis pour qu'il puisse croître en futaie`` (Colin 1971). Réserver tant de baliveaux par hectare (Ac. 1835-1932) : 1. Si l'usufruit comprend des bois taillis, l'usufruitier est tenu d'observer l'ordre et la quotité des coupes (...) sans indemnité toutefois en faveur de l'usufruitier ou de ses héritiers, pour les coupes ordinaires, soit de taillis, soit de baliveaux, soit de futaie, qu'il n'aurait pas faites pendant sa jouissance.
Code civil,1804, p. 109. 2. ... partagés en douze coupes égales, les bois fournissaient chaque année, avec quelques baliveaux dont on n'espérait plus de croissance, un taillis de douze ans qu'on mettait en fagots.
Gide, L'Immoraliste,1902, p. 444. SYNT. Baliveau de souche. Baliveau issu des rejets de la souche d'un arbre. Baliveau de l'âge. Baliveau qui a le même âge que le taillis lui-même. Baliveaux modernes. Arbres de 30 à 40 ans. Baliveaux anciens. Arbres de 50, 60, 70 ans et au-delà (cf. Colin 1971). − P. métaph. [En parlant d'une pers.] :
3. Mais, tandis que le monde, ses usages, émondaient presque tous ces baliveaux de bonnes familles, Raymond Courrèges, lui, jetait sans vergogne tout son feu.
Mauriac, Le Désert de l'amour,1924, p. 35. 4. − Je la connaissais depuis longtemps. Je l'admirais, pardi! ce rejeton, ce baliveau de quinze ans. La vie tendait la peau, comme un merisier son écorce...
J. de La Varende, Le Roi d'Écosse,1941, p. 152. B.− CONSTR. Longue perche fine employée pour la construction des échafaudages. Prononc. : [balivo]. Étymol. et Hist. 1. 1274 sylvic. boiviau (Charte dans Du Cange t. 1, p. 525a, s.v. baivarius citée dans Gdf. : Item il demora à l'Empereor au Parc de Pifons, cent arpens de bois de huit ans, et les boiviaus qui demeurerent au Parc); 1549 baliveau (Est.); 2. 1676 constr. « perche servant à faire un échafaudage » (Félibien, Principes d'architecture, p. 575 : Quand ce sont de grandes perches ou autres pieces de bois, ausquelles sont attachez plusieurs boulins les uns au dessus des autres, ils [les maçons] appellent cela des Baliveaux). Orig. obsc.; peut-être dér. de l'a. fr. baïf « qui regarde bouche bée, étonné » (ca 1160, B. de Ste Maure, Ducs Normandie, II, 5325, Michel dans Gdf. : N'i sunt estraier ne baif; Par sus les morz passent li vif), péj. « badaud » ca 1190, (Partonopeus de Blois, cité par G. Paris dans Romania, t. 25, p. 622 : Li tornois est maltalentis, N'i a mestier vasaus baïs), les baliveaux étant ceux qui attendent la coupe suivante ou ceux qui regardent ce qui se passe comme des badauds, d'où les formes du type baiveau, boiveau, attestées jusqu'au xvies. (Gdf.) et, dès 1244, le lat. médiév. bayvellus (Charte de Jean, abbé de Pontigny, Cartulaire de Pontigny, p. 41 dans Du Cange); -l- est expliqué soit 1. par l'allongement de -ai- en -ailli- (forme bailliveau dans Cotgr., peut-être en rapport avec l'a. fr. baillif (bailli*), d'apr. Sain. Sources t. 1, p. 141) puis réduction dans ce groupe de l mouillé à -l- (G. Paris dans Romania, t. 25, p. 623), soit 2. par la transformation de l'hiatus de baïveau en -y-, noté par l mouillé, c.-à-d. par -il- ou -ll- (v. Lebel dans Fr. mod., t. 12, pp. 297-306), soit 3. peut-être de soliveau (FEW t. 12, p. 42b). L'hyp. de l'introd. du l sous l'infl. du judéo-fr. abaliver (EWFS2) « charger de la surveillance, préposer », lui-même dér. de bailli(f), fait difficulté étant donné l'extension réduite dans le temps de abaliver et sa faible diffusion. Fréq. abs. littér. : 30. BBG. − Duch. 1967, § 53. |