| ASPHALTE, subst. masc. Composé naturel ou artificiel d'hydrocarbures, servant à divers usages industriels et techniques. A.− CHIM. et TECHNOL. 1. Bitume solide, fusible à plus de 100o, d'un noir luisant et qui surnage dans les eaux de certains lacs et de la mer Morte. Asphalte de la Trinité (Delorme 1962). Rem. Attesté ds Ac. 1835-1932. 2. Sorte de bitume, mou, glutineux, durcissant par le froid, se ramollissant par la chaleur et provenant en Europe et en Asie où on le rencontre, du calcaire, de l'argile, du grès ou de roches volcaniques. Asphalte naturel (Pétrol. 1964) : 1. ... on devait chercher des asphaltes dans les terrains caillouteux, du bitume dans les marais, et réaliser des bénéfices sur les chemins de fer en projet.
Balzac, Les Illusions perdues,1843, p. 474. ♦ Caoutchouc d'asphalte. Synon. de élatérite(cf. Duval 1959). 3. ,,Résidu de fractionnement du pétrole brut`` (Duval 1959). Asphalte de pétrole (cf. Delorme 1962) : 2. Les Antilles produisent des quantités intéressantes d'huiles minérales. Les Barbades et Trinidad renferment de puissants gisements d'asphalte.
J.-J. Chartrou, Pétroles naturel et artificiels,1931, p. 158. 3. ... aux mines de Nœux, à la sortie des presses où les schlamms, venus des rhéolaveurs, s'agglomèrent au brai ou à l'asphalte, les boulets sont cokéfiés à basse température, dans un four à cellules.
E. Schneider, Le Charbon,1945, p. 314. B.− TRAV. PUB. Mélange à base de bitume, employé notamment, à chaud ou à froid, pour revêtir les rues et les trottoirs : 4. ... le siècle où tu es né est un siècle heureux : les chemins de fer sillonnent la campagne; il y a des nuages de bitume et des pluies de charbon de terre, des trottoirs d'asphalte et des pavages en bois, des pénitenciers pour les jeunes détenus et des caisses d'épargne pour les domestiques économes qui viennent y déposer incontinent tout ce qu'ils ont volé à leurs maîtres.
Flaubert, Correspondance,1842, p. 99. − P. ext. Couche d'asphalte : 5. La voie des Boulevards devrait être un asphalte égal, et ne pas être entremêlée de dalles et d'asphalte, car on pense aussi par les pieds à Paris, et ce changement dans le tillac cahote la tête.
Balzac,
Œuvres diverses,t. 3,1850, p. 613. − P. méton. Rue, trottoir revêtu(e) d'asphalte : 6. Comment quitter l'asphalte parisien? Pénible, comme pour un vieil acteur de quitter les planches. Paris est un théâtre où cinq millions de cabotins venus des quatre coins de la province se raccrochent désespérément.
Drieu La Rochelle, Rêveuse bourgeoisie,1939, p. 341. Rem. 1. Asphalte, unanimement noté comme masc., peut cependant prendre le genre fém. : asphalte grise (Zola, La Curée, 1872, p. 446). 2. Selon les circonstances locales et l'imagination de l'écrivain, l'asphalte peut être noir (Malraux, L'Espoir, 1937, p. 722), blanc (A. Daudet, Les Rois en exil, 1879, p. 375; Bernanos, L'Imposture, 1927, p. 424), bleu (Malraux, L'Espoir, 1937, p. 483; Gracq, Un Beau ténébreux, 1945, p. 29), jaune (Queneau, Zazie dans le métro, 1959, p. 220), etc. Il en vient à symboliser la civilisation urbaine : 7. Ils descendent le boulevard Barbès. Ils s'avancent de front sur cet asphalte qui est leur sol natal.
Dabit, L'Hôtel du Nord,1929, p. 18. − Arg. ou fam. ♦ Arpenter l'asphalte; se ballader sur l'asphalte; polir l'asphalte. Flâner sur le trottoir (cf. aussi polisseur d'asphalte au sens de « badaud », ds Nouv. Lar. ill.) : 8. Quand on verra paraître les Petits Bourgeois de Paris, le Programme d'une jeune Veuve, et qu'on saura que je fais répéter Mercadet, tous ces cancans des sots et des cent mille niais, qui polissent l'asphalte de nos boulevards, se tairont...
