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ANICROCHE, subst. fém.
Fam. Obstacle ou difficulté occasionnant un désagrément passager :
1. Vraiment, je suis maudit! À chaque œuvre de moi, il y a une anicroche, un incident porte-malheur, tout à fait indépendant de l'œuvre. E. et J. de Goncourt, Journal,1896, p. 965.
2. Et ce ne sera pas ces chercheurs d'anicroches Qui viendront nous chercher dans le trouble et l'ordure. Péguy, Ève,1913, p. 905.
3. Je me contiens!... Je me contrains!... Je me domine pour éluder toute occasion d'anicroche, d'escarmouche! Céline, Mort à crédit,1936, p. 318.
SYNT. À la moindre anicroche; à la première -; avoir une ou des anicroches.
Rem. Selon Ac. Compl. 1842 et Besch. 1845, le mot désigne aussi une arme en forme de croc (sens mentionné dans les rubriques étymol. de la plupart des dict. gén.).
PRONONC. ET ORTH. : [anikʀ ɔ ʃ]. Enq. : /anikʀoʃ/. − Rem. Littré rappelle que le mot s'écrivait hanicroche au xviies. (cf. aussi DG, Rob. et Quillet 1965).
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1546 hanicroche « sorte d'arme en forme de croc » (Rabelais, Le Tiers livre, prologue, éd. Marty-Laveaux t. 2, p. 7 : Esguisoient [...] halebardes, hanicroches), attest. isolée; sens maintenu en Suisse romande : a. neuchâtelois, 1697 (Arch. Neuchâtel, Not. J. Bourgeois, 7 ds Pat. Suisse rom. t. 1); mentionné ds Ac. Compl. 1842; 2. 1584 fig. anicroche « ce qui accroche, ce qui blesse » (Thevet, Hommes Illustres, 108 ds Quem. : Quelque belle mine qu'ilz facent [les Anglais] ilz gardent tousjours queque anicroche pour refrein de la balade), attest. isolée; cf. Suisse romande, Vaud, fig. « blessure meurtrissure » (Pat. Suisse rom., op. cit.); 1608 hennicroche « une petite difficulté, obstacle » (Jean du Sin, Rhét. d'Aristote, 279 ds R. Hist. litt. Fr., t. 2, p. 114 : Celuy qui sould un argument, insistant a l'encontre, se fonde, non sur ce qu'il n'est pas vray semblable, mais sur ce qu'il n'est pas nécessaire. Et pourtant le deffendeur a beaucoup plus d'avantage que le demandeur a cause de cet abus et hennicroche); 1648 anicroche (Scarron, Virgile, V, 205 b, éd. Richardson : Nise étoit du but assez proche Quand il lui vint une anicroche). Composé de croche « crochet » (xiies., Aliscans ds Gdf.), et de ani- d'orig. obsc. A l'étymon a. fr. ane « cane » (1170-71, Chr. de Troyes, Cligès, éd. W. Foerster ds T.-L.; du lat. anas, atis; L. Sainéan, R. des Et. rabelaisiennes, Paris, 1903, t. 5, p. 392 et Sain. Sources t. 1, p. 85) s'oppose le fait que le bec de la cane est long et proéminent (d'où bec de cane*) mais non recourbé; l'identification avec a. fr. ane, de ane, hane nom champenois du « crochet de fer servant à retirer la viande du pot » (Sainéan, loc. cit.) est très hasardeuse de même que l'attribution du sens de « crochet » au m. fr. hane (1417, Lille, ap. La Fons, Gloss. ms., Bibl. Amiens ds Gdf. : Pour 1. c. de hanes a pallette pour clauwer ploncq a masières sour l'avant pie à le porte du Moliniel). L'identification de a(r)ni- avec l'a. fr. harneis (harnais*), croche étant en ce cas adj. au sens de « recourbé » (Gamillscheg ds Z. rom. Philol., t. 40, p. 131 et EWFS2) se heurte − d'une part au fait que les formes avec -r-, rarement attestées, sont seulement secondaires, prob. dues à une contamination; − d'autre part à l'emploi presque exclusif de harneis comme collectif au sens de « ensemble des ustensiles, matériel », voir Spitzer ds Z. rom. Philol., t. 56, p. 574. Au rapprochement de ani- avec l'a. fr. haim « hameçon » (hameçon*) (Guiraud ds Neophilologus, t. 40, p. 230) par l'intermédiaire d'une forme méridionale an, s'oppose le fait que l'a. prov. ne connaît que la forme am (Pt Levy : am, hameçon), ce qui donnerait un composé *amicroche.
STAT. − Fréq. abs. littér. : 20.
BBG. − Bruant 1901. − Canada 1930. − Laf. 1878. − Leloir 1961. − Le Roux 1752. − Pierreh. 1926.