| BADIGOINCES, subst. fém. plur. Arg., vx. Lèvres et plus rarement joues. S'en lécher les badigoinces (Lar. 19e-Lar. encyclop., Rob.): 1. ... ayant satisfait le sens de la vue en admirant cette chaude couleur de topaze brûlée, il passait au sens de l'odorat, et, remuant le vin (...), il en humait l'arome à narines aussi béantes que les fosses d'un dauphin héraldique. Restait le sens du goût. Les papilles du palais, convenablement excitées, s'imprégnaient d'une gorgée de ce nectar; la langue la promenait autour des badigoinces et l'envoyait enfin au gosier avec un clappement approbatif. Ainsi maître Jacquemin Lampourde, au moyen d'un seul verre, flattait-il trois des cinq sens que l'homme possède, ...
T. Gautier, Le Capitaine Fracasse,1863, p. 315. 2. Lorsqu'il est savamment accommodé [le rutabaga], les petits enfants, qui s'y connaissent, s'en pourlèchent les badigoinces. (La Fouchardière).
L'Œuvre,31 janv. 1941. − Jouer des badigoinces, se caler les badigoinces. Manger avec avidité (Bruant 1901). PRONONC. : [badigwε
̃:s]. ÉTYMOL. ET HIST. − 1532 arg. « lèvre » (Rabelais, Pantagruel, chap. 26, éd. Marty-Laveaux, t. 1, p. 341 : Lors dist Pantagruel, Pleust à dieu que chascun de vous eust deux paires de sonnettes de Sacre au menton, & que je eusse au mien les grosses horologes de Renes, de Poictiers, de Tours, & de Cambray, pour veoir l'aubade que nous donnerions au remuement de noz badiguoinces).
Orig. inc. (FEW t. 21, p. 300). Mot peut-être forgé par Rabelais; un rapprochement avec la racine bab- qui a servi à créer de nombreux mots se rapportant aux lèvres et à la parole (babiller*, babine*) proposé par Dauzat 1968, est possible du point de vue sém., mais non phonétique. STAT. − Fréq. abs. littér. : 4. BBG. − France 1907. − Sain. Lang. par. 1920, p. 328. − Sain. Lang. Rab. t. 2 1923, p. 175. − Sandry-Carr. 1963. − Timm. 1892. |