Balzac, Lettres à l'étrangère,t. 2,1850, p. 285. ♦ Faire l'asphalte. Faire le trottoir (cf. Ch.-L. Carabelli, [Lang. pop.]).,,Princesse de l'asphalte. Petite dame, dans l'argot des gens de lettres`` (A. Delvau, Dict. de la lang. verte, 1866, p. 320). SYNT. Technol. Asphalte armé. ,,Revêtement obtenu par coulage de béton asphaltique sur une armature constituée de carton sur lequel ont été fixées au bitume de petites pierres dures`` (Barb.-Cad. 1963). Asphalte bricks. ,,Briques imprégnées d'asphalte pour revêtements routiers`` (Ibid.). Asphalte comprimé. ,,Matériau de revêtement obtenu par compression, sous pilons chauffés, de poudre d'asphalte chaude`` (Ibid.). Asphalte coulé. ,,Produit d'étanchéité obtenu en mélangeant à chaud, au moment de l'emploi, des produits riches en bitume et du mastic d'asphalte`` (Ibid.). Asphalte coulé sablé. ,,Produit de revêtement obtenu en adjoignant, à la pose, à de l'asphalte coulé, un tiers environ de sable`` (Ibid.). Asphalte liège. ,,Béton asphaltique à agrégats en liège`` (Ibid.). Asphalte porphyrique. ,,Béton asphaltique à agrégats en porphyre`` (Ibid.). Mastic d'asphalte. ,,Produit d'étanchéité noir et solide à la température ordinaire obtenu par addition de produits riches en bitume à l'asphalte naturel`` (Ibid.). Rem. On rencontre dans la docum. le subst. masc. asphaltais (Nouv. Lar. ill.; suff. -ais*). ,,Flâneur amoureux`` (Ch.-L. Carabelli, [Lang. pop.]). DÉR. Asphaltène, subst. masc.,chim. Hydrocarbure entrant dans la composition de l'asphalte et du bitume (cf. J.-J. Chartrou, Pétroles naturel et artificiels, 1931, p. 176). (1865, Littré-Robin; suff. -ène*). PRONONC. : [asfalt]. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca. 1160 « bitume solide, d'un noir luisant, qui se trouve à la surface de certains lacs » (Eneas, éd. Salverda de Grave, 6496 ds T.-L. : Il ot del betumei d'asfalte Al seeler la sepolture); 1488 « id. » (La Mer des Histoires, I, 150d, éd. 1491, cité par Vaganay ds Rom. Forsch., t. 32, p. 14 : ceste mer morte qui aultrement nommée la mer du sel ou le lac de asphalti et de cyment, separe Arabie et Judée); 2. 1866 « préparation destinée au revêtement des chaussées » (Lar. 19e).
Empr. du b. lat. asphaltus (transcription du gr. α
́
σ
φ
α
λ
τ
ο
ς « bitume ») 2emoitié ives., Pelagonius, 92 ds TLL s.v., 828, 78. STAT. − Fréq. abs. littér. : 119. BBG. − Bach.-Dez. 1882. − Barb.-Cad. 1963. − Bible 1912. − Bouillet 1859. − Brard 1838. − Chabat t. 1 1875. − Chesn. 1857. − Colas-Cab. 1968. − Comm. t. 1 1837. − Delorme 1962 (et s.v. asphaltène). − Duval 1959 (et s.v. asphaltène). − France 1907. − Fromh.-King 1968. − Grand. 1962. − Jossier 1881. − Larch. 1880. − Lar. comm. 1930. − Littré-Robin 1865 (et s.v. asphaltène). − Noter-Léc. 1912. − Nysten 1824. − Pétrol. 1964 (et s.v. asphaltène). − Privat-Foc. 1870. − Sc. 1962. − Siz. 1968. − Uv. Chapman 1956. |