| AVIS, subst. masc. Opinion ou information communiquée. A.− [L'accent est mis sur l'opinion et les circonstances où elle est prise; le plus souvent empl. avec un poss. ou un compl. introd. par de ou par sur] Opinion résultant d'une réflexion, d'une délibération sur une question, un problème précis, et destinée à être communiquée. Synon. appréciation, jugement, opinion. 1. [L'avis émane d'une pers. quelconque] Divergence, concordance des avis; exprimer un avis : 1. Et rien n'était plus choquant que l'effet de ses paroles dans une atmosphère où je n'avais jamais entendu développer que des avis mesurés et le préjugé commun.
Lacretelle, Silbermann,1922, p. 78. SYNT. a) Avoir un avis, changer d'avis; dire, émettre, soutenir un avis. b) Avis commun, général, partagé, unanime; deux (ou plusieurs) avis contraires, contradictoires, différents, opposés. a) [L'auteur de l'avis est exprimé par un adj. poss.] Donner son avis sur qqc. : 2. − C'est donc ça que nous n'avons pas été les plus forts! ... N'importe, on donne les chiffres : Bazaine a cent cinquante mille hommes, trois cent mille fusils, plus de cinq cents canons; et bien sûr qu'il leur ménage un sacré coup de sa façon.
Henriette hochait la tête, se rangeait à son avis, pour ne pas l'assombrir davantage.
Zola, La Débâcle,1892, p. 495. − À mon (ton, son, notre, votre, leur) avis. − [Lang. de la conversation fam., avec ell. du verbe] Votre avis? 3. − Mais vous... mais tu es le seul juge de ta conduite.
Elle ne s'était pas reprise si vite, que Justin n'eût été blessé par ce vous inconscient.
− Mais toi? Ton avis?
Elle le regarda fixement, et dit d'un ton âpre :
− J'espère que tu ne reverras pas cet homme.
Arland, L'Ordre,1929, p. 460. b) [L'auteur de l'avis est exprimé par un compl. prép. de] Demander l'avis de qqn, être de l'avis de qqn. SYNT. Avoir, prendre, recevoir, rejeter, retenir l'avis de qqn; revenir à l'avis de qqn. c) Loc. fam. − Loc. synon. de penser que (expression d'une simple opinion). Être d'avis que + ind. : 4. MmePicard était d'avis qu'un enfant peut tout lire : « Un livre ne fait jamais de mal quand il est bien écrit. »
Sartre, Les Mots,1964, p. 86. ♦ Vx. (Il) m'est avis que + ind. : 5. Il goguenarda :
− Paraît qu'il y avait du monde dans le fossé, l'autre soir, près de la route de l'Aubette? Je me suis laissé dire qu'un poseur de collets, un malin pourtant, un subtil... M'est avis qu'on se retrouvera, mon gars!
Genevoix, Raboliot,1925, p. 109. − Loc. synon. de juger bon que (expression d'un souhait). ♦ Être d'avis que + subj. : 6. ... ces différences dépendent des insectes, qui déposent plutôt leurs œufs dans certaines eaux que dans d'autres, et toujours en été : on sait aussi que le bois sert souvent d'asile aux œufs de ces animaux; il est donc possible qu'il s'en trouve dans celui qui compose les futailles. Je regarde comme important de s'assurer jusqu'à quel point. En conséquence, je suis d'avis qu'on fasse subir à l'eau seule quelque préparation...
Voyage de La Pérouse,t. 1, 1797, p. 198. ♦ Être d'avis de + inf. : 7. − Voyez ce que vous pouvez faire, dit-il. J'enverrai quelqu'un vers sept heures.
Il sortit.
− Es-tu d'avis de remettre les armes? demanda Kyo à Katow.
Malraux, La Condition humaine,1933, p. 273. − Sauf meilleur avis (Ac. 1835). d) Proverbes et loc. proverbiales − Autant de têtes, autant d'avis. Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. des xixeet xxes. à partir de Ac. 1835. − Changer d'avis comme de chemise : 8. − Tout de même, dit Rodays, pour trois cents francs, vous pourriez bien ajouter quelque chose!
− Mais quoi?
− Je ne sais pas, moi. Des hachures...
C'est une question de propreté : il faut changer d'avis comme de chemise.
