| ASTIC, subst. masc. TECHNOL. Outil en os, parfois en acier ou en buis, utilisé par les cordonniers pour polir le cuir des semelles. − P. ext., MILIT., vx. Outil en bois dont se servaient les soldats pour polir le cuir de leur giberne; polissoir de giberne. Rem. Michel 1856 et Larch. 1880 enregistrent le sens de « épée » : ,,Ce n'est autre chose qu'acier [= pointe] dont la seconde syllabe a été remplacée par une terminaison argotique.`` (Michel 1856). Pour A. Delvau, Dict. de la lang. verte, 1866, p. 14, astic, au sens de « épée », est du fém. et vient de ,,l'allemand Stich, chose pointue``; attesté également ds Bruant 1901, p. 201, avec la mention ,,désuet``. − P. méton., MILIT., vx. Mélange de blanc d'Espagne, d'eau de vie et de savon utilisé pour faire briller les pièces métalliques du fourniment. Aller à l'astic. Astiquer son fourniment. Frotter avec de l'astic. Synon. tripoli. PRONONC. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [astik]. 2. Forme graph. − Rob. et Quillet 1965 écrivent astic ou asti; Lar. encyclop. donne uniquement la forme astic. 3. Hist. : astic ds Ac. Compl. 1842, Besch. 1845, Lar. 19e, DG et Pt Lar. 1906; asti ou astic ds Littré et Guérin 1892; Nouv. Lar. ill. mentionne le mot, s.v. astic et asti. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1721 mét. (Trév. : Astic ... Terme de cordonnier. C'est un os creux, dans lequel les Cordonniers mettent du suif ou de la graisse, pour y graisser de tems en tems la pointe de leurs aleines); 2. 1725 arg. (Le Vice puni ds Sain. Sources t. 1, p. 329 : Astic, épée); 3. 1838 arm. (Ac. Compl. 1842 : Astic [...] Polissoir de giberne).
Déverbal d'un verbe *astiquer du dial. hennuyer (parler où l's devant consonne s'est maintenu à l'époque moderne), correspondant au liég. astichî « tendre, pousser en avant » (Haust), et dont l'existence est attestée par le dér. astiquette, mot dont le phonétisme révèle l'origine hennuyère, passé en Flandre et en Artois au sens de « alène que le mineur enfonce de la main dans le bois pour y accrocher la lampe » (v. Wartburg ds R. Ling. rom., t. 24, 1960, p. 285); la forme verbale en usage en Flandre, Artois et Picardie, après la chute du s devant consonne est at(t)iquer « accrocher, pénétrer, enfoncer » (FEW, t. 17, p. 234a). *Astiquer correspond, avec changement de préf., à l'anc. pic. estiquier « ficher, frapper avec force » (1374-1507 ds Gdf.), agn. estikier « ficher, enfoncer » (Jordan Fantosme ds Gdf.), a. fr. estichier « id. » (fin xiiie-xives., Doon de Mayence ds T.-L.), verbes empr. à l'a.b.frq. *stikkan « piquer », v. aussi étiquette. Le sens techn. de astic se déduit facilement de celui de « pousser en avant » du verbe; le terme du dial. septentrional a pénétré en fr. comme terme de mét.; il est prob. passé ds la lang. commune à travers la lang. techn. des cordonniers milit.; avec l'évolution de la forme du polissoir, la notion de « pointe » a actuellement disparu. En cette hyp., le fr. mod. astiquer* serait une nouvelle formation propre au fr., tout à fait distincte de l'*astiquer hennuyer.
L'hyp. qui consiste à faire de astic un déverbal du fr. mod. astiquer* n'est pas recevable du point de vue chronologique.
L'hyp. d'un empr. de astic à l'angl. stick « bâton » (DG, Dauzat68) fait difficulté du point de vue phonét., ne pouvant expliquer le a- initial; de plus, un empr. de ce terme isolé à l'angl. par la lang. des cordonniers s'expliquerait difficilement. BBG. − Chesn. 1857. − Esn. 1966. − France 1907. − France Suppl. 1907. − Larch. 1880. − Michel 1856. |