| AVEULIR, verbe trans. I.− Emploi trans. Rendre veule, sans volonté et sans énergie. A.− [Le compl. désigne une pers. ou sa vie intellectuelle] Aveulir qqn; aveulir ses idées : 1. C'est la solitude qui m'aveulit de la sorte.
J. Richepin, Braves gens,1886, p. 364. B.− P. anal. [Le compl. désigne un inanimé, gén. une expr. artistique] Aveulir un refrain ,,en ralentissant les notes finales`` (A. Daudet, Jack, t. 2, 1876, p. 291). Rem. Noté comme néol. par Littré; non admis par les dict. de l'Ac. II.− Emploi pronom. (à valeur passive). Devenir veule. A.− [Le suj. désigne une pers.] :
2. − Pendant ton emprisonnement, qu'est-ce qui t'a demandé le plus de force?
− D'apprendre à m'aveulir ...
Depuis longtemps Hernandez soupçonnait Moreno d'une singulière complaisance à l'égard du tragique. Mais son angoisse, dont le capitaine ne discernait pas la nature, était évidente.
Malraux, L'espoir,1937, p. 622. B.− P. anal. [Le suj. désigne une forme d'expr. artistique, un tracé, une figure, etc.] :
3. Et puis, il faut bien l'avouer, le tableau de cette année témoigne d'étranges défaillances. Le modelé s'est aveuli et l'air s'est raréfié. Les mains de sa paysanne [de M. Lepage] ne sont pas des mains de femme qui tripote la terre, ce sont les mains de ma bonne qui époussète le moins possible et lave la vaisselle, à peine.
Huysmans, L'Art mod.,1883, p. 49. 4. Au lieu de préparer sur la palette la valeur d'un morceau ou un bon mélange où s'aveulissaient les couleurs, ils les trouvent sur la toile par l'action...
F. Fénéon, Les Hommes d'aujourd'hui,no241 (Plowert1888). Rem. 1. La forme en -ant du verbe peut être adjective : une vie aveulissante, des mœurs aveulissantes (Rob.). ,,Vieillir nous charge quelquefois d'une mauvaise vie et aveulissante science`` (Guéhenno, Journal d'une « Révolution », 1937, p. 159). 2. De même la forme du part. passé, un caractère aveuli (Gide, Journal, 1928, p. 877). PRONONC. : [avøli:ʀ], j'aveulis [ʒavøli]. − Aveulissant : [avølisɑ
̃], fém. [-ɑ
̃:t]. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. xives. « réduire (une qualité) à néant » (G. Le Muisis, Poésies, éd. Kervyn de Lettenhove, II, 54 ds T.-L. : toute gentillecche par est trop aveulie), attesté uniquement chez cet auteur; 2. 1876 « rendre veule », supra ex. 3.
Dér. de veule*; dés. -ir. STAT. − Fréq. abs. littér. : 10. BBG. − Darm. 1877, p. 130. − Plowert 1968 [1888]. |