Renard, Journal,1902, p. 786. − Deux avis valent mieux qu'un (Ac. 1835, 1932, Rob.). 2. [L'avis émane d'une autorité supérieure délibérante, d'une pers. ou d'une collectivité qualifiée] Prendre l'avis du conseil, d'un connaisseur, d'un médecin. Synon. consultation, délibération : 9. − (...) Ah! au fait, que je te dise : j'ai voulu prendre l'avis d'un homme du métier, car, en somme, nous allons être imprimeurs et même éditeurs, bien entendu, Sénac proteste quand on parle de compétences.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Désert de Bièvres, 1937, p. 74. − Spécialement a) ADMIN. Après avis de la commission, du conseil; sur avis conforme, favorable de; saisir pour avis; rapport pour avis : 10. Le Conseil doit établir son rapport pour avis dans les deux mois. S'il ne le fait pas, ou s'il établit un rapport pour avis en accord avec le texte voté par l'Assemblée (appelé alors avis conforme), le texte est envoyé par le président de l'Assemblée au gouvernement pour sa promulgation comme loi.
Lidderdale, Le Parlement fr.,1954, p. 206. ♦ Avis du conseil d'État. Dans des cas définis par la loi, consultation donnée au gouvernement, par l'assemblée générale ou les sections du conseil d'État, sur les projets de règlements administratifs. Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. des xixeet xxes. à partir de Ac. 1835. b) DR. PRIVÉ. Avis des jurisconsultes. Consultation pour avis de trois jurisconsultes désignés par le Procureur de la République, et chargés d'examiner les transactions d'un tuteur au nom d'un enfant mineur. Rem. Attesté ds Ac. 1932, Cap. 1936 et Rob. .Avis des parents. Délibérations, prises à la majorité absolue, du conseil de famille, réuni pour traiter des intérêts d'un enfant mineur. Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. des xixeet xxes. à partir de Ac. 1798. ♦ Avis des experts. Rapport d'experts sur une question qui leur a été soumise par le tribunal. Rem. Attesté ds Lar. 19e, Rob. 3. [L'opinion est le résultat d'une réflexion qui se propose de guider l'attitude, la conduite de qqn en des circonstances données] Donner de bons avis, solliciter des avis de qqn; avis amicaux, charitables, salutaires. Synon. conseil, directive, recommandation : 11. J'ai essayé, ces derniers jours, de lui conseiller la prudence dans la poursuite, − c'est « dignité » et non « prudence » que je pensais − et un style stratégique différent. Mais elle a balayé mes avis d'un grand geste de son bras nu, et elle hochait la tête à grands hochements assurés.
Colette, La Naissance du jour,1928, p. 68. SYNT. Écouter, faire cas des avis de qqn, négliger les avis de qqn; avis affectueux, déments, éclairés. − Donner avis à qqn que + subj.Lui conseiller de (cf. supra A 1 c être d'avis que + subj.). On va lui donner avis qu'il s'en aille au plus tôt (Bonn.-Leis.1970). − Fam. et péj. Offreur, donneur d'avis. Personne toujours prête à donner des recommandations, à conseiller : 12. Il importe au plus haut point que le manuscrit ne soit communiqué à qui que ce soit. Méfiez-vous des offreurs d'avis, qui, sous un air de sollicitude, ne songent qu'à satisfaire leur curiosité.
Hugo, Correspondance,1862, p. 373. Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. des xixeet xxes. à partir de Ac. 1835. B.− [L'accent est mis sur la communication] 1. En gén. Information pratique que quelqu'un qui a autorité pour le faire communique à un particulier ou au public pour lui indiquer ce qu'il doit ou peut faire, éventuellement pour le mettre en garde. Recevoir, avoir avis de qqc., de ce que; transmettre un avis; des avis utiles, sûrs. Synon. communiqué, information. − Donner avis de + subst. : 13. Vous voyez, mes réflexions étaient loin d'être apaisantes. En arrivant au pont d'Austerlitz, j'étais résolu à donner avis de mon renvoi sans le moindre commentaire.
G. Duhamel, Confession de minuit,1920, p. 27. − Donner avis que + ind. : 14. Hier au soir, j'ai été dans le train jusqu'à Saint-Nom la Bretèche, ayant reçu avis le matin que mon cahier rouge avait été retrouvé.
