| ANESTHÉSIQUE, adj. et subst. MÉDECINE I.− Adj. Qui rend insensible, qui produit une anesthésie locale ou générale. Agent, méthode, sommeil anesthésique. − Au fig. : 1. Buccaferrata, enflammé par l'idée d'amener à bien son croquis, ne vit pas l'espèce de prostration anesthésique où le spectacle d'un cadavre avait précipité Jean-Paul.
F. Fabre, Le Roman d'un peintre,1878, p. 114. ♦ P. plaisant. : 2. Tous les jours − cependant − les anesthésiques bibliothèques me font quelques heures de paix, où la lecture de formules, de malaises précipités en vertigineuses dispositions, tourne sous mes yeux longtemps.
P. Valéry, Correspondance[avec A. Gide], 1893, p. 188. Rem. Sur le synon. anesthésique, qui n'a pas vécu, cf. étymol. II.− Substantif A.− Subst. masc. Substance qui calme la douleur, qui endort la sensibilité locale ou générale. Absorber un anesthésique, opérer sans anesthésique : 3. Quelle singulière époque, se disait Des Esseintes, que celle qui, tout en invoquant les intérêts de l'humanité, cherche à perfectionner les anesthésiques pour supprimer la souffrance physique et prépare, en même temps, de tels stimulants pour aggraver la douleur morale!
J.-K. Huysmans, À rebours,1884, p. 225. 4. Comme un malade grâce à un anesthésique assiste avec une pleine lucidité à l'opération qu'on pratique sur lui, mais sans rien sentir, je pouvais me réciter des vers que j'aimais ou observer les efforts que mon grand père faisait pour parler à Swann du duc d'Audiffret-Pasquier, ...
M. Proust, À la recherche du temps perdu,Du côté de chez Swann, 1913, p. 24. − Au fig. : 5. C'était [le cinéma] aussi un anesthésique, un opium, un oubli, ...
P. Vialar, Tournez, jolies gosses,1956, p. 91. B.− Subst. masc. ou fém. Personne soumise à une anesthésie. Anesthésique total. − Au fig. Celui (ou celle) qui n'éprouve plus de sentiments, qui vit dans l'indifférence : 6. J'ai connu un pauvre anesthésique total, qui n'éprouvait plus la joie ni la peine.
L. Daudet, L'Hérédo,1916, p. 11. Prononc. : [anεstezik]. Étymol. ET HIST.
I.− Adj. 1847 (Physiologie. Communication verbale concernant les effets de l'inhalation du chloroforme sur des individus soumis à des opérations chirurgicales, par M. Roux ds Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Ac. des sc., Paris, Gauthier-Villars, t. 25, p. 887 : Je viens un peu tard, dit M. Roux, pour entretenir l'Académie du nouvel agent qui paraît remplacer l'éther comme moyen anesthésique).
II.− Subst. 1850 (Chirurgie. De l'éthérisation, par M. A. Velpeau, ibid., t. 30, p. 268 : L'activité de l'esprit humain s'est tellement attachée à la question des anesthésiques, au surplus, qu'elle n'a jamais cessé complétement de s'en occuper).
Dér. de anesthésie*; suff. -ique*, cf. fr. anesthétique adj. de même sens 1847 empr. à l'angl. anœsthetic, attesté dep. 1846 (Holmes, Letter to W. T.G. Morton, 21 nov. ds DAE s.v. anœsthesia : The state produced ... should, I think, be called « anœsthesia ». This signifies insensibility ... The adjective will be « anœsthetic »). STAT. − Fréq. abs. litt. : 14. BBG. − Duval 1959. − Fromh.-King 1968. − Galiana Déc. sc. 1968. − Garnier-Del. 1961 [1958]. − Lal. 1968. − Littré-Robin 1865. − Marcel 1938. − Méd. Biol. t. 1 1970. − Uv.-Chapman 1956. − Vieill. 1970. |