| AUTOCRATE, subst. masc.,AUTOCRATRICE, subst. fém. I.− Substantif A.− Souverain dont le pouvoir est indépendant et absolu. Puissant autocrate; le pouvoir de l'autocrate : 1. La raison d'état n'est, sous le voile de l'intérêt public, qu'un autre nom du « bon plaisir ». L'autocrate ancien n'avait qu'à dire : « Je veux ». Il fallait obéir sans demander ses raisons. Plus tard, quand le malheur des temps mit le potentat dans le cas de donner à ses sujets des apparences d'explications, la raison d'état parut bonne pour cet office. On ne disait plus seulement : « Je veux ». On alléguait l'intérêt de l'état.
Clemenceau, L'Iniquité,1899, p. 37. − En partic. Titre officiel des anciens tsars : 2. « Nous, par la grâce de Dieu, empereur et autocrate de toutes les Russies, ... »
Verne, Michel Strogoff,1876, p. 58. − P. anal., fam. Personne dont l'autorité absolue est incontestée : 3. Brigitte traitait d'ailleurs son frère comme le roi du logis : elle le vantait à Céleste, elle en faisait un autocrate, un Ladislas, un pape infaillible.
Balzac, Les Petits bourgeois,1850, p. 24. B.− Péj. Souverain qui jouit d'une puissance sans partage et impose arbitrairement et tyranniquement sa domination. Synon. despote, tyran : 4. Guerre habilement choisie à tous les points de vue. Elle assurait à Napoléon III l'alliance anglaise. Elle était agréable, en France, aux catholiques, parce qu'elle avait pour prétexte le conflit des Lieux Saints revendiqués par les Russes schismatiques, et aux républicains qui haïssaient le tsar autocrate, le « tyran du Nord », persécuteur de la Pologne.
Bainville, Histoire de France,t. 2, 1924, p. 202. − P. anal. Personne dont la conduite est comparable à celle d'un souverain tyrannique. Affreux, vieil autocrate : 5. − Croyez-vous donc que je sois dupe de moi-même? dis-je. Croyez-vous que je ne me pose pas des questions sur mes mobiles profonds? Je vais vous étonner, je mets dans le même sac les communistes et les nazis. C'est la même race d'autocrates besogneux pleins d'enfantillages emphatiques.
Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 58. II.− Emploi adj. A.− [Titre hist.] Tsar autocrate, tsarine autocratrice. B.− Qui exerce arbitrairement le pouvoir absolu. Divinité autocratrice (Volney, Les Ruines,1791, p. 281). Rem. Ac. 1835-1932, Land. 1834, Gattel 1841, Besch. 1845, Lar. 19e(et Nouv. Lar. ill.). Littré, Guérin 1892 ainsi que Quillet 1965 notent le fém. autocratrice à côté du masc. autocrate. Lar. 19econsacre à autocratrice une vedette indépendante sous laquelle il indique : ,,féminin peu usité du mot autocrate`` (pour cette rem., cf. aussi Nouv. Lar. ill., s.v. autocrate). Cf. encore DG : ,,(le fém.) n'est plus usité bien qu'il soit encore dans Acad. 1878``. Autocratrice est proprement le fém. de autocrator, noté ds Ac. 1798 et encore ds Lar. encyclop. et Quillet 1965 comme titre hist. de souverains. Cf. également autocrator* ex. 1 et 2. PRONONC. : [otɔkʀat] ou [ɔ-]. Passy 1914 transcrit l'initiale par [oˑ] fermé mi-long (pour [o], cf. aussi Harrap's 1963 et les dict. hist.). Pt Rob. et Warn. 1968 donnent les deux possibilités de prononc. À ce sujet, cf. auto-1. ÉTYMOL. ET HIST. − 1768 Autocrate « souverain absolu » (Éphémérides du Citoyen, VIII, p. 143 ds Brunot, t. 4, p. 433 : Vous ne confondrez plus le despote et l'« autocrate »); 1811 « souverain dont l'autorité absolue s'exerce de façon arbitraire » (J. de Maistre, Correspondance, 1796-1821, t. 4, p. 54 : ... ce mot d'autocrate est encore un de ces termes magiques qui ont beaucoup d'effet. En lui-même il signifie : Celui qui commande et n'est jamais commandé, celui dont la volonté fait plier toutes les autres. Mais ce privilège appartient à la souveraineté en général. Cependant, l'usage et l'opinion universelle ont attaché à ce mot d'autocratie je ne sais quelle idée vague d'arbitraire).
Empr. au gr. α
υ
̓
τ
ο
κ
ρ
α
τ
η
́
ς « qui commande souverainement, maître absolu » (Hippocrate, 423, 5 ds Bailly). STAT. − Fréq. abs. littér. : 38. BBG. − Bouillet 1859. − Dub. Pol. 1962, p. 81. − Éd. 1967. − Foulq.-St-Jean 1962. |