Du Bos, Journal,1922, p. 133. − Loc. Avis aux amateurs! SYNT. Avis préalable, sauf avis contraire, jusqu'à nouvel avis; agir sur avis. − En partic. Avis au public, à la population, etc. Dans un lieu public, en-tête d'un placard exposant une réglementation, une information qui doit être connue de chacun : 15. Enfin, détail exquis, le patron avait préparé, vers 1925, une pancarte qu'il n'ose plus exhiber, une pancarte qui dit bien que la douceur de vivre s'est évaporée comme une rosée, un charmant avis, qu'il se proposait de placer dans sa devanture, entre un pot de géraniums et un jeu de dames, un texte que, seule, la dignité montmartroise autorisait : « Le patron joue aux cartes. » ...
Fargue, Le Piéton de Paris,1939, p. 47. ♦ P. ext. Synon. de Attention!Avis à toi! : 16. le fâcheux, se sauvant.
Au secours! À la garde!
cyrano
Avis donc aux badauds,
Qui trouveraient plaisant mon milieu de visage,
Et si le plaisantin est noble, mon usage
Est de lui mettre, avant de le laisser s'enfuir
Par devant, et plus haut, du fer, et non du cuir!
E. Rostand, Cyrano de Bergerac,1898, I, 4, p. 41. Rem. Dans le domaine milit., avis est souvent synon. de ordre. − Au fig. Avertissement amical, mise en garde de quelqu'un contre quelque chose : 17. Ne restez pas en tous cas ainsi tête nue, mettez vite votre couvre-chef. − Ce ne sont pas des étouffements a frigore, dit sentencieusement Cottard. − Ah! alors, dit M. de Cambremer en s'inclinant, du moment que c'est votre avis... − Avis au lecteur! dit le docteur en glissant ses regards hors de son lorgnon pour sourire.
Proust, Sodome et Gomorrhe,1922, p. 976. 2. Spécialement a) ADMINISTRATION − Avis de concours, de nomination; avis judiciaire : 18. Berne, le 21 février 1851.
Monsieur,
Je viens de recevoir l'avis de ma nomination dans la Légion d'honneur et j'ai deux motifs pour ne pas tarder à vous en informer.
Gobineau, Correspondance[avec Tocqueville], 1851, p. 162. Rem. Mentionné dans la phraséologie admin. par Spr. 1967. − CH. DE FER. Avis d'arrivée. Lettre informant le destinataire d'un envoi que la marchandise est à sa disposition. SYNT. Avis de livraison, de souffrance (adressés au destinataire). − TÉLÉCOMM. (postes). Avis de réception (d'une lettre recommandée), avis d'appel (téléphonique). b) ÉCON. et FIN. − Avis de traite. Indication portée sur une facture, pour informer de la date à laquelle devra être effectué le paiement. Rem. 1. Attesté ds Lar. comm. 1930, Rob. 2. Cf. également avis d'encaissement d'une traite (pour notifier que la somme due a été perçue). − BANQUE. Avis d'exécution (d'un ordre de bourse) ou avis d'opéré. Information donnée à un client de l'exécution d'un ordre de bourse qu'il a passé. Rem. Attesté ds Lar. comm. 1930, Rob. SYNT. Avis à valoir, avis à tiers détenteur. − COMM. Lettre d'avis. Lettre écrite par un négociant pour informer d'une expédition ou de toute autre question : 19. ... il [Danglars] vit que, sur ce terrain-là, il n'était pas de force avec Monte-Cristo, il essaya donc de revenir sur un terrain qui lui était plus familier.
− Monsieur le comte, dit-il en s'inclinant, j'ai reçu une lettre d'avis de la maison Thomson et French.
− J'en suis charmé, monsieur le baron.
A. Dumas Père, Le Comte de Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 682. Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. des xixeet xxes. à partir de Ac. 1798. c) ÉD. Avis au lecteur. Courte préface en tête d'un ouvrage où l'auteur ou l'éditeur s'adresse au lecteur. Synon. avant-propos, introduction : 20. Je saute les épigraphes charmantes du livre, et je passe à l'avis au lecteur. Il commence ainsi : « Le profond respect et la haute estime que j'ai toujours eus pour le grand homme que la voix publique fait auteur de l'histoire des aventures de Télémaque, m'avoient fait prendre une ferme résolution de supprimer et de jeter au feu les critiques que j'avois faites de ce livre. »
Chateaubriand, Les Martyrs,t. 1, 1810, p. 63. d) JOURN. Avis de mariage, de vente : 21. C'est qu'ils n'accèdent à la conscience que par ce qui les « prend aux tripes », comme cet aphasique qui ne pouvait lire un journal, jusqu'au jour où ses yeux tombèrent sur l'avis de décès de l'un de ses amis.
Mounier, Traité du caractère,1946, p. 279. e) MAR. Avis aux navigateurs, avis de tempête. Bulletins du service hydrographique signalant aux navigateurs tout danger : 22. Il le fit [le télégramme] aussi bref que possible en ce qui concernait l'abordage et l'avarie, plus explicite quant à la situation du navire : « L'Étoile-des-Mers ne court aucun danger. Je demande au Berlin de venir sur les lieux, de m'accompagner par prudence, et de me prêter assistance si besoin s'en faisait sentir. » Enfin, il écrivit un radio pour prier le poste de Cap Race de signaler par un avis aux navigateurs exceptionnel l'accident.
Peisson, Parti de Liverpool,1932, p. 193. PRONONC. : [avi]. Grammont Prononc. 1958 signale une oppos. Midi/Nord pour la prononc. (Midi) du s final (de même compas, gens, moins, etc.). Fér. Crit. t. 1 1787, Land. 1834, Gattel 1841, Besch. 1845, Fél. 1851, Littré et DG précisent que l's se lie. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. a) 1135 ce m'est avis « il me semble (que) » (Wace, Vie de Sainte Marguerite, 11 ds Keller, p. 71b : Ce m'est avis que par raison Dut ele bien avoir cel non); b) ca 1175 il m'est avis « il me semble » (Chr. de Troyes, Chevalier lion, éd. W. Foerster, 3591 ds T.-L.); c) ca 1185 a son avis « selon son sentiment, son opinion » (Chr. de Troyes, Le Roman de Perceval, éd. W. Roach, v. 4793, Qui plus biax est que Absalon, Au suen sens et a son avis); d) apr. 1350 être d'avis « penser qu'il est bon ou nécessaire » (Loyal Serviteur, c. 59 ds Dict. hist. Ac. fr. : Puisque nous sommes si avant, je suis d'advis que nous poursuyvons); 2. a) ca 1170 « opinion sur un sujet » (La vie d'Edouard le Conf., 177-80 ds Fr. mod., t. 21, 1953, p. 222 : Li reis, puis que il fut requis, Saver en voleit lur avis : Ceo que chescun d'euz mielz voleit Deïssent lui il le fereit); b) 1356 « conseil, recommandation » (Ordonnances des roys de France, par D. E. Secousse, éd. Gregg Press, 1967, t. 3, p. 125 : Et aussi pour Nous donner bon Conseil & advis sur la garde, bon gouvernement, tuicion et deffense dudit Royaume); 3. dernier quart xives. « communication, annonce » (Froissart, Chroniques, liv. I, 1repart., c. 137 ds Dict. hist. Ac. fr. : Si eurent avis qu'ils delogeroient et retourneroient vers Valenciennes).
Agglutination de la prép. à* et de l'a.fr. vis, du lat. visum « ce qui semble (bon) » part. passé neutre de videre « voir » dans l'expr. ce m'est a vis (supra étymol. 1 a; littéralement : « cela est pour moi à titre d'opinion ») qui a concurrencé l'expr. de même sens ce m'est vis, attestée en a. fr. dep. ca 1040 (Vie de Saint Alexis, 343, éd. G. Paris, p. 12 : E ço m'est vis que ço est li om Deu) de l'expr. lat. mihi est visum (FEW t. 14, p. 535a; EWFS2) (Cicéron, Senect., 1. 1 ds Forc. 1965, p. 986, col. 1). STAT. − Fréq. abs. littér. : 4 859. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 7 719, b) 7 803; xxes. : a) 5 484, b) 6 598. BBG. − Bach.-Dez. 1882. − Banque 1963. − Barr. 1967. − Bél. 1957. − Blanche 1857. − Boucher 1835. − Boulan 1934, p. 63. − Cap. 1936. − Cham. 1969. − Comm. t. 1 1837. − Dauzat Ling. fr. 1946, p. 44. − Dupin-Lab. 1846. − Éd. 1913. − Gall. 1955, p. XV. − Goug. Lang. pop. 1929, p. 38, 91. − Gruss 1952. − Kuhn 1931, p. 138, 177. − Lacr. 1963. − Lar. comm. 1930. − Le Clère 1960. − Lemeunier 1969. − Le Roux 1752. − Math. 1967. − Pierreh. Suppl. 1926. − Pissot 1803. − Pol. 1868. − Prév. 1755. − Réau-Rond. 1951. − Rolland-Coul. 1969. − St-Edme t. 2 1825. − Spr. 1967. |